Overblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Articles avec #comedie dramatique tag

Et si on s'aimait? (Da Kommt noch was)

Publié le par Rosalie210

Mareille Klein (2021)

Et si on s'aimait? (Da Kommt noch was)

Je ne sais pas si c'est intentionnel, mais le point de départ de "Si on s'aimait" m'a fait penser à la première partie de la pièce "Oh les beaux jours" de Samuel Beckett. Soit une femme vieillissante qui tombe dans un trou et se retrouve coincée sous son plancher, seul le haut de son corps émergent du sol. Soit une métaphore assez limpide de la situation de cette sexagénaire séparée de son mari dont la seule perspective se résume à attendre la mort. Helga n'est pas à proprement parler isolée mais au cours du film, sa solitude est mise en évidence par les coups de fils de sa fille qui n'a pas le temps d'aller la voir, par ses amies superficielles et surtout par la scène du concert où elle se rend avec son homme de ménage faute d'avoir trouvé quelqu'un d'autre pour l'accompagner avant de fondre en larmes à la vue de son ex-mari venu avec sa nouvelle compagne. Cet homme de ménage qui surgit à l'improviste pour un remplacement a tout de la pièce ronde à introduire dans un univers carré: il est étranger et ne parle pas l'allemand (et Helga ne parle pas anglais ce qui rend leur communication difficile), il est moins âgé qu'elle et surtout, il brouille les repères du patriarcat puisque Helga le domine socialement. Toutes proportions gardées car Ryszard n'est pas jeune, n'est pas un apollon et n'a rien d'exotique, leur relation fait penser à celles que certaines riches occidentales esseulées s'offrent avec de jeunes hommes issus de pays pauvres. La question de l'argent et celle du regard social constituent des entraves au moins aussi importantes que la barrière de la langue. Comme dans le modèle du genre, "Tout ce que le ciel permet" (1955) mais sur le mode de la comédie. Comment faire exister cette histoire dans un monde qui n'est pas adapté pour elle, sinon en faisant les réajustements qui s'imposent, à commencer par déménager. Mais Helga fait moins qu'elle ne laisse faire, les faux-semblants tombants tout seuls comme des fruits mûrs. Un grand ménage de printemps parfaitement salutaire!

Voir les commentaires

Linda veut du poulet !

Publié le par Rosalie210

Chiara Malta et Sébastien Laudenbach (2023)

Linda veut du poulet !

Film d'animation haut en couleurs aux accents proustiens, "Linda veut du poulet" est une course-poursuite menée tambour battant pour mettre la main sur le précieux volatile, ingrédient principal de la recette du poulet aux poivrons. Celle-ci est le plus cher souhait de Linda parce que c'est le seul souvenir qu'il lui reste de son père disparu quand elle était bébé. Et sa mère qui l'a punie injustement est prête à se couper en quatre pour se faire pardonner. Le problème est que Paulette ne cuisine pas et qu'elle ne peut pas faire de courses ce jour-là, les magasins étant fermés pour cause de grève générale. Il va donc lui falloir trouver sa matière première à la source et de façon plutôt cavalière mais ne maîtrisant pas les gestes de la fermière, le poulet va faire des siennes. D'autres personnages entrent bientôt dans la danse: les amies de Linda qui tentent de l'aider à faire le plat ce qui est surtout matière à divers gags (les poivrons qui brûlent, le chien qui mange le poulet...), des policiers zélés, un camionneur allergique aux plumes de poulet, Astrid, la soeur de Paulette etc. Tout cela est mis en scène avec une belle énergie et une symbolique qui fait mouche. A chaque personnage est attribué une couleur qui de loin, le fait ressembler à une tache colorée ce qui finit par former une sorte de guirlande multicolore lorsque tous les participants passent à table. La nuit, seuls les contours des personnages restent en couleur et Linda se demande si tout est noir quand on est mort. Contre l'oubli, restent les sensations. La symbolique du père perdu et retrouvé ne s'arrête pas à ce repas pris ensemble, il concerne aussi la punition injustement donnée à l'origine de l'affaire. Une punition relative à une bague, elle aussi liée au père que Paulette croit perdue et qu'elle finit par retrouver. Proust avait sa madeleine, Linda a désormais son poulet.

