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Articles avec #comedie dramatique tag

La Vénus blonde (Blonde Venus)

Publié le par Rosalie210

Josef von Sternberg (1932)

La Vénus blonde (Blonde Venus)

Film quelque peu dual voire schizophrène, "La Vénus Blonde", cinquième des sept films du duo Josef von STERNBERG-Marlene DIETRICH a sans doute dérouté le public à sa sortie qui n'a pas accepté de voir l'actrice dans un rôle de ménagère ce qui peut expliquer son échec. Bien que les invraisemblances et facilités du scénario sautent aux yeux sans parler d'un happy end mièvre en forme d'ode à la famille américaine, le film s'avère étonnement moderne. On y voit Marlene DIETRICH chercher à échapper à l'emprise masculine qui soit la fige dans le rôle d'une icône inaccessible soit dans celui d'une bonne épouse et bonne mère. On est tantôt dans "Morocco" (1930) ou "L'Ange bleu" (1930) avec des numéros de cabaret où Marlène apparaît déguisée en homme ou en gorille (si, si!) et tantôt dans "Un week-end sur deux" (1990) avec la cavale qu'elle entreprend pour échapper à son mari qui veut lui enlever son fils au motif qu'elle a été infidèle. Mais qui peut résister à Cary GRANT même dans l'un de ses premiers rôles? Cela ne fait cependant pas oublier que son personnage de séducteur immensément riche achète les faveurs des femmes. Quant au mari joué par Herbert MARSHALL, il illustre bien l'ambivalence masculine "maman-putain" d'abord fasciné par l'apparition de la belle en naïade nue (on est encore dans la période pre-code) puis en chanteuse de cabaret un poil provocante avant d'exiger d'elle l'abandon de sa carrière pour se consacrer au foyer. Et lorsque sa santé ne lui permet plus d'assurer son entretien et qu'elle reprend son métier et sa liberté, il se mue en juge des bonnes moeurs, l'accusant d'être une mauvaise mère et la traquant ce qui l'accule à la misère. Mais en toutes circonstances, Marlene DIETRICH ne plie pas et réussit à conserver sa dignité.

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Wayne's World

Publié le par Rosalie210

Penelope Spheeris (1992)

Wayne's World

Je ne connaissais pas du tout "Wayne's world" avant que le Blow up de Luc Lagier consacré au groupe Queen ne me le fasse découvrir. En effet une partie de son statut de film culte est liée à sa séquence inaugurale sur "Bohemian Rhapsody" (Bryan SINGER s'en souviendra lorsqu'il réalisera le film-hommage à Freedy Mercury en donnant un rôle à Mike MYERS en forme de clin d'oeil). Mais le reste du film n'est pas mal non plus. Dès les premières secondes, on reconnaît en Wayne et Garth (Mike MYERS et Dana CARVEY) deux bêtes de scène du Saturday Night Live (SNL), cette incroyable fabrique à talents et à idées de films des années 80 puisque "Wayne's world" était à l'origine un simple sketch. L'aspect "boîte à idées" du film ressort dans le confinement propre à l'univers geek des ados attardés joués par le duo qui produisent une émission de télévision dans la cave des parents de l'un d'eux, se déplacent dans une voiture customisée avec leurs comparses, parlent un langage spécifique, bref, vivent dans une bulle. Le propos du film réside dans la rencontre entre cette sous-culture geek et les médias mainstream aux mains de gros capitalistes avides de se faire de l'argent sur leur dos. Mais Myers et Carvey tournent en dérision le sponsoring, le placement de produits, les signatures de contrat, les scènes performatives à Oscar et autres "astuces" lucratives tout en rendant hommage à la pop culture avec des caméos musicaux (une rencontre avec Alice COOPER en ancêtre du groupe Gojira ^^), cinématographiques (l'excellent passage reprenant du point de vue de l'automobiliste une scène de "Terminator 2 : Le Jugement dernier" (1991) avec Robert PATRICK) ou encore télévisuelles (la délicieuse fin alternative à la "Scoubidou") (1969). Bref, même si c'est peut-être moins stylé et engagé que "The Blues Brothers" (1980) c'est tout aussi barré et fun que "Ghostbusters" (1984), autres réussites "made in SNL" passés au rang de films cultes.

