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Rogue one: a star wars story

Publié le par Rosalie210

Gareth Edwards (2016)

Rogue one: a star wars story

Rogue one a star wars story développe une intrigue qui se situe juste avant l'épisode IV Un nouvel espoir (le tout premier film de la saga sorti en 1977). Il nous raconte comment un groupe de rebelles a pu s'emparer des plans de l'étoile noire sous le nom de code "Rogue one". Ces plans ensuite remis à la princesse Léia et qui sont la clé de la neutralisation de cette arme de destruction massive par Luke Skywalker dans l'épisode IV. Le film est donc une pièce de cet immense puzzle qu'est devenu Star Wars et non pas un simple produit dérivé.

Le film a un peu de mal à démarrer car il s'éparpille dans toute une série de lieux pour la plupart sous domination de l'Empire. De même il introduit un nombre important de nouveaux personnages. Par la suite l'intrigue se resserre autour du groupe de rebelles prêts à sacrifier leurs vies pour mener à bien leur mission. Si les motivations de leur leader, la fille du concepteur de l'étoile noire sont évidentes (réhabiliter son père en prouvant qu'il a saboté l'arme que l'Empire l'a obligé à fabriquer) celles de ses compagnons le sont beaucoup moins. On ne sait quasiment rien d'eux ce qui affadit l'aspect tragique indéniable du film. Enfin les effets spéciaux sont bluffants, tout particulièrement la recréation en images de synthèse de personnages de l'épisode IV dont les acteurs sont décédés. Grand Moff Tarkin (Peter Cushing mort en 1994) et la princesse Léia de l'épisode IV, sa tunique blanche et ses macarons intacts alors que Carrie Fisher vient juste de nous quitter, bien abîmée par la vie qu'elle a vécu. Ce pouvoir du cinéma à défier le temps et la mort est l'aspect le plus mémorable du film.

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La femme au corbeau (The River)

Publié le par Rosalie210

Frank Borzage (1929)

La femme au corbeau  (The River)

Enhardi par les immenses succès de l'Heure suprême et de l'Ange de la rue, Borzage s'aventure dans son film suivant sur un terrain tabou en 1928, celui de l'érotisme. L'amour physique, le désir, la sensualité étaient discrètement suggérés dans ses films précédents mais dans La Femme au corbeau ils éclatent au grand jour. L'union des corps est indissociable chez Borzage de celle des émotions et des esprits. Il n'existe qu'une seule échelle qui prend ses racines dans l'amour profane et monte jusqu'au sacré. L'amour est assomption mais celle-ci n'est possible que parce que toutes les dimensions de l'humain sont prises en compte. Et comme on est encore dans la période pré-code Hays, Borzage va oser réaliser "l'oeuvre la plus sensuelle et la plus provocatrice de tout le cinéma muet." (Hervé Dumont)

Il ne reste plus aujourd'hui que la moitié du film d'origine. Le début, la fin et deux scènes intermédiaires ont été perdus (la pellicule s'est décomposée) et sont remplacés aujourd'hui par des photos du tournage et des cartons explicatifs permettant de suivre l'intrigue. Coup de chance, ce qui nous reste du film est la partie la plus intense, celle qui montre la naissance du désir, le jeu de séduction puis l'éclosion de l'amour entre les deux personnages principaux, Allen John (Charles Farrell) et Rosalee (Mary Duncan). Ce sont ces scènes qui ont offusqués les puritains (le film a été interdit ou censuré dans de nombreux Etats aux USA et dans le monde) et à l'inverse ont provoqué la pâmoison des surréalistes en France qui l'ont élevé au rang de film culte. Farrell sortant de la rivière dans le plus simple appareil, réchauffé par le corps de Rosalee couché sur lui ou sa main guidée par elle touchant son sein sont autant de magnifiques visualisations du désir féminin. Entre cette femme revenue de tout (et surtout des hommes) et cet innocent qui n'a jamais connu de femme (un petit garçon qui devient un homme), l'amour prend une tournure bouleversante qui les révèle à eux-mêmes. Le corbeau, métaphore des obstacles à vaincre (le rival castrateur, le passé encombrant etc.) sur le chemin de la libération et de la plénitude ne peut qu'être vaincu. Une fois de plus, Borzage a recours a des jeux d'ombres expressionnistes pour symboliser la menace qui pèse sur les amants alors que la puissance de leurs désirs se manifeste à travers les déchaînements de la nature (tourbillons, tempêtes de neige...) Ajoutons que le jeu des acteurs stupéfie par sa modernité. Mary Duncan est incroyablement directe dans ses attitudes et ses gestes (elle se caresse le sein, s'allonge lascivement, porte une sucrerie offerte par Allen John à la bouche avec un regard provocateur etc.) Et Charles Farrell dans son initiation au désir provoque le trouble.

