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Articles avec #comedie dramatique tag

Les 12 salopards (The Dirty Dozen)

Publié le par Rosalie210

Robert Aldrich (1967)

Les 12 salopards (The Dirty Dozen)

Ils sont 12 comme les apôtres du Christ, 12 candidats au suicide, prêts à mourir en martyrs de la grande Alliance contre le nazisme. Ils vont jusqu'à communier la veille de leur sacrifice en une scène de repas qui rappelle la Cène. Ces références spirituelles contrastent cependant violemment avec les objectifs guerriers, les méthodes employées et la nature des recrues, un ramassis de crapules condamnées à mort ou à de lourdes peines et qui sous la houlette d'un officier lui-même fâché avec les règlements (Lee MARVIN) va se transformer en commando opérationnel. Cet échantillon d'humanité majoritairement composé d'idiots et de psychopathes que le major Reisman doit mater et souder à la fois tourne en dérision l'armée et ses chefs, aussi malmenés que chez Stanley KUBRICK. Et en même temps se fait jour aussi un certain réalisme. La démythification de l'héroïsme patriotique permet d'évoquer l'anomie des périodes de guerre où des prisonniers de droit commun ont pu servir de supplétifs aux armées régulières. Le cas le plus connu étant celui des Kapos chargés par les nazis d'encadrer la main d'oeuvre des camps de concentration. Mais surtout, le film est une charge virulente contre l'Amérique WASP. L'un des salopards est un afro-américain qui a tué pour ne pas être lynché mais le motif de légitime défense lui a été refusé ce qui sous-entend une partialité de la justice américaine. Surtout, les acteurs choisis pour les rôles des salopards étaient eux-mêmes pour la plupart d'origine étrangère et cantonnés à des rôles d'arrière-plan, voire même pour certains, débutants (Jim Brown était footballeur, Trini López chanteur). Tous n'ont pas tirés profit d'être ainsi projetés dans la lumière, mais pour certains, le film a été un tremplin. C'est particulièrement vrai pour Charles BRONSON qui a enchaîné ensuite avec le rôle qui l'a immortalisé, celui d'Harmonica dans "Il etait une fois dans l'Ouest" (1968). Il est assez jouissif d'ailleurs dans le film de voir le major Reisman contraint de s'appuyer sur lui lors de leur opération d'infiltration du château nazi, le personnage de Charles BRONSON étant le seul à parler allemand (je soupçonne Quentin TARANTINO d'avoir repris cette idée comme d'autres dans "Inglourious Basterds") (2009). Autre exemple, John CASSAVETES dont la carrière d'acteur servait à financer ses projets de films indépendants, en l'occurence à cette époque "Faces" (1968). Enfin, on peut citer dans le rôle du pire de tous les salopards Telly SAVALAS qui n'était pas encore devenu l'inspecteur Kojak et dans celui de l'idiot du village, le canadien Donald SUTHERLAND qui allait voir ensuite sa carrière décoller dans les années 70.

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L'Adorable voisine (Bell, Book and Candle)

Publié le par Rosalie210

Richard Quine (1958)

L'Adorable voisine (Bell, Book and Candle)

