Overblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Articles avec #aventure tag

L'Empire contre-attaque (The Empire Strikes Back)

Publié le par Rosalie210

Irvin Kershner (1980)

L'Empire contre-attaque (The Empire Strikes Back)

"L'Empire contre-attaque" reprend tous les éléments mis en place dans l'épisode fondateur de la saga et les élève jusqu'à l'âge adulte comme doit le faire le personnage principal, Luke dont la mue se fait par de douloureuses épreuves qui le meurtrissent dans sa chair et dans son âme. Coïncidence, l'acteur, Mark HAMILL avait eu avant le tournage du film un grave accident de voiture qui lui avait laissé des séquelles au niveau du visage. Un visage dont l'aspect angélique et enfantin avait contribué à son choix pour le rôle. Et qui se fait plus dur et moins expressif, en parallèle avec une identité terriblement malmenée. Je pense en particulier à la scène de la grotte du mal sur la planète Dagobah. Elle symbolise la descente dans les abysses où Luke affronte Dark Vador, lequel s'avère être la part obscure de lui-même. Cette scène préfigure celle où il l'affronte directement et qui se termine par sa castration symbolique et sa chute en même temps que par la révélation de ses véritables origines familiales. Là, on n'est plus dans le space opera mais dans la tragédie antique ce qui n'est guère surprenant quand on se penche sur les nombreuses références bibliques, grecques et romaines qui parsèment la saga. Le manichéisme primaire du premier film (chevalier blanc contre chevalier noir, "marcheur céleste" contre "sombre envahisseur") est ainsi battu en brèche par la généalogie comme par l'approfondissement de la réflexion sur la nature de la Force. Après Obi-Wan Kenobi (Alec GUINNESS) qui a fusionné avec "le grand tout" à la fin du premier film, c'est au tour du maître Yoda de prendre en main la formation de l'apprenti-Jedi. Avec son apparence de gnome vert, Yoda est une parfaite illustration du fait que les apparences sont trompeuses. L'animation de sa marionnette (créée et manipulée par Frank OZ qui lui prête aussi sa voix et un langage caractérisé par une syntaxe particulière inspirée du latin sans laquelle Yoda ne serait pas Yoda) est tout simplement prodigieuse en ce qu'elle produit une humanité que par la suite les effets numériques ne parviendront jamais à recréer.

En dépit de cette gravité et même d'une certaine noirceur qui touche aussi les autres personnages (C3PO se fait tailler en pièces, Han Solo est torturé puis cryogénisé sans parler de sa rivalité latente avec Luke pour le cœur de Leia étant donné que ces deux derniers ne connaissent pas leurs liens biologiques), l'humour est toujours très présent au travers des compagnons fidèles: Chewbacca, R2D2, C3P0. Enfin le film se caractérise par des scènes d'action épiques dans des décors bien plus grandioses que le film précédent en particulier la bataille des tripodes sur la planète Hoth et la cité dans les nuages de Lando Calrissian (Billy Dee WILLIAMS).

Voir les commentaires

La Guerre des Etoiles (Star Wars)

Publié le par Rosalie210

George Lucas (1977)

La Guerre des Etoiles (Star Wars)

Depuis sa première sortie en 1977 le premier film de la saga Star Wars a connu plusieurs mutations. Il a tout d'abord changé de titre: "La Guerre des étoiles" (ou plutôt si le titre avait été correctement traduit, "Les guerres de l'Etoile" ce qui a autrement plus de sens!) est devenu "Un nouvel espoir", l'épisode IV d'une saga qui en comporte à ce jour neuf (sans parler des films qui en sont dérivés). Il est ensuite aujourd'hui introuvable sous sa forme originelle (du moins officiellement). Son créateur, George LUCAS a décidé pour la ressortie de la trilogie au cinéma en 1997 d'effectuer des incrustations numériques tout à fait dispensables (et discutables car elles jurent avec le reste du film et brouillent l'identité spatio-temporelle dans lequel il a été conçu) et même de changer le sens d'une scène-clé, celle où Han Solo tue Greedo dans la Cantina. Dans la version d'origine il tire le premier alors qu'à partir de 1997, il réagit au tir de Greedo ce qui le place en situation de légitime défense (et depuis la scène a été encore modifiée pour brouiller les pistes). Ce révisionnisme affectant le cowboy de l'espace me fait penser à celui qui a un moment donné a touché Lucky Luke qui ne pouvait plus fumer ni tirer. Imaginez le même traitement appliqué aux westerns de John FORD ou de Sergio LEONE!

