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Robin des Bois (Robin Hood)

Publié le par Rosalie210

Allan Dwan (1922)

Robin des Bois (Robin Hood)

S'il ne s'agit pas de la première adaptation cinématographique du mythe du justicier hors la loi qui vole aux riches pour donner aux pauvres, il s'agit de l'une des premières superproductions de l'histoire: 2h20, un budget de 1,4 millions de dollars, des milliers  de figurants, le plus grand décor alors jamais construit pour un film muet et le plus  grand succès de l'année 1922. A cela il faut ajouter la première superstar de la cascade, Douglas Fairbanks dans l'un de ses rôles les plus célèbres. Et pour cause, il livre une prestation en apesanteur, multipliant les prouesses acrobatiques et interprète un Robin des bois joyeux, léger et perpétuellement en mouvement d'un charme irrésistible: 100 ans après, il crève toujours l'écran. Eternel adolescent, on le voit s'amuser avec ses ennemis de façon très cartoonesque (on pense aussi à la façon dont Astérix sous potion et Obélix envoient valser les romains dans les airs). Cependant, il faut attendre plus d'une heure avant de voir surgir le diablotin bousculant une mise en scène bien trop sage. La faute à un prologue fastueux pour ne pas dire fastidieux (que l'on appellerait aujourd'hui une préquelle) essayant de donner une explication réaliste à l'origine du personnage avant que la légende telle qu'on la connaît se déploie dans toute sa splendeur, entraînant une nette accélération du rythme du film.

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La Loi de Téhéran (Metri Shesh Va Nim)

Publié le par Rosalie210

Saeed Roustaee (2021)

La Loi de Téhéran (Metri Shesh Va Nim)

J'aurais dû voir "La loi de Téhéran" en avant-première mais manque de chance, je n'avais pas pu me libérer. Manque de chance car c'est le premier film iranien qui m'enthousiasme autant. La mise en scène est brillante mais elle ne fait pas tout. Des thrillers efficaces mais sans âme, on en a vu beaucoup au cinéma. Or celui-ci est au service d'une véritable histoire et de personnages qui existent et ont une résonance universelle tout en s'inscrivant dans le contexte de leur pays d'origine.

"La loi de Téhéran" souligne un paradoxe mainte fois vérifié pourtant: plus une société est puritaine et répressive, plus elle génère de comportements déviants. "L'ordre moral" de la théocratie iranienne cache donc une réalité aux antipodes des buts affichés par les religieux au pouvoir. Ainsi le film montre brillamment que l'Iran est incapable d'endiguer l'addiction de masse de sa population à la drogue et que sa criminalisation n'a aucun effet sur le problème. L'accès aux produits opiacés est facilité par la position géographique du pays par lequel transite l'opium afghan (90% de la production mondiale) et deux très belles scènes qui se répondent au début et à la fin montrent que la chasse aux drogués par la police est inefficace, leur nombre augmentant trois fois plus vite que celui de la population. De plus, le film montre que si les arrestations touchent surtout les hommes, c'est toute la société qui est gangrenée par ce fléau. Des femmes de dealers sont complices en dissimulant sur elles les substances illicites, des pères accusent leurs enfants pour éviter d'aller en prison ou d'être condamné à mort, des amis ou des fiancé(e)s deviennent des traîtres etc.

Ce réalisme documentaire qui innerve le film (de véritables drogués sont venus prêter main-forte en tant que figurants aux acteurs) n'empêche pas celui d'être puissamment romanesque avec le portrait de deux flics tenaces mais ambigus et surtout d'un caïd tout aussi acharné à lutter qu'eux mais qui se retrouve dépassé par les événements, entraînant dans sa chute toute sa famille, idée là encore illustrée à l'aide d'un montage particulièrement expressif. Le personnage de Nasser est de la trempe d'un Tony Montana ou d'un Michael Corleone ou encore d'un Cosmo Vitelli c'est à dire qu'il dépasse le jugement manichéen et ce d'autant plus que tout ce qu'il aura bâti pour sortir de la misère et aider sa famille lui sera brutalement repris. A l'image de la frappante scène d'introduction, le film montre une société d'emmurés vivants dans laquelle ne subsiste aucun espoir (la mort de l'enfant d'Hamid en est une autre illustration).

