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Dallas Buyers Club

Publié le par Rosalie210

Jean-Marc Vallée (2013)

Dallas Buyers Club

De Jean-Marc Vallée, disparu à 58 ans le 25 décembre 2021, je n'avais vu que C.R.A.Z.Y. dont j'ai gardé un souvenir trop vague pour pouvoir en parler mais que je reverrai si j'en ai l'occasion. En attendant, j'ai choisi pour lui rendre hommage son film le plus connu et reconnu, notamment pour les performances de ses deux acteurs principaux, Matthew McConaughey et Jared Leto justement récompensées aux Oscar et aux Golden Globe 2014.

Inspiré d'une histoire vraie, le film met en scène un personnage type de cow-boy texan bas du front adepte de pratiques à risques, certaines avouables socialement car conformes à son image de rustre hyper-viril (la pratique du rodéo) et d'autres, non. C'est ce que montre le générique: d'un côté de la barrière, la mise en scène de la virilité brute de décoffrage. De l'autre, façon backdoor de boîte de nuit, les partouzes bisexuelles sauvages non protégées et non assumées (dans le noir, dans le tas et aussitôt fait, aussitôt oublié)*. Sauf qu'on est dans les années 80 c'est à dire à l'ère de l'expansion de l'épidémie de SIDA qui ne tarde pas à être détecté chez Ron Woodrof. Son secret révélé, il est rejeté par ses pairs qui l'assimilent à un homosexuel et les médecins ne lui prédisent qu'un mois à vivre. C'est là que le film commence vraiment. Car face à l'adversité, Ron a deux choix possibles: baisser les bras ou bien se battre. Il choisit évidemment la deuxième solution et son caractère rebelle, teigneux, buté va s'avérer un allié de poids dans cette lutte contre la maladie mais surtout contre le carcan administratif et médical qui veut l'enfermer dans un protocole expérimental destiné à se servir de lui et de ses compagnons d'infortune comme cobayes pour obtenir le monopole des juteux profits liés au traitement de la maladie. Tel un animal poussé dans ses derniers retranchements, Ron Woodrof décide de rendre coup pour coup au Big Business des laboratoires pharmaceutiques US avec l'énergie du désespoir en montant sa propre officine médicale et ses propres traitements médicamenteux obtenus à l'étranger en profitant d'un vide juridique qui ne tardera pas à être comblé. Mais cela n'empêchera pas Ron de continuer son combat, un combat pour sa propre survie, de plus en plus soutenu par tous ceux pour qui ces traitements constituent un espoir en terme de durée et de qualité de vie. Matthew McConaughey donne l'apparence d'un corps qui se consume pour son combat (d'autant que le réalisateur nous fait partager ses sensations de vertige et de maux de tête) et parallèlement d'une âme qui s'élève au fur et à mesure qu'il accepte à ses côtés et comme ses égaux des homosexuels et des femmes. Parmi eux, Rayon (Jared Leto), un travesti toxicomane que l'on découvre issu d'un milieu aisé devient son associé et son ami, leur "amour vache" constitue un des meilleurs ressorts du film que ce soit en terme d'humour ou d'émotion. Mais le symbole le plus significatif est un tableau fleuri qui est la seule chose que Ron emporte avec lui quand il est expulsé. Il l'offre plus tard au docteur Eve Sacks (Jennifer Garner) qui le soutient en lui expliquant qu'il lui vient de sa mère qui était issue de la communauté gitane.

* Le parallèle avec l'acteur Rock Hudson, souligné au début du film n'est évidemment pas innocent. Celui-ci a entretenu toute sa vie une image de séducteur hétérosexuel, devant et derrière l'écran, allant jusqu'à se marier alors qu'il était homosexuel et adepte de relations multiples (il avait d'ailleurs fait l'objet d'un chantage avec des photos compromettantes que les studios avaient réussi à étouffer). Il a fini par révéler qu'il était atteint du sida en 1985. 