Malgré ces vicissitudes, le film de George LUCAS n'est pas devenu par hasard l'une des références incontournable de la planète cinéma. Il réunit les codes du conte ("Il y a bien longtemps dans une galaxie lointaine, très lointaine" résonne exactement comme "Il était une fois" et il y a de nobles chevaliers, une princesse et des forêts… de météorites), ceux du mythe (dont l'unicité à travers les âges et les cultures a été mise en évidence par Joseph Campbell dans son ouvrage "Le héros aux mille et un visages". Ainsi Luke dans la plus pure tradition du récit initiatique quitte son quotidien pour vivre des aventures fabuleuses et s'accomplir en tant que héros) et enfin ceux de plusieurs genres cinématographiques: le space opera, le western (déjà cité plus haut), le film historique (l'anéantissement d'une planète, les combats entre engins spatiaux, les uniformes des officiers de l'Empire et leurs cérémonies renvoient au nazisme et à la seconde guerre mondiale) et le film de sabre japonais (George LUCAS est un admirateur de Akira KUROSAWA et l'influence de celui-ci est très forte). S'y ajoute une forte dimension mystique. "Un nouvel espoir" est un film "réenchanteur" qui affirme haut et fort la supériorité des forces de l'esprit (puisées dans les religions occidentales et orientales) sur la technologie. Enfin le casting n'est pas pour rien dans la réussite du film. Luke, le chevalier blanc est campé par un Mark HAMILL à la candeur émouvante, Han Solo le space cowboy a contribué à propulser le charismatique Harrison FORD au firmament des étoiles ^^ et Leia la princesse au caractère bien trempé et aux célèbres macarons est pour toujours associée à Carrie FISHER a qui le personnage a terriblement pesé. Obi-Wan Kenobi, le mentor spirituel est une sorte de résurrection des premiers moines du désert auquel Alec GUINNESS apporte toute sa classe. Enfin leur antithèse, le chevalier noir Dark Vador est entré dans la légende des plus grands méchants de l'histoire du cinéma.

Voir les commentaires

La Forteresse cachée (Kakushi toride no san akunin)

Publié le par Rosalie210

Akira Kurosawa (1958)

La Forteresse cachée (Kakushi toride no san akunin)

Voir où George LUCAS a puisé l'âme de sa saga "Star Wars" n'est pas très compliqué. Il suffit de bien observer la forme du casque de Dark Vador, les postures des maîtres Jedi et leurs sabres… laser (et je ne parle même pas de la Force) pour comprendre qu'il est autant allé chercher son inspiration du côté du pays du soleil levant que dans le livre de Joseph Campbell "Le Héros aux mille et un visages". La première scène de la "Forteresse cachée" est quasiment reprise telle quelle dans "Star Wars: Episode IV - A New Hope" (1977) avec son étendue désertique dans laquelle errent non les héros mais les comparses, chargés de servir et de divertir la galerie avec leurs comportements grotesques (cupidité, veulerie etc.) Cette ouverture marque d'ailleurs un tournant dans la filmographie de Akira KUROSAWA qui après les échecs successifs de ses films adaptés de grandes oeuvres littéraires s'essaye avec brio à un cinéma d'inspiration plus populaire. Ce récit d'aventures picaresques tourné dans de splendides décors naturels et ponctué de scènes d'action spectaculaires et admirablement filmées (voir la scène où le général Makabe alias Toshiro MIFUNE se lance à la poursuite de ses ennemis le sabre levé) se paye en plus le luxe d'être féministe. La princesse Yuki (Misa UEHARA) est une guerrière (comme l'est également la princesse Leia qui incarne l'âme de la rébellion et finit générale) et si elle doit se faire passer pour muette afin de voyager incognito, sa langue est en réalité bien pendue et elle n'a pas les yeux dans sa poche. Le fait d'être traquée par le clan adverse est une chance pour elle car il lui permet de quitter sa tour d'ivoire et d'observer le monde tel qu'il est, le meilleur et le pire des hommes. Elle est également très critique envers les mentalités féodales (et patriarcales) japonaises, notamment le sens du sacrifice, de la loyauté et de l'honneur poussé jusqu'à ses extrémités les plus mortifères. La manière dont elle bouscule les deux généraux, Makabe et Tadokoro (Susumu FUJITA) dans leurs certitudes (alors qu'elle n'a que 16 ans, soit l'âge auquel Greta Thunberg est devenue célèbre mais je dis ça je ne dis rien) s'avère décisive pour l'issue de l'histoire.