Le couple de cinéma formé par James STEWART et Kim NOVAK est entré au panthéon du cinéma en 1958 avec le "Vertigo" (1958) de Alfred HITCHCOCK. La même année, ils tournaient "L'Adorable voisine" de Richard QUINE dans un registre beaucoup plus léger, celui d'une comédie fantastique. Le film aurait paraît-il inspiré la série "Ma sorciere bien-aimee" (1964). On y retrouve le James STEWART tendre et naïf des comédies de Frank CAPRA et Ernst LUBITSCH mais avec vingt ans de plus. Comme le film est adapté d'une pièce de théâtre et se déroule en grande partie dans une boutique, il m'a fait notamment penser à "The Shop Around the Corner" (1939). Face à lui, une Kim NOVAK magnifiquement photographiée et aussi envoûtante que dans le film de Alfred HITCHCOCK. A ceci près que c'est elle qui mène la danse en jetant son dévolu sur son voisin. Non par amour mais par désir d'avoir une aventure. Le terme de "féline" la concernant s'impose plus que jamais, elle qui jette des sorts en s'appuyant sur son compagnon à quatre pattes. Le comique provient de l'effet de ses manipulations sur le personnage joué par James STEWART qui ne sait plus ou il en est. Quelques adjuvants efficaces dont un tout jeune et déjà désopilant Jack LEMMON viennent renforcer l'effet produit. Mais chassez le naturel, il revient au galop, elle va bien évidemment tomber amoureuse et devoir choisir entre lui et ses pouvoirs ce qui est un pur reflet du puritanisme américain. Le film a donc une conclusion parfaitement convenue qui anéantit la (très relative) force subversive qu'il pouvait avoir en renversant temporairement les rôles. "L'Adorable voisine" est donc au final une comédie sympathique mais inoffensive.

A noter la présence étonnante de Philippe CLAY, chantant dans la boîte de jazz fréquentée par la confrérie sorcière ainsi que Elsa LANCHESTER, la fiancée de Frankenstein, dans le rôle de la tante Queenie.

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Un homme et une femme

Publié le par Rosalie210

Claude Lelouch (1966)

Un homme et une femme

Bien que connaissant par coeur la séquence dans laquelle les personnages joués par Jean-Louis TRINTIGNANT et Anouk AIMEE se retrouvent à Deauville et tombent dans les bras l'un de l'autre sous le regard d'une caméra tournoyante sur le célébrissime air de Francis LAI "Chabadabada", je n'avais jamais vu le reste du film. Les rétrospectives des films de Claude LELOUCH sur Arte et MyCanal et le décès de Anouk AIMEE m'ont conduit à le découvrir. J'ai eu l'impression de feuilleter un roman-photo alternant sans raison apparente séquences en noir et blanc, séquences sépia, séquences nocturnes, séquences en couleur. Roman-photo car en dépit de son mouvement perpétuel le film ressemble à une collection d'images sur fond musical. Images pléthoriques, souvent répétitives, dont le défilement donne le tournis mais qui semblent à peine reliées à un scénario et des dialogues qui eux sont anémiques. Reste que Anouk AIMEE est ultra photogénique dans ce film où elle joue une veuve qui ne parvient pas à faire le deuil de son mari. Son rôle a un peu plus de substance que celui de Jean-Louis TRINTIGNANT qui en est réduit à foncer sur les routes avec son bolide! Je me doute que c'est la maîtrise technique et l'originalité de la forme qui ont dû séduire. L'époque semblait aimer les esthétiques tape à l'oeil et les pilotes de formule 1. Non, non, je ne pensais pas du tout en écrivant cela à "L'Affaire Thomas Crown" (1968) ^^.

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L'argent fait le bonheur

Publié le par Rosalie210

Robert Guédiguian (1993)