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Le Pouvoir du Chien (The Power of the Dog)

Publié le par Rosalie210

Jane Campion (2021)

Le Pouvoir du Chien (The Power of the Dog)

"La faiblesse est un crime" peut-on lire sur la page de couverture d'une revue intitulée "Physical culture" et peuplée de photos d'hommes nus. On est environ à la moitié du film et Peter, l'étudiant en chirurgie efféminé qui est la risée de tous les cow-boys du ranch où vit sa mère vient de découvrir la cachette -et le secret- du pire d'entre eux, Phil (Benedict Cumberbatch, interprète idéal des mâles ambigus et névrosés). Celui-ci se baigne nu non loin de là juste après avoir fait glisser sur son corps un foulard ayant appartenu à son mentor, Bronco Henry (chez Jane Campion, le sens tactile est un moyen vital d'interaction avec le monde sensible). Seul, évidemment. Sous le regard des autres, Phil a revêtu depuis longtemps le costume du mâle alpha en recouvrant son passé étudiant mais aussi son homosexualité sous une bonne couche de crasse et de rudesse pour ne pas dire de cruauté. Empoignant les testicules des animaux à castrer à pleine main, chevauchant pendant des heures, effectuant les travaux les plus durs, tout est bon pour mettre en scène sa virilité. Or on le sait, surjouer à ce point la virilité et écraser ceux qui la mettent en danger est un signe de trouble identitaire. Le frère de Phil, beaucoup plus doux et policé fait entrer la discorde au ranch lorsqu'il se marie avec Rose (Kirsten Dunst), la mère de Peter. Phil qui ne supporte pas sa présence décide de l'anéantir et il est en voie d'y réussir lorsque Peter découvre son secret. Peter et lui développent alors une relation semblable à celle qu'a vécu Phil avec Bronco Henry à ceci près que Peter n'a qu'une idée en tête: sauver sa mère des griffes du prédateur. Et pour cela il a les armes de son savoir mais aussi une dureté forgée au contact des humiliations subies. Il sait se montrer cruel et impitoyable avec les êtres vivants et vis à vis de Phil, il fait figure d'ange de la mort. Parmi les scènes les plus fortes du film, il y a celle, très sensuelle forcément où les deux hommes échangent une cigarette c'est à dire mélangent leurs fluides. Sauf que Peter a empoisonné ceux de Phil avec le cuir d'une vache malade: le plan où celui-ci le saisit à pleine main dans l'eau alors qu'il a une profonde plaie qui saigne est lourd de signification.

Le film de Jane Campion est une déconstruction du western qui fait quelque peu penser au "Secret de Brokeback Mountain" ou si on remonte plus loin au "Reflets dans un oeil d'or" de John Huston (qui n'est pas un western mais étudie dans un milieu ultra-viril, celui de l'armée le désir refoulé du major Penderton pour le soldat Williams, lequel aime chevaucher nu dans la forêt). Offrant des scènes sublimes de grands espaces (même si son film est aussi un huis-clos étouffant), il est dommage qu'il ne soit visible que sur petit écran. Mais Netflix a eu le mérite de permettre à Jane Campion de réaliser enfin un long-métrage, 12 ans après "Bright Star" dont l'originalité par rapport aux autres est de centrer l'histoire sur des personnages masculins ou plutôt sur la féminité refoulée dans les comportements masculins toxiques plutôt que de montrer le monde par les yeux d'une femme. Et celui-ci est une réussite.

