Overblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Articles avec #action tag

Pat Garrett et Billy le Kid (Pat Garrett and Billy the Kid)

Publié le par Rosalie210

Sam Peckinpah (1973)

Pat Garrett et Billy le Kid (Pat Garrett and Billy the Kid)

"Pat Garrett et Billy the Kid" avait beaucoup d'atouts (entre autre son background historique, sa photographie, sa musique, une partie de son interprétation, de belles idées de mise en scène et de montage) pour être un grand film dans sa portée comme peut l'être par exemple la saga du Parrain qui transcende aussi bien l'époque de sa réalisation (les années 70 pour les deux premiers volets, 1990 pour le troisième) que son genre (gangsters) pour devenir une tragédie humaine intemporelle et universelle. On pourrait en dire autant de nombre de westerns classiques ou baroques comme théâtres des passions humaines à l'oeuvre. Mais "Pat Garrett et Billy the Kid" n'en fait pas partie. Il a selon moi au moins deux défauts assez rédhibitoires.

D'une part une narration relâchée, presque "je m'en foutiste" qui fait traîner le film en longueur et rend ses enjeux presque absurdes. Les exemples abondent mais je n'en citerai qu'un, la scène où le Kid s'évade de prison, en prenant tout son temps, mais vraiment tout son temps, à croire que le Far west était un espace propice à la flânerie presque bucolique. Autre exemple de ce manque de rigueur, "l'amitié" entre Pat et Garrett n'est pas montrée de façon convaincante alors qu'elle est pourtant basée sur des faits réels. Ca n'aurait pas eu d'importance si l'idée la plus intéressante du film à savoir que la quête de Pat consiste en fait à tuer la partie libre et sauvage de lui-même pour rentrer dans le moule de la civilisation (corrompue) avait été incarnée avec plus de conviction. Mais elle ne l'est que par intermittences. Le plus beau plan de ce point de vue reste celui où après avoir tiré sur le Kid il tire sur son propre reflet dans le miroir. Enfin, cette narration brouillonne se remarque également dans le fait que le personnage joué par Bob DYLAN semble ne jamais trouver une place satisfaisante dans le récit. Tout le monde l'épargne alors que ça tire à qui mieux mieux dans tous les coins et on ne sait pas pourquoi, pas plus qu'on ne sait ce qu'il fabrique là, autrement que comme symbole.

Cela m'amène au deuxième défaut du film. Comme nombre de ceux qui ont été réalisés à cette époque, il porte l'empreinte des idéaux post soixante huitard, lesquels s'incarnent dans le personnage du Kid et de sa bande. Ils ne sont pas pacifiques certes mais ce sont des "bandits joyeux, insolents et drôles qui attendaient que la mort les frôle" pour reprendre la chanson de Bernard Lavilliers "On the road again". Bref, les motards de "Easy Rider" (1968) confrontés à la haine de "Ploucland" ne sont pas loin, d'ailleurs Pat (James COBURN) est montré comme un croque-mort qui veut enterrer ses idéaux de jeunesse pour comme il le dit "finir peinard". Sauf que ce plaquage forcé est très simpliste. Billy est joué par un beau gosse au sourire charmeur (Kris KRISTOFFERSON) à des milliards de lieues des trognes burinées de Sergio LEONE et son comportement hédoniste fait croire que les lois humaines sont celles de la jungle (plus exactement celles de la mafia) et qu'à l'inverse ce sont celles de la jungle qui sont humaines (même pas comme Robin des bois d'ailleurs car il est trop égoïste pour cela, ne pensant qu'à prendre du bon temps avec ses potes). Cela me fait d'autant plus rager que l'appropriation capitaliste du bien commun par le système des enclosures transplanté d'Angleterre est bien montré mais la critique est rendu inopérante par cette glorification du hors la loi, instrumentalisé au profit d'un discours contestataire bêta. Enfin, si le progressisme d'un film se mesure à la façon dont il traite la gent féminine, celui-ci est l'un des plus réacs que j'ai vu. je l'ai trouvé proprement imbuvable. Toutes (ou presque) sont des putes interchangeables servant d'objets de plaisir et réduites au silence de surcroît (mais avec le smile!!). La seule exception, la femme de Pat est une pisse-froid qui lui fait la morale et qu'il ne touche donc même plus, CQFD.

