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Articles avec #cinema italien tag

Race for Glory Audi vs Lancia (2 Win)

Publié le par Rosalie210

Stefano Mordini (2024)

Race for Glory Audi vs Lancia (2 Win)

Je ne suis pas du tout fan de sports mécaniques mais j'ai passé un bon moment devant ce film qui reconstitue le championnat du monde de rallye 1983 ayant vu s'affronter l'écurie allemande Audi contre les italiens de Lancia. Aux premiers l'avantage technologique avec les quatre roues motrices, aux seconds la créativité. Plusieurs qualités m'ont sauté aux yeux: c'est immersif, sans aucun temps mort et les acteurs sont ultra charismatiques, surtout Riccardo SCAMARCIO dans le rôle de Cesare Fiorio, le directeur sportif de Lancia. Je ne l'avais pas vu depuis "Eden a l'ouest" (2008) et il s'est sacrément bonifié avec le temps, d'autant plus qu'il co-signe le scénario et co-produit également le film. Face à lui, un acteur non moins charismatique, Daniel BRUHL dans le rôle de Roland Gumper, le directeur sportif d'Audi. On l'avait déjà vu jouer une dizaine d'années auparavant Niki Lauda dans le film "Rush" (2013), autre compétition entre champions de course automobile mais dans "Race for Glory" ce sont les directeurs sportifs qui sont mis à l'honneur beaucoup plus que les pilotes. Basé sur le témoignage de Cesare Fiorio et utilisant de véritable modèle de l'époque, le film se veut réaliste et ne recherche aucun effet facile du genre sous-intrigue sentimentale propre à de nombreux biopics. La course, rien que la course et ses enjeux, c'est ce qui m'a plu.

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L'Enlèvement (Rapito)

Publié le par Rosalie210

Marco Bellocchio (2023)

L'Enlèvement (Rapito)

"L'Enlèvement" est un film puissant et engagé qui mêle avec talent et un lyrisme tout opératique grande et petite histoire pour nous raconter comment entre 1858 et 1870 le pape Pie IX, despotique et réactionnaire a tenté de sauver ce qu'il restait de son pouvoir temporel en s'appuyant sur la conversion et l'embrigadement de jeunes enfants juifs, recrutés parfois de façon peu "catholique". Ce film crépusculaire qui décrit l'agonie d'une institution d'autant plus venimeuse qu'elle est à bout de souffle est un thriller nerveux qui n'hésite pas lors de plusieurs séquences à recourir à l'onirisme. En effet Marco BELLOCCHIO créé un suspense prenant autour du sort du petit Edgardo, enlevé à sa famille juive à l'âge de six ans sous prétexte qu'il aurait été baptisé alors qu'il était bébé et malade par sa nourrice crédule qui espérait ainsi lui épargner "les limbes". Histoire incroyable et pourtant véridique connue sous le nom de l'affaire Mortara. Une véritable course contre la montre s'engage entre d'un côté la famille d'Edgardo qui remue ciel et terre pour le récupérer, épaulée par la communauté juive et les libéraux du monde entier alors que l'Italie est en voie d'unification sous la houlette du royaume de Piémont-Sardaigne et de l'autre une Eglise obscurantiste et bunkérisée. Même les têtes couronnées réprouvent ce flagrant abus de pouvoir mais Pie IX ne veut rien savoir et va jusqu'à adopter le petit garçon qui entre lavage de cerveau et syndrome de Stockholm embrasse sa nouvelle condition, peut-être aussi pour ne plus souffrir tant Marco BELLOCCHIO montre que chaque contact avec sa famille d'origine le déchire profondément.

