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Articles avec #guediguian (robert) tag

Marius et Jeannette

Publié le par Rosalie210

Robert Guédiguian (1997)

Marius et Jeannette

"Marius et Jeannette" est le film le plus célèbre de Robert GUEDIGUIAN, celui qui lui a apporté la notoriété et qui bénéficie d'un fort capital sympathie. Il faut dire qu'il s'agit de son propre aveu d'un conte et d'un conte particulièrement bien ficelé. Le titre déjà fait forcément écho aux deux premiers volets de la trilogie marseillaise de Marcel PAGNOL, "Marius" (1931) et "Fanny" (1932). Pas seulement le titre d'ailleurs, le décor et l'accent évidemment mais aussi la pittoresque micro-société formée par Jeannette (Ariane ASCARIDE) et ses voisins qui se retrouvent dans la cour de leur résidence pour rire, discuter, regarder la télé, préparer les repas, cour partagée qui est un lieu de sociabilité en forme de petit théâtre tout à fait comparable au café de César chez Marcel PAGNOL. Cet espace de convivialité plein de vie tranche avec celui de la cimenterie désaffectée, symbole de la désindustrialisation mais aussi de la disparition du monde ouvrier et de sa culture. Dans ce désert minéral, la seule présence vivante est celle du vigile, Marius (Gerard MEYLAN), un homme solitaire, taciturne et boiteux. Jeannette qui a du mal à joindre les deux bouts, seule pour élever ses enfants avec son boulot de caissière tente de chiper des pots de peinture aux abords de la cimenterie et se fait attraper par Marius. N'ayant pas sa langue dans sa poche, elle lui dit ce qu'elle pense de son boulot de sous-fifre, de même qu'au petit chef qui la flique dans son dos à la caisse, ce qui lui vaut d'être renvoyée. Mais puisque c'est un conte de fées, son franc-parler fait des miracles: le petit chef change de métier et Marius vient toquer à la porte de la communauté et bientôt dans le coeur de Jeannette. Robert GUEDIGUIAN créé ainsi une romance pleine de charme (l'alchimie des deux acteurs est parfaite et pour cause, ils tournent ensemble depuis le premier film de Robert GUEDIGUIAN et font partie de ses proches), cimentée par la solidarité du chaleureux groupe qui les entoure (eux aussi membres de la troupe). Un ciment humain qui s'oppose en tous points à la sinistrose économique où la rareté du travail atomise les groupes, transformant chacun en concurrent potentiel (voir l'interminable file de chômeuses attendant un entretien d'embauche faisant écho au récit de Marius expliquant par quelle ruse il a réussi à obtenir son emploi).

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Dernier été

Publié le par Rosalie210

Robert Guédiguian, Frank le Wita (1981)

Dernier été

Premier film de Robert GUEDIGUIAN, "Dernier Eté" est une sorte de "Les Vitelloni" (1953) marseillais. Grosso modo on suit une bande de jeunes gens désoeuvrés du quartier de l'Estaque à Marseille qui carburent au pastis et tuent le temps entre les bars, les bals, le baby-foot, la plage, les petits boulots, la délinquance. Le tout sur fond de chômage, de fermetures d'usines et de désespérance sociale mais ce contexte a du mal à s'imposer à l'écran. Il y a en effet trop d'hésitations sur le genre et même sur le contenu du récit. Le ton dominant du film est en effet léger, insouciant mais celui-ci est encadré par la musique de Vivaldi qui annonce un final tragique (l'ombre de Pier Paolo PASOLINI est un peu lourde à porter). Et sur le fond, on a plus l'impression de voir un groupe de petits glandeurs sans perspectives que des chômeurs dans la galère façon frères Dardenne ou des résistants au modèle en train de s'imposer juste à côté, celui des grandes métropoles mondialisées. "Dernier Eté" vaut surtout comme acte fondateur de l'identité d'un cinéaste avec son unité de lieu et sa troupe d'acteurs fétiches, dont le couple phare composé de Gerard MEYLAN et Ariane ASCARIDE alors tout jeunes. Il est assez fascinant de voir ces acteurs devenus familiers avec "Marius et Jeannette" (1997) à l'aube de leur carrière.

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Les Neiges du Kilimandjaro

Publié le par Rosalie210

Robert Guédiguian (2010)

Les Neiges du Kilimandjaro

Robert GUÉDIGUIAN que je surnomme le "Ken LOACH" marseillais fait un cinéma social qui, s'il a produit d'incontestables réussites, pèche aussi parfois par excès d'utopie et de lourdeur. J'avais bien aimé "Les Neiges du Kilimandjaro" à la première vision parce qu'une belle histoire, bien racontée et bien interprétée, ça fait toujours du bien et j'avais fermé les yeux sur ses défauts. Le revoir a considérablement accentué mes réserves. N'est pas Jean RENOIR qui veut. La mère de Christophe (Karole ROCHER) justifie l'abandon de ses enfants en rejetant la faute sur ses différents maris et en s'exemptant elle-même ainsi de toute responsabilité sur le refrain individualiste de "moi aussi j'ai droit au bonheur". Hirokazu KORE-EDA a bien montré les conséquences criminelles d'un tel comportement et Jean RENOIR aurait sans doute renvoyé tout ce beau monde dos à dos (qui est pour moi le sens du "chacun a ses raisons") plutôt que de leur chercher des excuses. Il aurait sans doute fait de même avec les arguments de Christophe (Grégoire LEPRINCE-RINGUET) justifiant ses actes délictueux et violents envers ses ex-collègues de travail par sa rancoeur d'avoir été licencié et sa jalousie vis à vis de personnes disposant d'une stabilité financière mais surtout d'un tissu social, amical et familial dont lui-même est privé. Car là où selon moi, Robert GUÉDIGUIAN touche juste, c'est dans le constat d'une fracture générationnelle ayant détruit l'unité de la classe ouvrière, les "boomers" ayant bénéficié de la croissance et de la solidité des institutions des 30 Glorieuses pour s'élever socialement et acquérir du patrimoine alors que la jeune génération souffre d'une atomisation sociale généralisée (crise des syndicats, crise de la famille, précarisation des emplois etc.) et en rend responsable les aînés.

Seulement cette responsabilité n'est pas individuelle mais collective, c'est le modèle de société forgé par la mondialisation libérale qui est responsable de l'explosion des inégalités et de l'atomisation des structures sociales et non les pauvres Michel (Jean-Pierre DARROUSSIN) et Marie-Claire (Ariane ASCARIDE) qui en viennent à se sentir coupables de leur embourgeoisement (tout relatif) comme si le libéralisme les avaient contaminés (après le "si tu es chômeur c'est de ta faute" voici venu le temps du "si tu t'es fait agresser c'est de ta faute, tu as trop"). La fable humaniste de Robert GUÉDIGUIAN dans laquelle les orphelins sont miraculeusement recueillis par les deux bons samaritains qui par générosité ont sacrifié leurs vacances (au grand dam de leurs enfants d'ailleurs) fait moins penser à Victor Hugo qu'à un exercice un peu démago dans lequel les responsabilités collectives sont évacuées, les services sociaux de l'Etat étant aux abonnés absents (on se demande pourquoi d'ailleurs). Moi j'appelle ça "le grand bond en arrière", celui du temps où les services publics étaient assurés par les oeuvres de charité...

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