Voir les commentaires

L'ordre des choses (Alles in bester Ordnung)

Publié le par Rosalie210

Natja Brunckhorst (2020)

L'ordre des choses (Alles in bester Ordnung)

Une revenante. Comme Ana TORRENT, Natja BRUNCKHORST est devenue mondialement célèbre très jeune grâce à "Moi, Christiane F., 13 ans, droguee, prostituee..." (1981) avant de disparaître (ou presque) de la circulation pendant des décennies. Et voilà que Arte nous donne de ses nouvelle en diffusant le film qu'elle a réalisé en 2020, "L'Ordre des choses". Très bonne initiative de leur part!

"L'Ordre des choses" repose sur la rencontre de deux personnes dont les appartements reflètent les conceptions opposées de la vie. Un thème archi-classique mais le traitement l'est moins. En effet très rapidement, Fynn, jeune ingénieur informatique qui ne possède que le strict nécessaire dans son appartement se retrouve temporairement sans domicile et contraint de squatter chez sa voisine avec sa valise. Et l'essentiel de l'intrigue prend place dans cet appartement archi-encombré. Marlen est en effet atteinte de syllogomanie et accumule chez elle des objets inutiles au point qu'il devient compliqué de s'y déplacer et d'y vivre. Si contrairement au cas exposé par Thierry Jonquet dans "La Bête et la Belle" qui s'accompagne du syndrome de Diogène, l'appartement est propre et ressemble plus à une vieille librairie ou à une boutique d'antiquités qu'à un dépotoir, les troubles associés à ce syndrome sont bien présents. Marlen vit seule, fuit les relations sociales et s'est isolée du monde, refusant toute intrusion dans son appartement qu'elle sait non conforme aux normes de sécurité. Et elle s'avère incapable de se débarrasser de son bric-à-brac. Celui-ci forme une sorte de carapace à l'intérieur de laquelle elle peut se réfugier. Elle vit la présence de Fynn plutôt mal donc mais celui-ci cherche à l'apprivoiser et imagine diverses stratégies pour l'aider à reprendre le contrôle de son environnement qui menace de lui échapper.

Le film est centré sur Marlen, le personnage masculin étant en quelque sorte son chevalier servant, ce qui est plutôt original, les portraits de femme étant moins nombreux et moins fouillés que ceux des hommes la plupart du temps. Fynn tel un chevalier servant met ses talents d'ingénieur au service d'une organisation plus rationnelle de son intérieur. Le résultat est particulièrement beau et poétique et sans remettre en cause son mode de vie est une métaphore réussie d'une vie plus harmonieuse.

Voir les commentaires

Tombe les filles et tais-toi (Play it again, Sam)

Publié le par Rosalie210

Herbert Ross (1972)

Tombe les filles et tais-toi (Play it again, Sam)

Pris isolément, j'ai trouvé que "Tombe les filles et tais-toi" avait plutôt mal vieilli. L'aspect théâtral sans doute puisque le film (réalisé par Herbert ROSS) est l'adaptation de la pièce de Woody ALLEN, "Play it again, Sam" (1972). Mais aussi le jeu burlesque de Woody ALLEN, tellement outrancier qu'il n'en est même plus drôle. Ou alors ce sont les filles qu'on lui présente qui sont inexistantes, en tout cas il manque quelque chose pour que la sauce prenne. Sauf évidemment quand il est mis en présence de Diane KEATON. Leur duo est une évidence et tous les passages où ils jouent ensemble préfigurent "Annie Hall" (1977) d'autant que Diane KEATON y arbore le même look. Car si on remet le film dans le contexte de la filmographie de Woody ALLEN, on réalise combien celui-ci est un brouillon de ses futurs chefs-d'oeuvre. Sa cinéphilie irrigue tout le film au même niveau que ses névroses. Le titre est un hommage à "Casablanca" (1942), l'archétype du cinéma de l'âge d'or hollywoodien. L'introduction où Allan Felix (le personnage de fiction joué par Woody ALLEN) regarde fasciné la scène finale du film de Michael CURTIZ au cinéma, avant que Humphrey BOGART ne s'incarne à ses côtés pour lui donner des conseils de drague rappelle forcément "La Rose pourpre du Caire" (1985), seuls les genres y sont différents. Et le final où la réalité rejoint la fiction, Woody ALLEN et Diane KEATON endossant les rôles de Humphrey BOGART et Ingrid BERGMAN à l'aéroport revient dans "Meurtre mysterieux a Manhattan" (1992), à ceci près que les deux acteurs sont dans le final d'un autre film de l'âge d'or des studios hollywoodien à l'ambiance exotique, "La Dame de Shanghai" (1947) de Orson WELLES.

