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Articles avec #aventure tag

Seul au monde (Cast Away)

Publié le par Rosalie210

Robert Zemeckis (2001)

Seul au monde (Cast Away)

L'un des thèmes transversaux de la filmographie de Robert ZEMECKIS est la relation que l'homme entretient avec le temps depuis son court-métrage de fin d'études "The lift" (1971) jusqu'à ce prenant "Seul au monde", film "performance" où pendant 1h30 (sur les 2h17 que dure le film) le spectateur est invité à s'immerger avec le héros dans une expérience de temps suspendu sur une île déserte. Grâce à la grande humanité que dégage Tom HANKS (et à son engagement physique qui rend terriblement crédible l'épreuve qu'il traverse) l'épreuve de la lenteur sur la durée et du dépouillement n'a rien d'aride.

"Seul au monde" est construit avec la rigueur scénaristique qui caractérise Robert ZEMECKIS comme un triptyque: avant/pendant/après. Avant, le héros, le bien nommé Chuck Noland ("sans terre") est un obsédé de la productivité. Il court littéralement après le temps qu'il ne cesse de mesurer avec les outils derniers cris de la technologie. Bref Chuck est le Winslow Taylor* du début du XXI°. A force de chercher à gagner du temps, il n'en a plus pour sa vie personnelle ce que lui fait discrètement remarquer sa fiancée Kelly (Helen HUNT) en lui offrant une montre à gousset de collection héritée de ses ancêtres avec sa photo le soir de noël. Un moment familial symbolique que le monde du travail ne respecte même plus avec les nouvelles technologies ce qui anticipe les ravages des mails professionnels bombardés sur les têtes des employés à toute heure du jour et de la nuit, pulvérisant la notion de vie privée et empêchant la déconnexion. Mais Chuck est victime d'un accident d'avion (une scène spectaculaire filmée d'une façon particulièrement immersive, les moyens de transport étant toujours source d'imprévus voire de catastrophes) et se retrouve coupé du monde et coupé du temps "mesurable" puisque son naufrage aérien a détruit les mécanismes des objets qui se trouvent dans ses poches. Plus que les étapes obligées de la robinsonnade, c'est la manière dont il réinvente l'usage des objets issus du naufrage qui fascine. Ultimes vestiges de la société de consommation de laquelle il a été contraint de s'extraire, tous ces objets superflus à l'origine deviennent des outils indispensables à sa survie: lames de patin transformées en couteau, tulle de robe devenu un filet de pêche, ruban magnétique de cassette vidéo servant de corde etc. Mais à la survie matérielle s'ajoute la survie psychique avec Wilson, le ballon de volley transformé en ami imaginaire. Là, on touche à ce qu'il y a de plus intime dans le cinéma de Robert ZEMECKIS, un univers peuplé de solitaires marginaux vivant en autarcie ("cast away" le titre original du film qui signifie "naufragé" résonne comme "outcast", "banni") dans un temps et un monde parallèle peuplé d'objets animés (de "Retour vers le futur" (1985) et son savant "fou" vivant dans son garage hors du temps à "Bienvenue à Marwen" (2018) et son village reconstitué de la seconde guerre mondiale peuplé de poupées à travers lequel le héros exorcise ses traumatismes). Des hommes-enfants tellement semblables à des autistes asperger qu'après son retour à la "civilisation", Chuck sera plus que jamais "Noland", son principal repère n'étant plus le temps industriel mais une paire d'ailes d'ange (les asperger ont le sentiment d'être des extra-terrestres dans le monde qui les entoure).

* L'inventeur du taylorisme ou "travail en miettes" qui consiste à décomposer la fabrication d'un objet en taches simples dont l'exécution millimétrée se fait sous la surveillance d'un chronomètre. Son application dans les usines Ford a donné naissance au travail à la chaîne et à la robotisation des hommes, une deshumanisation dénoncée entre autre par Charles CHAPLIN et Jacques PRÉVERT. Les critiques superficielles soulignant le placement de produit effectué par la société Fedex dans le film n'ont pas pris la peine de l'analyser en profondeur.