Voir les commentaires

Les Cadavres ne portent pas de costard (Dead Men Don't Wear Plaid)

Publié le par Rosalie210

Carl Reiner (1982)

Les Cadavres ne portent pas de costard (Dead Men Don't Wear Plaid)

Des images en noir et blanc, un accident de voiture en pleine nuit, le bureau d'un privé revenu de tout à la ressemblance plus que troublante avec Dana ANDREWS, la silhouette d'une superbe femme fatale se découpant contre la vitre du bureau, des flingues, du poison, des chambres d'hôtel où l'on ne trouve pas "Le Grand sommeil" (1946), des tavernes mal famées, des ports de l'angoisse, des blondes et des brunes qui vampent, des nazis qui complotent, des indices, des fausses pistes, des meurtres, des trahisons... en bref un pastiche très réussi en forme d'hommage aux films noirs américains des années quarante et cinquante. Le soin maniaque avec lequel les dix-neuf extraits de films de cette époque sont insérés dans l'intrigue originale et la haute dose d'autodérision font penser aux films de Michel HAZANAVICIUS et plus précisément à ses deux OSS 117. Sauf que Jean DUJARDIN n'y rencontrait pas des acteurs ou des figures historiques des années cinquante et soixante "en chair et en os" (ou plutôt à l'écran). Le travail de Carl REINER se rapproche davantage de celui d'un Robert ZEMECKIS. Il s'agit de rendre possible l'interaction entre un acteur des années quatre-vingt (Steve MARTIN) et ses compatriotes de l'âge d'or d'Hollywood ayant officié dans le genre à savoir Humphrey BOGART, Barbara STANWYCK, James CAGNEY, Veronica LAKE, Fred MacMURRAY, Ingrid BERGMAN, Cary GRANT, Ava GARDNER, Burt LANCASTER et tant d'autres. Certes, les trucages sont moins sophistiqués que chez Robert ZEMECKIS car constitués principalement de champs et de contrechamps et non d'interactions dans un même plan comme dans "Forrest Gump" (1994) ou "Qui veut la peau de Roger Rabbit?" (1988) (également un bel hommage au film noir en plus d'être un éblouissant film cartoonesque mêlant animation et prises de vues réelles). Mais ils fonctionnent. On se délecte aussi de l'humour omniprésent (l'extraction des balles avec les dents, le pelotage renommé "repositionnement des seins" etc.) et des nombreux clins d'oeil (la tirade sur le sifflement dans "Le Port de l'angoisse" (1944) qui se transforme en leçon d'apprentissage de la composition d'un numéro de téléphone sur un cadran etc.) Bref le père du cinéaste Rob REINER a signé avec un film un petit bijou dont se régalent les cinéphiles du monde entier depuis bientôt quatre décennies.

Voir les commentaires

Batman- The Dark Knight Rises (The Dark Knight Rises)

Publié le par Rosalie210

Christopher Nolan (2012)

Batman- The Dark Knight Rises (The Dark Knight Rises)