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Madres Paralelas

Publié le par Rosalie210

Pedro Almodovar (2021)

Madres Paralelas

S'il fallait résumer d'une seule phrase le dernier film de Pedro Almodovar, ce serait celle-ci: les femmes sont à la fois les dépositaires du passé et celles qui garantissent l'avenir. Et cela vaut aussi bien à l'échelle de la généalogie familiale qu'à celle de l'histoire d'un pays. Pedro Almodovar n'établit pas seulement en effet un parallèle entre deux mères d'âge différent dont les bébés ont été échangés à la naissance (intrigue téléphonée qu'on a déjà vu dans plusieurs films). Il va beaucoup plus loin en montrant comment les cicatrices non refermées du franquisme pèsent sur des descendants étrangement absents. En effet ce qui frappe dans ce film, c'est la quasi absence des hommes: disparus au cours de la guerre civile, ils semblent ne pas avoir véritablement réapparus, sinon sur des photos. Le film s'ouvre d'ailleurs sur un shooting photo durant lequel Janis (Penelope Cruz, charismatique comme dans tous les films qu'elle a tourné avec Pedro Almodovar) mitraille Arturo l'historien qui devient également le père de son bébé. Elle exprime ainsi son désir (on remarque au passage l'inversion des rôles genrés dans ce type de situation par rapport à la norme, cela mériterait d'ailleurs une rétrospective) mais aussi le fait qu'il est voué comme l'arrière-grand-père qu'elle recherche à disparaître parce qu'il est marié mais peut-être et surtout parce qu'il ne se reconnaît pas dans le bébé (et pour cause!). Janis l'efface alors de sa vie et décide de garder le secret lorsqu'elle découvre qu'elle n'est pas la mère biologique de l'enfant qu'elle élève. Cependant elle ne peut y parvenir durablement. Car tout le film est construit ainsi comme un relevé d'indices, de traces permettant de reconstituer une lignée mise à mal. Même si ça lui fait mal, Janis ne peut pas d'un côté chercher à faire la lumière et de l'autre, la fuir. Et on voit bien les dysfonctionnements que provoque son silence vis à vis d'Arturo qui l'aide à clarifier son passé et qui donc a un rôle à jouer dans son avenir, vis à vis d'Ana, l'autre mère qui ne sait pas quelle place occuper (amie, nounou, amante) sans parler de l'enfant biologique de Janis, quasiment mort-né. Les parallèles que tissent Pedro Almodovar lient ainsi inextricablement passé et futur et passent par le ventre des femmes mais aussi par leur rôle de gardiennes d'une mémoire longtemps occultée et enfin exhumée*.

* Le film fait référence à la loi sur la mémoire historique de 2007 qui n'allait pas assez loin dans l'engagement du gouvernement en faveur de la réparation des torts faits aux victimes du franquisme par souci de ménager une société encore très divisée sur la question. Ainsi la recherche et l'ouverture des fosses communes dans lesquelles 130 mille personnes ont été ensevelies dépendait des associations privées et les subventions publiques ont été coupées quand la droite est repassée au pouvoir. Une nouvelle loi dite de la mémoire démocratique est en projet pour le début de l'année 2022. Elle condamne sans ambiguïté le coup d'Etat de 1936 et débloque les subventions publiques pour cartographier et ouvrir les 3000 fosses communes du pays ainsi que pour identifier les corps en constituant une banque ADN.  Mais elle suscite une forte résistance de la droite et de l'extrême-droite.

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Plaire, aimer et courir vite

Publié le par Rosalie210

Christophe Honoré (2018)

Plaire, aimer et courir vite

J'avais juré de ne plus jamais remettre les pieds dans le cinéma de Christophe Honoré, l'un des réalisateurs parmi les plus affectés du cinéma français actuel dont j'ai détesté chacun des films que j'ai pu voir. Mais le passage de "Plaire, aimer et courir vite" sur Arte m'a donné quand même envie de le voir à cause des deux acteurs principaux que j'aime beaucoup: Pierre Deladonchamps et Vincent Lacoste. Le fait est qu'ils sont impeccables, chacun dans leur registre et qu'ils vont bien ensemble. Il y a aussi incontestablement un caractère intimiste et personnel dans ce film qui convoque les fantômes d'un grand nombre d'artistes morts du sida (ou trop jeunes et admirés par Christophe Honoré) dans les années 80 qui seraient autant de "Jacques" (l'écrivain déclinant joué par Pierre Deladonchamps) que pourrait enfin rencontrer le jeune "Arthur" (l'étudiant breton joué par Vincent Lacoste, étoile montante vraisemblablement un double de Christophe Honoré au même âge). La maîtrise technique (cadrages, lumière, mouvements de caméra) se combine à une bande sonore magnifique. J'ai beaucoup écouté Cocteau Twins à une époque, Ariodante à une autre et la scène qui l'accompagne est particulièrement belle. Quand aux "gens qui doutent" de Anne Sylvestre, c'est une chanson sublime et elle accompagne également une très belle scène intimiste dans laquelle Jacques est en proie à des sentiments contradictoires qui le font souffrir.