Voir les commentaires

Diabolo menthe

Publié le par Rosalie210

Diane Kurys (1977)

Diabolo menthe

Du film-culte de Diane KURYS vu à l'adolescence, il ne me restait à peu près rien. Aussi, le revoir a été pour moi comme le découvrir pour la première fois. Une fois de plus, le contexte est essentiel pour comprendre ce film dont l'histoire est ancrée au début des années 60, époque de l'adolescence de la réalisatrice mais qui a été réalisé à la fin des années 70. Les deux époques se répondent subtilement puisqu'à travers le portrait très autobiographique d'Anne (Eleonore KLARWEIN), de sa soeur et de leurs copines de lycée, Diane KURYS dépeint une génération tiraillée entre la société française traditionnelle gaullienne extrêmement corsetée et un ardent désir d'émancipation et de liberté. Le point de vue féminin donne évidemment à cette question qui concernait l'ensemble de la jeunesse des années 60 une saveur particulière. Il y avait encore peu de réalisatrices à l'époque où Diane KURYS a réalisé son premier long-métrage et celui-ci est devenu le premier teen-movie français. Bien plus que "Les Quatre cents coups" (1959) qui ne possède pas de dimension générationnelle, sans doute parce qu'en 1959, l'adolescent comme "classe d'âge" avec ses goûts et ses désirs propres n'avait pas encore été inventé. C'est la société de consommation et l'allongement de la durée des études qui ont façonné en France cette nouvelle catégorie sociale, née avec le journal "Salut les copains" au début des années 60. Les marqueurs de la culture adolescente sont partout dans le film de Diane KURYS, yé-yé et rock affichés sur les murs ou émanant des tourne-disques et radios portatives. Et puis les photos de vacances à la mer et au ski qui rappellent que ces années-là voient l'avènement du tourisme de masse. Mais "Diabolo Menthe", c'est aussi le poids du patriarcat et des moeurs puritaines. Un lycée qui ressemble à une caserne, la non-mixité, les blouses uniformes, un personnel enseignant de cheftaines psychorigides pour la plupart pouvant aller jusqu'au sadisme (la prof de dessin), une mère certes aimante mais fliquant ses filles sur leurs horaires de sortie ou leur tenue vestimentaire, le divorce alors exceptionnel et stigmatisant, les comportements masculins déplacés etc. Dans cet univers carcéral fait d'interdictions tant sur le plan sexuel que politique, les quelques coups d'éclat marquent les esprits, que ce soit le chahut dans les cours d'une prof de maths sans autorité jouée par Dominique LAVANANT, les badges vendus par Frédérique (Odile MICHEL), le discours de Pascale (Corinne DACLA) sur les événements du métro Charonne encouragée par la prof d'histoire que l'on devine communiste ou encore la fugue de Muriel (Marie Veronique MAURIN) criant "merde, merde, merde" dans la cour du lycée avec le même caractère exutoire que les "fuck you" hurlés par une iranienne à la face du monde dans "Critical Zone" (2023)

Voir les commentaires

Comme un lundi (Mondays)

Publié le par Rosalie210

Ryo Takebayashi (2024)

Comme un lundi (Mondays)

Comédie enlevée et sympathique, quelque part entre la série "The Office" et le cultissime "Un jour sans fin" (1993), "Comme un lundi" raconte la semaine infernale d'une employée de bureau japonaise carriériste qui pour se faire embaucher par une agence publicitaire prestigieuse sacrifie sa vie privée, son sommeil et sa santé. Jusqu'au jour où deux de ses collègues lui font remarquer qu'elle revit toujours la même semaine, du lundi au dimanche. Elle ne s'en est même pas aperçue parce que la vie pour elle se résume à un tunnel de travail dans un bureau qu'elle ne quitte quasiment jamais, même pas pour dormir, pas plus que ses collègues d'ailleurs. Et ses rêves, tous identiques se résument encore et toujours au travail. Une conception du travail très japonaise où il paraît normal de sacrifier ses soirées et ses dimanches et où la mort par excès de travail est une réalité.

Le réveil de la jeune femme, puis des membres de toute l'équipe, un par un ne viendra pas d'une marmotte (ils ne dorment pas assez pour ça ^^) mais d'un pigeon qui chaque lundi vient se fracasser contre leur fenêtre. Une fois qu'ils ont tous pris conscience de la boucle temporelle dans laquelle ils sont enfermés, la question devient "comment en sortir?". Et la jeune femme d'être tiraillée par un dilemme cornélien: utiliser ce temps à rallonge pour produire un travail parfait qui lui permettra de réaliser son objectif professionnel ou se joindre à ses collègues pour enquêter sur les causes de leur infortune et briser la malédiction. La culture du collectif face à l'individualisme en somme. La solution se trouve peut-être entre les planches d'un manga à l'ancienne, c'est à dire dans la nostalgie de l'enfance qui apporte une belle touche de mélancolie à l'ensemble.