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Cours, Lola, cours (Lola rennt)

Publié le par Rosalie210

Tom Tykwer (1998)

Cours, Lola, cours (Lola rennt)

« Un film sur les possibilités de la vie, pour moi, c’est aussi forcément un film sur les possibilités du cinéma ». Pour son troisième film qui lui a permis de se faire connaître à l'international (je l'ai d'ailleurs vu au cinéma à sa sortie), Tom Tykwer imagine un récit minimaliste mais à la forme très travaillée, le tout sur un rythme effréné et une musique endiablée. Lola, une jeune fille aux cheveux rouge feu doit trouver en 20 minutes top chrono 100 mille marks et les donner avant l'heure fatidique à Manni, son petit ami qui l'attend à l'autre bout de la ville. Faute de quoi, la mort est au bout du chemin. Mais la magie du cinéma où tout est possible fait que Lola peut revenir au point de départ et retenter sa chance. Elle a droit à trois essais.

Tom Tykwer utilise quatre techniques différentes (photographie, vidéo, animation et cinéma) afin de démultiplier les possibilités de son récit de course contre la montre sans perdre le spectateur. Ainsi l'histoire du couple principal (très fortement identifié par des couleurs primaires flamboyantes, le rouge pour ce qui touche à Lola, le jaune pour ce qui concerne Manni) se joue en format cinéma, les intrigues secondaires qu'ils percutent mais qui n'ont pas de lien direct avec eux (les péripéties sentimentales du père de Lola par exemple) sont tournées en vidéo dans des teintes très ternes, le futur potentiel des passants qu'ils croisent apparaît sous forme de flashs instantanés et fixes qui se succèdent à toute vitesse (on entend même le bruit répétitif de l'appareil photo) alors que les flashbacks sont eux réalisés en noir et blanc. Enfin les séquences impossibles à réaliser en prise de vue réelle sont remplacées par l'animation, notamment la scène de l'escalier au début de chaque partie du triptyque qui s'avère déterminante pour la suite. 

En effet, comme dans la saga "Retour vers le futur", "Cours, Lola, cours" est un film sur le temps ou plutôt la distorsion du temps au cinéma (d'où les accélérations, les split-screen comme dans la série "24h chrono" etc.) Aucune explication rationnelle ne vient éclairer la possibilité qu'a l'héroïne de recommencer trois fois son parcours. On peut donc tout imaginer, y compris une expérience de mort imminente qui conduit à "rembobiner le film" et à proposer une nouvelle version. Comme dans la boucle temporelle de "Un jour sans fin", l'héroïne apprend de ses erreurs ce qui contribue à modifier le récit par des réactions en chaîne (l'effet papillon). On peut également y voir un écho à l'univers du jeu vidéo où on remet les pendules à zéro et on recommence une partie en temps limité en essayant de faire mieux (on constate par exemple que les trajectoires de Lola sur le dallage en plongée ne sont pas les mêmes d'une version à l'autre, d'abord en diagonale, puis en ligne droite). Enfin Lola est aussi le double du réalisateur, deus ex machina qui a un contrôle total sur le film. La scène du casino, totalement irréelle, peut également s'entendre ainsi, d'autant que c'est l'une de celles où les références cinématographiques sont les plus évidentes. Le tableau montrant le chignon d'une femme vue de dos fait penser à "Vertigo" qui faisait justement de Scottie un scénariste et un réalisateur en puissance puisqu'il réorganisait le monde selon ses désirs. De plus le chignon renvoie au motif de la spirale qui est au coeur du film de Alfred Hitchcock mais aussi de Tom Tykwer. Le cri de Lola (la nouvelle Marlène Dietrich?) qui casse le verre et l'aide à gagner à la roulette est une allusion évidente à "Le Tambour" qui lui aussi influait de façon invisible et décisive sur le destin. 