Néanmoins ce qui me déplaît dans le cinéma de Christophe Honoré n'a pas disparu comme par magie. En particulier le côté verbeux-prétentieux. Autant les scènes musicales ou simplement chorégraphiées sont réussies, autant les scènes dialoguées brisent le charme par leur caractère souvent péremptoire, poseur, ampoulé et condescendant. C'est censé refléter le caractère de diva du dandy qu'est Jacques (et son métier, écrivain) sauf que cela revient de film en film comme une signature, celle de Christophe Honoré. Ainsi grâce à lui, on saura que manger des BN au petit déjeuner c'est un truc de plouc (ça c'est dans "Métamorphoses"), que les hôtels bon marché puent l'eau de javel (ça c'est dans "Plaire, aimer et courir vite") et que nous, pauvres spectateurs de la plèbe ne sommes "pas des Lumières" (ça c'est dans "Les Malheurs de Sophie"). L'indélicatesse paradoxale d'un monsieur se définissant comme raffiné et érudit se révèle de temps à autre ainsi, au détour de ces petites phrases méprisantes, à l'image d'un personnage écrit pour une partition de mélodrame mais dont l'ego surdimensionné et le caractère dominateur font obstacle à toute forme d'empathie, particulièrement lorsqu'il prend la parole. Goujat avec les femmes, classant ses amants en catégories comme des étalons de concours (mais à partir de références littéraires, histoire d'étaler sa science en prime), se livrant à des ébats sexuels excluant son meilleur ami devenu trop vieux (Denis Podalydès, remarquable, comme ses deux partenaires)*, se querellant avec un ex en phase terminale devant son fils de 9 ans et faisant la leçon à tout le monde, Jacques a beau être gay et malade, jamais Christophe Honoré ne laisse ce versant prendre le dessus sur celui du mâle dominant version intello-bobo-macho qui contrôle et manipule à qui mieux mieux. Heureusement que Pierre Deladonchamps (ultra talentueux, je ne le répèterai jamais assez!) parvient grâce à son jeu sensible à faire passer un peu d'humanité dans le personnage. Christophe Honoré devrait par exemple apprendre outre la simplicité et l'humilité l'art du silence, comme Ada dans "La Leçon de Piano" à qui il rend un drôle d'hommage dont on ne sait si c'est de l'art ou du cochon ^^.

* L'affiche du film où l'on voit trois hommes hilares dans un lit est purement et simplement MENSONGERE. Et j'ai en horreur le mensonge.

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Happy Together

Publié le par Rosalie210

Wong Kar-Wai (1997)