L'argent fait le bonheur

"L'argent fait le bonheur" est à l'origine une commande s'inscrivant dans le contexte du renouveau de la télévision publique au début des années 90. On pense par exemple à la collection "Tous les garçons et les filles de leur âge" sur le thème de l'adolescence commandé par la chaîne Arte (et auquel appartient par exemple "Les Roseaux sauvages" (1994) de Andre TECHINE). "L'argent fait le bonheur" avait été réalisé à l'origine pour France télévisions mais c'est également Arte qui l'a diffusé tout en bénéficiant d'une sortie en salles. Il s'agit par ailleurs du premier des trois contes de l'Estaque, les deux autres étants "A l'attaque !" (2000) et "Marius et Jeannette" (1997). Le terme de conte souligne que le film, l'une des premières fictions sur la banlieue, n'est pas réaliste. Le ton est celui de la comédie mâtinée de fable sociale puisque le film contient une morale, portée par Simona (Ariane ASCARIDE), les autres femmes du quartier et leur curé (Jean-Pierre DARROUSSIN). L'histoire se déroule en effet dans le huis-clos d'une cité délabrée (et non dans les petits cabanons auxquels Robert GUEDIGUIAN nous a habitué) et montre un échantillon bigarré de ses habitants en proie aux maux de l'exclusion et de la pauvreté de ces années là (chômage, drogue, sida etc.) En même temps, le film montre que la misère matérielle s'accompagne d'une déliquescence des liens d'entraide et de solidarité, non sous la forme de l'embourgeoisement des anciennes générations ouvrières comme dans "Les Neiges du Kilimandjaro" (2010) ou d'un individualisme exacerbé chez les plus jeunes comme dans "Gloria Mundi" (2018) mais sous la forme d'une guerre fratricide de territoire. Comme Robert GUEDIGUIAN aime Frank CAPRA mais aussi visiblement la légende de Robin des bois, il offre une conclusion assez simpliste qui prête à sourire " Il faut apprendre à nos enfants à voler comme il faut ... comme autrefois. Volons les nantis, les bourgeois, les riches ! ... Montrons les bienfaits du partage. Soyons ce que nous sommes ! Vilains et solidaires". C'est évidemment bien naïf, utopique et choisir un personnage de curé pour veiller sur les "ouailles" est tout à fait discutable, compte tenu du pluri confessionnalisme de la cité, même si Robert GUEDIGUIAN l'utilise de façon quelque peu provocante. Bref, même si le film ne manque pas d'intérêt, les limites de l'exercice apparaissent assez évidentes, que ce soit sur le fond ou sur la forme.

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Un homme qui me plaît

Publié le par Rosalie210

Claude Lelouch (1969)

Un homme qui me plaît

Film inégal, "Un homme qui me plaît" raconte une escapade amoureuse au beau milieu d'un tournage de film entre une actrice un peu fatiguée (Annie GIRARDOT) et un compositeur solaire (Jean-Paul BELMONDO pour sa première collaboration avec Claude LELOUCH), tous deux mariés par ailleurs. Avec des tempéraments aussi différents, on comprend assez vite qu'ils ne sont pas sur la même longueur d'ondes. Lui est un séducteur qui tombe les filles (Farrah FAWCETT au début du film!), elle est plus mélancolique et se laisse tenter par son baratin puis par ses promesses d'évasion. Le road-movie à travers les USA est filmé de manière un peu onirique, comme si le tournage du film continuait (la course-poursuite avec les indiens) mais aussi un peu trop à la manière d'un dépliant touristique. La parenthèse enchantée néanmoins se termine en désillusion lorsqu'il faut revenir à la réalité. Le montage parallèle établit une comparaison éclairante entre le couple crépusculaire de Françoise et la rayonnante santé de celui de Henri, même si nous savons qu'il est basé sur des mensonges. Ce décalage prépare le spectateur à la séquence finale, celle où Françoise vient attendre Henri à l'aéroport de Nice. Une séquence de plusieurs minutes, poignante, magnifique, bercée par la musique de Francis LAI dans laquelle Annie GIRARDOT déploie son immense talent pour faire passer les émotions par le regard et les expressions du visage. Dommage qu'il faille attendre les dernières minutes pour atteindre ce niveau d'intensité.

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Vacances romaines (Roman Holiday)

Publié le par Rosalie210

William Wyler (1953)

Vacances romaines (Roman Holiday)