Après un premier volet inégal mais offrant des propositions intéressantes et un second volet abouti qui a fait date, Christopher Nolan se vautre complètement sur ce troisième et dernier volet qui doit de ne pas avoir été jeté aux poubelles de l'histoire uniquement à la qualité de ses deux prédécesseurs. Il n'y a plus en effet aucune ambition, tant esthétique que narrative dans ce blockbuster académique qu'il a sans doute réalisé pour remplir un cahier des charges. La panne d'inspiration est manifeste de même que le manque d'implication. Tout ce qui faisait l'originalité et l'intérêt des films précédents disparaît au profit d'un déluge de scènes d'action vues 100 fois ailleurs. De même que la nuit et l'invisibilité se sont dissipées au profit de plans fixes et poseurs tournés en plein jour, le scénario est décalqué sur celui de 80% des superproductions US dans lesquelles l'Amérique joue à se faire peur pour mieux réaffirmer ses valeurs conservatrices. On a donc le sempiternel héritier qui veut terminer l'œuvre de son méchant de père (Ra's Al Ghul of course, le Joker, trop dérangeant n'est même pas évoqué) à savoir détruire Gotham City. Pendant ce temps Bruce Wayne qui est en petite forme boude dans son manoir (on le comprend au vu du scénario) mais humilié par le méchant à deux balles, il relève la tête et endosse le rôle de super-héros (rôle qu'il refusait jusque là) pour jouer les sauveurs, christique tant qu'on y est. Délivré du fardeau du costume de Batman (car seule l'enveloppe explose avec la bombe nucléaire), il pourra alors couler des jours heureux auprès de Catwoman sous l'œil rassuré d'Alfred qui a lui aussi terminé sa mission de père de substitution (c'est le seul personnage qui s'en tire à peu près honorablement dans ce naufrage, toujours impeccablement joué par Michael Caine). Au passage, on a droit à un petit cours d'édification civique dans lequel on apprend aux masses à se méfier des dangereux révolutionnaires communistes assoiffés de scalps de riches et de figures d'autorité qui deviennent alors de pauvres victimes. Quant au casting qui recycle le catalogue de "Inception" (2009) il a également laissé sa marque, peu glorieuse, à savoir la palme de la mort la plus ridicule (et la plus parodiée) du cinéma contemporain décernée à Marion Cotillard qui s'est pris les pieds dans l'interprétation d'un personnage dont l'écriture est particulièrement grotesque.

Voir les commentaires

Batman-The Dark Knight, le Chevalier Noir (The Dark Knight)

Publié le par Rosalie210

Christopher Nolan (2008)

Batman-The Dark Knight, le Chevalier Noir (The Dark Knight)

"The Dark Knight" pousse beaucoup plus loin les bonnes idées du premier volet en se débarrassant de la majeure partie des scories qui le plombaient. Tant et si bien que le super-héros Batman (Christian Bale) confine à l'abstraction, façon de dire subtilement qu'il s'agit d'une illusion (celle du "sauveur", marotte du cinéma américain attaché aux vigilante movies et autres justiciers hors la loi adeptes de l'autodéfense hérités du western). La dissolution du mythe Batman, définitivement fondu dans le décor ("dark knight" résonne comme "dark night") permet de donner une place prépondérante à des personnages bien plus denses, donnant au film une dimension de film noir tragique et post-apocalyptique dans laquelle plane l'ombre du 11 septembre. D'un côté, Harvey Dent (Aaron Eckart) surnommé le "chevalier blanc" parce qu'il veut nettoyer Gotham de sa pègre en s'appuyant sur la légalité et un discours intransigeant. Bien entendu cette figure de cire moraliste se dégonflera au premier assaut* et finira par tomber le masque (jusqu'à l'os pourrait-on dire) pour révéler sa propre monstruosité cachée. De l'autre, le Joker, surnommé le "maître du chaos" en raison de son nihilisme et de son anarchisme fou furieux. "Why so serious?" en effet quand plus rien n'a de sens et que l'état physique et mental est dégradé au point de considérer la société et ses valeurs comme une vaste blague dont il faut s'amuser avant de tout faire sauter. Alors qu'il y a encore un peu trop (par moments) de blabla inconsistant, Heath Ledger donne du poids à chaque mot qu'il prononce, rendant glaçant, terrifiant son personnage de clown psychopathe à l'intelligence supérieure avec son corps désarticulé et son maquillage baveux et défait. Ayant toujours un coup d'avance, s'infiltrant partout et manipulant tout le monde, le Joker apparaît comme l'ombre de Batman, la projection dévoyée de son désir de toute-puissance. Entre ces deux entités monstrueuses, Jim Gordon le flic intègre et modeste joué par Gary Oldman tente de sauver comme il le peut l'humanité de Gotham à défaut de sa démocratie, la première étant rudement mise à l'épreuve (la scène des Ferries) et la seconde gangrenée de toutes parts.