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La Tresse

Publié le par Rosalie210

Laetitia Colombani (2023)

La Tresse

Laetitia Colombani aime bien entrelacer des histoires. Je me souviens de "A la folie... pas du tout" qui montrait les mêmes événements en changeant le point de vue et en poussant les curseurs à l'extrême. "La Tresse" (d'après son roman au titre éponyme) alterne trois récits de femmes vivant dans les parties éloignées du monde mais reliées par leur combattivité face à l'adversité et... par leurs cheveux. A l'image de ses arguments publicitaires tapageurs ("le best-seller aux cinq millions de lecteurs", "préparez-vous à être émus aux larmes"), le film ne recule devant aucune grosse ficelle pour émouvoir tout en cherchant à dépayser par des images touristiques léchées. Surtout, les trois femmes sont mises sur le même plan alors qu'elles représentent les différents maillons de la chaîne de valeur d'une économie mondialisée et hiérarchisée. La fin, présentée comme un happy end m'a donné une sensation de malaise avec cette riche avocate canadienne aux dents longues dont la maladie est réduite à un problème de carrière et d'image. Mais la pire des trois histoires est celle de l'entreprise de perruques italienne, renflouée grâce à l'importation des cheveux indiens donnés en offrande aux dieux. Rien ne tient la route dans cette histoire qui serait juste ridicule si elle n'abordait pas sous couvert de success story la réalité de l'exploitation de la crédulité des indiens et indiennes les plus pauvres. Mais rien ne semble réfléchi dans ce dépliant touristique soit très naïf, soit très bête qui ne flatte que le cerveau reptilien en essayant d'endormir le reste (à commencer par la conscience sociale) sous les nappes de violons.

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Alice n'est plus ici (Alice doesn't live here anymore)

Publié le par Rosalie210

Martin Scorsese (1974)

Alice n'est plus ici (Alice doesn't live here anymore)

"Alice n'est plus ici" est le quatrième long-métrage de Martin SCORSESE, atypique dans sa filmographie puisqu'il s'inscrit dans le genre du road-movie au féminin, popularisé par "Thelma et Louise" (1991) mais qui avait déjà fleuri dans les marges du nouvel Hollywood contestataire des années 70. On pense à "Wanda" (1970) de Barbara LODEN mais aussi aux films de John CASSAVETES avec Gena ROWLANDS tels que "Une femme sous influence" (1974). Ce dernier n'est pas un road-movie mais décrit très bien le profond malaise de la femme au foyer qui est aussi le lot d'Alice (Ellen BURSTYN). Martin SCORSESE utilise ce prénom à dessein avec une séquence d'introduction flamboyante en studio reconstituant l'âge d'or hollywoodien. On pense plus précisément à un improbable croisement entre "Autant en emporte le vent" (1938) et "Le Magicien d'Oz" (1938). L'artificialité du dispositif de comédie musicale ressort à la manière d'un David LYNCH non pour tracer une frontière entre le conscient et l'inconscient mais entre le "wonderland disneylandisé" où évolue Alice enfant et la réalité nettement moins glamour qui est son quotidien adulte de femme au foyer de l'Amérique profonde aliénée par un mari indifférent et désagréable et un gamin insupportable. La mort subite du mari est vécue une fois le choc passé comme un nouveau départ autant que comme une nécessité de survie. Le film bascule alors dans le road-movie mais ne revient pas pour autant dans le monde de l'enfance. Il cherche sa voie comme Alice cherche la sienne, brièvement retrouvée dans la séquence où elle chante pour un public mais qui tourne court à la faveur d'une mauvaise rencontre (Harvey KEITEL, glaçant). Finalement c'est comme serveuse qu'elle découvre les joies de la sororité avec une sorte d'Arletty de comptoir et un homme relativement plus ouvert et positif que ce qu'elle a connu jusque là. Son fils pré-adolescent fragile et hyperactif a droit également à une véritable attention de la part du cinéaste, que ce soit dans la relation à sa mère ou à son pendant féminin rebelle, jouée déjà par la toute jeune et déjà dotée d'un caractère bien trempé Jodie FOSTER. Le résultat n'est pas tout à fait abouti, en tout cas pas toujours pleinement convaincant mais il ne manque pas d'intérêt.