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L'isolé (Lucky Star)

Publié le par Rosalie210

Frank Borzage (1929)

L'isolé (Lucky Star)

L'isolé en France, Lucky star en VO est le dernier film muet réalisé par Frank Borzage et son dixième film pour la Fox. Contrairement aux autres films tournés avec le couple vedette Janet Gaynor et Charles Farrell celui-ci se heurta à un contexte difficile en raison de la crise de 29 mais surtout de l'avènement du parlant. William Fox exigea l'introduction de séquences sonorisées (aujourd'hui perdues) et à sa sortie le film fut boudé: il était passé de mode. On le crut longtemps définitivement perdu comme 90% des films muets mais l'on finit par retrouver au début des années 90 une copie de la version muette aux Pays-Bas avec des intertitres en flamand. Le script ayant été conservé, il fut possible de restaurer le film dans son état d'origine et de le redécouvrir.

Quelle que soit l'intrigue, Borzage développe toujours les mêmes thèmes. Ici il adapte à sa manière une nouvelle très courte de Tristram Tupper, Trois épisodes dans la vie de Tim Osborne. Tim connaît une succession de hauts et de bas. Réparateur de poteaux électriques, on le découvre perché sur leurs cîmes avant que la guerre de 14 ne le cloue dans un fauteuil roulant. L'isolé c'est lui, rejeté de tous, enfin de presque tous: "je m'occupe des débris, ils ne m'intéressaient pas avant." L'autre débris c'est Mary Tucker, fille d'une fermière veuve qui vit dans la misère. Mary seconde sa mère auprès de ses petits frères, accomplit les durs travaux de la ferme. Elle est négligée, maltraitée, mal élevée. Tim la prend sous son aile et l'éduque (la scène du schampoing fait penser à Charlot violoniste où la souillon à décrasser est Edna Purviance.) Mary lui redonne le goût de vivre et de se battre. Mais sa mère voit d'un mauvais oeil cette relation avec un infirme et veut la forcer à faire un beau mariage. Le prétendant a beau être un escroc, c''est un séducteur beau parleur qui la couvre de cadeaux. Face à l'adversité le couple devra puiser comme toujours chez Borzage dans la force de son amour pour triompher des obstacles et accomplir des miracles. La scène où Tim accomplit son chemin de croix avec ses béquilles fait penser à la fin de l'Heure suprême où aveugle il parvenait à retrouver le chemin de sa maison et à gravir les étages pour retrouver sa bien-aimé. Les comédiens sont formidables et leurs sentiments retranscrits avec beaucoup de finesse. Charles Farrell y joue une partition plus grave, plus mature que dans les films précédents avec Janet Gaynor et il est d'autant plus émouvant.

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L'ange de la rue (Street Angel)

Publié le par Rosalie210

Frank Borzage (1928)

L'ange de la rue (Street Angel)

L'Ange de la rue a été réalisé dans la foulée du succès de l'Heure suprême. Le public voulait absolument voir un autre film avec le couple d'amoureux joués par Janet Gaynor et Charles Farrell. Borzage décida d'adapter très librement une pièce de théâtre de Monckton Hoffe pour y injecter sa personnalité. L'intrigue fut déplacée de Londres à Naples (Borzage était d'origine italienne) le héros devint un véritable artiste et sa compagne un "ange des rues", oxymore désignant les prostituées.