Voir les commentaires

Jabberwocky

Publié le par Rosalie210

Terry Gilliam (1977)

Jabberwocky

J'ai rarement vu une restauration produire des effets aussi spectaculaires que dans "Jabberwocky", le premier long-métrage réalisé par Terry GILLIAM. En effet celui-ci en dépit d'un budget modeste a créé un magnifique univers visuel qui s'était terni avec le temps. En retrouvant son éclat, l'image révèle des paysages ruraux de chateaux-forts nimbés d'une somptueuse lumière. Les mêmes que ceux de "Monty Python sacré Graal" (1975), l'œil du peintre en prime. Cela n'empêche pas de reconnaître le style Gilliam, récurrent de film en film, celui des courtes focales et des contre-plongées qui écrasent les personnages sous l'architecture, bouchent la vue et déforment les perspectives et les traits jusqu'à la caricature. Le Moyen-Age dépeint par Gilliam est pictural et en même temps il s'en dégage une impression de réalisme comme dans le film antérieur des Monty Python. C'est lié à une intimité avec cette époque dans ce qu'elle a de plus "terre-à-terre" c'est à dire sa violence et sa saleté. Celles-ci deviennent d'ailleurs les supports d'un long gag où la tribune royale d'un tournoi est progressivement recouverte de sang et de morceaux de chair sans que les personnages ne s'en émeuvent (un type de gag non-sensique récurrent chez les Python*). Mais de la saleté au sens propre à la saleté au sens figuré il n'y a qu'un pas et la crasse ou la poussière qui recouvre les dirigeants qui utilisant leurs vassaux comme de la chair à canon n'a rien de gratuit. A travers le Moyen-Age, Terry GILLIAM critique en réalité le fonctionnement de la société britannique des années 70 touchée par la crise et le chômage et désormais rétive comme le reste de l'Europe à l'immigration de travail venue des pays pauvres. Quant au "monstre" (emprunté à un autre univers de l'absurde, celui de Lewis Carroll) qui terrorise la contrée, il est cyniquement instrumentalisé pour manipuler les masses puisque les habitants n'ont guère envie de s'aventurer à l'extérieur et apaisent leurs angoisses en… consommant. Il est presque dommage que Terry GILLIAM finisse par le montrer (d'autant que ce n'est pas une réussite, contrairement aux plans où la caméra adopte son point de vue et où il est donc invisible) car comme le magicien d'oz, il aurait pu tout aussi bien n'être qu'une illusion.

* Une partie d'entre eux participent au film en tant qu'acteurs. Michael Palin interprète le rôle principal et le regretté co-fondateur des Python Terry Jones y joue un petit rôle, celui du braconnier qui apparaît en introduction et est la première victime du monstre.

Voir les commentaires

Le Monde perdu (The Lost world)

Publié le par Rosalie210

Harry O. Hoyt (1925)

Le Monde perdu (The Lost world)

"Le Monde perdu" est l'œuvre matricielle d'où sont sortis des films de monstre tels que les "Jurassic park" (du côté des USA) et les "Godzilla" (du côté du Japon). Il préfigure également le premier chef- d'œuvre parlant du genre "King-Kong" qui reprend la même technique mélangeant prises de vue réelles et animation en stop motion pour les créatures fantastiques ou disparues. "Le Monde perdu" et "King Kong" sont les deux réussites les plus éclatantes de Willis O'Brien, l'inventeur et le metteur en scène de cette technique d'effets spéciaux*. En dépit de leur âge, les scènes mettant en scène les dinosaures restent impressionnantes (dommage qu'il y ait parmi eux un homme déguisé en singe qui ne fait quant à lui pas du tout illusion). Il y a même devant leur fuite éperdue devant l'éruption volcanique et l'incendie géant qui en résulte une étrange résonnance contemporaine.