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Sin City

Publié le par Rosalie210

Robert Rodriguez, Frank Miller, Quentin Tarantino (2005)

Sin City

J'aime beaucoup les oeuvres hybrides et "Sin City" l'est à tous les niveaux: 

- Le style. "Sin City" transpose au cinéma l'esthétique de la bande dessinée de Frank Miller (co-réalisateur du métrage), devenant un semi-film d'animation produit par une filiale de Disney (incroyable mais vrai!). De plus, ce superbe noir et blanc sans nuances de gris est rehaussé par des taches de couleur qui symbolisent le vice et la violence mais qui la mettent également à distance en la stylisant.

- Le genre. L'univers, les personnages, les codes narratifs sont ceux du film noir des années 50 mais la violence grand-guignolesque et les belles filles guerrières, sexy... et interchangeables m'ont fait penser aux vipères assassines de "Kill Bill" d'un certain Quentin Tarantino qui d'ailleurs a également réalisé avec Robert Rodriguez les deux volets de "Grindhouse" ("Boulevard de la mort", lui aussi peuplé de belles pépées sans identité et "Planète terreur") et offre un coup de main sur certaines scènes de "Sin City". 

- Les héros masculins. "Sin City" est un film de mecs "hard boiled", rompus à l'usage de l'ultra-violence (subie comme infligée), arpentant les bas-fonds nauséabonds d'une ville dont toutes les instances (justice, police, clergé, sénat etc.) sont corrompues. Et en même temps, ces hommes possèdent en eux un romantisme noir qui se manifeste notamment par le besoin d'épancher par la parole et/ou par l'écriture leur âme foncièrement mélancolique qui se raccroche à quelques îlots d'amour et de beauté. Si Mickey Rourke, méconnaissable, est absolument impressionnant dans le rôle de la brute Marv attaché au souvenir de la seule femme qui lui a offert une nuit d'amour, c'est Hartigan, campé par un Bruce Willis à son meilleur qui offre la prestation la plus complexe en homme malade et tourmenté par un amour impossible (car frappé de l'interdit d'un inceste symbolique qui, s'il le brave, le ravale au rang du prédateur dont il cherche à protéger la jeune fille qu'il aime depuis l'enfance). Côté méchants, le plus original et stylé est le silencieux mais néanmoins terrifiant cannibale interprété par Elijah Wood (pendant masculin de la découpeuse ninja Miho jouée par Devon Aoki) alors que le plus drôle (à son corps défendant) est Jackie boy (Benicio del Toro) dont la "prestation post-mortem" (réalisée par Tarantino) relève de la comédie d'épouvante.

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La Main au collet (To Catch a Thief)

Publié le par Rosalie210

Alfred Hitchcock (1955)

La Main au collet (To Catch a Thief)

J'avais peu de souvenirs de ce film qui en dépit d'une belle photographie, de costumes splendides, de plans aériens novateurs assez impressionnants pour l'époque et d'une distribution étincelante (après tout, il se déroule sur la Riviera, entre Cannes et Nice!) pâtit d'un scénario assez faible. Alfred Hitchcock a manifestement voulu prendre des vacances avant d'entamer la série de grands films que tout le monde connaît. "La Main au collet" est donc une récréation légère, souvent drôle et ultra glamour avec ses deux grandes stars qui avaient toutes deux déjà tournées deux fois avec Alfred Hitchcock. Cary Grant est un Arsène Lupin repenti plein de charme très proche de sa véritable biographie (il mentionne à un moment son passé d'acrobate) et Grace Kelly incarne une fois de plus la blonde hitchcockienne idéale c'est à dire le feu sous la glace. Les apparences sont en effet trompeuses et la "reine des neiges" ^^ s'avère à la manière des screwball comédies mener la danse, que ce soit pour donner un baiser (et plus si affinités, la métaphore du feu d'artifices vu depuis la fenêtre de sa chambre d'hôtel étant tout aussi explicite que celle du train dans le tunnel de "La Mort aux trousses"), se débarrasser d'une rivale ou bien conduire à tombeau ouvert (et Cary Grant fait alors penser à son personnage de "Allez coucher ailleurs" mais sans la jupe^^). Cela prêterait à sourire si ça ne préfigurait pas sa mort tragique dans un accident de voiture en 1982 sur ces mêmes routes. Nul ne peut ignorer en effet que l'année suivante, elle épousait Rainier de Monaco ce qui la conduisit à arrêter sa carrière, au grand dam de Alfred Hitchcock qui ne parvint jamais à la faire revenir sur sa décision et se vengea de cette frustration sur la plupart des actrices qui furent chargées de la remplacer. 