On retrouve dans ce film tous les thèmes chers à Borzage. Des personnages isolés, bannis, rejetés de la société. Un amour fou purificateur qui agit comme une assomption. Un dégoût des institutions et des autorités qui broient les individus. Un art consommé des contrastes où la putain se mue en madone, où la félicité côtoie le désespoir et où la cîme est tout près de la chute. Borzage a l'art de jouer aux montagnes russes avec les émotions du spectateur en transcendant pourtant les ficelles du mélodrame. Le climax du film est ainsi une longue et déchirante scène où Angela que Gino vient de demander en mariage après avoir décroché un gros contrat est rattrapée par son passé. Lui croit à des lendemains radieux alors qu'elle sait qu'elle passe sa dernière heure avec lui avant d'être arrêtée. Ses yeux pleins de larmes dans son visage souriant bouleversent.

De manière encore plus flagrante que dans l'Heure suprême, l'Ange de la rue bénéficie de l'esthétique de l'expressionnisme allemand. Jeux d'ombres, formes géométriques stylisées, perspectives penchées et échelles faussées (la scène du procès fait paraître Angela minuscule dans un décor qui l'écrase), effets de brume etc. Borzage a assisté au tournage de l'Aurore et a voulu rivaliser avec Murnau. Enfin on sent que le passage au parlant est proche. Lorsque les amants communient, ils ne le font plus visuellement avec des médailles religieuses mais en sifflotant l'air de O Sole Mio et grâce à un effet sonore qui avait fait sensation à l'époque, on entend l'air parfaitement synchronisé.

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L'heure suprême (Seventh Heaven)

Publié le par Rosalie210

Frank Borzage (1927)

L'heure suprême (Seventh Heaven)

D'une pièce de théâtre à succès d'Austin Strong (le petit neveu de Robert Louis Stevenson) misérabiliste et bondieusarde très XIX° siècle Borzage parvient à tirer un film personnel rempli de moments de grâce tout en donnant une leçon de cinéma.

Borzage, cinéaste de l'expressivité sublime aime les contrastes seuls à même de la mettre en valeur. L'heure suprême est structuré par les contrastes. Pour qu'il y ait élévation il faut partir de très bas: le film commence dans les égouts où travaille Chico et où pataugent moralement Nana, alcoolique et violente et sa soeur martyre Diane, trop faible pour lui résister. Lorsque Chico prend Diane sous sa protection et l'emmène chez lui on assiste à un travelling vertical ascensionnel d'étage en étage magnifique "je travaille dans les égouts mais je vis près des étoiles." La mansarde de Chico devient le nid paradisiaque (seventh heaven, le paradis du septième ou le septième ciel en VO) où pourra éclore leur amour, un amour que les éreuves ne feront que renforcer jusqu'à atteindre une dimension mystique et miraculeuse. Nouveau contraste: c'est l'éclatement de la guerre de 14, l'imminence de la séparation et l'ombre de la mort qui pousse Chico à déclarer son amour. En utilisant le montage alterné, Borzage oppose l'immonde liesse patriotique de la foule (vue le plus souvent depuis la mansarde en plongée d'où l'impression de vermine grouillante) et l'union divine des deux amants qui viennent juste de découvrir la force de leur amour (opposition entre une mauvaise et une bonne passion.) La haine de la guerre de Borzage était d'ailleurs si forte que les scène de bataille du film furent tournées par John Ford qui était comme lui sous contrat à la Fox. Elles tranchent par leur réalisme documentaire (taxis de la Marne, évolution des uniformes) avec un film par ailleurs très stylisé. Une esthétique expressionniste très influencée par le cinéaste star de la Fox, Murnau qui tournait en même temps L'Aurore. Borzage a d'ailleurs prêté à Murnau sa vedette féminine Janet Gaynor, une inconnue qu'il avait réussi à imposer au studio tout comme Charles Farrell. Pendant 15 jours elle a tourné pour lui en blonde durant la journée pendant qu'elle devenait brune la nuit pour Borzage. Et ce n'est que l'un des nombreux échos entre les deux films.