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Les Vitelloni (I Vitelloni)

Publié le par Rosalie210

Federico Fellini (1953)

Les Vitelloni (I Vitelloni)

A mes yeux, les premiers films de Federico FELLINI sont les plus beaux. "Les Vitelloni", son troisième film (le deuxième si l'on exclut "Les Feux du music-hall") (1950) traduit en français par "les oisifs de province" mais qui signifie littéralement "Les vieux veaux" raconte l'histoire d'une bande de cinq hommes d'une trentaine d'années qui n'ont pas réussi à entrer dans l'âge adulte. Des "inutiles" (sous-titre du film) qui ne travaillent pas et vivent encore chez et de leurs parents, s'étonnant en retour d'être infantilisés par eux. Leur vie sans horizon est parfaitement résumée en un plan mélancolique où on les voit regarder la mer. Mais comme dans beaucoup de films de Federico FELLINI, il y a une part autobiographique. Ces jeunes gens sont moins des feignants que des rêveurs coincés dans une existence pour laquelle ils sont inadaptés. Alternant les plans vides suintant l'ennui et les séquences de fête ou de spectacle au rythme frénétique et à l'ambiance onirique qui annonce ses oeuvres à venir, le cinéaste ne se contente pas d'une chronique douce-amère et néoréaliste de ses losers, ne serait-ce que parce que ceux-ci planent ou jouent plutôt qu'ils ne s'engagent ou se révoltent. Il les creuse de l'intérieur au point que le film finit par adopter la forme d'un drôle de récit initiatique entre vrai et "Faux mouvement" (1975). Fausto (Franco FABRIZI), le chef de la bande, Don Juan lâche et menteur qui torpille par ses incartades répétées une vie d'adulte qui ressemble à un costume mal taillé pour lui finit par se racheter auprès de sa femme Sandra (Eleonora RUFFO) qui de son côté passe de la jeune oie blanche à la femme expérimentée et mûrie par les épreuves. Le frère de Sandra, Moraldo (Franco INTERLENGHI) qui est le plus jeune et le plus discret de la bande (et le vraisemblable double de Fellini) assiste à tous les événements en position d'observateur jusqu'au jour où il trouve le courage de quitter le nid. C'est une rencontre qui s'avère décisive, celle du jeune Guido (au prénom prédestiné), personnage d'adolescent cheminot éminemment chaplinesque. L'intellectuel Leopoldo (Leopoldo TRIESTE) voit ses espoirs de succès engloutis dans une nuit de terrible désillusion. Enfin, impossible d'oublier Alberto (Alberto SORDI) qui après une nuit de folie traîne misérablement son masque habillé en femme et voit sa soeur Olga (Claude FARELL) avoir plus de courage que lui en osant partir pour vivre son amour non conforme au grand jour.

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Eté violent (Estate violenta)

Publié le par Rosalie210

Valerio Zurlini (1959)

Eté violent (Estate violenta)