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Un week-end sur deux

Publié le par Rosalie210

Nicole Garcia (1990)

Un week-end sur deux

e premier film de Nicole GARCIA est le portrait d'une femme qui a raté sa vie tant professionnelle que personnelle. Actrice au chômage qui fait des animations pour survivre, divorcée, séparée de ses enfants qu'elle a abandonné à son mari, elle ne parvient pas à redresser la barre. Il faut dire que le début du film montre que ses échecs professionnels et son incapacité à gérer ses enfants sont liés au patriarcat avec un ex-mari, véritable oeil de Moscou qui ne lui confie les enfants que contraint et menace de les reprendre au moindre écart et un impresario qui l'a mise sous sa tutelle. On comprend donc son pétage de plombs et sa fuite vers une autre vie qu'elle maîtriserait, qu'elle déciderait. Néanmoins elle ne cesse d'être rattrapée par la loi et par la norme: contrôles d'identité incessants, arrestation, dénonciation. De plus elle a peu de prise sur ses enfants qui lui reprochent son abandon, surtout son fils de dix ans qui semble écartelé entre les nouveaux horizons proposés par sa mère (un besoin d'évasion qu'il exprime dans son intérêt pour l'astronomie) et les préventions du père à son égard. Nathalie BAYE porte le film sur ses épaules, au point qu'on ne voit qu'elle et ce au détriment d'un environnement survolé et de rebondissements parfois peu crédibles. D'autant plus que son personnage est un peu trop opaque pour que le spectateur s'y attache vraiment. Cette absence d'intimité se ressent particulièrement avec les enfants durant la plus grande partie du film. Enfin la "déchéance sociale" de l'actrice est toute relative, animer des soirées au Rotary Club de Vichy avec le regretté Jacques BOUDET, ce n'est pas la même chose que de devoir chanter dans un supermarché au fin fond de la cambrousse.

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La Princesse aux Huîtres (Die Austernprinzessin)

Publié le par Rosalie210

Ernst Lubitsch (1919)

La Princesse aux Huîtres (Die Austernprinzessin)

Brillant! On s'attend à un film de jeunesse de Ernst LUBITSCH compte tenu de la date de sa réalisation (1919 soit dans l'après première guerre mondiale bien que sa tonalité annonce déjà les années folles) et on se retrouve face à un petit bijou satirique et burlesque qui témoigne d'une maîtrise parfaite de l'outil cinéma. "La princesse aux huîtres" aurait pu s'appeler "la folle journée" bien que le film évoque davantage Marivaux que Beaumarchais. Encore que l'épidémie de Fox-Trot qui met sans dessus-dessous la hiérarchie sociale évoque aussi le deuxième. Sur le plan chorégraphique et rythmique, le film est une merveille d'horlogerie suisse (bien que Ernst LUBITSCH soit allemand ^^). On voit une armée de domestiques se démener tel un corps de ballet pour servir le roi des huîtres et sa capricieuse fille Ossi qui piquée au vif par le mariage d'une concurrente avec un lord (la fille du roi du cirage, cela sent la parodie des magnats américains de l'acier et du pétrole à plein nez!) veut convoler sur-le-champ en justes noces avec un prince. Sinon, elle casse tout sous le regard indifférent de son père que rien n'impressionne. Mais le promis, non content d'être criblé de dettes, envoie son homme de main jouer son rôle sans savoir qu'il va lui aussi finir par se retrouver embarqué dans la danse. Car le film de Ernst LUBITSCH, concentré d'énergie pousse la science du dérèglement à son paroxysme tout en la maîtrisant parfaitement. Les personnages semblent montés sur ressorts et se déplacent avec une grâce folle, tourbillonnant au son d'un orchestre hystérique (mené par Curt BOIS alors tout jeune, lui que j'ai découvert sous les traits d'un vieillard dans "Les Ailes du desir") (1987). Même sans musique, les personnages semblent se déplacer selon un canevas chorégraphié, que ce soit en cercle ou en ligne, seuls, en duo ou au sein d'un groupe. Sans parler de l'alcool qui coule à flots et n'est pas pour rien dans le vaste délire collectif qui nous est donné à voir (alcool et peut-être plus mais on n'en saura rien). Délire alimenté par des quiproquos menant tout droit à la chambre à coucher. Car on reconnaît la Lubitsch touch, mélange d'élégance et de grivoiserie à ces plans suggérant une caméra qui regarde par le trou de la serrure ce qu'il se passe dans le lit d'Ossi. Car c'est la seule chose qui finalement intéresse son blasé de père. Un film qui donne la pêche et met de bonne humeur!