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A fond

Publié le par Rosalie210

Nicolas Benamou (2016)

A fond

A fond était-il une bonne idée pour fêter noël au cinéma? Plutôt oui en ce qui concerne le volet action. J'avais adoré Speed de Jan de Bont et c'est ce qui m'a conduit à aller voir le film de Benamou. L'idée est effectivement très semblable. Un véhicule lancé à pleine vitesse et qui ne peut ralentir ce qui créé un suspense et une tension constante avec des cascades spectaculaires. Benamou s'en sort plutôt bien dans ce registre. La voiture high-tech (en réalité de la camelote) se transforme en cauchemar ambulant alors que les éléments extérieurs s'en mêlent (un automobiliste enragé dont la portière a été arrachée, un péage, une guêpe, un bouchon, les flics pas toujours compréhensifs etc.)

Si A fond était un pur film d'action je lui aurais mis 3 étoiles. Mais (hélas) c'est aussi une comédie style gros christmas pudding bien indigeste. Pour filer la métaphore automobile on se demande si le scénario n'a pas été écrit en mode pilotage automatique avec un régulateur de vitesse neuronal coincé à 0,1 km/heure tant c'est mauvais, lourd, téléphoné, cliché et j'en passe. Les personnages sont soit de grosses caricatures (pauvre Dussolier réduit à n'être que libidineux ou gaffeur) soit inexistants (A quoi sert Melody franchement? Et les enfants ce n'est guère mieux). Et Caroline Vigneaux est insupportable. Son jeu sonne aussi faux que son gros bidon (ce qui explique sans doute pourquoi elle est si relax dans une situation où elle devrait mourir de peur.) Gros navet donc d'une étoile. Ce qui fait une moyenne de deux étoiles au final.

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La huitième femme de Barbe-Bleue (Bluebeard's Eighth Wife)

Publié le par Rosalie210

Ernst Lubitsch (1938)

La huitième femme de Barbe-Bleue (Bluebeard's Eighth Wife)

Pour apprécier à sa juste valeur cette comédie de Lubitsch réalisée en 1938 il faut avoir en tête le contexte de l'époque. Celui des tournages en studio avec effets de transparence pour simuler un tour d'Europe et code Hays tout-puissant contraignant à évoquer la sexualité de façon allusive et métaphorique. D'autre part si les spécialistes du cinéma mettent en avant plutôt Haute Pègre ou To be or not to be, la Huitième femme de Barbe-Bleue est une comédie tout aussi brillante. De plus c'est la première collaboration de Lubitsch avec le duo Brackett-Wilder qui signe le scénario. Wilder a beaucoup appris de Lubitsch et ses futurs chefs-d'oeuvre comiques sont déjà en germe dans les scénarios qu'il écrit pour son compatriote.

La Huitième femme de Barbe-Bleue est un parfait exemple de Lubitsch "touch", cette capacité unique à mélanger plusieurs sortes de comique pour former un tout précis, rythmé, harmonieux. Screwball comédie (remariage et guerre des sexes), comédie loufoque à la Hawks avec des cris d'animaux émis par des humains comme dans l'Impossible M.Bébé sorti la même année, satire autour du pouvoir et de l'argent, burlesque (gifles, fessées, coups de poing) sur fond de musique martiale, comédie sophistiquée avec le décorum de la haute société, allusions grivoises dès la première scène du "pyjama partagé" (une idée de Wilder ce qui n'est pas surprenant) puis avec l'évocation cryptée de la frustration sexuelle (nom de code Tchécoslovaquie, un autre type de frustration après les accords de Munich de 1938) et du sado-masochisme (fessée, camisole...)

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Ainsi va l'amour/Minnie & Moscowitz (Minnie and Moscowitz)

Publié le par Rosalie210

John Cassavetes (1971)

Ainsi va l'amour/Minnie & Moscowitz (Minnie and Moscowitz)

Minnie and Moscowitz est la seule comédie réalisée par John Cassavetes. C'est son sixième long-métrage, le deuxième avec Gena Rowlands après Faces.

