Le premier long-métrage de Marion VERNOUX est, trois après après "Thelma et Louise" (1991) la déclinaison française du road-movie au féminin qui a ensuite essaimé dans le cinéma français (exemple: "Elle s'en va") (2012). Quatre femmes assez dissemblables et tentées par les dissensions partagent le temps d'un voyage en camping-car vers la mer l'objectif commun de se libérer de la dépendance aux hommes. Que ce soit pour affirmer un désir propre, prendre une revanche ou fuir une situation aliénante, ces femmes sont démangés par le besoin de liberté que l'on sent parfois venir nous ébouriffer les cheveux. Et elles puisent leur force dans la sororité du groupe ce que les hommes savent faire en faisant corps là où les femmes s'isolent dans de stupides rivalités. Comme un contrepoint à leur odyssée, Marion VERNOUX filme également la fille de l'une d'entre elles, Marie (jouée par LIO) qui essuie échec sur échec en ne se définissant que par rapport aux hommes, lesquels en prennent pour leur grade (de façon trop caricaturale à mon avis). Le quatuor du camping-car est dominé de la tête et des épaules par le duo formé par Bernadette LAFONT et Bulle OGIER qui jouent des soeurs que tout oppose: l'une est alcoolique et mène une vie désordonnée, l'autre est une bourgeoise guindée qui n'imagine même pas que son mari puisse la tromper. Toutes deux sont surtout des monstres sacrés de la nouvelle vague et lorsque Annie évoque la perte de sa fille de fiction, on ne peut s'empêcher de penser aux filles bien réelles que toutes deux ont perdu, Pauline LAFONT et Pascale OGIER. Grâce à leur abattage, à la musique de ARNO et à quelques moments inspirés, on ferme les yeux sur l'aspect quelque peu confus de la mise en scène.
Vu il y a des lustres, "Comment épouser un millionnaire" est typiquement un film de studio calibré pour le succès et qui n'arrive pas à la cheville de son modèle "Les Hommes préfèrent les blondes" (1953) de Howard HAWKS. Le prologue ennuyeux à mourir qui montre durant cinq bonnes minutes un orchestre jouer le thème principal du film sert à en mettre plein la vue avec le Cinémascope qui en était à ses débuts. A l'époque, ça devait faire son petit effet. Aujourd'hui, c'est kitsch à mort, à l'image du film lui-même qui en remet plusieurs couches en filmant New-York comme un dépliant touristique ou en faisant advenir une séquence de défilé de mode qui ralentit encore plus un rythme déjà poussif. Quant au scénario, il est anémique: trois mannequins fauchées s'installent grâce à une combine dans un luxueux appartement qui doit servir d'attrape-millionnaire. Mais aucune ne va finir avec le richard convoité. Aucun des neuf personnages (les trois filles, les trois millionnaires et les trois fiancés "fauchés") n'est véritablement développé et l'intrigue comme la mise en scène est répétitive et sans relief. Ne parlons même pas de la vision vénale des femmes que l'histoire véhicule. Le seul intérêt du film réside dans la présence de Lauren BACALL et de Marilyn MONROE (la troisième, l'ex pin-up Betty GRABLE est parfaitement oubliable). La première est classieuse, la deuxième, craquante et on sourit une ou deux fois lorsque les dialogues font allusion à Humphrey BOGART ou à "Diamonds are a girl's best friend" mais c'est à peu près tout.
"Les mauvais garçons", César du meilleur court-métrage en 2022 sort du lot pour au moins trois raisons qui font que l'on a envie de voir son réalisateur, Elie GIRARD passer au format long (ce qui est en cours de concrétisation):
- La beauté de la photographie, métier initial de Elie GIRARD. On est dans un quasi huis-clos, l'intérieur d'un kebab, les "1001 nuits", filmé en plan fixe et de nuit ce qui joue beaucoup dans l'atmosphère introspective et mélancolique du film.
- La présence de Raphael QUENARD dans l'un des rôles principaux (son partenaire, Aurelien GABRIELLI est excellent lui aussi).