* L'insignifiance de sa petite amie Rachel (Maggie Gyllenhaal, aussi transparente que Katie Holmes dans le premier volet), sacrifiée par Batman et Gordon au nom de l'espoir qu'il représente pour sauver Gotham donne encore davantage cette impression d'ensemble vide envahi par la haine et le désespoir.

Voir les commentaires

Batman begins

Publié le par Rosalie210

Christopher Nolan (2005)

Batman begins

Alors que l'on ne parle plus que du rôle de sauveur du cinéma en salles gravement affecté par la pandémie du Covid-19 que doit jouer le dernier opus de Christopher Nolan, "Tenet" (2020), j'ai eu envie de revoir sa trilogie Batman. Autant le dire tout de suite, j'ai beaucoup de mal avec l'univers des super-héros de comics tant sur la forme que sur le fond au point de confondre encore récemment ceux de DC et ceux de Marvel (mais je me suis fait reprendre par un puriste lors d'une exposition des oeuvres de Nathan Sawaya qui leur était consacrée et depuis j'arrive à les distinguer). Evidemment quand le film est réflexif comme "Incassable" (2000) ou "Les Indestructibles" (2004), ça passe mieux. J'avais le souvenir de m'être ennuyée devant "Batman Begins" et fort heureusement, je l'ai davantage apprécié au deuxième visionnage. J'aime tout particulièrement trois choses: le soin apporté aux décors de Gotham City, très fortement inspirés du "Blade Runner" (1982) de Ridley Scott. Le caractère théâtral du personnage de Batman, véritable fantôme d'un grandiose opéra urbain que la mise en scène rend aussi insaisissable que l'éther. Et enfin l'humanité qui se dégage de ses pères de substitution, Alfred le majordome (Michael Caine), le sergent puis lieutenant Gordon (Gary Oldman) et enfin Lucius Fox (Moirgan Freeman) qui travaille dans l'entreprise Wayne. Cela permet de supporter un scénario très "premier degré" c'est à dire sans zones d'ombre où les motivations de Bruce Wayne (Christian Bale) sont assez grossièrement surlignées à la manière de nombreux biopics. Vous saurez tout sur ses traumas d'enfance d'autant que "ça" explique le personnage qui paradoxalement ne possède plus une seule zone d'ombre alors que le charisme repose sur le mystère (mais le mystère dérange). Quant à la séquence initiatique en Asie, elle fait terriblement cliché d'autant que la présence de Liam Neeson me fait aussitôt penser à son personnage conventionnel de mentor dans la deuxième (ou première selon le critère retenu) trilogie Star Wars. Alors certes, Ducard est double mais qu'est ce qu'on s'en balance! (Tout comme la simpliste dualité du héros en fait). Rien à voir avec le vilain inoubliable du deuxième volet incarné par Heath Ledger.

Voir les commentaires

Okja (Ok-ja)

Publié le par Rosalie210

Bong Joon-ho (2017)

Okja (Ok-ja)

"Okja" comme "Roma" ou "The Irishman" fait partie des films signés par de grands réalisateurs mais produits par Netflix et qui de ce fait a été accusé de participer à la mort du cinéma en salles. Mais la réalité est que Netflix permet à des films originaux de voir le jour et d'être vus, films qui n'auraient peut-être pas été financés et distribués dans les circuits traditionnels. De plus il faut bien admettre que le public des cinémas est vieillissant, la jeune génération préférant se tourner vers les plateformes de streaming. Le covid a accéléré le processus comme le montre la décision de Disney de sortir leur version live de "Mulan" directement sur Disney +. Ce n'est peut-être pas la mort du cinéma tel qu'on le connaissait mais la diversification de ses supports est il me semble quant à elle irréversible, notamment pour les films grand public. Et n'a pas que des aspects négatifs comme le montre la chute du nabab Harvey Weinstein.