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American Honey

Publié le par Rosalie210

Andréa Arnold (2017)

American Honey

"Emmenez-moi au bout de la terre, emmenez-moi au pays des merveilles, il me semble que la misère, serait moins pénible au soleil". Cet extrait de la chanson de Charles Aznavour convient parfaitement à "American Honey", road-movie dans le midwest américain. Sa longueur (2h43) permet d'effectuer une radiographie assez poussée de l'envers du rêve américain et ce, des deux côtés de la barrière: la nomade et la sédentaire, l'une se nourrissant de l'autre. Le film colle aux basques de l'héroïne, Star (Sasha LANE), adolescente qui décide de plaquer du jour au lendemain sa famille dysfonctionnelle pour partir sur les routes à bord d'un van regroupant d'autres jeunes paumés ramassés sur le bord du chemin par le séduisant Jake (Shia LaBEOUF, seul acteur professionnel du casting) pour le compte de sa maîtresse et patronne, Chrystal (Riley KEOUGH). Ce faisant, Star troque un système d'exploitation contre un autre. Rien de nouveau sous le soleil: Chrystal est une Fagin ou une Garofoli des temps modernes, une femme d'affaires impitoyable qui recueille de jeunes vagabonds pour les faire travailler et punir ceux qui ne rapportent pas assez. Le travail lui-même ressemble à de la mendicité, il s'agit de soutirer des abonnements à des magazines que personne ne lit plus en suscitant la pitié des acheteurs. Mais comme Star ne mange pas de ce pain-là, ses méthodes la rapprochent dangereusement de la prostitution. Elles permettent aussi de visiter cette Amérique du vide largement acquise à Trump: motels crasseux, maisons abandonnées, banlieues cossues évangélistes, champs pétrolifères peuplés d'hommes en manque, cow-boys texans tape à l'oeil et pas très nets ou encore lotissements pavillonnaires misérables dans lesquels Star rencontre des situations qui reflètent celle qu'elle a quitté. Le portrait n'est guère reluisant. Mais le film lui est flamboyant, brut et sauvage, énergique voire tonitruant avec sa musique omniprésente ce qui lui permet de contourner l'écueil du misérabilisme, comme Andrea ARNOLD parvenait déjà à le faire dans "Fish tank" (2009) auquel on pense beaucoup. La soif de liberté des héroïnes y est identique et s'exprime à travers l'attention au vivant dans ses manifestations les plus humbles. Ainsi Star recueille avec précaution les insectes et les animaux pris au piège pour les relâcher dans la nature. Il est cependant dommage que la réalisatrice ait privilégié la relation toxique entre Star et Jake au détriment du reste du groupe. Le casting (que l'on devine à l'image du film, sauvage) est pourtant réussi mais les personnalités restent seulement esquissées et on reste sur notre faim.