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Les Horizons perdus (Lost Horizon)

Publié le par Rosalie210

Frank Capra (1937)

Les Horizons perdus (Lost Horizon)

"Horizons perdus" c'est L'Utopie de Thomas More revue et corrigée par James Hilton (auteur du roman), Frank CAPRA (réalisateur du film adapté du livre) et indissociable du contexte historique très sombre des années 30 et 40 dans lequel le cinéaste a forgé ses plus grands chefs d'oeuvre humanistes (le roman date quant à lui de 1933 soit l'année de l'arrivée de Hitler au pouvoir). S'y ajoute une dimension mystique lié au lieu où le romancier a décidé d'implanter sa cité idéale: non sur une île mais au beau milieu d'une vallée perdue quelque part aux confins de la chaîne de l'Himalaya. Shangri-La est d'ailleurs un surprenant mélange entre une lamaserie tibétaine et un palais art déco occidental (à l'image de sa population). Inspiré du mythe bouddhiste de Shambhala ("lieu du bonheur paisible") il se situe hors du temps et hors de l'histoire dans un lieu secret à l'abri des tempêtes qui agitent le reste du monde. Un lieu qui est d'ailleurs plus spirituel que matériel puisqu'il suffit d'y croire pour le retrouver (en soi) et qu'à l'inverse ceux qui ne sont pas en paix avec eux-mêmes sont incapables d'y rester comme l'illustre l'itinéraire tragique du frère de Robert Cornway*.

La première scène de "Horizons perdus" est une plongée saisissante dans l'enfer des années précédent l'éclatement de la seconde guerre mondiale vu à travers le prisme d'une petite colonie britannique chinoise sur le point de basculer sous la domination japonaise. On assiste à une scène chaotique d'évacuation des blancs par avion alors que les chinois sont impitoyablement refoulés. Expression du racisme occidental décomplexé, cette évacuation sélective est aussi une manifestation de la vision nazie du monde "la lutte pour la vie" dont ne peuvent se sortir que "les plus forts" c'est à dire "les races supérieures"**.

Cependant l'organisateur de cette évacuation, le diplomate Robert Cornway (Ronald COLMAN) se pose des questions. Sa curiosité et ses interrogations vont l'entraîner dans la direction opposée à celle qu'il avait (consciemment) voulu prendre, entraînant avec lui ses quatre compagnons pour le meilleur ou pour le pire. Car ce que souligne également Frank CAPRA c'est le peu d'appétence de l'homme occidental pour le bonheur qui implique une frugalité, une simplicité et une modestie dont il est dépourvu. Son "logiciel idéologique" est celui du conquérant et du compétiteur agressif et perpétuellement insatisfait, pas celui du sage qui rayonne de sérénité. D'ailleurs on découvre que la raison d'être de Shangri-La est de mettre hors de portée de cet homme prétendûment seul civilisé mais en réalité enclin à la destructivité tous les trésors accumulés au cours des siècles (James Hilton et Frank Capra en se focalisant sur les livres avaient sans doute en tête les autodafés nazis mais les menaces récentes de Donald Trump sur le patrimoine culturel iranien ou les bombardements et pillages des œuvres d'art irakiennes en 2003 montrent que les occidentaux ne se sont pas vraiment amendés de ce côté en dépit des actions de l'UNESCO en faveur de la protection du patrimoine mondial de l'humanité).

Bref il y a de quoi réfléchir avec ce film très riche et remarquablement construit pour peu qu'on le replace dans son contexte et que l'on comprenne que Frank CAPRA n'avait rien de naïf mais bien au contraire érigeait ses fables humanistes en rempart contre le désespoir (un désespoir qui conduira par exemple l'écrivain Stefan Zweig au suicide en 1942). Ayant été au fil du temps amputé de 25 minutes (il en faisait 132 à l'origine), il a bénéficié d'un travail de recherche qui a permis de le restaurer en majeure partie: la bande-son a été entièrement retrouvée et quant aux images, il en manque environ sept minutes. Elles sont remplacées par des photos de tournage.

* Dans "Brazil" (1985) de Terry GILLIAM qui dépeint un terrifiant monde totalitaire dont on ne peut s'échapper qu'en esprit, la cité où vit Jill, la femme idéale que Sam retrouve (en rêve) dans les cieux se nomme justement "Shangri-La".

** Jusqu'à la bataille d'Angleterre, les nazis ont espéré trouver un terrain d'entente avec les anglais qu'ils considéraient comme des cousins "naturels" situés dans la partie haute de leur hiérarchie raciale.