Ce préalable posé, il serait temps de s'intéresser à "Okja" pour lui-même et non pour ce qu'il représente. C'est un film puissant, à mi chemin entre "Snowpiercer" et "The Host", deux des meilleurs crus de Bong Joon-ho
. L'influence américaine sur la Corée du Sud est une nouvelle fois critiquée. Sauf qu'il ne s'agit plus de rejets toxiques dans les rivières mais de manipulations génétiques issues des laboratoires de la FTN Mirando, allusion transparente à Monsanto. La bébête obtenue n'est cette fois plus un monstre mais une victime de la cupidité de la mondialisation néolibérale (sous couvert d'hypocrites préoccupations sociales et environnementales). Seule Mija (Ahn Seo-Hyun), une adolescente vivant en symbiose avec la créature dans les montagnes depuis sa toute petite enfance ose se dresser contre cet ordre qui veut exploiter médiatiquement sa belle histoire pour embellir l'image de la firme (ça c'est le versant marketing incarné par Lucy Mirando) avant de transformer le cochon géant en chair à pâté (ça c'est le versant productiviste incarné par Nancy, la jumelle de Lucy, Tilda Swinton incarnant les deux rôles façon "bonnet blanc et blanc bonnet").

Mais le film n'est pas pour autant un face à face manichéen entre David et Goliath (clin d'oeil à Spielberg auquel on pense beaucoup, la relation viscérale entre Mija et Okja devant beaucoup à Elliott et E.T.) Car il y a un troisième protagoniste dans l'histoire, les activistes de la FLA (front de libération des animaux) qui comme dans la dystopie de Terry Gilliam "L'armée des 12 singes" sont assimilés à des terroristes alors qu'ils se veulent altermondialistes et non violents. Leur cause est noble puisqu'ils luttent pour informer le monde des mensonges de Mirando et de leur cruauté envers les animaux. Mais le problème est qu'ils utilisent les mêmes méthodes que leurs adversaires, le mensonge et la manipulation pour arriver à leurs fins. Ils bafouent ainsi le souhait de Mija de ramener Okja à la maison, préférant livrer cette dernière à ses bourreaux au nom de leur cause. Néanmoins des dissensions et des contradictions se font jour entre eux et en eux ce qui rend certains d'entre eux passionnants, tout particulièrement leur leader, Jay* (Paul Dano, remarquable une fois de plus) qui a quelque chose du prince Ashitaka face à Mija en princesse Mononoké. Car l'hommage à Hayao Miyazaki ne se réduit pas à la scène édénique dans laquelle Mija et Okja jouent à "Mon voisin Totoro" mais il est présent en filigrane dans tout le film.

Il y a cependant un personnage en trop, celui du très fatiguant docteur Johnny Wilcox, mi bateleur de foire façon "Hunger Games" mi tortionnaire néo-nazi (la fin du film est d'ailleurs une métaphore de la Shoah). Les deux aspects ne font pas bon ménage ou bien est-ce le jeu ultra cabotin (et uniforme) de Jake Gyllenhaal, toujours est-il que j'ai trouvé que les passages dans lesquels il intervenait étaient pénibles, passant à côté de l'effet burlesque cartoon recherché.

* Personnage toujours en contradiction avec lui-même, Jay possède une dimension chevaleresque alliant courage, abnégation et fidélité à de nobles principes qui par moments le font déraper du côté du dictateur gourou dogmatique. De même, la douceur exquise et sincère dont il fait preuve avec Mija qu'il veut protéger de la violence qui les entoure au péril de sa vie (le passage à tabac du groupe par la police-milice de Mirando est d'une brûlante actualité) est contredite par ses propres accès de sauvagerie, au point que c'est Mija qui doit arrêter son bras prêt à frapper Okja devenue folle après les mauvais traitements subis. C'est donc ironiquement cette innocente démunie (d'armes et d'idéologie) qui sans le vouloir le protège de lui-même en l'empêchant de basculer dans la négation de ce qu'il représente (le défenseur non-violent de la cause animale). Dans un même personnage cohabitent ainsi Bob Dylan, Alex de "Orange Mécanique" (la correction musclée d'un camarade "déviant") et Che Guevara (ne pas rater la postface de trois minutes qui succède au générique de fin).