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Vanishing

Publié le par Rosalie210

Denis Dercourt (2021)

Vanishing

Vanishing est un film franco-coréen que j'ai eu la chance de pouvoir regarder en avant-première au cinéma alors que sa sortie est prévue en France directement sur Canal + en avril 2022. Autrement dit comme pour les productions Netflix, il n'est pas prévu qu'il sorte en salle en France sauf lors de projections exceptionnelles.

L'histoire est le reflet du cosmopolitisme de l'équipe du film, elle se déroule en Corée du sud avec une majorité d'acteurs coréens mais a pour principale protagoniste une médecin-légiste française, Alice Launey jouée par une actrice d'origine russe à la carrière internationale, Olga Kurylenko. Trois langues sont principalement utilisées: le français, le coréen et l'anglais pour les relations entre les policiers coréens et Alice Launey même si celle-ci dispose d'une interprète qui joue un rôle essentiel dans l'intrigue. Il s'agit d'un thriller extrêmement bien ficelé autour d'un trafic d'organes se déroulant sur le sol coréen mais dont les victimes sont des immigrées d'origine chinoise venues travailler comme femme de ménage en Corée. Le début du film nous fait remonter toute la filière criminelle avec une grande fluidité et uniquement grâce aux images, depuis celui qui utilise sa vieille mère sénile pour piéger et livrer aux trafiquants d'organes les jeunes chinoises envoyées par une société vraisemblablement complice ironiquement nommée "dream" (le profil recherché est en effet celui du groupe sanguin B- qui est très fréquent au sud de la Chine alors qu'il ne représente que 2% des cas dans le monde) jusqu'à une clinique de chirurgie esthétique utilisée comme couverture pour les opérations du chirurgien véreux qui y officie, chirurgien marié par ailleurs à l'interprète de Alice Launey. Celle-ci qui est à Séoul pour un colloque est invitée à participer à l'enquête grâce à sa technique de prise d'empreintes sur les cadavres en décomposition avancée retrouvés par la police locale, technique inconnue en Corée du sud. La police à la ramasse est un clin d'oeil notamment à "Memories of murder" de Bong joon-ho, même si heureusement, elle n'en est plus à l'âge de pierre dépeint par l'illustre réalisateur de "Parasite". Elle se retrouve à faire équipe avec un jeune commissaire, Jin-Ho Park (Yeon-seok Yoo) qui à ses heures perdues tord les cuillères pour épater sa jeune nièce (un tour de magie que j'avais déjà vu dans le manga "20th Century Boys", j'en conclue qu'il doit être populaire en Asie). Les deux membres de ce duo peu conventionnel qui s'expriment en trois langues différentes (une femme de tête forte et fragile à la fois car hantée par une expérience traumatique et un homme plus jeune et plus maladroit, du moins en apparence) ne sont d'ailleurs pas insensibles l'un à l'autre ce qui ajoute une touche de romantisme, lequel est contrebalancé par l'histoire tragique de l'interprète d'Alice, amenée à commettre le pire pour tenter de sauver son mari, pris au piège de son pacte avec la mafia.

Seul bémol de ce film sans temps mort, fluide et nerveux à la fois qui met en relation plusieurs genres et plusieurs cultures: quelques personnages qui apparaissent fugitivement (un couple avec un enfant en attente de greffe, un indonésien faisant partie de la filière des trafiquants) ne sont pas développés, laissant ainsi quelques trous dans la raquette.

