Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Diabolo menthe

Publié le par Rosalie210

Diane Kurys (1977)

Diabolo menthe

Du film-culte de Diane KURYS vu à l'adolescence, il ne me restait à peu près rien. Aussi, le revoir a été pour moi comme le découvrir pour la première fois. Une fois de plus, le contexte est essentiel pour comprendre ce film dont l'histoire est ancrée au début des années 60, époque de l'adolescence de la réalisatrice mais qui a été réalisé à la fin des années 70. Les deux époques se répondent subtilement puisqu'à travers le portrait très autobiographique d'Anne (Eleonore KLARWEIN), de sa soeur et de leurs copines de lycée, Diane KURYS dépeint une génération tiraillée entre la société française traditionnelle gaullienne extrêmement corsetée et un ardent désir d'émancipation et de liberté. Le point de vue féminin donne évidemment à cette question qui concernait l'ensemble de la jeunesse des années 60 une saveur particulière. Il y avait encore peu de réalisatrices à l'époque où Diane KURYS a réalisé son premier long-métrage et celui-ci est devenu le premier teen-movie français. Bien plus que "Les Quatre cents coups" (1959) qui ne possède pas de dimension générationnelle, sans doute parce qu'en 1959, l'adolescent comme "classe d'âge" avec ses goûts et ses désirs propres n'avait pas encore été inventé. C'est la société de consommation et l'allongement de la durée des études qui ont façonné en France cette nouvelle catégorie sociale, née avec le journal "Salut les copains" au début des années 60. Les marqueurs de la culture adolescente sont partout dans le film de Diane KURYS, yé-yé et rock affichés sur les murs ou émanant des tourne-disques et radios portatives. Et puis les photos de vacances à la mer et au ski qui rappellent que ces années-là voient l'avènement du tourisme de masse. Mais "Diabolo Menthe", c'est aussi le poids du patriarcat et des moeurs puritaines. Un lycée qui ressemble à une caserne, la non-mixité, les blouses uniformes, un personnel enseignant de cheftaines psychorigides pour la plupart pouvant aller jusqu'au sadisme (la prof de dessin), une mère certes aimante mais fliquant ses filles sur leurs horaires de sortie ou leur tenue vestimentaire, le divorce alors exceptionnel et stigmatisant, les comportements masculins déplacés etc. Dans cet univers carcéral fait d'interdictions tant sur le plan sexuel que politique, les quelques coups d'éclat marquent les esprits, que ce soit le chahut dans les cours d'une prof de maths sans autorité jouée par Dominique LAVANANT, les badges vendus par Frédérique (Odile MICHEL), le discours de Pascale (Corinne DACLA) sur les événements du métro Charonne encouragée par la prof d'histoire que l'on devine communiste ou encore la fugue de Muriel (Marie Veronique MAURIN) criant "merde, merde, merde" dans la cour du lycée avec le même caractère exutoire que les "fuck you" hurlés par une iranienne à la face du monde dans "Critical Zone" (2023)

Commenter cet article