Voir les commentaires

Ghost Dog, la Voie du Samouraï (Ghost Dog: The Way of the Samurai)

Publié le par Rosalie210

Jim Jarmusch (1999)

Ghost Dog, la Voie du Samouraï (Ghost Dog: The Way of the Samurai)

La solitude, le silence, les oiseaux lanceurs d'alerte, les gants blancs, le flegme et l'ascétisme, l'art "d'emprunter" les voitures, le code bushido en toile de fond et le flingue en bandoulière, nul doute on est dans un remake quelque peu évanescent du "Samouraï" de Jean-Pierre Melville. Soit dans les deux cas une culture ancestrale à forte teneur spirituelle et philosophique venant hanter une société égarée dans le pur matérialisme. "Ghost Dog" est le prolongement de "Dead Man" et préfigure "Only lovers left alive". Il s'attache aux pas errants d'une Ombre qui plane au-dessus de la ville et qui parfois, fond sur sa proie avec une redoutable efficacité en fonction des principes qui la guident (loyauté, fidélité, respect de la nature et des êtres vivants qui la peuplent). "Ghost Dog" est au film de gangsters et de sabre ("Rashomon" de Akira Kurosawa est également souvent cité) ce que "Dead Man" est au western, une relecture décalée, ironique (la mafia italienne réduite à un club d'abrutis du troisième âge), poétique, contemplative dans laquelle les héros sont des fantômes qui appartiennent pour la plupart aux minorités discriminées voire détruites par la société américaine WASP et qui portent en elles d'autres valeurs que l'appât du gain. Seuls quelques privilégiés peuvent les voir tels qu'un marchand de glace haïtien qui ne parle pas anglais mais lit dans les pensées et une fillette qui aime les livres (on retrouve cette relation homme-enfant dans "Paterson" avec son titre programme).

Voir les commentaires

Bronco Apache (Apache)

Publié le par Rosalie210

Robert Aldrich (1954)

Bronco Apache (Apache)

"Bronco Apache" avait-il 15 ans d'avance comme l'affirme son réalisateur Robert ALDRICH? Pas si sûr car son grand succès (le premier du réalisateur) est le fruit d'un compromis entre la radicalité révisionniste du réalisateur et le formatage du système hollywoodien conçu par et pour la civilisation dominante. De ce fait le film est pétri de contradictions voire ambigu. D'un côté "Bronco Apache" qui date de 1954 se situe dans la mouvance des westerns pro-indiens qui étaient minoritaires à l'époque. "La Flèche brisée" (1950) de Delmer DAVES et "La Porte du Diable (1950)" de Anthony MANN avaient ouvert la voie à une vision plus positive du peuple indien ainsi que les deux premiers volets de la trilogie de la cavalerie de John FORD. Plus original encore et propre à la personnalité de Robert ALDRICH, le fait de centrer l'intrigue sur un Apache insoumis menant des actions de guérilla, moins "bankable" que l'indien pacifique, assimilé ou victime. Cette rugosité est l'aspect le plus saisissant du film, lui conférant par moments des accents de véracité qui m'ont fait penser à "La Bataille d'Alger" (1965) de Gillo PONTECORVO. Je pense aux actions de guérilla terroristes ou bien au passage où Massaï (Burt LANCASTER) se retrouve pris à partie dans une ville du Far West, scène dans laquelle la haine raciste se déchaîne contre lui. Les divisions entre indiens sont également bien mises en lumière.