Film vu et revu au charme aussi atemporel que celui de la ville éternelle où il a été tourné. C'est à la fois un conte de fées et un récit initiatique qui conserve les pieds sur terre même dans ses moments les plus magiques. La princesse Ann s'échappe durant 24h de sa prison dorée pour faire l'expérience de la liberté sous un nom d'emprunt avant que le poids de ses responsabilités ne la rappelle à son devoir. Entre temps la petite fille sera devenue une femme (avec le symbole de la coupe de cheveux). Audrey HEPBURN dans son premier grand rôle est absolument délicieuse. Elle ressemble à un petit oiseau qui tombe du nid, directement ou presque dans les bras du (presque) parfait gentleman qu'est Gregory PECK. Car si la tentation vénale effleure son personnage de journaliste ce qui donne lieu à d'hilarants moments de comédie avec Irving (Eddie ALBERT) le photographe, il s'avère capable de se hisser à la hauteur de "son altesse royale". Et puis "Vacances romaines" est une ode à la capitale de l'Italie. 40 ans avant le plan-séquence culte de "Journal intime" (1993), la visite en Vespa de ses monuments emblématiques antiques et baroques symbolise la dolce vita. L'allégresse, la légèreté de ce film est rehaussée d'une pointe de mélancolie sur la fin quand le retour à la réalité est marqué par la barrière désormais infranchissable qui sépare la plèbe des têtes couronnées. L'allusion transparente à la pantoufle de vair de Cendrillon en introduction annonce d'emblée que le bal permettant de s'affranchir de l'étiquette identitaire s'achèvera à minuit.

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Simple comme Sylvain

Publié le par Rosalie210

Monia Chokri (2023)

Simple comme Sylvain

Des films sur les oppositions de classe sociale, j'en ai vu un certain nombre, dans le registre de la comédie le plus souvent et j'en ai conclu que c'est un terrain glissant voire miné tant il est propice aux clichés. Il comporte quand même son lot de réussites comme "Ainsi va l'amour" (1971) de John CASSAVETES ou dans un registre plus satirique "La Vie est un long fleuve tranquille" (1987) de Etienne CHATILIEZ. Sur "Simple comme Sylvain", je suis beaucoup plus réservée. J'ai apprécié le regard féministe, c'est si rare au cinéma de montrer la sexualité féminine de façon réaliste, c'est à dire avec une bonne connaissance du fonctionnement du corps féminin et des pensées et désirs propres à l'émoustiller (de quoi aider ce pauvre George Brassens à améliorer les statistiques de sa chanson "Quatre-vingt quinze pour cent"). En revanche le "choc des cultures" produit par la rencontre entre deux personnages aux prénoms-programmes, Sophia (sagesse) et Sylvain (forêt) s'il est au début du film très bien mené grâce à un ton alerte, s'essouffle sur la longueur. Surtout, il n'échappe pas à la caricature. Les deux personnages sont dépeints comme de purs produits de leur milieu social, ils sont unidimensionnels. Et ces milieux sont eux-mêmes uniformes. Sophia est une intello, donc forcément elle intellectualise tout et donc forcément son entourage est composé de snobs. Sylvain est un prolo, donc forcément il est inculte, ne marche qu'à l'instinct et a des goûts vulgaires à l'image de son entourage. C'est là qu'une autre réussite aurait fait du bien pour nuancer le tableau, "Le Gout des autres" (1999) d'autant que plus que le mépris de classe y est montré pour être mieux démonté. Dans "Simple comme Sylvain", on a la désagréable impression qu'il en est rien et que l'on rit beaucoup plus aux dépends de Sylvain, ses fautes de langage, son ignorance de la langue anglaise et ses goûts de "plouc" que de Sophia. Goûts de ploucs décrétés d'ailleurs par l'élite bien-pensante (j'ignorais que la République Dominicaine en faisait partie). Plus gênant encore, Sylvain s'avère être un traditionnaliste réac partisan de la peine de mort comme si le fait d'appartenir à la bourgeoisie intellectuelle était une garantie de progressisme. Un petit tour du côté de Pier Paolo PASOLINI et de Stefan Zweig rappelle qu'il n'en a rien été. Alors qu'à l'inverse des gens "simples" ont pu à la même époque agir avec une noblesse dont ces gens-là auraient été incapables.