Un très beau film, beaucoup plus beau que ce à quoi je m'attendais. "Eté violent" est le deuxième film de Valerio ZURLINI et se divise assez nettement en deux parties. Dans la première, on assiste à la "La Dolce vita / La Douceur de vivre" (1960) d'une jeunesse dorée et oisive en pleine seconde guerre mondiale. Celle-ci s'invite cependant lorsqu'elle interrompt brutalement les distractions des uns et des autres au gré des alertes aériennes et des bombardements de 1943. C'est justement lorsqu'un avion de chasse allemand survole en rase-motte la plage de Riccione au bord de l'Adriatique où cette jeunesse farniente qu'une petite fille terrorisée tombe dans les bras de Carlo (Jean-Louis TRINTIGNANT dans son premier rôle transalpin), fils d'un dignitaire fasciste et qui grâce à l'appui de son père a échappé à l'enrôlement. Roberta la mère, beauté mélancolique d'une trentaine d'années (Eleonora ROSSI DRAGO) intervient aussitôt et c'est le coup de foudre entre elle et Carlo. Dans un premier temps, le film s'attarde sur les obstacles à leur idylle, tant du côté de Carlo avec la jalousie d'une de ses amies que du côté de Roberta qui est veuve de guerre mais vit avec sa mère psychorigide qui souhaite qu'elle reste fidèle au souvenir de son mari décédé (choisi par son père et qu'elle n'aimait pas). Obstacles qui ne font qu'attiser un désir dont la croissance est parfaitement orchestrée par la mise en scène jouant sur les gestes et les regards avec notamment une soirée en clair-obscur mémorable sur une chanson "Temptation" on ne peut plus appropriée. Puis le film bascule dans une dimension beaucoup plus intimiste et dramatique dans laquelle Roberta assume son désir, s'émancipe du jugement des autres (comme le montre la scène sur la plage où elle refuse de se cacher) et s'affirme par rapport à sa famille qui l'a toujours dirigée. De son côté, Carlo est expulsé de sa cage dorée suite au renversement de Mussolini et se fait rattraper par l'armée en voulant rester près de Roberta. Celle-ci s'avère en effet impuissante à le protéger comme le faisait son père, la scène très forte de bombardement final à la gare où l'on tremble pour leur vie en témoigne. La relation avec cette femme plus âgée que lui dans un contexte historique troublé permet donc paradoxalement à Carlo de sortir de son cocon et de devenir adulte. Valerio ZURLINI entremêle de façon remarquable grande et petite histoire, chacune se nourrissant de l'autre. Toute l'ironie résidant dans le fait que si c'est la grande histoire qui les pousse l'un vers l'autre et leur permet de cesser de subir leur destin, c'est elle aussi qui les sépare définitivement.

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La Ciociara

Publié le par Rosalie210

Vittorio De Sica (1960)

La Ciociara

"La Ciociara" est un film puissant qui hante longtemps après l'avoir vu. Vittorio DE SICA a réussi à combiner dans un même film l'adaptation d'un roman (celui de Moravia au titre éponyme), un terreau néoréaliste d'où il est issu et qui nourrit sa chronique paysanne et des influences américaines mélodramatiques portées par Sophia LOREN qui avait passé plusieurs années à Hollywood mais qui renoue avec ses origines italiennes. Si dans "La Ciociara" elle magnétise l'écran et laisse peu de place aux autres personnages, son interprétation bouleverse et renforce la puissance globale du film. C'est avec "Une journee particuliere" (1977) son interprétation la plus forte, comparable à celle de Romy SCHNEIDER dans "Le Vieux fusil" (1975). Mais le propos de "La Ciociara" est plus complexe et plus subtil tant au niveau de l'histoire individuelle qu'à l'échelle collective. Sophia LOREN interprète le rôle de Cesira, une jeune veuve de caractère vivant à Rome qui décide de retourner dans son village natal pour mettre sa fille Rosetta à l'abri des horreurs de la guerre. Or le titre à lui seul souligne que la campagne offre une sécurité illusoire: la Ciociara désigne une région rurale d'Italie qui a été le théâtre de crimes de guerre en 1944 de la part des soldats, notamment marocains, du corps expéditionnaire français en Italie commandés par le général Juin qui remontaient vers Rome à la suite de la bataille du Mont-Cassino. C'est donc vers l'horreur que s'acheminent les deux femmes. Les signaux de danger ne manquent pas (l'attaque de l'avion, le comportement lubrique des miliciens). Néanmoins la vie en communauté apporte une sécurité précaire. Aussi l'erreur la plus tragique de Cesira est de se séparer du groupe pour rentrer à Rome alors que la guerre n'est pas terminée et que les alliés considèrent l'Italie comme un territoire conquis. La terrible agression dont elle et Rosetta sont victimes dans l'Eglise outre son caractère symbolique introduit une rupture dans la dernière demi-heure de film qui souligne que le temps de l'insouciance et de l'innocence est révolu. Cesira perd son assurance (à tous les sens du terme) en perdant sa fille qui s'est coupée d'elle et part à la dérive. La relation mère/fille au coeur du film laisse peu de place aux personnages masculins même si Michele (Jean-Paul BELMONDO) dont Rosetta est amoureuse mais qui lui préfère Cesira introduit la première faille dans la relation mère/fille.