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Les Chasses du comte Zaroff (The Most Dangerous Game)

Publié le par Rosalie210

Ernest B. Schoedsack et Irving Pichel (1932)

Les Chasses du comte Zaroff (The Most Dangerous Game)

Voilà un film méconnu en réalité très connu puisqu'il a été repris, en tout ou en partie dans de multiples autres œuvres, entre remakes et source d'inspiration pour des classiques comme "Les Yeux sans visage" (1960) et "Délivrance" (1971) jusqu'aux jeux vidéos contemporains. Pour ma part, j'en ai découvert la trame toute petite sans le savoir avec le vingtième épisode de la série "Ulysse 31", "Le Magicien noir" (la série de Jean CHALOPIN et de Nina WOLMARK reprend énormément d'éléments de films de SF et fantastiques, de "Alien" et "2001" pour Shyrka à "L'invasion des profanateurs de sépulture" qui est la base du scénario du "Marais des doubles" en plus d'être une formidable réinterprétation SF de l'œuvre d'Homère).

"Les chasses du comte Zaroff" est l'œuvre jumelle de "King Kong" (1932) à ceci près que Merian C. COOPER se contente d'en être le producteur préférant se concentrer sur le tournage de "King Kong" (1932) que Ernest B. SCHOEDSACK rejoindra, une fois "Les chasses du comte Zaroff" terminé. C'est pourquoi les deux films partagent non seulement les mêmes décors, le même compositeur, une partie de l'équipe technique et de la distribution mais ils ont aussi la même philosophie, d'une actualité brûlante. Cet aristocrate russe dégénéré (pour ne pas dire psychopathe) qui pour tromper son ennui n'a pas trouvé mieux que de de piéger et de pourchasser ses congénères n'est pas seulement l'incarnation du fait que l'homme peut être un loup pour l'homme. Il illustre "l'inconsistance de la civilisation [occidentale]". Alors que "les animaux qui tuent pour assurer leur subsistance sont appelés sauvages" (ce que Isabelle Filiozat appelle l'agressivité biophile, au service de la vie), "l'homme qui tue pour le sport est qualifié de civilisé" (ce que la même auteure qualifie de destructivité qui est à l'origine des guerres et aujourd'hui du désastre écologique nourrissant les appétits des prédateurs de la finance et de leurs obligés politiques et médiatiques). Et Bob le chasseur de renchérir en précisant que "ce monde est divisé en deux catégories: les chasseurs et les chassés. Par chance je suis un chasseur, et rien ne pourra changer cela". Et pourtant, le simple fait de refuser de chasser le gibier préféré du comte Zaroff qui incarne cette "morale" jusque dans ses prolongements les plus extrêmes suffira à faire basculer Bob du côté des chassés dans une lutte pour la vie tout à fait annonciatrice de l'idéologie nazie (le film date de 1932 soit peu de temps avant l'arrivée de Hitler au pouvoir). Si le film est si marquant, c'est aussi qu'il frappe l'inconscient collectif avec des images (la jungle, les marais, le brouillard) qui ont la puissance d'un conte tel que "Barbe-Bleue" dont la découverte de la "chambre secrète" équivaut à un arrêt de mort ou "Le petit Poucet", sa forêt profonde et son ogre terrifiant (et tellement d'actualité avec ce français d'origine russe coupable d'innombrables crimes pédophiles sur plus de 40 années).

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Star Wars épisode IX: L'Ascension de Skywalker (Star Wars: The Rise of Skywalker)

Publié le par Rosalie210

J.J. Abrams (2019)

Star Wars épisode IX: L'Ascension de Skywalker (Star Wars: The Rise of Skywalker)