- Une thématique universelle traitée certes du point de vue masculin mais qui peut tout autant concerner les "Bande de filles" (2014): le temps qui passe et défait les amitiés les plus fusionnelles à la façon du clip de Jean-Jacques Goldman, "Pas toi". Lorsque Victor, le pote de lycée de Cyprien et Guillaume leur annonce qu'il va être père et disparaît de leur vie, ces deux derniers se retrouvent plongés dans une crise existentielle. 40 minutes à réfléchir à ce qui a bien pu dysfonctionner pour qu'à trente ans passés ils se retrouvent aussi seuls. Le choc de voir leur ami construire sa famille les oblige à regarder en face le désastre de leur propre vie sentimentale. Non sans humour certes car leurs déboires ont quelque chose de comique et de pathétique à la fois. Elie GIRARD ne cherche pas à enjoliver et montre la déprime et l'angoisse qui résultent d'une telle situation. Mais aussi le réconfort d'avoir quelqu'un avec qui partager son intimité.
A la fin de sa carrière, Yasujiro OZU s'est lancé dans des auto-remake de ses films des années 30. "Bonjour" réactualise ainsi "Gosses de Tokyo" (1932). Sur un plan technologique tout d'abord, le film est parlant et en couleurs contrairement à son prédécesseur. Et sur le plan thématique, il s'agit de mettre à jour la tension entre les permanences (des codes rigides de la société japonaise) et les mutations (introduites par la modernité) qui traversaient déjà "Gosses de Tokyo". A la fin des années cinquante, le Japon connaît son second miracle économique et à l'image de l'Europe de l'ouest, entre dans la société de consommation avec quelques équipements emblématiques dont deux sont au coeur du film de Yasujiro OZU: le lave-linge et la télévision. Le réalisateur montre comment la possession (ou non) de ces biens cristallise les conflits entre voisins et entre générations vivant sous le même toit. Et il le fait d'une manière qui rappelle énormément un autre cinéaste ayant accompagné les mutations économiques et sociales des 30 Glorieuses dans son propre pays (et je jure que cette comparaison m'est venue spontanément en regardant le film d'Ozu): Jacques TATI dans "Mon oncle" (1957). Même choc des cultures dans le paysage urbain, dans les tenues vestimentaires, dans le langage verbal (transformé en verbiage) et corporel (bruitages inclus dont l'un rappelle le klaxon d'un certain vélo) et bien entendu dans les valeurs qui les accompagnent. Même tonalité douce-amère "mélancomique", même science du cadrage et de la profondeur de champ, même petite musique allègre et sautillante. En lieu et place de Hulot, deux garnements bien décidés à piétiner la bienséance pour obtenir une télévision et la fameuse signature Ozu des plans à hauteur de tatami qui épouse leur regard. Si l'objet de leur grève de la parole paraît bien futile, leur rébellion déstabilise les conventions sociales sur lesquelles est bâtie la communauté, créant des quiproquos à la fois hilarants et cruels tant ils éclairent la vacuité de l'existence des adultes, et spécifiquement des femmes au foyer japonaises. D'ailleurs les enfants remettent en question l'utilité même des paroles creuses servant de lubrifiant social telles que "Il fait beau". On remarquera que leur principal allié est un voisin toujours éméché, l'alcool desserrant le carcan dans lequel sont enfermés les corps des japonais. Comme dans "Mon voisin Totoro" (1988) ou dans "Le Tombeau des lucioles" (1988), on remarque la très grande finesse dans l'approche de l'enfance. La fratrie se compose d'un "grand" et d'un "petit" pour qui l'aîné est un modèle et qui est absolument craquant avec sa bouille ronde et ses "I love you" issus des cours d'anglais, autre signe de l'influence occidentale en marche.