Happy Together

Qui connaît un peu le cinéma de WONG Kar-Wai sait que le titre de son film ne peut être qu'une antiphrase. C'est l'impossibilité de la relation amoureuse qui est explorée dans "Happy Together", film qui joue admirablement tel l'accordéon argentin sur une alternance entre grands espaces dans lesquels les liens se dissolvent et à l'inverse la promiscuité étouffante du huis-clos d'un appartement délabré. "Ni avec toi ni sans toi" est la devise qui semble guider les agissements de Ho (Leslie CHEUNG) et de Fai (Tony LEUNG Chiu Wai), couple gay composé de deux caractères antinomiques qui ne cessent de se retrouver et de se déchirer. "Happy Together" fonctionne comme une danse de tango entre les deux pôles opposés de la planète, Hong-Kong et Buenos Aires. Pourtant, l'aspect le plus réussi du film ne réside pas dans la dramatisation mais dans l'exploration de l'intimité de ce couple au travers de gestes banals du quotidien criants de vérité qui m'ont fait penser à certains passages de "Mala Noche" (1985). L'ébauche de relation entre Fai et Chang (Chen CHANG) fondée sur le non-dit, les rencontres manquées mais aussi le rêve d'un ailleurs m'a fait penser au film le plus connu de WONG Kar-Wai, "In the Mood for Love" (2000) sans parler d'une esthétique très semblable. Néanmoins en dépit de son prix de la mise en scène à Cannes, j'ai trouvé qu'il y avait quelques longueurs dans "Happy Together" et que le fait que WONG Kar-Wai travaille sans scénario préétabli s'y faisait davantage ressentir.

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Hit and Miss

Publié le par Rosalie210

Paul Abbott (2012)

Hit and Miss

"Hit and Miss" est une mini-série de six épisodes de 45 minutes créée en 2012 par Paul Abbott avec Chloë Sevigny, (une adepte des rôles sulfureux) dans le rôle principal qui a été diffusée sur Canal + en 2013. Elle ne comporte qu'une seule saison bien que la première se termine sur un cliffhanger. C'est bien dommage car la série ne manque pas d'intérêt, notamment par les portraits de marginaux mis en scène.

Qui est Mia? Ce qui est sûr c'est que tout ce qui la concerne est fait de morceaux mal ajustés.

Son corps tout d'abord. Une scène montre le petit ami de Mia (très perturbé dans sa propre identité dès qu'il découvre celle de Mia) assemblant deux magazines, l'un avec un buste de femme et l'autre avec un entrejambe masculin. Quoi de mieux pour résumer la difficulté de vivre avec un corps transsexuel encore en chantier?

Les scènes où Mia se regarde dans un miroir sont révélatrices et toujours extrêmes que se soit pour sublimer son reflet ou pour le flageller ou lui cracher dessus.

Son histoire est à l'image de son corps: duale. Dans sa jeunesse et pour l'état civil, Mia est Ryan, le fils cadet d'une famille de forains qui l'ont rejetée quand Ryan a entamé sa transformation. Pour tous les autres, elle est Mia, personnage qui n'a aucune existence légale. 

Enfin il y a sa double vie ou plutôt sa vie coupée en deux. D'un côté, Mia est une tueuse à gages solitaire, sorte d'oiseau de nuit guettant sa proie avant de l'abattre froidement. Pratiquant cette activité à Manchester, elle navigue entre le café de son patron et son nid, un loft à l'état de hangar où elle dissimule la plus grande partie de son matériel.

De l'autre, Mia est le chef d'une famille recomposée de quatre enfants issus de trois pères différents et dont la mère est morte d'un cancer. Ils vivent dans une ferme isolée dans les environs de Manchester.

Cette famille est elle-même une sorte de patchwork rapiécé. Les deux aînés, Levi et Riley sans doute issus du même lit, sont des adolescents rebelles et un peu paumés. Ryan qui a 11 ans n'est autre que le fils biologique de Mia comme le souligne son prénom. Plusieurs scènes montrent qu'il est très perturbé par la mort de sa mère et par l'identité de son père. La plus jeune, Léonie s'est réfugiée dans un monde parallèle où sa mère est encore vivante.

En dépit de tous ses efforts, Mia ne parvient pas à cloisonner ses vies de façon étanche ce qui occasionne des drames. Riley tue son agresseur avec l'arme de Mia, Eddie, le patron de Mia, s'immisce dans la famille et prend Levi à son service sans que celui-ci ne se doute de la nature réelle de ses activités. La scène de fin pousse le drame de l'interpénétration des vies de Mia à son paroxysme.