Voir les commentaires

Marius et Jeannette

Publié le par Rosalie210

Robert Guédiguian (1997)

Marius et Jeannette

"Marius et Jeannette" est le film le plus célèbre de Robert GUEDIGUIAN, celui qui lui a apporté la notoriété et qui bénéficie d'un fort capital sympathie. Il faut dire qu'il s'agit de son propre aveu d'un conte et d'un conte particulièrement bien ficelé. Le titre déjà fait forcément écho aux deux premiers volets de la trilogie marseillaise de Marcel PAGNOL, "Marius" (1931) et "Fanny" (1932). Pas seulement le titre d'ailleurs, le décor et l'accent évidemment mais aussi la pittoresque micro-société formée par Jeannette (Ariane ASCARIDE) et ses voisins qui se retrouvent dans la cour de leur résidence pour rire, discuter, regarder la télé, préparer les repas, cour partagée qui est un lieu de sociabilité en forme de petit théâtre tout à fait comparable au café de César chez Marcel PAGNOL. Cet espace de convivialité plein de vie tranche avec celui de la cimenterie désaffectée, symbole de la désindustrialisation mais aussi de la disparition du monde ouvrier et de sa culture. Dans ce désert minéral, la seule présence vivante est celle du vigile, Marius (Gerard MEYLAN), un homme solitaire, taciturne et boiteux. Jeannette qui a du mal à joindre les deux bouts, seule pour élever ses enfants avec son boulot de caissière tente de chiper des pots de peinture aux abords de la cimenterie et se fait attraper par Marius. N'ayant pas sa langue dans sa poche, elle lui dit ce qu'elle pense de son boulot de sous-fifre, de même qu'au petit chef qui la flique dans son dos à la caisse, ce qui lui vaut d'être renvoyée. Mais puisque c'est un conte de fées, son franc-parler fait des miracles: le petit chef change de métier et Marius vient toquer à la porte de la communauté et bientôt dans le coeur de Jeannette. Robert GUEDIGUIAN créé ainsi une romance pleine de charme (l'alchimie des deux acteurs est parfaite et pour cause, ils tournent ensemble depuis le premier film de Robert GUEDIGUIAN et font partie de ses proches), cimentée par la solidarité du chaleureux groupe qui les entoure (eux aussi membres de la troupe). Un ciment humain qui s'oppose en tous points à la sinistrose économique où la rareté du travail atomise les groupes, transformant chacun en concurrent potentiel (voir l'interminable file de chômeuses attendant un entretien d'embauche faisant écho au récit de Marius expliquant par quelle ruse il a réussi à obtenir son emploi).

Voir les commentaires

Chocolat

Publié le par Rosalie210

Roschdy Zem (2016)

Chocolat

Le clown Chocolat est la première star noire-africaine ayant percé en France au tournant de la Belle Epoque. Les traces iconographiques de sa notoriété dans les dessins de Henri Toulouse-Lautrec ou dans la campagne du chocolat Felix Potin ("battu et content") illustrent pour la plupart les stéréotypes racistes en vigueur à l'époque, Chocolat n'ayant été accepté que par son rôle de faire-valoir du clown blanc George Foottit avec lequel il a formé un duo a grand succès avant de chercher à se détacher en vain de cette image humiliante et de tomber dans l'oubli. Jusqu'aux travaux de l'historien Gérard Noiriel qui se sont conclus en 2012 avec la publication d'un livre lui étant consacré. C'est ce livre qui a servi de base au film réalisé par Roschdy ZEM, même si celui-ci a pris pas mal de libertés avec l'histoire, notamment la relation entre Chocolat (Omar SY) avec George Foottit qui était davantage basée sur la rivalité que sur l'amitié. Il n'en reste pas moins que les caractères bien dessinés des deux personnages et l'alchimie entre les acteurs font que leur duo est très intéressant à regarder de par leur dynamique complexe. Si Chocolat doit supporter de terribles blessures d'amour-propre, c'est lui qui attire la lumière (il est seul sur les affiches!), les femmes et qui flambe l'argent. Foottit est quant à lui hors de la scène renvoyé dans l'ombre où il rumine ses frustrations. J'ai découvert James THIERREE dont la ressemblance avec son grand-père Charles CHAPLIN est extrêmement frappante et qui a une présence indiscutable. Si le message est parfois trop appuyé (la séquence de la prison par exemple où Chocolat est maltraité n'a pas existé!), certaines séquences sont délicieuses comme celle, véridique du tournage d'un film des frères Lumière (joué par les frères Bruno PODALYDES et Denis PODALYDES) mettant en scène les deux clowns.