J.J. ABRAMS fait une sorte de synthèse entre le VII opus déjà réalisé par lui-même qui jouait la carte de la nostalgie en se situant dans la continuité des épisodes IV et V et l'épisode VIII réalisé par Rian JOHNSON beaucoup plus iconoclaste. L'épisode IX reprend donc pas mal d'éléments de la trilogie des années 70-80 en "rebranchant" Palpatine, l'increvable empereur, notamment pour un final où l'avenir de l'univers dépend de la résolution d'un conflit familial ou en faisant une brève incursion sur la lune d'Endor ou en reprenant des répliques cultes ("je t'aime"/"Je sais"). On retrouve aussi une énième scène d'infiltration à bord du vaisseau amiral qui semble tellement facile qu'on se demande si ce n'est pas de la parodie. Rey toujours en quête de son identité se combat elle-même comme le faisait Luke 37 ans plus tôt. En fait d'identité, elle est bien une fille (ou plutôt une petite-fille) de comme l'est Kylo Ren ou plutôt Ben (qui signifie "fils de") mais en même temps Abrams n'abandonne pas complètement l'idée de démocratiser la Force. Finn la ressent à plusieurs reprises, il est guidé par elle mais cet aspect comme le personnage reste sous-développé par rapport aux lignées prestigieuses Vador, Skywalker et Palpatine. De même la révélation que Leia était un maître Jedi arrive trop tard pour rendre cette saga véritablement féministe, d'autant que Rey est hyper-masculinisée à force de super-pouvoirs la rendant quasiment invincible (mon fils la compare à Son Goku dans DBZ ^^). Luke était bien plus vulnérable qu'elle, il souffrait dans sa chair et son apprentissage était autrement plus laborieux. Mais à notre époque, des scènes comme celles avec Yoda seraient taxées de lenteur. Là on ne s'ennuie pas certes et il y a de superbes séquences esthétiquement parlant (celles dans les ruines de l'étoile de la mort particulièrement) mais ça ne fait pas tout à fait oublier les incohérences et les clichés. Reste la mise en abyme de la mort de Leia qui ne peut que renvoyer à celle de son interprète, Carrie FISHER, disparue prématurément à la fin du tournage de "Star Wars Les derniers Jedi" (2017) et qui figure néanmoins dans le dernier film grâce à des scènes coupées du précédent astucieusement utilisées et quelques images de synthèse.

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Le Pôle Express (The Polar Express)

Publié le par Rosalie210

Robert Zemeckis (2004)

Le Pôle Express (The Polar Express)


"Le Pôle Express" est le premier des trois films que Robert ZEMECKIS a réalisé à l'aide de la technique de la performance capture qui en était alors à ses débuts. L'aspect expérimental de son film vient appuyer sa recherche constante d'élimination des lois physiques qui compartimentent l'existence humaine. Avec le "Pôle Express", l'impossible devient possible: les obstacles se dématérialisent, permettant à la caméra de les traverser, les humains fusionnent avec leurs jouets, devenant des êtres synthétiques affranchis des contingences spatio-temporelles. C'est ainsi qu'un même acteur (Tom HANKS) après avoir pu s'incruster dans des images d'archives (dans "Forrest Gump" (1994)) peut ici incarner en même temps six personnages différents dont un vieillard et un enfant (ainsi que son père). De même le film défie les lois de la gravité avec de nombreuses séquences de montagnes russes qui donnent l'impression de voler. La plus virtuose est celle du ticket de train, à juste titre comparé à la plume de Forrest Gump (mais aussi au ticket d'or de "Charlie et la chocolaterie" ou bien à l'aventure tout aussi magique du Poudlard Express ^^). C'est cette dimension de liberté absolue qui donne au film son aura de rêve éveillé (la musique de Alan SILVESTRI y est aussi pour quelque chose) et lui permet de dépasser un discours de surface très niais sur "l'esprit de noël" et une intrigue initiatique convenue. Le "Pôle Express" en dépit de ces grosses ficelles ouvre une autre voie aux enfants sortis de l'illustration de Norman Rockwell brisant le mythe du père Noël en leur permettant de grandir sans s'amoindrir.

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Le Réveil de la Force (Star Wars : Episode VII - The Force Awakens)

Publié le par Rosalie210

J.J. Abrams (2015)

Le Réveil de la Force (Star Wars : Episode VII - The Force Awakens)