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Il reste encore demain (C'è ancora domani)

Publié le par Rosalie210

Paola Cortellesi (2024)

Il reste encore demain (C'è ancora domani)

Je n'ai pas tellement apprécié "Il reste encore demain" parce que je l'ai trouvé confus et sans rythme. L'histoire m'a paru bien longuette et répétitive et la fin, déceptive. Toutes ces cachotteries pour en arriver à l'exercice d'un droit dont on sait bien qu'il n'a pas mis fin aux violences faites aux femmes, ni d'ailleurs à une meilleure représentation des femmes en politique. J'ajoute qu'il y a de grosses incohérences telles que le dynamitage d'un café par un soldat US à la demande d'une pauvre mère de famille censé ne pas comprendre un mot d'anglais. Ou bien le fait qu'elle laisse de l'argent bien en vue sur une table pour sa fille alors qu'on sait que son mari leur prend tout. Là-dessus se greffent des confusions qui m'ont gêné. Au niveau du style, on a l'impression d'être dans une comédie italienne des années 70 mêlée avec le drame de Ettore SCOLA, "Une journee particuliere" (1977) mais avec des codes néo-réalistes des années 40. Au niveau du fond, les violences conjugales sont transformées en scènes de danse ce qui est d'une insigne maladresse, de même que le fait de faire disparaître les ecchymoses de Délia aussitôt apparues, comme si elles n'avaient jamais existé. D'ailleurs Délia (joué par Paola CORTELLESI elle-même) semble bien trop rayonnante dès que son mari n'est plus dans les parages pour apparaître telle qu'elle devrait être au bout de vingt ans d'un tel traitement. Rayonnante, fleur-bleue avec son ancien amoureux qui comme par hasard se trouve toujours sur son chemin, pleine d'énergie pour enchaîner quatre boulots mal payés et gueuler sur ses voisines commères. Bref, le film est plein d'intentions louables mais le rendu est assez lourd, maladroit et cliché.

Cependant si cinématographiquement parlant, j'ai trouvé "Il reste encore demain" assez mauvais, je comprends ses 5 millions d'entrées en Italie. Car sur le plan sociologique, le film vise en effet juste. Il s'interroge sur la reproduction des violences conjugales de génération en génération, plus particulièrement de mère en fille. Ainsi, Delia qui est tyrannisée au quotidien par son mari de toutes les manières possibles (contrôle de ses moindres mouvements et confiscation de son argent, insultes, coups, humiliations et dénigrement systématique) n'a longtemps qu'un seul désir: voir sa fille dans une belle robe de mariée. Fille déjà bien partie pour prendre le relai de sa mère: privée d'école, obligée de travailler pour arrondir les fins de mois de sa famille pauvre et flanquée d'un fiancé qui promet de la mettre au pas une fois qu'elle "sera à lui". Et tout le monde de se réjouir, mère et fille compris du destin qui l'attend parce qu'il y a à la clé une bague, une belle robe et un "statut de dame". Belle manière de souligner la façon dont l'aliénation est intégrée par celles qui en sont victimes. Evidemment, le film montre comment Délia torpille ce destin tout tracé et réoriente l'avenir de sa fille en prenant conscience de ses droits.

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Bon voyage

Publié le par Rosalie210

Jean-Paul Rappeneau (2003)

Bon voyage

J'ai trouvé le film absolument virtuose sur le plan de la mise en scène. Tel un chef d'orchestre, Jean-Paul RAPPENEAU mène tout son petit monde sur un rythme allegro-presto et pourtant, tout s'y écoule de façon parfaitement limpide, jusqu'au plus petit rôle. Parce qu'il ne faut pas sous-estimer la difficulté que représente le fait de maintenir ce rythme trépidant tout au long du film tout en restant lisible. Si on regarde plus en détail, on s'aperçoit que le scénario est bien structuré avec plusieurs sous-intrigues impliquant un ou plusieurs personnages qui reviennent en leitmotiv tout au long du film: les gangsters, les espions, les scientifiques, les politiciens etc. Car oui, "Bon voyage" ressemble à une partition de musique avec sa soliste star (Isabelle ADJANI qui n'a pas l'âge du rôle certes mais qui en a l'aura et qui joue la fausse ingénue manipulatrice avec brio), ses duettistes (Gregori DERANGERE et Yvan ATTAL, Virginie LEDOYEN et Jean-Marc STEHLE), ses triangles amoureux (Gregori DERANGERE, Isabelle ADJANI et Gerard DEPARDIEU, Gregori DERANGERE, Yvan ATTAL et Virginie LEDOYEN ) sans parler de la petite musique distillée par le moindre petit rôle incarné par des acteurs de caractère (Michel VUILLERMOZ, Edith SCOB) avec en arrière-plan, le choeur d'une reconstitution historique sachant rendre à merveille le chaos de l'exode de l'élite française à Bordeaux en mai-juin 1940. Chapeau!