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Complot de famille (Family Plot)

Publié le par Rosalie210

Alfred Hitchcock (1976)

Complot de famille (Family Plot)

Le dernier film de Alfred HITCHCOCK ne m'avait pas laissé un souvenir impérissable. Mais j'ai pris beaucoup de plaisir à le revoir. Certes, c'est un film mineur dans sa filmographie mais ce terme chez lui est tout relatif. "Complot de famille" est une comédie policière réussie dans laquelle tonton Alfred n'a d'autre prétention que de s'amuser et de nous amuser. Et il en a bien le droit! En effet il n'a plus rien à prouver depuis longtemps et offre en guise de pirouette finale (même s'il ne savait sans doute pas que ce serait son dernier film) un film léger, ludique, espiègle qui se termine sur le joli visage en forme de coeur de la pétillante Barbara HARRIS nous faisant un joli clin d'oeil complice. Son rôle de médium arnaqueuse préfigure celui tout aussi savoureux de Emma STONE dans "Magic in the Moonlight" (2014). A ceci près qu'elle bénéficie d'un complice de luxe: rien de moins que le père de Laura DERN, Bruce DERN ^^. Ce couple de petits escrocs au style "populo" très sympathiques et sexuellement libérés (Alfred HITCHCOCK a pu aussi se faire plaisir à ce niveau-là, même s'il s'agit d'une libération de la parole plus que des actes montrés à l'écran) en croise un autre beaucoup plus aisé, chic et glamour mais dont les revenus proviennent essentiellement de kidnapping de personnes fortunées, échangées contre des diamants. On découvre même pire en ce qui concerne l'homme, Arthur Adamson (William DEVANE) puisque c'est aussi un assassin sans scrupules. Toute l'ironie de l'histoire est basée sur un quiproquo: le couple d'Arthur Adamson et de Frances (Karen BLACK) est persuadé que l'enquête que mènent Blanche et George à leur sujet a pour but de les dénoncer alors qu'il s'agit au contraire de retrouver l'héritier d'une immense fortune. Pas d'effets spectaculaires, peu de véritable suspense (hormis une scène d'action sur une route sinueuse) mais un divertissement agréable et décontracté dans une veine d'humour noir qu'affectionnait Alfred Hitchcock: le film se situe dans la même lignée que "Mais qui a tué Harry ?" (1955). A noter, la musique est signée de John WILLIAMS.

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Diva

Publié le par Rosalie210

Jean-Jacques Beineix (1981)

Diva

Je ne suis pas spécialement fan de Jean-Jacques Beineix et de l'esthétique années 80 qui l'accompagne mais j'aime bien "Diva" son premier film qui a acquis le statut de film culte. Celui-ci a en effet relativement bien vieilli comparativement à d'autres oeuvres de cette époque et je pense que c'est lié au fait que "Diva" est un alliage réussi d'éléments contradictoires. En effet la réalisation tape-à-l'oeil (la critique a suffisamment taillé en pièces les films de Beineix en raison de leur parenté avec l'esthétique du clip et de la publicité pour que je n'aie pas besoin de développer davantage cet aspect) est contrebalancée par un travail d'épure qui par moments, touche, n'ayons pas peur des mots, la grâce (pour le dire autrement, il y a une âme derrière l'image). Chaque passage où l'on écoute l'air extrait de "La Wally" chanté par Wilhelmenia Wiggins Fernandez (la diva du titre qui fascine Jules, l'improbable facteur mélomane héros de l'histoire) s'accompagne de mouvements de caméra planants, épousant le rythme lent et hypnotique de la musique. Il y a aussi l'univers tout aussi hypnotique de l'allié de Jules, Gorodish qui pratique la philosophie zen dans son loft quasi vide plongé tout entier dans le "grand bleu" de "La Vague" de Hokusai (le travail très pop art sur les couleurs primaires, jaune, rouge et bleu et les jeux de lumières et de mouvements oscillatoires d'une sculpture associée au bleu renforcent l'effet d'hypnose ressenti, un peu comme l'atmosphère de "Blade Runner").

Le motif de la vague a aussi selon moi un autre sens. "Diva" rend à sa manière -décalée- hommage aux courants qui l'ont précédé: le réalisme poétique et la nouvelle vague. Côté Carné, le film met en avant des décors de studio et une galerie d'acteurs typés inconnus à l'époque mais que le film allait hisser au rang de stars: Gérard Darmon, Dominique Pinon et surtout Richard Bohringer. Côté Godard (outre les couleurs primaires), je ne peux pas m'empêcher de penser à une parodie du début de "Le Mépris" quand j'entends les répliques de Dominique Pinon dans le film "j'aime pas Beethoven", "j'aime pas les ascenseurs", "j'aime pas ta gueule"* et son comparse qui finit par lui dire "mais t'aime rien alors?" (sans parler de l'actrice asiatique qui joue Alba, la compagne de Gorodish et qui je trouve joue comme Bardot).