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A L'attaque !

Publié le par Rosalie210

Robert Guédiguian (2000)

A L'attaque !

"A L'attaque !" est le dernier volet de la trilogie des "contes de l'Estaque" (après "L'argent fait le bonheur" en 1993 et "Marius et Jeannette" en 1997). Le film utilise le même procédé que celui de "La Fête à Henriette" de Julien Duvivier (qui a ensuite été repris aux USA par Richard Quine dans "Deux têtes folles" et par Woody Allen dans "Mélinda et Mélinda"). A savoir une mise en abyme du travail de création cinématographique. Deux scénaristes (joués par Denis Podalydès et Jacques Pieiller) travaillent sur une comédie sociale marseillaise que l'on voit s'incarner à l'écran avec un certain nombre de retouches, retours en arrière, scènes finalement mises à la poubelle, versions alternatives. L'histoire est cependant très simple à suivre, celle d'une famille de garagistes (la troupe habituelle de Robert Guédiguian) dont le bien est sur le point d'être saisi pour impayés, la société Eurocontainer qui les emploie ayant été mise en liquidation judiciaire sans leur régler ce qu'elle leur doit. Mais banquiers et patrons voyous n'ont qu'à bien se tenir, les scénaristes ne manquent pas d'imagination pour leur faire rendre les armes. En mettant en scène deux mondes parallèles, celui de la culture et celui des ouvriers, Guédiguian parle sans doute de sa propre schizophrénie tout en se moquant de lui-même et des films sociaux pondus par les bourgeois parisiens. En tout cas le résultat, foncièrement ludique est sympathique même s'il ne vole pas très haut, plombé notamment par une grivoiserie lourde et insistante: il paraît que cela fait marcher le commerce!

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Il Bidone

Publié le par Rosalie210

Federico Fellini (1955)

Il Bidone

Film puissant, "Il Bidone" s'inscrit dans le prolongement des deux oeuvres précédentes de Federico FELLINI, "Les Vitelloni" (1953) et "La Strada" (1954). Du premier, il reprend le principe du film de bande, portraiturant à nouveau un groupe de minables vivant aux crochets des autres, sauf qu'au lieu d'êtres des oisifs, ce sont des escrocs. Parmi eux, on reconnaît Franco FABRIZI, séducteur dans "Les Vitelloni", gigolo dans "Il Bidone". Du second, outre la présence de Giulietta MASINA qui apporte l'une des seules sources d'espoir du film, celui-ci révèle le même tournant métaphysique dans sa dernière ligne droite, celui d'un homme qui a refusé la grâce et se retrouve banni du monde des hommes et du royaume de Dieu, pleurant ou agonisant dans un paysage désertique. "Il Bidone" est cependant plus sombre que les deux autres films et se caractérise par d'importantes ruptures de ton et même de genre. La vilénie humaine est d'abord traitée sur le mode de la bouffonnerie avec la description des escroqueries du trio formé par Augusto, Picasso et Roberto qui abusent de la crédulité des plus faibles, se déguisant tantôt en ecclésiastiques pour gruger les paysans et tantôt en fonctionnaires pour arnaquer les demandeurs de logements sociaux vivant dans les bidonvilles. Néanmoins, lorsque surgit Rinaldo, ancien associé d'Augusto qui a réussi dans la vie commence à percer chez ce dernier un abattement, une lassitude qui le détache des deux autres que l'on peut considérer comme des avatars possibles d'Augusto lui-même quand il était jeune (une version candide et l'autre au contraire totalement cynique). Augusto ne cesse en effet de souligner son âge, 48 ans comme si c'était "trop tard", d'autant qu'il en fait en réalité presque vingt ans de plus. Le film va alors peu à peu se resserrer sur lui et lui faire emprunter un véritable chemin de croix, alors même qu'il bascule du néoréalisme vers quelque chose de beaucoup plus existentiel. La rencontre avec sa fille, âgée de 17 ans et qu'il n'a pas élevée lui-même s'avère déterminante. Celle-ci est sur le point de faire un choix quant à son avenir, choix marqué par la gêne financière. Augusto qui vit hors de la réalité est alors paradoxalement ramené sur terre par cette figure de pureté morale qui revient le hanter sous la forme d'une petite paysanne infirme. Mais il refuse de renoncer à l'argent facile et rejette la main tendue de cette incarnation de la grâce. Son châtiment (divin?) sera terrible mais Federico FELLINI le filme jusqu'au bout comme un homme qui souffre, un homme qui doute, un homme ambivalent ayant fait les mauvais choix mais aspirant toujours à rejoindre l'humanité. Sans doute parce Augusto est une part de la personne qu'aurait pu devenir Federico FELLINI, lui qui avait échappé de justesse à ce type de destin, à l'image de Moraldo dans les Vitelloni sous l'influence d'un "Guido" ce qui l'a rendu apte à comprendre aussi bien les "Vitelloni" que les "Bidoni".