Toute personne s'intéressant à Cassavetes et/ou au cinéma hollywoodien ne peut passer à côté de ce film. S'il est moins connu en France que Shadows, Faces, Une femme sous influence ou Opening night c'est parce qu'il a longtemps été privé d'une sortie en DVD. Cet oubli est désormais réparé comme pour Husbands, le film réalisé juste avant lui.

Minnie and Moscowitz reflète parfaitement le rapport complexe de Cassavetes au cinéma hollywoodien. Pris à contrepied, tourné dans ses marges mais sans en renier l'héritage pour autant. Cassavetes prend un malin plaisir à déjouer les attentes du spectateur telles qu'elles ont été façonnées par le cinéma hollywoodien: "Le cinéma c'est une conspiration. Et tu sais pourquoi? Parcequ'il nous conditionne. Il nous apprend à gober n'importe quoi. Il veut nous faire croire à un idéal, à la virilité, au romantisme et bien sûr à l'amour. On y croit, on cherche autour de soi, on ne trouve pas. Je n'ai jamais rencontré un Charles Boyer, un Clark Gable, un Humphrey Bogart. Ils n'existent pas mais le cinéma nous fait croire le contraire et tu marches."

Pourtant Minnie and Moscowitz parle d'amour. Plus exactement il parle du grand amour. Il ne parle que de ça. Et il en parle en s'inscrivant dans le genre hollywoodien en diable de la screwball comedie: deux êtres que tout oppose (un voiturier beatnik exubérant et une bourgeoise peu loquace et névrosée joués par Seymour Cassel et Gena Rowlands) vont se confronter, apprendre à se connaître et à s'aimer. Cassavetes rend ainsi hommage à New-York Miami de Capra avec Clark Gable justement. Quant à Bogart il est cité pas moins de trois fois! Dans le Faucon maltais puis Casablanca (deux films où les histoires d'amour se terminent mal) puis dans Le Port de l'angoisse où à l'inverse Bogart-Bacall y célèbrent leur amour à l'écran pendant que Minnie et Moscowitz font de même dans la salle.

Mais Cassavetes ne serait pas Cassavetes s'il n'introduisait quelques grains de sable dans cette machine trop bien huilée. Ceux qui espéraient le voir dans des scènes glamour avec Gena Rowlands en ont été pour leurs frais. Il prend le contrepied de leurs attentes en jouant le rôle de l'amant lâche, jaloux et violent qui passe Minnie à tabac. De même son histoire avec Moscowitz n'est pas dénuée de violence. Violence symbolique liée à la différence de condition sociale (la scène où elle ne parvient pas à présenter Moscowitz à ses amis), violence que Seymour Moscowitz s'inflige à lui-même. Etre excessif, impulsif, il est en proie à d'incontrôlables débordements. Et pourtant c'est l'amour qui l'emporte. Un amour fou, viscéral comme toujours chez Cassavetes. "Il n'y a pas d'amour il n'y a que des preuves d'amour." Et ce sont les corps (qui ne mentent jamais comme le disait Alice Miller) qui fournissent ces preuves. La plus belle étant celle où Seymour pris dans son élan se rase la moustache: il tombe le masque. Même chose pour Minnie qui troque ses lunettes noires pour des lunettes roses: tout un symbole!

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Faces

Publié le par Rosalie210

John Cassavetes (1968)

Faces

C'est le 4eme film de Cassavetes mais son 2eme vraiment indépendant. Et cette indépendance se paie au prix fort: hypothèque de la maison de Cassavetes et Rowlands, comédiens bénévoles qui tournent de nuit après leur travail jusqu'à épuisement, réalisateur qui fait l'acteur en parallèle pour réinjecter les cachets dans le film, recyclage de chutes de pellicules d'autres productions, montage interminable...A tous points de vue Faces s'est construit à la marge du système et n'a dû son existence qu'à la détermination sans faille de toute son équipe. Alors oui Faces est un film fauché, pas complètement abouti techniquement (un seul technicien pour l'ensemble du film) mais who cares? C'est un film d'un engagement fou, total, absolu. Un film réalisé avec les tripes où le besoin de s'exprimer librement est viscéral.