Ceci étant si "King Kong" est davantage passé à la postérité que "Le Monde perdu" (sauf via des citations dans ses avatars contemporains) c'est à cause principalement de son scénario. Celui du "Monde perdu", adapté du livre éponyme de Sir Conan Doyle (le père de Sherlock Holmes) paru en 1912 relève du récit d'aventure divertissant à la Jules Verne ou H.G Wells** alors que celui de "King-Kong", bien que présentant des similitudes avec celui du "Monde perdu" (dont il s'est sans doute inspiré) est plus érotique, plus tragique et intègre une puissante dimension de critique politique et sociale. Bref il y a comme une différence de maturité ^^. Le contexte des deux films a sans doute une incidence dans leur tonalité. "Le Monde perdu" a été écrit à la Belle Epoque et réalisé durant les "roaring twenties" alors que "King Kong" date du début des années 30 alors que sévissait la grande crise. 

* Ici assisté de Marcel Delgado qui créa les modèles réduits de sauriens à l'aide d'une armature métallique recouverte de caoutchouc et de matière spongieuse afin de faire illusion à l'écran.

** Le dénouement du "Monde perdu" peut être considérée comme l'histoire de la genèse du monstre du Loch Ness.

Voir les commentaires

Seul au monde (Cast Away)

Publié le par Rosalie210

Robert Zemeckis (2001)

Seul au monde (Cast Away)

L'un des thèmes transversaux de la filmographie de Robert ZEMECKIS est la relation que l'homme entretient avec le temps depuis son court-métrage de fin d'études "The lift" (1971) jusqu'à ce prenant "Seul au monde", film "performance" où pendant 1h30 (sur les 2h17 que dure le film) le spectateur est invité à s'immerger avec le héros dans une expérience de temps suspendu sur une île déserte. Grâce à la grande humanité que dégage Tom HANKS (et à son engagement physique qui rend terriblement crédible l'épreuve qu'il traverse) l'épreuve de la lenteur sur la durée et du dépouillement n'a rien d'aride.

"Seul au monde" est construit avec la rigueur scénaristique qui caractérise Robert ZEMECKIS comme un triptyque: avant/pendant/après. Avant, le héros, le bien nommé Chuck Noland ("sans terre") est un obsédé de la productivité. Il court littéralement après le temps qu'il ne cesse de mesurer avec les outils derniers cris de la technologie. Bref Chuck est le Winslow Taylor* du début du XXI°. A force de chercher à gagner du temps, il n'en a plus pour sa vie personnelle ce que lui fait discrètement remarquer sa fiancée Kelly (Helen HUNT) en lui offrant une montre à gousset de collection héritée de ses ancêtres avec sa photo le soir de noël. Un moment familial symbolique que le monde du travail ne respecte même plus avec les nouvelles technologies ce qui anticipe les ravages des mails professionnels bombardés sur les têtes des employés à toute heure du jour et de la nuit, pulvérisant la notion de vie privée et empêchant la déconnexion. Mais Chuck est victime d'un accident d'avion (une scène spectaculaire filmée d'une façon particulièrement immersive, les moyens de transport étant toujours source d'imprévus voire de catastrophes) et se retrouve coupé du monde et coupé du temps "mesurable" puisque son naufrage aérien a détruit les mécanismes des objets qui se trouvent dans ses poches. Plus que les étapes obligées de la robinsonnade, c'est la manière dont il réinvente l'usage des objets issus du naufrage qui fascine. Ultimes vestiges de la société de consommation de laquelle il a été contraint de s'extraire, tous ces objets superflus à l'origine deviennent des outils indispensables à sa survie: lames de patin transformées en couteau, tulle de robe devenu un filet de pêche, ruban magnétique de cassette vidéo servant de corde etc. Mais à la survie matérielle s'ajoute la survie psychique avec Wilson, le ballon de volley transformé en ami imaginaire. Là, on touche à ce qu'il y a de plus intime dans le cinéma de Robert ZEMECKIS, un univers peuplé de solitaires marginaux vivant en autarcie ("cast away" le titre original du film qui signifie "naufragé" résonne comme "outcast", "banni") dans un temps et un monde parallèle peuplé d'objets animés (de "Retour vers le futur" (1985) et son savant "fou" vivant dans son garage hors du temps à "Bienvenue à Marwen" (2018) et son village reconstitué de la seconde guerre mondiale peuplé de poupées à travers lequel le héros exorcise ses traumatismes). Des hommes-enfants tellement semblables à des autistes asperger qu'après son retour à la "civilisation", Chuck sera plus que jamais "Noland", son principal repère n'étant plus le temps industriel mais une paire d'ailes d'ange (les asperger ont le sentiment d'être des extra-terrestres dans le monde qui les entoure).