Revu hier soir à la TV l'épisode 7 qui inaugure la troisième trilogie (la dernière? Rien n'est moins sûr même si l'insuccès relatif de "Solo: A Star Wars Story" (2018) a mis un terme aux spin-off pour le moment). Si la deuxième trilogie semblait servir de prétexte à un vaste terrain d'expérimentation d'effets spéciaux alors novateurs (qui ont envahi depuis les productions mainstream du cinéma us), la troisième titille la fibre nostalgique du spectateur attaché à la première trilogie des années 70-80. S'inscrivant dans une vague de remakes modernisés des grands succès de cette époque, le film colle aux basques des épisodes 4 et 5 avec un scénario aux enjeux assez similaires et une multitude de motifs récurrents. Il y a donc l'éternel trio du héros, de l'héroïne et du comparse relookés à l'aune des exigences de la diversité. Mais force est de constater que chez Disney (qui a racheté la franchise en 2012), la seule alternative à la princesse qui attend le prince charmant, c'est le "mec déguisé en fille" invincible (Daisy RIDLEY a d'évidentes qualités athlétiques. En revanche son jeu d'actrice lui est moins évident). Son allié, Finn (John BOYEGA) le stormtrooper repenti est assez marrant mais le personnage est un peu léger et ne colle pas à ce qu'est censé être un stormtrooper dans les films précédents. Celui du pilote Poe (Oscar ISAAC) est à peine esquissé. BB8 le droïde qui avait été conçu à la fin des années 70 fait doublon avec R2D2 (même s'il est très mignon), Starkiller est une étoile de la mort XXL qui détruit des galaxies et non plus une seule planète, les fils tuent le père au lieu d'être symboliquement castrés par eux, Mark HAMILL, Carrie FISHER et Harrison FORD ont dû mal à réincarner leurs anciens personnages tant le poids des ans pèse sur eux (l'épisode 8 saura bien mieux les utiliser). L'Empire est remplacé par le nouvel ordre, la rébellion par la Résistance bref on est dans les clous des précédents opus. Reste que le film est divertissant et que le personnage gothique de Kylo Ren (Adam DRIVER) en pleine crise d'adolescence offre un vrai plus très appréciable dans ce qui apparaît plus comme un film habile de fan-service qu'une œuvre à part entière.

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Les Aventures du Baron de Münchhausen (The Adventures of Baron Munchausen)

Publié le par Rosalie210

Terry Gilliam (1988)

Les Aventures du Baron de Münchhausen (The Adventures of Baron Munchausen)


Une quinzaine d'années avant ses déboires avec Don Quichotte, Terry GILLIAM s'était déjà embarqué dans une grosse galère avec un héros à sa (dé)mesure en la personne de Karl Friedrich Hieronymus Freiherr von Münchhausen, mercenaire allemand dans l’armée russe, qui combattit les troupes turques avant de devenir l'un des mythomanes les plus célèbres de la littérature grâce à Rudolf Erich Raspe qui coucha par écrit ses prétendus "exploits" et Gustave Doré qui les illustra. Terry GILLIAM s'est approprié ce matériau originel (le choix de John NEVILLE pour incarner le baron est une référence directe à Gustave Doré dont il s'est beaucoup inspiré) en y ajoutant son imagination débridée, sa créativité visuelle et sa soif de liberté. Son film est donc un nouvel épisode métaphorique (après "Bandits, bandits…" (1981) et "Brazil") (1985) de sa lutte don quichottesque contre les moulins à vents des studios incapables de contrôler ce rêveur aux projets mégalomanes (autrement dit synonymes de gouffre financier). La scène où le baron s'envole toujours plus haut dans le ciel avec la belle Vénus toute droit sortie du coquillage de Botticelli (Uma THURMAN âgée de 18 ans dans son premier rôle) avant d'être brutalement ramené sur terre par le dieu Vulcain (Oliver REED) et la jeune Sally (Sarah POLLEY) est assez représentative de son rapport au monde ("Brazil" (1985) contient des scènes iconiques identiques). On peut en dire autant de la scène "fauchée" pour cause de dépassement de budget (mais qui est l'une de mes préférées) sur la lune, magnifique hommage à Georges MÉLIÈS et incroyable délire sur la dualité corps/esprit (Robin WILLIAMS comme Robert De NIRO dans "Brazil" (1985) y avance masqué, il est pourtant excellent). Car même si Terry GILLIAM est selon le journal le Monde un "maudit rêveur", il est aussi extraordinairement persévérant, réussissant toujours au final à concrétiser ses projets. C'est tout le sel du dénouement du film. Alors que le baron, surgissant sur une scène de théâtre tel un acteur a semblé tout au long du film n'offrir à son auditoire avide d'évasion (comme on a pu souvent le constater dans les périodes de guerre) qu'un dérivatif illusoire, voilà que lorsqu'ils se décident à ouvrir les portes de leur ville assiégée, ils découvrent que les turcs se sont enfuis, illustrant la phrase de Dumbledore à la fin des "Reliques de la mort", "Bien sûr que tout cela se passe dans ta tête Harry mais pourquoi faudrait-il en conclure que ce n'est pas réel?"