Faces s'inscrit dans la lignée de Shadows. Même noir et blanc granuleux, même caméra à l'épaule filmant au plus près des corps et des visages, même errances nocturnes, même montage dicté par le rythme de l'action et le jeu des comédiens, même frontière ténue entre la fiction et le documentaire.

Faces possède plusieurs strates. A première vue, le film aurait pu s'intituler "la valse des pantins". On assiste en effet à de nombreuses scènes hystériques où les personnages copieusement imbibés d'alcool crient, gesticulent, rient frénétiquement, pleurent etc. Mais Cassavetes arrache toujours le masque à un moment ou à un autre. Souvent au bout de longs plans-séquences où les corps s'abandonnent, s'empoignent en toute impudeur. Et au bout du compte, la tristesse, le désespoir, un profond désarroi. Faces dissèque les faux-semblants de l'american way of life. Une société d'apparences privée de sens et de communication où les couples se délitent sous nos yeux. Où les hommes d'affaires fuient leurs épouses "givrées" ou suicidaires dans les bras des call-girls. Où les épouses délaissées se consolent en parallèle en faisant appel à des gigolos. Il y a un parallélisme évident entre le rôle de Jeannie l'escort-girl et celui de Chet, le danseur au service des dames. Tous deux tenus par des piliers de la bande de Cassavetes (Gena Rowlands et Seymour Cassel), ils sont à la fois objets de désir et de défoulement. Faces montre le vrai visage d'une certaine Amérique de la réussite. Et il n'est pas beau à voir même si les fragments d'humanité arrachés aux masques sont bouleversants.

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Une vie de chien (A Dog's Life)

Publié le par Rosalie210

Charles Chaplin (1918)

Une vie de chien (A Dog's Life)

Premier film tourné pour la First National et dans son propre studio californien, Une vie de chien marque un nouveau tournant dans la carrière de Chaplin. Il a signé pour 8 nouveaux courts-métrages mais on sent que le passage au long-métrage est imminent. De fait Une vie de chien préfigure le Kid et est déjà en soi un pur petit chef-d'oeuvre mêlant harmonieusement gags burlesques, satire sociale et tendresse pour les exclus.

Le monde dépeint dans Une vie de chien est âpre. La loi du plus fort y règne et les policiers veillent à enfoncer encore plus la tête sous l'eau des "salauds de pauvres".
Dans la rue c'est chacun pour soi. On est en plein darwinisme social lorsque l'on voit lors d'une séquence magistrale Charlot se faire doubler à l'agence pour l'emploi par une meute de chômeurs enragés...la métaphore animale est limpide lorsque la scène est rejouée à l'identique autour d'un bout de viande par des molosses s'en prenant à un petit chien bâtard. Mais Charlot refuse cet ordre du monde et son humanité sauve le malheureux des griffes de ses adversaires. Non seulement il rejette ainsi le féroce individualisme du capitalisme libéral mais sans le savoir il nous offre déjà la rigoureuse antithèse du nazisme qu'il combattra dans Le Dictateur. Les nazis imprégnés de spencérisme (darwinisme social) projetaient sans arrêt des films de combats animaliers se terminant par la mise à mort du plus faible, "la lutte pour la vie" ou l'on mange pour ne pas être mangé. A contrario Une vie de chien est imprégné d'humanisme. Une solidarité se créé entre Charlot, son chien et Edna une autre victime du système. Sans parler de Sydney Chaplin qui dans sa baraque à saucisses a toujours le dos tourné au bon moment pour laisser Charlot et Scraps chaparder sur le comptoir. Et la chance qui s'en mêle lorsque Scraps trouve un portefeuille plein de billets dans le terrain vague où ils dorment. Portefeuille auparavant dérobé par des voleurs mais qui finit par leur échapper. Ajoutons que le gag où Chaplin joue au marionnettiste avec un des deux voleurs est brillantissime.

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