* L'inventeur du taylorisme ou "travail en miettes" qui consiste à décomposer la fabrication d'un objet en taches simples dont l'exécution millimétrée se fait sous la surveillance d'un chronomètre. Son application dans les usines Ford a donné naissance au travail à la chaîne et à la robotisation des hommes, une deshumanisation dénoncée entre autre par Charles CHAPLIN et Jacques PRÉVERT. Les critiques superficielles soulignant le placement de produit effectué par la société Fedex dans le film n'ont pas pris la peine de l'analyser en profondeur.

Voir les commentaires

Les Horizons perdus (Lost Horizon)

Publié le par Rosalie210

Frank Capra (1937)

Les Horizons perdus (Lost Horizon)

"Horizons perdus" c'est L'Utopie de Thomas More revue et corrigée par James Hilton (auteur du roman), Frank CAPRA (réalisateur du film adapté du livre) et indissociable du contexte historique très sombre des années 30 et 40 dans lequel le cinéaste a forgé ses plus grands chefs d'oeuvre humanistes (le roman date quant à lui de 1933 soit l'année de l'arrivée de Hitler au pouvoir). S'y ajoute une dimension mystique lié au lieu où le romancier a décidé d'implanter sa cité idéale: non sur une île mais au beau milieu d'une vallée perdue quelque part aux confins de la chaîne de l'Himalaya. Shangri-La est d'ailleurs un surprenant mélange entre une lamaserie tibétaine et un palais art déco occidental (à l'image de sa population). Inspiré du mythe bouddhiste de Shambhala ("lieu du bonheur paisible") il se situe hors du temps et hors de l'histoire dans un lieu secret à l'abri des tempêtes qui agitent le reste du monde. Un lieu qui est d'ailleurs plus spirituel que matériel puisqu'il suffit d'y croire pour le retrouver (en soi) et qu'à l'inverse ceux qui ne sont pas en paix avec eux-mêmes sont incapables d'y rester comme l'illustre l'itinéraire tragique du frère de Robert Cornway*.

La première scène de "Horizons perdus" est une plongée saisissante dans l'enfer des années précédent l'éclatement de la seconde guerre mondiale vu à travers le prisme d'une petite colonie britannique chinoise sur le point de basculer sous la domination japonaise. On assiste à une scène chaotique d'évacuation des blancs par avion alors que les chinois sont impitoyablement refoulés. Expression du racisme occidental décomplexé, cette évacuation sélective est aussi une manifestation de la vision nazie du monde "la lutte pour la vie" dont ne peuvent se sortir que "les plus forts" c'est à dire "les races supérieures"**.

Cependant l'organisateur de cette évacuation, le diplomate Robert Cornway (Ronald COLMAN) se pose des questions. Sa curiosité et ses interrogations vont l'entraîner dans la direction opposée à celle qu'il avait (consciemment) voulu prendre, entraînant avec lui ses quatre compagnons pour le meilleur ou pour le pire. Car ce que souligne également Frank CAPRA c'est le peu d'appétence de l'homme occidental pour le bonheur qui implique une frugalité, une simplicité et une modestie dont il est dépourvu. Son "logiciel idéologique" est celui du conquérant et du compétiteur agressif et perpétuellement insatisfait, pas celui du sage qui rayonne de sérénité. D'ailleurs on découvre que la raison d'être de Shangri-La est de mettre hors de portée de cet homme prétendûment seul civilisé mais en réalité enclin à la destructivité tous les trésors accumulés au cours des siècles (James Hilton et Frank Capra en se focalisant sur les livres avaient sans doute en tête les autodafés nazis mais les menaces récentes de Donald Trump sur le patrimoine culturel iranien ou les bombardements et pillages des œuvres d'art irakiennes en 2003 montrent que les occidentaux ne se sont pas vraiment amendés de ce côté en dépit des actions de l'UNESCO en faveur de la protection du patrimoine mondial de l'humanité).

Bref il y a de quoi réfléchir avec ce film très riche et remarquablement construit pour peu qu'on le replace dans son contexte et que l'on comprenne que Frank CAPRA n'avait rien de naïf mais bien au contraire érigeait ses fables humanistes en rempart contre le désespoir (un désespoir qui conduira par exemple l'écrivain Stefan Zweig au suicide en 1942). Ayant été au fil du temps amputé de 25 minutes (il en faisait 132 à l'origine), il a bénéficié d'un travail de recherche qui a permis de le restaurer en majeure partie: la bande-son a été entièrement retrouvée et quant aux images, il en manque environ sept minutes. Elles sont remplacées par des photos de tournage.