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Ludwig, le crépuscule des Dieux (Ludwig)

Publié le par Rosalie210

Luchino Visconti (1972)

Ludwig, le crépuscule des Dieux (Ludwig)

Ludwig est le dernier volet de la trilogie allemande de Luchino VISCONTI après "Les Damnés" (1969) et "Mort à Venise" (1971) et il est encore plus dans la démesure puisqu'il dure dans sa version intégrale près de quatre heures! Le destin du roi Louis II de Bavière ne pouvait que fasciner le cinéaste de par son romantisme, sa soif d'absolu, son inadaptation au monde réel et enfin sa déchéance.Luchino VISCONTI offre le rôle à sa muse, Helmut BERGER qui fait une prestation habitée tandis que Romy SCHNEIDER reprend le rôle qui l'a rendu célèbre, celui d'Elisabeth d'Autriche pour mieux l'exorciser. En effet la vision qu'elle donne de l'impératrice, nettement plus sombre et tourmentée que dans les images d'Epinal mièvres des années cinquante en fait le parfait miroir féminin de Ludwig. Pas étonnant qu'elle soit la seule femme qui le fascine, la recherche du double étant chez lui une obsession ne pouvant l'entraîner que de déception en déception. Complètement inadapté aux attentes attachées à sa fonction et manifestement asocial, Ludwig rejette la guerre, la réalité du pouvoir et la conjugalité. Roi esthète profondément catholique (religion de la Bavière), il sublime son homosexualité dans la recherche éperdue de la beauté, que ce soit à travers la musique de Wagner dont il devient le mécène ou la construction de ses extravagants châteaux. Autant de folies ruineuses (et de fuites de la réalité) qui lui aliènent la confiance des élites du pays qui finissent par le déclarer fou et le destituer. De toutes façons, Ludwig découvre très tôt que les grandes décisions lui échappent étant donné qu'il n'est le roi que d'un confetti à côté de ses puissants voisins, l'Autriche-Hongrie et la Prusse. Tel un lapin traqué, Ludwig tente de fuir un destin qu'il n'a pas choisi mais celui-ci le rattrape et sa profonde solitude nourrie de désillusions rejaillit sur son apparence qui se dégrade: à quarante ans, celui-ci est devenu une épave dans des habits de prince. C'est la puissance de ce portrait intimiste allié à la magnificence du cadre et de la musique (Luchino VISCONTI est un grand esthète) qui fait toute la beauté du film, construit comme une enquête avec différents intervenants témoignant face caméra venant ponctuer le récit.

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Les Damnés (La caduta degli dei/Götterdämmerung)

Publié le par Rosalie210

Luchino Visconti (1969)

Les Damnés (La caduta degli dei/Götterdämmerung)