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Le Voleur de bicyclette (Ladri di biciclette)

Publié le par Rosalie210

Vittorio De Sica (1948)

Le Voleur de bicyclette (Ladri di biciclette)

"Le voleur de Bicyclette" est un film illustre de l'histoire du cinéma qui a inspiré par la suite nombre de réalisateurs. Chef-d'oeuvre du néoréalisme italien ayant contribué à son existence au même titre que "Rome, ville ouverte" (1944), il s'agit d'un drame de la précarité, traité avec une simplicité et une justesse qui explique pour beaucoup la réussite du film. Autant par nécessité financière que par choix artistique et politique, le cinéma italien de l'après-guerre connaît une refondation sur les ruines de celui qui s'était fourvoyé dans la propagande fasciste. Il recherche la plus grande proximité possible avec les sujets qu'il filme, pris dans la réalité âpre d'un pays défait et miné par la crise économique et sociale. Ainsi Vittorio DE SICA, ancien acteur passé à la réalisation dans l'après-guerre tourne son film avec peu de moyens, un scénario réduit à l'extrême et sans effets visuels, en version muette (il sera ensuite post synchronisé), en extérieur et en décors naturels, avec des acteurs non-professionnels et dans les lieux les plus déshérités de Rome ce qui confère à son long-métrage un caractère proche du documentaire et lui donne une grande valeur historique comme chez Roberto ROSSELLINI. De plus, le drame social de De Sica est d'une grande justesse dans sa description des rapports humains. D'un côté, la pauvreté et la précarité qui touchent une large partie de la population italienne réduite au chômage et à l'indigence ont annihilé les liens de solidarité, transformant la société en jungle où chacun essaye de s'en sortir au détriment des autres. Le périple d'Antonio à la recherche de sa bicyclette volée sur laquelle repose son seul espoir de s'en sortir lui fait traverser des destins aussi infortunés que le sien voire pire et la fin souligne combien la frontière est fragile entre pauvreté et délinquance (en VO le titre est au pluriel). Quant aux structures d'aide, elles sont impuissantes (la police), indifférentes (le syndicat), illusoires (la voyante) ou intéressées (l'Eglise). De l'autre, "Le voleur de bicyclette" est un grand film humaniste qui observe les pauvres essayer de survivre avec compassion, sans les juger. Surtout à travers le regard de Bruno, le fils d'Antonio, témoin sensible des malheurs de son père, "Le voleur de bicyclette" a des airs de "Le Gosse" (1921) de Charles CHAPLIN avec un final qui s'y réfère directement. La relation père-fils est en effet aussi importante que le contexte social dans lequel ils évoluent. Le film repose sur un équilibre miraculeux entre le témoignage documentaire et la dimension intimiste et émotionnelle, l'un empêchant l'autre de verser dans le mélodrame ou à l'inverse dans le documentaire stérile froidement distancié.

"Le voleur de Bicyclette" marque les débuts de Sergio LEONE au cinéma. Engagé comme assistant, il joue également un petit rôle (celui d'un séminariste) et son futur cinéma doit beaucoup à celui de Vittorio DE SICA.

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Un vrai crime d'amour (Delitto d'amore)

Publié le par Rosalie210

Luigi Comencini (1974)

Un vrai crime d'amour (Delitto d'amore)