* Dans "Brazil" (1985) de Terry GILLIAM qui dépeint un terrifiant monde totalitaire dont on ne peut s'échapper qu'en esprit, la cité où vit Jill, la femme idéale que Sam retrouve (en rêve) dans les cieux se nomme justement "Shangri-La".

** Jusqu'à la bataille d'Angleterre, les nazis ont espéré trouver un terrain d'entente avec les anglais qu'ils considéraient comme des cousins "naturels" situés dans la partie haute de leur hiérarchie raciale.

Voir les commentaires

Les Chasses du comte Zaroff (The Most Dangerous Game)

Publié le par Rosalie210

Ernest B. Schoedsack et Irving Pichel (1932)

Les Chasses du comte Zaroff (The Most Dangerous Game)

Voilà un film méconnu en réalité très connu puisqu'il a été repris, en tout ou en partie dans de multiples autres œuvres, entre remakes et source d'inspiration pour des classiques comme "Les Yeux sans visage" (1960) et "Délivrance" (1971) jusqu'aux jeux vidéos contemporains. Pour ma part, j'en ai découvert la trame toute petite sans le savoir avec le vingtième épisode de la série "Ulysse 31", "Le Magicien noir" (la série de Jean CHALOPIN et de Nina WOLMARK reprend énormément d'éléments de films de SF et fantastiques, de "Alien" et "2001" pour Shyrka à "L'invasion des profanateurs de sépulture" qui est la base du scénario du "Marais des doubles" en plus d'être une formidable réinterprétation SF de l'œuvre d'Homère).

"Les chasses du comte Zaroff" est l'œuvre jumelle de "King Kong" (1932) à ceci près que Merian C. COOPER se contente d'en être le producteur préférant se concentrer sur le tournage de "King Kong" (1932) que Ernest B. SCHOEDSACK rejoindra, une fois "Les chasses du comte Zaroff" terminé. C'est pourquoi les deux films partagent non seulement les mêmes décors, le même compositeur, une partie de l'équipe technique et de la distribution mais ils ont aussi la même philosophie, d'une actualité brûlante. Cet aristocrate russe dégénéré (pour ne pas dire psychopathe) qui pour tromper son ennui n'a pas trouvé mieux que de de piéger et de pourchasser ses congénères n'est pas seulement l'incarnation du fait que l'homme peut être un loup pour l'homme. Il illustre "l'inconsistance de la civilisation [occidentale]". Alors que "les animaux qui tuent pour assurer leur subsistance sont appelés sauvages" (ce que Isabelle Filiozat appelle l'agressivité biophile, au service de la vie), "l'homme qui tue pour le sport est qualifié de civilisé" (ce que la même auteure qualifie de destructivité qui est à l'origine des guerres et aujourd'hui du désastre écologique nourrissant les appétits des prédateurs de la finance et de leurs obligés politiques et médiatiques). Et Bob le chasseur de renchérir en précisant que "ce monde est divisé en deux catégories: les chasseurs et les chassés. Par chance je suis un chasseur, et rien ne pourra changer cela". Et pourtant, le simple fait de refuser de chasser le gibier préféré du comte Zaroff qui incarne cette "morale" jusque dans ses prolongements les plus extrêmes suffira à faire basculer Bob du côté des chassés dans une lutte pour la vie tout à fait annonciatrice de l'idéologie nazie (le film date de 1932 soit peu de temps avant l'arrivée de Hitler au pouvoir). Si le film est si marquant, c'est aussi qu'il frappe l'inconscient collectif avec des images (la jungle, les marais, le brouillard) qui ont la puissance d'un conte tel que "Barbe-Bleue" dont la découverte de la "chambre secrète" équivaut à un arrêt de mort ou "Le petit Poucet", sa forêt profonde et son ogre terrifiant (et tellement d'actualité avec ce français d'origine russe coupable d'innombrables crimes pédophiles sur plus de 40 années).