Enfin "Diva" a une parenté qui m'a sauté aux yeux lorsque je l'ai revu avec le cinéma de Leos Carax et particulièrement ses deux premiers films, "Boy meets Girl" et "Mauvais Sang" (dans la manière de filmer des marginaux, les quais déserts de Paris, des intérieurs désaffectés, de mener un thriller, de décrire des couples improbables incarnant le "modern love") ainsi qu'avec celui de Jean-Pierre Jeunet. Et pas seulement en terme d'esthétique (des décors en studio à la Trauner façon "Le jour se lève") mais aussi en terme de "gueules de cinéma". Ainsi les répliques de Dominique Pinon font penser au court-métrage "Foutaises", le prototype du "Fabuleux destin de Amélie Poulain" où celui-ci alterne entre les "j'aime" et les "j'aime pas". Alors "cinéma du look" comme cette "nouvelle-nouvelle vague" (incluant aussi évidemment Luc Besson) a été qualifiée ou bien cinéma "d'atmosphère-atmosphère, est-ce que j'ai une gueule d'atmosphère!"

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Capitaine Conan

Publié le par Rosalie210

Bertrand Tavernier (1996)

Capitaine Conan

J'ai eu il y a quelques années un "faux départ" avec "Capitaine Conan". Enthousiasmée par "La Vie et rien d'autre" (mon film préféré de Bertrand Tavernier) j'ai voulu enchaîner avec le DVD de son autre grand film sur l'après-guerre (de la première guerre mondiale) mais j'ai baissé les bras au bout de cinq minutes, découragée par l'argot des tranchées dont j'étais loin de connaître tous les termes qui plus est débité à une cadence infernale.

Il serait pourtant vraiment dommage de se laisser arrêter par cet obstacle (gênant surtout au début, après, on s'y habitue ou alors on prend un lexique pour s'aider). Les films historiques de Bertrand Tavernier, saisissants de réalisme et de dynamisme comme s'ils étaient une sorte de reportage de terrain "pris sur le vif" font partie des meilleurs qui existent par le fait d'être capable de donner vie et chair au passé, par le fait qu'il s'agit d'un cinéma humaniste, un cinéma filmé à hauteur d'homme, sans aucun manichéisme. Une scène en particulier illustre bien "l'esprit Tavernier" dans "Capitaine Conan": celle de l'armistice du 11 novembre 1918 qui est totalement démythifié. On y voit des soldats torturés par la dysenterie dont certains partent se cacher derrière le premier obstacle venu pour se soulager plutôt que d'écouter un discours officiel aux allures de pétard mouillé, au sens propre d'ailleurs puisqu'il pleut des cordes. D'ailleurs cette armistice n'en est pas un pour Conan et ses hommes que l'on envoie en Roumanie traquer le Bolchévik. Et même s'ils avaient été démobilisés, la guerre aurait de toute façon continué dans leur tête et dans leur corps.