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La Nouvelle Eve

Publié le par Rosalie210

Catherine Corsini (1999)

La Nouvelle Eve

"La nouvelle Eve" m'avait laissé le souvenir d'un vaste bordel sentimental charrié par l'héroïne mais j'avais complètement oublié qu'il existait deux camps dans le film. Celui des Camille libérées et paumées et celui des couples petits-bourgeois étriqués qui en prennent pour leur grade, que ce soit celui du frère rabat-joie de Camille (Laurent LUCAS) ou celui d'Alexis (Pierre-Loup RAJOT) flanquée d'une tour de contrôle jouée par Catherine FROT. Ce genre de petit couple conformiste, on en connaît tous (normal puisque le conformisme est fait pour se dupliquer) et le moule social que cherche à dénoncer Catherine CORSINI est si fort qu'il contamine jusqu'aux amies lesbiennes de Camille. De ce point de vue là, le film voit juste, il faut dire qu'il a été réalisé à l'époque de la mise en place du PACS et précède d'une quinzaine d'années le mariage pour tous. Le PS comme réceptacle des notables (la "gauche caviar") est également dénoncée avec justesse étant donnée que l'on sait aujourd'hui que cela a fini par tuer le parti. Ce sont ces normes sociales étouffantes qui étaient déjà dénoncées dans les années 70 dans des films tels que "Cousin cousine" (1975) que rejette Camille (Karin VIARD). Celle-ci apparaît comme la précurseure de personnages tels que celui de Christina dans "Vicky Cristina Barcelona" (2007) qui sait ce qu'elle ne veut pas mais ne sait pas ce qu'elle veut ou encore de Bahia dans "Le Nom des gens" (2010) dont les méthodes de conversion aux idéaux de gauche sont peu orthodoxes. Bref, c'est frais, pétillant, impulsif, parfois franchement loufoque (Camille boit plus que de raison, se trompe de soirée, saute sur le premier inconnu ou branche la première inconnue qui passe, se cogne aux murs, balance cash ses quatre vérités dans les situations les plus incongrues) mais ça ne mène nulle part. Sous son vernis d'éternelle adolescente adepte d'un romantisme rock and roll Camille est même le prototype d'une autre forme de conformisme social, un pur produit du boboïsme parisien individualiste adepte des soirées branchouilles, plus attirée par l'adultère avec quelqu'un de sa classe sociale (un pote à son frère) qu'une relation avec son déménageur-camionneur (en plus joué par le charismatique Sergi LOPEZ que j'ai découvert à l'occasion de ce film). Pas très transgressif tout ça au final. Il y a mieux comme modèle de rébellion et elle n'a pas de ce point de vue là inventé l'eau chaude, de même que Catherine CORSINI ne possède ni l'élégance d'un Ernst LUBITSCH, ni le sens du rythme et l'humanisme d'un Howard HAWKS.

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