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La Folle histoire de l'espace (Spaceballs)

Publié le par Rosalie210

Mel Brooks (1987)

La Folle histoire de l'espace (Spaceballs)

Il n'est pas si simple de faire une parodie qui tienne la route (je me souviens du consternant "Le Silence des Jambons" (1993) avec un Billy ZANE qui s'était particulièrement fourvoyé dans le rôle de "Joe Di Fostar" ah ah ah). "La Folle histoire de l'espace" est pour filer la métaphore sexuelle de son titre original "Spaceballs" d'un autre "calibre". Bien sûr le film parodie avec soin et jubilation les films de SF les plus populaires des années 70-80 mais il y ajoute en plus une couche de satire clairvoyante voire prophétique sur les mutations d'une industrie hollywoodienne concentrée entre quelques mains, abandonnant toute ambition créative au profit d'une exploitation marchande tous azimuts des mêmes succès. Voir les sept nains ainsi catapultés (en 1987!) dans l'univers Star Wars ne peut que faire penser à une anticipation du rachat de la franchise par Disney en 2012 alors que les incursions dans la saga Indiana Jones, les Transformers ou la scène la plus culte de "Alien, le huitième passager" (1979) avec John HURT qui reprend son rôle emblématique de Kane va au-delà du cross-over: cette dernière séquence rappelle que le ver est littéralement dans le fruit ^^. Et c'est ainsi que le film multiplie les placements de produits les plus voyants et les plus grotesques de la princesse "Vespa" à "Pizza the Hutt" (qui rappelle moins son modèle de grosse limace visqueuse que M. Creosote, le monstre insatiable symbolisant la consommation à outrance du "Monty Python : Le Sens de la vie" (1982)) cousin du vorace et vomitif sans-visage de Hayao MIYAZAKI). "Spaceballs" se décline d'ailleurs en une multitude de produits dérivés, une séquence entière du film prenant la forme d'un télé-achat dans une boutique que l'on croirait toute droit sortie d'un parc Disneyland (quand je dis que ce film était prophétique ^^). Mel BROOKS le réalisateur qui joue également le rôle du président Esbroufe (et de Yahourt/Yoda) fait d'ailleurs un gros plan sur les vidéos de ses précédents films. Quant à l'inénarrable Rick MORANIS dans le rôle de "casque noir" (échangé lors d'une séquence dans le désert contre un casque colonial et des culottes courtes dignes des aventures de Tintin ou d'un autre sketch des Monty Pythons dans "Monty Python : Le Sens de la vie" (1982)), il fait penser à tous les dictateurs-nabots de la terre qui à force d'avoir (au sens propre) la grosse tête sont juste ridicules.

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Alien 3 (Alien³)

Publié le par Rosalie210

David Fincher (1992)

Alien 3 (Alien³)

Le chapitre millénariste et nihiliste de la saga Alien a le mérite de proposer quelque chose de différent des deux premiers volets même s'il se situe soigneusement dans leur continuité: les premières images reprennent celles de la fin du film de James CAMERON, la logique du sacrifice d'un groupe au profit d'intérêts militaires et géopolitiques est respectée ainsi que le climat claustrophobique du premier volet et c'est Pete POSTLETHWAITE qui reprend le cultissime "kitty, kitty" que Harry Dean STANTON prononçait dans le film de Ridley SCOTT. De plus le film file la métaphore de l'Alien comme une projection du "monstre qui est en nous" bien plus explicitement que ne le faisaient les deux premiers films. En se situant dans une prison composée de dangereux psychopathes mais aussi en faisant de Ripley (Sigourney WEAVER, de plus en plus androgyne) un être maudit. Maudit parce que condamné à errer sans fin dans l'espace, maudit parce que condamné à voir ses compagnons de route périr et elle seule survivre, maudit parce qu'ayant trop côtoyé l'Alien pour rester extérieure à lui, maudit parce que destiné à perpétuer son espèce. De ce point de vue David FINCHER est aux antipodes de James CAMERON. Alors que ce dernier dans le chaos ambiant s'évertuait à préserver l'humanité de ses personnages et à recréer un cocon familial (bref à rassurer, à redonner des repères), David FINCHER détruit tout le dispositif (au grand dam de Cameron d'ailleurs) pour faire au contraire de Ripley la mère du monstre, la "mauvaise" mère, celle-ci étant obligée de disparaître avec lui pour s'en débarrasser. Le même pessimisme est à l'œuvre d'ailleurs en ce qui concerne les robots androïdes. Alors que James CAMERON avait donné beaucoup d'humanité à Bishop, tendant à faire penser que son créateur était un homme de bien, David FINCHER en fait au contraire l'un des dirigeants qui souhaite s'emparer de l'alien pour en faire "l'arme ultime". Cette confrontation de points de vue est donc tout à fait intéressante car elle complète la réflexion de la saga sur l'altérité féminine vue comme un potentiel danger (ce n'est pas un hasard si de film en film Ripley se masculinise toujours plus) et surtout la maternité qui est un processus qui échappe encore largement au contrôle humain et qui est de ce fait le lieu de tous les fantasmes. Il n'en reste pas moins que la mise en scène est parfois redondante (la traque, fuite, capture du monstre ressemble à un jeu vidéo qui n'en finit pas), la photographie chromatique finchienne est très glauque et il faut supporter son goût pour l'organique (insectes et vers sur les cadavres, autopsie filmée de façon à voir l'intérieur du corps etc.). Si la mue de l'alien, né d'un animal et ayant pris son apparence est intéressante, les effets spéciaux apparaissent aujourd'hui un peu grossiers, l'incrustation de la créature dans l'image est notamment par trop visible.