Car ce que le film de Bertrand Tavernier montre d'une façon admirable, c'est comment la "culture de guerre" c'est à dire la sauvagerie vécue au quotidien imprègne des hommes au point qu'ils ne peuvent plus revenir à la civilisation une fois celle-ci terminée. La décision d'envoyer le corps franc du capitaine Conan terroriser les roumains plutôt que de les faire revenir en France est d'un cynisme révoltant. Un redoutable commando dont la France a bien su se servir en temps de guerre comme champions du combat au corps à corps mais dont elle cherche ensuite à se débarrasser en temps de paix quand ces comportements deviennent ceux de hors la loi, délinquants et criminels en se défaussant de ses responsabilités et en "refilant le bébé" à d'autres pays. C'est pourquoi, sans excuser les exactions dont se rendent coupables ces soldats, Bertrand Tavernier montre comment ceux-ci sont à la fois des bourreaux et des victimes. Et dresse au passage deux admirables portraits, non moins admirablement joués, celui de leur capitaine, Conan (Philippe Torreton, magistral), un dur à cuire fruste issu du peuple qui partage le sort de ses hommes et les défend corps et âme au point de prendre tous leurs errements sur lui et celui du lieutenant Norbert (Samuel Le Bihan) issu d'un milieu intellectuel et bourgeois donc bien plus policé et conscient des lois mais qu'une amitié indéfectible lie à Conan. Norbert décide d'accepter la mission de commissaire-rapporteur pour faire régner la justice au milieu du chaos. Non une justice désincarnée mais une justice humaine pour redonner des repères à ces hommes perdus et les protéger du pire tout en protégeant également la société de leur dérive. Cela ne va pas sans tensions avec Conan qui accuse Norbert d'être un vendu (la vision que Conan -et derrière lui Bertrand Tavernier- a de l'Etat-Major est digne de celle de Stanley Kubrick dans "Les Sentiers de la gloire" même si le personnage du lieutenant joué par Bernard le Coq vient nuancer le propos) mais leur conflit lié à leur différence de classe et d'éducation renforce au final leur amitié. Au point que l'on voir Conan faire ce qu'aucun membre du tribunal militaire ne daigne faire: aller sur le terrain pour comprendre comment un jeune soldat a pu perdre les pédales au point de se livrer à l'ennemi avec des secrets militaires dans la poche (haute trahison qui le rend passible du peloton d'exécution). La valeur du geste étant lié au fait que ce soldat est pourtant issu de l'aristocratie, sa mère étant même liée aux membres de l'Etat-Major. On comprend ainsi comment le fait de se comporter en homme d'honneur sur le champ de bataille peut transcender les barrières de classe sociale (soit exactement ce que démontrait Jean Renoir dans "La Grande Illusion" autre grand film sur cette période). La scène finale, d'une grande force émotionnelle montre aussi comment une fois sorti pour de bon de la guerre, Conan qui faisait office de pilier pour tous les autres s'avère rongé de l'intérieur par le mal incurable de ce qu'il a subi et infligé. Une scène si forte qu'elle vous poursuit bien au-delà du visionnage du film*.

* Que Philippe Torreton ait reçu le césar du meilleur acteur et Bertrand Tavernier celui du meilleur réalisateur pour ce film n'est que justice.

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L'Homme de Rio

Publié le par Rosalie210

Philippe de Broca (1964)

L'Homme de Rio

L'Homme de Rio, deuxième collaboration entre Philippe de Broca et Jean-Paul Belmondo (après "Cartouche") c'est le film qui fait la liaison entre les aventures de Tintin et la saga Indiana Jones. Les emprunts aux albums du célèbre reporter sont légion et rappellent que L'Homme de Rio est issu d'un projet d'adaptation de l'oeuvre de Hergé: les statuettes dissimulant un secret? "L'Oreille Cassée". Les enlèvements d'ethnologues? "Les Sept boules de cristal". La superposition des trois parchemins? "Le Secret de la Licorne". Le héros suspendu juste au-dessus d'un crocodile affamé? "Tintin au Congo". Ou cascadeur le long d'un immeuble? "Tintin en Amérique". Les fléchettes empoisonnées? "Les Cigares du pharaon". Cette ligne claire par son extrême précision se combine avec une vitesse d'exécution sans pareille, d'immenses espaces à défricher (la jungle), ou à investir (Brasilia), les qualités athlétiques de Jean-Paul Belmondo qui ne cesse de courir, sauter, grimper, nager, se bagarrer du début à la fin du film à pied, en vélo, en voiture, en avion ou de liane en liane (mais toujours en ligne droite, de case en case!) et un zeste du rire unique de Françoise Dorléac. La dynamique de leur couple rappelle les meilleures comédies américaines, les séquences de saloon font penser au western, celle où le héros grimpe le long d'un mur et les bagarres où le décor est détruit aux burlesques muets et juste retour des choses, le film sera à son tour une source d'inspiration majeure pour Spielberg (qui découvrira ensuite par ricochet l'oeuvre belge d'origine et lui rendra hommage en 2011). L'ensemble défie les lois de l'apesanteur dans une esthétique bariolée proche de son modèle original, la BD mais aussi de la légèreté de la Nouvelle Vague (décors naturels, faux raccords privilégiant le rythme à la cohérence).

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