Voir les commentaires

Star Wars épisode IX: L'Ascension de Skywalker (Star Wars: The Rise of Skywalker)

Publié le par Rosalie210

J.J. Abrams (2019)

Star Wars épisode IX: L'Ascension de Skywalker (Star Wars: The Rise of Skywalker)

J.J. ABRAMS fait une sorte de synthèse entre le VII opus déjà réalisé par lui-même qui jouait la carte de la nostalgie en se situant dans la continuité des épisodes IV et V et l'épisode VIII réalisé par Rian JOHNSON beaucoup plus iconoclaste. L'épisode IX reprend donc pas mal d'éléments de la trilogie des années 70-80 en "rebranchant" Palpatine, l'increvable empereur, notamment pour un final où l'avenir de l'univers dépend de la résolution d'un conflit familial ou en faisant une brève incursion sur la lune d'Endor ou en reprenant des répliques cultes ("je t'aime"/"Je sais"). On retrouve aussi une énième scène d'infiltration à bord du vaisseau amiral qui semble tellement facile qu'on se demande si ce n'est pas de la parodie. Rey toujours en quête de son identité se combat elle-même comme le faisait Luke 37 ans plus tôt. En fait d'identité, elle est bien une fille (ou plutôt une petite-fille) de comme l'est Kylo Ren ou plutôt Ben (qui signifie "fils de") mais en même temps Abrams n'abandonne pas complètement l'idée de démocratiser la Force. Finn la ressent à plusieurs reprises, il est guidé par elle mais cet aspect comme le personnage reste sous-développé par rapport aux lignées prestigieuses Vador, Skywalker et Palpatine. De même la révélation que Leia était un maître Jedi arrive trop tard pour rendre cette saga véritablement féministe, d'autant que Rey est hyper-masculinisée à force de super-pouvoirs la rendant quasiment invincible (mon fils la compare à Son Goku dans DBZ ^^). Luke était bien plus vulnérable qu'elle, il souffrait dans sa chair et son apprentissage était autrement plus laborieux. Mais à notre époque, des scènes comme celles avec Yoda seraient taxées de lenteur. Là on ne s'ennuie pas certes et il y a de superbes séquences esthétiquement parlant (celles dans les ruines de l'étoile de la mort particulièrement) mais ça ne fait pas tout à fait oublier les incohérences et les clichés. Reste la mise en abyme de la mort de Leia qui ne peut que renvoyer à celle de son interprète, Carrie FISHER, disparue prématurément à la fin du tournage de "Star Wars Les derniers Jedi" (2017) et qui figure néanmoins dans le dernier film grâce à des scènes coupées du précédent astucieusement utilisées et quelques images de synthèse.

Voir les commentaires

Le Pôle Express (The Polar Express)

Publié le par Rosalie210

Robert Zemeckis (2004)

Le Pôle Express (The Polar Express)


"Le Pôle Express" est le premier des trois films que Robert ZEMECKIS a réalisé à l'aide de la technique de la performance capture qui en était alors à ses débuts. L'aspect expérimental de son film vient appuyer sa recherche constante d'élimination des lois physiques qui compartimentent l'existence humaine. Avec le "Pôle Express", l'impossible devient possible: les obstacles se dématérialisent, permettant à la caméra de les traverser, les humains fusionnent avec leurs jouets, devenant des êtres synthétiques affranchis des contingences spatio-temporelles. C'est ainsi qu'un même acteur (Tom HANKS) après avoir pu s'incruster dans des images d'archives (dans "Forrest Gump" (1994)) peut ici incarner en même temps six personnages différents dont un vieillard et un enfant (ainsi que son père). De même le film défie les lois de la gravité avec de nombreuses séquences de montagnes russes qui donnent l'impression de voler. La plus virtuose est celle du ticket de train, à juste titre comparé à la plume de Forrest Gump (mais aussi au ticket d'or de "Charlie et la chocolaterie" ou bien à l'aventure tout aussi magique du Poudlard Express ^^). C'est cette dimension de liberté absolue qui donne au film son aura de rêve éveillé (la musique de Alan SILVESTRI y est aussi pour quelque chose) et lui permet de dépasser un discours de surface très niais sur "l'esprit de noël" et une intrigue initiatique convenue. Le "Pôle Express" en dépit de ces grosses ficelles ouvre une autre voie aux enfants sortis de l'illustration de Norman Rockwell brisant le mythe du père Noël en leur permettant de grandir sans s'amoindrir.

Voir les commentaires

<< < 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 30 > >>