"Un vrai crime d'amour" m'a fait penser à deux autres films sur le monde prolétarien: "Les Camarades" (1963) de Mario MONICELLI qui racontait le soulèvement d'ouvriers turinois contre l'usine qui les exploitait jusqu'à la mort à la fin du XIX° siècle et "Elise ou la vraie vie" (1970) dans lequel une jeune ouvrière s'éprenait d'un immigré algérien OS dans une usine automobile de la région parisienne pendant la guerre d'Algérie. L'usine de "Un vrai crime d'amour" située dans la même région que celle de "Les Camarades" (1963) lui ressemble en tous points alors que près d'un siècle est censé séparer les événements racontés dans les deux films. Les ouvriers travaillant à la chaîne y sont tout aussi exploités à ceci près que la maltraitance dans "Un crime d'amour" est plus insidieuse et plus actuelle. Le réalisateur, Luigi COMENCINI met en effet l'accent sur l'oppression des femmes et de la nature qui s'incarnent dans le corps de Carmela (Stefania SANDRELLI). Celle-ci d'origine sicilienne vit dans un taudis qui n'est pas sans rappeler celui de "Affreux, sales et méchants" (1976). "Les Camarades" montraient déjà que les siciliens étaient des parias, rejetés par les italiens du nord se considérant comme plus civilisés. Dans "Un vrai crime d'amour", ils sont qualifiés de "bouseux" vivant dans la crasse et la misère. Bien que Carmela soit sous l'emprise du catholicisme et du patriarcat de son milieu d'origine, elle est attirée justement par un italien du nord, Nullo (Giuliano GEMMA) qui est ouvrier dans la même usine mais athée, anarchiste et dont la famille vit dans un appartement moderne dans un grand ensemble, à l'image de ce qui se passait à la même époque en France où les ouvriers de souche étaient logés décemment les premiers alors que les immigrés les plus récents n'avaient pu quitter les bidonvilles qu'à la fin des années 70. Leur histoire d'amour, clandestine et compliquée en raison des tiraillements intérieurs de Carmela (symbolisés notamment par ses multiples couches de vêtements qui font obstacle à son amour pour Nullo à la manière de "Le Déshabillage impossible") (1900) mais aussi par le machisme ambiant (des regards libidineux sur son corps dans un monde extérieur régi par les hommes) s'inscrit dans un monde sinistré socialement et écologiquement. Dans une scène frappante, les deux amoureux se déchirent au bord d'une rivière affreusement polluée et dont les berges sont transformées en décharge publique. La toxicité de l'ensemble ne fait aucun doute lorsque le réalisateur s'attarde sur de nombreux petits oiseaux morts à une époque où personne ou presque ne s'en préoccupait*. Mais la scène a aussi une portée symbolique. En se privant du lait distribué par l'usine afin de le donner à ses petits frères, Carmela expose dangereusement son corps aux substances nocives alors même que la mort des fleurs entourant l'usine annonce le pire. L'ironie de l'histoire est qu'il faudra en arriver à la tragédie (comme dans "Romeo et Juliette") pour que les deux familles se rencontrent et que l'amour de Nullo et Carmela puisse se révéler au grand jour. Une tragédie annoncée dès les premiers plans qui reviennent à la fin, inscrivant la trajectoire individuelle dans un drame collectif annonciateur de lendemains rouge sang.

* Il y a quand même un film important qui tirait déjà la sonnette d'alarme à cette époque et que l'on redécouvre aujourd'hui: "Soleil vert" (1973).

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Divorce à l'italienne (Divorzio all'italiana)

Publié le par Rosalie210

Pietro Germi (1961)

Divorce à l'italienne (Divorzio all'italiana)

J'avais oublié que je connaissais déjà "Divorce à l'italienne", le film le plus célèbre de Pietro GERMI puisque m'est revenu en mémoire la fin pendant que je le regardais. Une fin qui constitue le clou d'un film parfaitement maîtrisé de la première à la dernière image. Une comédie de moeurs satirique et cynique jouant avec un délicieux humour noir afin d'épingler l'hypocrisie d'une société rigide et arriérée (d'où la comparaison qui a été établie avec les comédies anglaises de la même époque qui s'en donnaient à coeur joie avec leur propre société corsetée). Peu de choses semblent avoir évolué en effet depuis que Roberto ROSSELLINI a montré dans "Stromboli" (1949) que l'obsession du mâle sicilien était d'être traité de "cornuto" (cocu) par ses congénères pour le simple fait de ne pas avoir réussi à cloîtrer sa femme étrangère. Pietro GERMI enfonce le clou au début des années 60 en montrant que le mariage est une prison dans laquelle s'engouffre la population parce que c'est la seule forme de sexualité autorisée par la religion catholique, les coutumes et les traditions qui parviennent encore à verrouiller la société. Une prison à perpétuité puisqu'au début des années 60 le divorce est interdit en Italie. En ce sens, on peut penser que le film de Pietro GERMI a contribué à faire évoluer la loi comme à la même époque dans un genre différent "La Victime" (1961) en Angleterre pour la dépénalisation de l'homosexualité.