"Les Damnés", en VO "La Chute des Dieux" dans les forges de l'enfer est l'un des plus grands films de Luchino VISCONTI. Avec la puissance opératique qui le caractérise, le cinéaste croise l'Histoire, la tragédie antique et le théâtre shakespearien pour mettre en parallèle l'avènement du nazisme dont il explore les soubassements inavoués et l'autodestruction d'une famille d'Atrides germaniques, les von Essenbeck. Inspirés des magnats de la sidérurgie Krupp qui firent alliance avec Hitler parce qu'ils avaient tout à gagner de la remilitarisation de l'Allemagne (sans parler de plusieurs de ses membres qui devinrent SS), les Essenbeck symbolisent cette aristocratie décadente, fascinante et terrifiante dont Luchino VISCONTI lui-même issu de l'aristocratie s'est fait le peintre. "Les Damnés" est ainsi le premier volet d'une trilogie poursuivie avec "Mort à Venise" (1971) et "Ludwig, le crépuscule des Dieux" (1972) au titre wagnérien ô combien significatif ("La Chute des Dieux" s'en approchait déjà). La séquence quasi-inaugurale des "Damnés" dans laquelle Martin (Helmut BERGER) travesti en Marlene DIETRICH chante "Ein richtiger Mann" évoque tout autant "L Ange bleu" (1930) que le futur "Cabaret" (1972) de Bob FOSSE. Alors c'est quoi "Un homme, un vrai?" pour le nazisme dont on connaît le culte pour la virilité "aryenne"? A cette question, Visconti donne une réponse juste mais qui sent le souffre puisque son principal représentant dans le film, le cousin SS Aschenbach (Helmut GRIEM) décide justement de couronner ce Martin non seulement équivoque mais pervers et meurtrier. Le spectateur a tout le temps de frémir en découvrant ses penchants pédophiles et incestueux mais aussi de comprendre en quoi ceux-ci servent le nazisme. En effet comme tous les totalitarismes (et tous les systèmes fondés sur l'embrigadement), le nazisme a besoin de serviteurs fanatiques totalement contrôlables c'est à dire qui n'ont aucune limite et aucune attache autre qu'eux. Or Martin qui a des points communs avec Hamlet à travers sa haine pour sa mère Sophie (Ingrid THULIN) et l'amant de celle-ci, l'arriviste Friedrich (Dirk BOGARDE) mais aussi avec les perversions sexuelles des notables de "Salò ou les 120 jours de Sodome" (1975) et que sa soif de revanche achève de transformer en monstre passe l'essentiel du film à se déshumaniser et à se désaffilier pour mieux tomber entre les griffes des nazis dont le rapport trouble à l'homoérotisme est également très fouillé notamment lors de ce morceau de bravoure qu'est la nuit des longs couteaux. Le fait qu'en 2016, le metteur en scène Ivo van Hove ait transposé avec succès "Les Damnés" sur scène montre d'une part à quel point ce film reste pertinent (il est également cité dans d'autres films comme "Saint Laurent" (2014) dans lequel Helmut BERGER joue le grand couturier âgé) et à quel point il se prête particulièrement bien à une adaptation théâtrale. C'est même la meilleure façon de relier l'Antiquité, la période élisabéthaine, le grand siècle (époque de la fondation de la Comédie française dont les acteurs ont interprété les rôles dans la pièce) et l'époque contemporaine soit les moments clés de l'histoire du théâtre occidental.

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Mort à Venise (Morto a Venezia)

Publié le par Rosalie210

Luchino Visconti (1971)

Mort à Venise (Morto a Venezia)

L'un des films de ma vie, celui qui m'a fait découvrir en même temps Luchino VISCONTI, Dirk BOGARDE, Gustav Mahler et la ville de Venise. Le film est si indissociable du lieu que lorsque j'ai visité Venise, j'ai dormi au Lido, je me suis promenée sur sa longue plage bordant l'Adriatique et je suis passée devant le grand Hôtel des Bains qui était alors encore en activité et qui abrite une bonne part de l'intrigue du film. Cet hôtel de style art nouveau avait été construit pour accueillir les riches touristes internationaux de la Belle Epoque et c'est exactement cette période qui est reconstituée à la perfection par Luchino VISCONTI, en référence au roman d'origine de Thomas Mann. On croirait vraiment que le film a été tourné en 1911, pas seulement par son esthétique, aussi raffinée et minutieuse soit-elle mais aussi par d'infimes détails qui nous renseignent sur les moeurs de l'époque. Il est frappant de constater que sur la plage, seuls les jeunes garçons sont libres de leur corps, libres de le déployer dans l'espace: ils peuvent se battre, se salir, se baigner comme le ferait n'importe quel gamin d'aujourd'hui. En revanche les fillettes et les adultes se comportent à la plage comme s'ils étaient dans le salon de l'hôtel, habillés de pied en cap, engoncés dans leurs habits et effectuant le moins de mouvements possibles, la plage n'étant qu'une scène sociale parmi d'autres. Par ailleurs la primauté des garçons sur les filles s'observe par le fait que Tadzio (Bjorn ANDRESEN) se comporte en petit roi dans sa famille exclusivement composée de femmes et de filles. Non seulement il peut aller et venir quand ça lui chante mais lorsqu'il exprime un désir, celui-ci est aussitôt satisfait. On voit l'une de ses soeurs se lever et lui laisser la place sur le transat dès qu'il s'en approche, comme s'il s'agissait d'un réflexe conditionné.