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Le deuxième acte

Publié le par Rosalie210

Quentin Dupieux (2024)

Le deuxième acte

Comme tous les ans depuis 2021, je regarde la cérémonie d'ouverture du festival de Cannes depuis le cinéma "Le Louxor" qui diffuse ensuite le film d'ouverture. Cette année c'est le dernier long-métrage de Quentin DUPIEUX, le réalisateur qui filme plus vite que son ombre! (trois films en moins de un an). "Le deuxième acte" s'inscrit comme une suite de "Yannick" (2023) et offre une mise en abyme satirique du monde du cinéma. Dans un décor blafard de no man's land dont le lieu central est le restoroute qui donne son titre au film, on assiste à des échanges tournés en plans-séquence entre des personnages qui sont régulièrement interrompus par les commentaires ou les réactions des acteurs qui les incarnent à savoir Louis GARREL, Raphael QUENARD, Lea SEYDOUX et Vincent LINDON. A l'image du brouillard qui envahit l'image, il devient de plus en plus difficile de distinguer ce qui relève de la fiction, ce qui relève du tournage de cette fiction et ce qui relève du réel ce qui est caractéristique du cinéma de Quentin DUPIEUX. Les acteurs n'hésitent pas en effet à s'autoparodier avec des allusions par exemple aux tics de Vincent LINDON. Et quand on pense être sorti de la fiction, c'est pour mieux entrer dans une autre, les acteurs-personnages changeant de rôle comme de chemise. Ce dispositif brechtien joue en effet à fond de l'abattage du quatrième mur, les acteurs ne cessant de faire allusion au public et à l'équipe de tournage que nous ne pouvons pas voir. Il passe à la moulinette les thèmes "à la mode" (allusions à Metoo, à la cancel culture, réalisateur remplacé par une IA qui nous donne l'une des scènes les plus drôles du film), se moque du narcissisme des acteurs (dont on avait un avant-goût dans la bande-annonce "c'est moi la star du film, non c'est moi etc.). Par contraste, il met en avant un simple figurant (Manuel GUILLOT) paralysé par le trac et incapable d'accomplir le geste tout simple qu'il est censé effectuer. Quant aux petites mains du tournage, elles sont représentées par la séquence de fin, les centaines de mètres de rail de travelling qu'il a fallu poser pour filmer les plans-séquence.

Cependant si le film est parfois drôle, je l'ai trouvé également trop souvent creux et prétentieux. A force de proposer le même dispositif (deux personnages marchant côte à côte en discutant) ou le même gag (la tremblotte qui empêche le serveur de remplir les verres), il finit par comporter des redites et des longueurs. Le dernier dialogue, très théorique sonne creux. On peut parfois se dire qu'il y a un soupçon de complaisance et de nombrilisme dans cette démarche, bien moins ciselée et percutante que celle de son précédent film, "Daaaaaali !" (2022). Enfin la façon dont sont abordées toutes les questions relatives aux rapports de domination et aux discriminations qui plombent aujourd'hui l'atmosphère du monde du cinéma est ambigüe. A force de brouiller les pistes, on a l'impression que Quentin DUPIEUX se planque si bien que son film censé être satirique voire provoquant semble avoir surtout été conçu pour ne fâcher personne.

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