Un des rares films du duo Eric TOLEDANO et Olivier NAKACHE que je n'avais pas encore vu, "Nos jours heureux" est la genèse de plusieurs de leurs films ultérieurs sur le vivre-ensemble. La gestion de la diversité par un ou plusieurs "chefs de troupe" quelque peu dépassés est en effet notamment le sujet de deux de leurs meilleurs films, "Le Sens de la fete" (2016) et "Hors Normes" (2019). "Nos jours heureux" bien que moins ambitieux les a fait connaître et est devenu leur premier film culte. Basé sur leur court-métrage "Ces jours heureux", il s'inspire également de leur expérience d'animateurs de colonies de vacances. Une situation que beaucoup de gens ont vécu et qui a donc une capacité de résonance universelle. Et ce d'autant mieux que le talent des deux réalisateurs pour filmer la diversité et l'universalité s'y exprime. Enfants et adultes sont confrontés aux mêmes problèmes (se séparer de la famille, trouver sa place et s'affirmer, faire des rencontres et séduire etc.) Alors certes, on est dans un feel good movie où "tout le monde il est beau, tout le monde il est gentil" et c'est incontestablement une limite par rapport à un film coup de poing comme "La Meilleure facon de marcher" (1976). Il n'y a pas non plus les nuances de tonalité à l'intérieur des scènes qui signent leurs métrages à partir de "Intouchables" (2011). Mais on suit avec plaisir Vincent, le directeur de colonie adulescent joué par Jean-Paul ROUVE et ses collègues pas plus matures que lui (et peu professionnels, un thème que l'on retrouve dans "Le Sens de la fete") (2016) ainsi que des jeunes bien écrits et très bien choisis. Et dans la scène la plus drôle du film où tout le monde se retrouve confronté aux inspecteurs sanitaires, soit à de "vrais" adultes, on a vite fait de choisir son camp!
Pas besoin de comprendre les mathématiques pour apprécier "Le théorème de Marguerite" dont la principale qualité est d'offrir un beau portrait de femme écrit avec une rigueur "mathématique". En effet du début à la fin du film, on s'amuse et on s'étonne du fonctionnement singulier de la jeune femme, brillante étudiante passionnée et obsédée par les mathématiques qui se moque de la bienséance, des codes sociaux, des hiérarchies et des règlements, allant droit au but dans toutes les situations de la vie. On pourrait la croire inadaptée avec ses échecs successifs (démission de l'ENS, exclusion d'une formation à la suite de critiques sur la conception d'un sondage, licenciement d'un boulot alimentaire où elle a jugé une décision illogique, difficultés de communication avec sa colocataire au tempérament opposé au sien et son partenaire de recherches avec lequel elle découvre l'amour), mais avec son tempérament tourné vers la résolution efficace des problèmes, elle parvient à chaque fois à rebondir comme lorsqu'elle a l'idée de payer le loyer de sa colocation dans le quartier chinois de Paris à coups de parties de mah-jong où elle peut appliquer concrètement ses talents de matheuse. On remarque également que si sa franchise et son côté introverti heurte souvent son entourage, il s'agit de quelqu'un d'intègre qui ne supporte pas le comportement ambigu de son directeur de thèse (Jean-Pierre DARROUSSIN) qui semble bien plus se positionner en concurrent manipulateur qu'en soutien protecteur. Bref on aura reconnu nombre de traits HPI (haut potentiel intellectuel) et autistiques chez Marguerite -son obsession pour la résolution de la conjecture de Goldbach par exemple- sans que pour autant cela soit appuyé et sans que cela ne l'empêche de faire son chemin dans la société ce qui correspond aux avancées de la recherche en ce domaine (avec les nuances des troubles du spectre autistiques ou TSA). Les autistes raisonnent souvent en images et la traduction visuelle de sa pensée dans le film est très réussie avec des formules mathématiques qui se déploient dans tout son appartement comme une forêt vierge. Dans le rôle, Ella RUMPF (découverte dans "Grave" (2016) de Julia DUCOURNAU) est excellente.
On regrettera cependant un scénario initiatique balisé qui se déroule comme un programme un peu trop bien huilé. Ce n'est pas parce que le fonctionnement de Marguerite ressemble à celui d'un robot qu'elle en est un et qu'elle peut tout maîtriser ou bien n'avoir jamais de doutes. Par ailleurs ses relations qu'elle ne cesse de malmener effacent l'ardoise avec une facilité trop déconcertante pour être crédibles. C'est particulièrement vrai de sa relation amoureuse. La "success story" que s'avère être finalement le film neutralise en partie ce que le portrait de Marguerite peut avoir d'original.