Mais en explorant cette facette du film qui participe à sa beauté, sa richesse et à son authenticité, je ne dis pas l'essentiel, à savoir qu'on à affaire à une oeuvre sublime, une oeuvre mystique. On touche ici à la perfection, à la grâce pure. Evidemment, ce n'est pas un film facile, il faut entrer dedans, se laisser porter par la beauté des images en symbiose avec la musique (utilisée de façon aussi expressive que chez Stanley KUBRICK ce qui la rend inoubliable). "Mort à Venise" se regarde et s'écoute religieusement, oui c'est le mot. C'est un film avare de mots mais profondément lyrique qui parvient à faire se toucher l'amour et la mort comme peu de films y sont parvenus. Toute l'ambivalence de Venise, sa beauté mais aussi son caractère putride ressort en parallèle de la relation qui se noue par delà les mots entre un adolescent polonais beau comme un dieu grec et un homme vieillissant et malade qui a déjà un pied dans la tombe. Chaque échange de regards avec Tadzio le consume un peu plus avec toute l'ambivalence que cela représente. Gustav von Aschenbach (nom qui fait allusion évidemment à Gustav Mahler d'autant que le personnage est aussi germanique et musicien) accélère sa fin tout en touchant du doigt cet absolu qu'il a recherché toute sa vie ce qui se traduit physiquement par un rajeunissement spectaculaire et même une agonie qui ressemble aux spasmes d'un orgasme, preuve que le corps et l'esprit ne font qu'un. Dirk BOGARDE est époustouflant, exprimant toutes les émotions qui traversent son personnage avec une intensité folle.

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The Danish Girl

Publié le par Rosalie210

Tom Hooper (2015)

The Danish Girl

Voilà le type même de film qui a été vampirisé par son sujet ou plutôt les prises de position idéologiques qu'il a soulevé. S'il avait été estampillé film d'auteur comme "Laurence Anyways" de Xavier Dolan au sujet proche il aurait subi sans doute moins de procès en légitimité. Mais comme il s'agit d'un film mainstream calibré pour les Oscar réalisé par l'auteur de "Le Discours d'un roi", j'ai entendu pis que pendre à son sujet. De toutes façons, aborder la transidentité est casse-gueule en soi. Cela suscite tantôt une levée de boucliers de la part des conservateurs lorsque ce thème est abordé au niveau de l'enfance (l'exemple de "Petite fille" de Sébastien Lifschitz l'a bien montré), tantôt celle de représentants de la communauté transgenre qui ne se reconnaissent pas dans les films censés parler d'eux et qui n'acceptent pas que ce soient des acteurs cisgenre qui interprètent leurs rôles. 

Après avoir vu le film, je dirai que je l'ai trouvé intéressant, esthétiquement soigné (remarquable choix de décors très picturaux: intérieurs arts nouveau et magnifiques extérieurs baignés de lumière) et bien interprété. J'ai beaucoup aimé en particulier la prestation troublante de Eddie Reymane et la sensibilité à fleur de peau qu'il exprime lorsqu'il joue Lili. Même si le film prend des libertés avec son histoire et la présente comme la première femme transgenre a avoir été opérée dans les années 30 (alors que c'est surtout la plus célèbre), il ne tourne pas qu'autour de ce personnage. Il s'agit aussi de l'analyse d'un couple. Einar et Gerda (Alicia Vikander) fonctionnent de façon très narcissique, chacun voyant en l'autre son jumeau. La révélation de la femme en Einar est tout aussi révélatrice pour lui que pour Gerda qui s'avère être une lesbienne refoulée (qui ne l'était pas dans la réalité) et qui trouve le succès comme peintre grâce à Lili au prix de la perte de son mari. Même si le registre très académique où rien ne doit trop bousculer le spectateur dans ses repères atténue la portée du film, il n'en reste pas moins tout à fait honorable.

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