Le film de Pietro GERMI se place du point de vue de son personnage principal, Ferdinando Cefalù (Marcello MASTROIANNI) issu de la vieille aristocratie italienne (autre signe de l'arriération de cette société) qui ne cesse d'échafauder des stratagèmes pour se débarrasser de son épouse, Rosalia qu'il ne peut plus souffrir. Non seulement on le comprend tant Rosalia est disgracieuse et insupportable mais on entre en connivence avec lui ce qui souligne à quel point le puritanisme religieux est pervers puisque loin de rendre les gens meilleurs, il donne des envies de meurtre en les privant de leur libre-arbitre. Les différents "scénarios" totalement amoraux imaginés par Ferdinando pour en finir avec son mariage sont juste désopilants en plus de lui redonner un pouvoir sur sa vie. Tel un cinéaste, il choisit parmi plusieurs candidats celui qui pourra faire "fauter" Rosalia et créé les conditions de leur rapprochement afin de pouvoir agir au moment propice avec le maximum de circonstances atténuantes. En effet, si l'Eglise diabolise la sexualité, elle ferme les yeux sur les crimes d'honneur, surtout s'ils sont commis par un homme envers sa femme adultère en raison de sa misogynie foncière mais aussi de celle des communautés qu'elle contrôle et pour qui l'honneur se lave dans le sang. La présence de la jeune, belle et innocente cousine (Stefania SANDRELLI dont la carrière a été lancée par le film) dont Ferdinando tombe amoureux sert de catalyseur. Mais on sent dès le départ qu'il s'agit d'un mirage ce que la fin vient confirmer. Marcello MASTROIANNI est drôlissime dans le rôle avec son impayable tic inspiré de Pietro GERMI lui-même. Enfin, on assiste avec une délectation particulière aux anathèmes de l'Eglise envers "La Dolce vita / La Douceur de vivre" (1960) sorti un an auparavant et qui est projeté dans le village où tout le monde feint de s'offusquer mais se rince l'oeil devant Anita EKBERG appelant un certain Marcello qui reste invisible à l'écran et pour cause... une mise en abyme réjouissante de plus.

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Le sourire de ma mère (L'Ora di religione: Il sorriso di mia madre)

Publié le par Rosalie210

Marco Bellocchio (2002)

Le sourire de ma mère (L'Ora di religione: Il sorriso di mia madre)