Mi satire politico-médiatique, mi fable philosophique, "Second tour" est moins abouti que le précédent film de Albert DUPONTEL, "Adieu les cons" au niveau du rythme et de l'écriture des personnages (pas toujours bien définis ou bien manquant de crédibilité). Néanmoins, il ne manque pas de sel, alliant sens de l'observation et esprit critique. Ainsi le duo de journalistes mis au placard formé par Mlle Pove (Cecile de FRANCE) et Gus (Nicolas MARIE) au langage délicieusement incorrect leur vaut trois scènes de recadrage avec leur supérieure pète-sec où le comique de répétition joue à plein. La parodie de BFMTV avec ses premiers de la classe tête à baffes est tout aussi drôle avec ce gimmick final en forme de ouf de soulagement sur la stabilité de la bourse en dépit des rebondissements de la campagne électorale ("business as usual"). Les petits détails qui font mouche comme l'attitude du journaliste politique en coulisses qui est impoli envers sa maquilleuse et envers le candidat qu'il interroge sans écouter sa réponse donne un aperçu plus efficace de la crise démocratique que nous traversons que tous les discours. Mais l'objectif de Albert DUPONTEL n'est pas seulement le cassage en règle du système. Il propose une alternative et la phrase d'incipit qui ouvre le film "pour changer le système il faut appartenir au système" se concrétise dans le fait que le candidat favori pour la présidentielle, un clone de Macron joué par Albert DUPONTEL n'est pas ce qu'il paraît. Il est double, à tous les sens du mot. C'est le dévoilement de son secret qui amène le récit du côté de la fable, en rendant hommage au passage à deux films sortis quarante-quatre ans plus tôt: "La Gueule de l'autre" (1979) et "Bienvenue Mister Chance" (1979). Comme dans le film de Hal ASHBY, un "idiot du village" remet une société à la dérive d'aplomb. Et en ces temps de désastre environnemental, le fait qu'il soit jardinier (apiculteur plus exactement) n'a contrairement à lui rien d'innocent.
C'est avec un grand plaisir que j'ai découvert le premier film de Jean-Paul RAPPENEAU qui a bénéficié d'une remarquable conjugaison de talents (Alain CAVALIER et Claude SAUTET au scénario, Michel LEGRAND à la musique, Pierre LHOMME à la photographie sans parler du casting trois étoiles) sans que pour autant il se noie dedans. En effet on retrouve dans cette pétillante comédie le sens du rythme et du mouvement du réalisateur de "Cyrano de Bergerac" (1990). "La vie de château" transpose dans un contexte franco-français la comédie hollywoodienne sophistiquée à la Ernst LUBITSCH (on pense à "To Be or Not to Be" (1942) forcément, vu le thème) et la screwball comédie à la Howard HAWKS. Outre son rythme trépidant, "La vie de château" est une comédie du remariage tout à fait dans la lignée de celles analysées dans le livre de Stanley Cavell. Une comédie dans laquelle un homme plutôt pantouflard joué par Philippe NOIRET va devoir sortir de sa réserve (au propre et au figuré) pour reconquérir sa femme (Catherine DENEUVE) qui s'ennuie et qui est convoitée à la fois par un héros de la résistance et par un officier allemand. Le film est en effet précurseur en osant traiter la seconde guerre mondiale - sujet encore sensible au milieu des années 60 - sur le ton de la comédie, près d'un an avant "La Grande vadrouille" (1966)*. Bien aidé par des seconds rôles truculents (Pierre BRASSEUR dans le rôle du beau-père fermier et Mary MARQUET dans celui de la mère châtelaine sont irrésistibles), le film raconte la métamorphose d'un planqué en héros au moment crucial du débarquement anglo-américain du 6 juin 1944. Un rôle qui en préfigure un autre pour Philippe NOIRET mais sur un mode tragique: celui de Julien Dandieu dans "Le Vieux fusil" (1975). Quant à Catherine DENEUVE, s'il peut paraître étonnant de la voir jouer dans un registre convenant mieux a priori à sa soeur, Francoise DORLEAC (qui avait été d'abord pressentie), elle a pu mettre en avant une élégance naturelle et un débit mitraillette n'ayant rien à envier à une Rosalind RUSSELL. Le générique de début, montage de photos du visage ou de parties du visage de l'actrice par Walerian BOROWCZYK l'élève déjà au rang de mythe alors qu'elle n'en était qu'au début de sa carrière.
* Les deux films sont sortis la même année mais "La vie de château" en janvier et "La grande vadrouille" en décembre.