Voir les commentaires

Toni Erdmann

Publié le par Rosalie210

Maren Ade (2016)

Toni Erdmann

Etonnant, ce Toni Erdmann qui évolue entre mélancolie quasi-dépressive et soudaines embardées burlesques totalement jouissives. Un burlesque qui m'a rappelé par certains côtés celui des frères Marx en raison de leur capacité à subvertir les rôles sociaux en démasquant par là-même leur vacuité. Dans le rôle du bouffon, un sacré personnage, Winfried (Peter SIMONISCHEK) qui dès la première séquence mystifie le facteur et le spectateur avec un récit farfelu et un dédoublement de personnalité. Par la suite, découvrant le mal-être de sa fille qui s'est enfermée dans un rôle d'exécutive woman chargée de préparer des plans de restructuration en Roumanie, il décide de surgir à l'improviste dans des déguisements désopilants pour l'entraîner dans des dialogues et des situations absurdes. Dans le rôle de Ines, Sandra HULLER excelle à traduire toute l'ambivalence de son personnage de freak control désincarné qui tente de mettre son père à distance tant elle en a honte mais s'effondre quand il fait semblant de partir. Ce double mouvement contradictoire donne tout son sel aux scènes où il la place dans des situations embarrassantes mais qui finissent par produire de petites (le rire) puis de grandes étincelles de complicité (le chant). A l'univers métallique, inhumain et hors-sol de l'entreprise auquel appartient Ines répondent les aventures incarnées que lui fait vivre Winfried qui noue le contact avec les roumains et entre dans leurs maisons. Jusqu'à la scène de l'anniversaire où Ines improvise son propre scénario et se libère littéralement d'une robe -d'une peau- dans laquelle elle était trop engoncée sous l'oeil bienveillant d'un énorme yéti. En dépit d'une durée trop longue qui se ressent par des baisses de rythme, le film par sa prise de recul salutaire interroge et bouscule nos perceptions et nos valeurs.

Voir les commentaires

Mes petites amoureuses

Publié le par Rosalie210

Jean Eustache (1974)

Mes petites amoureuses

"Mes petites amoureuses" (d'après le poème de Arthur Rimbaud qui a incarné à lui seul l'adolescence rebelle bien avant Jean-Pierre LEAUD) aurait dû être un tremplin pour son réalisateur, Jean EUSTACHE comme l'avait été "Les Quatre cents coups" (1959) pour Francois TRUFFAUT. Mais cela ne fut pas le cas. Sans doute parce que le ton du film était trop âpre, trop amer bien que détaché. On y voit un jeune garçon de treize-quatorze ans qui sans doute renvoie au réalisateur étant donné que le film a une forte résonance autobiographique faire l'apprentissage de la vie sous l'angle des désillusions. Ce qui m'a frappé, c'est le contraste entre la vitalité et les aspirations de Daniel et les déceptions que la vie lui réserve. Le film s'ouvre pourtant sur de belles promesses. Daniel a été déclaré apte pour le collège, il ressent ses premiers émois, il a des amis et une grand-mère bienveillante jouée par la merveilleuse Jacqueline DUFRANNE que j'ai tant aimé chez Maurice PIALAT (lequel vient d'ailleurs jouer une petite scène dans le film). Hélas pour lui, sa mère le ramène chez elle à Narbonne où elle vit avec un ouvrier espagnol mutique sans avoir rien à lui offrir sinon de la promiscuité, de l'indifférence et de l'aigreur. Elle lui coupe les ailes en le mettant en apprentissage chez un mécanicien qui ne pense qu'à l'exploiter ce qui transforme Daniel en tire-au-flanc. En amour ce n'est pas mieux, ses initiatives maladroites se heurtent à une société encore très pudibonde et il en est réduit la plupart du temps à jouer les voyeurs. Le seul refuge de Daniel est le cinéma, le rêve à défaut d'une vie réelle mais décevante. Ce qui n'empêche pas d'apprécier la beauté de la photographie, les paysages solaires et bucoliques et 1001 détails de la vie d'autrefois saisis avec réalisme.

Voir les commentaires

1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 20 30 40 50 60 > >>