Il est rare que je regarde un film deux fois de suite, c'est pourtant ce que j'ai fait pour "Le sourire de ma mère". La première fois en effet, je n'ai pas tout compris tant le film a un caractère énigmatique mais j'ai trouvé le personnage d'Ernesto et l'acteur qui l'interprète (Sergio CASTELLITTO) si beaux que j'ai eu envie de recommencer le voyage. Le film raconte l'histoire d'un homme qui se retrouve plongé en plein cauchemar kafkaïen le jour où un prêtre vient chez lui pour lui annoncer que l'Eglise veut béatifier sa mère et qu'elle a besoin de lui pour faire parler le responsable de son assassinat, lequel n'est autre qu'un frère d'Ernesto qui souffre de maladie mentale. Cauchemar car Ernesto qui est athée et ne supportait pas sa mère confite en dévotion mais incapable d'aimer subit les pressions de sa famille à l'origine de la demande de canonisation mais il choisit de résister, pour conserver son libre-arbitre et le transmettre à son petit garçon dont il est très proche. C'est ce combat pour conserver son intégrité face à un microcosme social corrompu que raconte Marco BELLOCCHIO avec un onirisme teinté de surréalisme qui n'est pas sans rappeler Luis BUÑUEL. Face au cynisme et au conformisme de ses autres frères, de ses tantes, de son ex-épouse qui envisagent la religion sous un angle mercantile, une "assurance-vie", un "investissement sûr" qui ne "coûte rien" et la canonisation comme un titre conférant prestige social et protection des puissants, Ernesto qui est peintre et illustrateur se réfugie dans la sublimation conférée par l'art et par l'amour. "Votre peinture est pleine de couleurs, de mouvement autour d'un sujet, vous travaillez l'arrière-plan comme les maîtres de la Renaissance dans le peu d'espace laissé par Jésus et les saints. Dans les espaces inutiles se libère un talent qui me manque" lui dit avec admiration l'institutrice de son fils dont il tombe amoureux et dont on peut douter de sa réalité lorsque le voile de son identité est levé. Quant au sourire du titre, il est moins celui de sa mère qui "ne souriait jamais" que celui qu'elle a transmis à Ernesto, lequel offre ce sourire évanescent comme un bouclier face au cynisme du monde qui l'entoure et contre la dépression qui menace. Oui, un bien beau film.

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La Fille à la valise (La Ragazza con la valigia)

Publié le par Rosalie210

Valerio Zurlini (1961)

La Fille à la valise (La Ragazza con la valigia)

Autant ma première incursion dans le cinéma de Valerio ZURLINI avec "Le Professeur" (1972) m'avait laissé une impression mitigée, autant "La Fille à la valise" m'a profondément touchée. Les ingrédients sont pourtant les mêmes: une atmosphère particulière, souvent hors du réel, un contexte plutôt glauque, une histoire d'amour impossible. Mais alors que "Le Professeur" baignait dans un climat poisseux, décadent et nihiliste avec des personnages sinistres, "La Fille à la valise" est illuminé par deux acteurs rayonnant de vitalité, de jeunesse et de beauté: Claudia CARDINALE et Jacques PERRIN. Alors certes, le déterminisme social y est souligné à gros traits. Avec l'argent qui remplace les mots qui ne peuvent se dire, tirant la romance vers le commerce (la satisfaction des pulsions contre celle des besoins matériels). Avec la morale religieuse incarnée par un prêtre qui vient faire la leçon à Aïda (une fille-mère perturbant les études d'un adolescent bourgeois, ce n'est pas convenable). Mais posséder un tel prénom quand on est une jeune fille pauvre c'est vivre dans la contradiction permanente. Car lorsque Aïda descend l'escalier de la demeure où vit Lorenzo après avoir pris son bain (et symboliquement lavé ses impuretés), c'est sur la musique du célèbre opéra de Verdi: on entrevoit alors cet autre monde que cherche Aïda dans son éternelle errance et qu'elle parvient à toucher du doigt avec Lorenzo, trop jeune pour être encore vraiment corrompu, le temps de quelques parenthèses hors du temps. Le climax étant atteint lors d'une séquence d'intense proximité dans le désert (d'une plage) où les deux amoureux, magnifiquement photographiés se retrouvent dépouillés de leur masque social: ils sont alors juste beaux à pleurer dans une gémellité qui préfigure celle que sublimera Jacques DEMY dans "Les Demoiselles de Rochefort" (1966). Cette séquence se rapproche de la grâce des photos de "La Jetée" (1963) qui arrachait également au temps des instants d'éternité. Peu importe au fond que la pesanteur du réel avec ses désillusions, son amertume, son fatalisme social ne reprenne ensuite le dessus puisque ces moments auront existé et que le cinéma les aura fait passer à la postérité.

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