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Aliens, le retour (Aliens)

Publié le par Rosalie210

James Cameron (1986)

Aliens, le retour (Aliens)

"Aliens, le retour" est une suite réussie de "Alien, le huitième passager" (1979). James CAMERON qui était alors au début de sa carrière établit des éléments de continuité avec le chef d'oeuvre de Ridley SCOTT tout en développant son style propre. Si l'on retrouve donc une grande quantité d'éléments faisant écho au premier film (personnages, objets, plans, éléments de mise en scène dont une dernière demi-heure de climax particulièrement prenante se terminant par l'explosion non d'un vaisseau mais d'une planète et l'expulsion de l'alien caché du vaisseau de secours), on a affaire ici à une version XXL spectaculaire remplie d'action et d'effets spéciaux qui fait plus penser à un film de guerre SF du type "Starship Troopers" (1997) qu'au huis-clos anxiogène intimiste du premier volet. Mais James CAMERON a un véritable talent pour jouer sur les échelles. Il ne perd jamais de vue son personnage principal et lui donne même une ampleur qu'il n'avait pas chez Ridley SCOTT. Avec James CAMERON, Ripley (Sigourney WEAVER) devient l'un de ces personnages féminins particulièrement forts qu'il affectionne. Et si le titre du film de Cameron est au pluriel (car de même que les protagonistes humains, le nombre d'aliens à combattre est démultiplié), Ripley se retrouve à livrer un duel avec la reine-mère des aliens et l'un des enjeux du film se focalise sur la maternité (il y a quelque chose de "L'origine du monde" jusque dans le titre). L'exploration de l'espace dans le premier film cède ici la place à sa colonisation avec le même cynisme des dirigeants consistant à envoyer au casse-pipe les citoyens ordinaires pour s'emparer de terres et de spécimens extra-terrestres afin on l'imagine de les transformer en machines de guerre à leur service. C'est contre cette monstruosité que s'insurge Ripley qui défend toujours l'humain contre les intérêts géopolitiques ou militaires. Dans le premier film, elle affrontait Ash, le robot androïde scientifique programmé par la compagnie pour ramener l'alien. Dans le deuxième, elle affronte son avatar, Burke (qui bien que fait de chair et de sang est bien moins humain que le robot androïde les accompagnant, Bishop. Cameron souligne à plusieurs reprises que les robots sont à l'image des humains qui les créent). C'est pourquoi le combat de Ripley contre la reine-mère alien peut se lire à plusieurs niveaux. Au premier degré, il s'agit de sauver Newt, la seule survivante de la colonie que Ripley adopte comme une fille de substitution (sa fille biologique étant décédée sans descendance au cours des 57 ans que Ripley a passé à dériver dans l'espace en hyper-sommeil entre le premier et le deuxième film). Au second, ce combat a pour enjeu l'avenir de l'humanité car si en tant que femme et mère, Ripley n'agit pas, sa destruction est programmée. Une vision des années 80 toujours aussi pertinente de nos jours.

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