J'attends toujours avec impatience les films du tandem Philippe TOLEDANO et Olivier NAKACHE dont j'ai beaucoup aimé également les deux saisons de la série "En Therapie" (2020). Je n'ai toutefois pas été complètement convaincue par "Une année difficile". Non que le film soit dépourvu de bonne idées. Elles ne manquent pas. En particulier l'idée de filmer au ralenti sur "La valse à mille temps" de Jacques BREL des gens se battant comme des chiens pour s'accaparer les produits en promotion lors du "Black Friday" donne un reflet peu reluisant de la société consumériste addict jusqu'au cou aux biens matériels. A l'image de l'hilarant personnage joué par Mathieu AMALRIC qui élabore toutes sortes de stratagèmes pour tenter d'entrer au casino où il est pourtant interdit de jeu. Néanmoins, assez rapidement le scénario bifurque vers une autre thématique, beaucoup plus sociale. Ainsi le personnage de Jonathan COHEN explique avoir sombré dans la spirale du surendettement pour "être à la hauteur" de son épouse, d'un milieu social plus élevé que lui. Comme un écho à sa situation, le travailleur précaire, SDF et surendetté joué par Pio MARMAI qui vit de combines tombe sous le charme d'une fille de très bonne famille (Noemie MERLANT) qui par esprit de rébellion a adopté les idéaux décroissants et vit dans un grand appartement bourgeois presque vide. Mieux encore, elle est la figure de proue d'un mouvement écologiste inspiré de "Extinction Rébellion" auquel les deux compères adhèrent surtout par opportunisme (du moins au début) et dont les membres se donnent des surnoms pour échapper aux assignations sociales. Le problème, outre que les personnages de Pio MARMAI et de Jonathan COHEN semblent trop légers et propres sur eux pour les rôles qu'ils sont censés incarner, est le manque de liant entre toutes les thématiques abordées. L'écologie (et son mal moderne, l'éco-anxiété) est traitée de façon superficielle et la fin est convenue. Rien de bien visionnaire donc dans cette confrontation entre "la fin du monde" et la "fin du mois". Un peu plus de hauteur de vue n'aurait pas fait de mal.
"Dumb money" est basé sur une histoire vraie, l'affaire GameStop survenue en 2021 et qui avait affolé les marchés boursiers. En pleine période du covid, la bourse américaine s'est ouverte aux petits investisseurs en leur permettant d'acheter ou de revendre des actions à l'aide d'une application nommée "Robinhood" (rien que ce titre en dit long) qui ne prélève pas de commission. Un analyste financier au look de pirate du web, Keith Gill également surnommé Roaring Kitty et DeepFuckingValue a alors misé sur les actions de la maison-mère de Micromania alias la chaîne de magasins de jeux vidéos GameStop pour contrarier les manoeuvres d'un fond spéculatif américain qui pariait sur la baisse des actions de l'enseigne. Grâce à son forum spécialisé sur les réseaux sociaux, il a réussi à entraîner ses followers à en faire de même, faisant flamber temporairement le cours des actions de GameStop et enrichissant les pauvres tout en dégarnissant les riches. Bref l'éternelle histoire du pot de terre contre le pot de fer ou de David contre Goliath. Une sorte d'écho lointain de l'appel lancé par Eric Cantona en 2010 à faire la révolution en retirant l'argent des banques pour que le système s'écroule. Bien qu'aux USA, l'idée ne soit pas de détruire le système capitaliste mais de remettre sur le devant de la scène le rêve américain dans toute sa splendeur (réussite à partir de rien, liberté d'entreprendre etc.)
Le film de Craig GILLESPIE (réalisateur de "Moi, Tonya") (2017) essaye de transformer l'aridité de l'histoire en comédie satirique enlevée. Il n'y parvient pas tout à fait. Entre le jargon financier indigeste que le spectateur doit avaler sans aucune pédagogie et un style visuel frénétique qui donne mal à la tête et m'a rappelé "Don't look up : Deni cosmique" (2021), on est tout de même assez souvent largué et essoré. Pas tout à fait quand même. Les grandes lignes de l'intrigue du combat des petits contre les gros sont universelles et Paul DANO dans le rôle de Keith Gill excelle à jouer les leaders charismatiques d'opposition au système.
Analyse de classiques et de films récents par une passionnée du 7eme art. Mes goûts sont éclectiques, allant de la nouvelle vague française au cinéma japonais (animation incluse) en passant par l'expressionnisme allemand et ses héritiers et le cinéma américain des studios d'Hollywood aux indépendants.