Mais de l'autre tout ce qui est proprement aldrichien dans le film est absorbé par la culture dominante. L'invisibilisation des minorités s'effectue par la censure financière qui conduit à mettre en avant des stars, lesquelles sont blanches à l'image de leur public. "Bronco Apache" est un parfait exemple de whitewashing. Quel que soit le charisme et les qualités physiques de Burt LANCASTER, le fait est que sa présence à l'écran est liée au fait qu'il a produit le film et que son nom pouvait fédérer un large public héritier des "blackfaces". Cette convention implicitement raciste consistant à faire interpréter un représentant des minorités par un blanc est particulièrement problématique. Pas seulement parce que le résultat grotesque (yeux bleus, couches de fond de teint apparentes) plombe quelque peu le propos du film mais parce que les minorités invisibilisées délégitiment aujourd'hui systématiquement tout film dans lequel un acteur mainstream s'empare d'un rôle "typé" (handicapé, transsexuel ou ethnique comme le montre l'exemple récent de Scarlett JOHANSSON dans "Ghost in the Shell") (2017)". Le décentrage culturel reste encore en effet largement un voeu pieux. Et puis que penser de la fin, imposée par les studios au réalisateur? La logique de Massaï était suicidaire mais cohérente, il se retrouve domestiqué et acculturé par la civilisation blanche au travers du rôle joué par sa femme, laquelle soit-dit en passant est interprétée par Jean PETERS. Le discours contestataire de Robert ALDRICH et la mascarade hollywoodienne ne font décidément pas bon ménage dans ce film.

Voir les commentaires

Proxima

Publié le par Rosalie210

Alice Winocour (2019)

Proxima

Non, les hommes ne viennent pas de Mars et les femmes de Vénus. Ils viennent tous de la Terre et le rêve d'aller dans l'espace comme tous les rêves n'est pas l'apanage d'un genre. Mais la société assigne des rôles distincts à chacun dès la naissance et les maintient ensuite avec le formatage éducatif, la propagande (matraquage publicitaire par exemple pour des jouets ou des activités genrés) et la censure (pression sociale normative, autocensure).

C'est ainsi qu'avec un réalisme minutieux conjugué à des convictions féministes fortes que j'avais déjà beaucoup apprécié dans "Augustine" (2012), Alice WINOCOUR réalise un portrait remarquable de femme en quête de réalisation de soi porté par une actrice (Eva GREEN) enfin débarrassée de tout artifice. Bien que le film narre la trajectoire d'une femme astronaute donc exceptionnelle, il peut parler à beaucoup de femmes en prise avec la difficulté de concilier travail et/ou aspirations personnelles et enfants. Il met en effet en évidence les inégalités entre hommes et femmes à compétences égales, exacerbées par le fait que la conquête spatiale comme jadis le western est un domaine très masculin et très machiste. Le plafond de verre que doit briser Sarah pour s'accomplir est constitué des remarques méprisantes de certains de ses collègues, de la charge mentale qui pèse sur ses épaules consistant à jongler entre les besoins de sa fille et l'exigente préparation au départ dans l'espace (dont on découvre au passage les différentes étapes dignes d'un entraînement à une compétition sportive de haut niveau) et de la culpabilité qui en résulte. Comment pleinement se concentrer lors d'une réunion alors que votre enfant (à peine toléré dans la salle) ne cesse de vous perturber? Comment répondre à la fois à ses besoins affectifs et aux pressions de l'équipe de préparateurs qui menace de vous remplacer si vous n'êtes pas à la hauteur? A ces questions, le film apporte des réponses basées sur les témoignages de véritables femmes astronautes qui étaient aussi des mères et dont on voit des photos à la fin du film. Un aspect documentaire qui se retrouve aussi dans la description des entraînements des spationautes (Thomas Pesquet fait d'ailleurs une brève apparition dans le film) mais qui n'occulte pas l'aspect intimiste de cette expérience spatiale du point de vue féminin qui est aussi un apprivoisement de la séparation voire de la mort puisque littéralement Sarah "va au ciel".

Voir les commentaires

Rush

Publié le par Rosalie210

Ron Howard (2013)

Rush

Je déteste les concours de testostérone et la formule 1, en revanche j'adore Daniel Brühl ("Goodbye Lenin!", "Inglourious Basterds") et les histoires de nobles chevaliers/samouraï qui comme chez Akira Kurosawa ("La Forteresse cachée") sortent grandis de leur mano a mano viril. Car l'histoire de la rivalité entre ces deux champions de F1 aux tempéraments opposés qu'ont été James Hunt (Chris Hemsworth) et Niki Lauda (Daniel Brühl) dans les années 70 aurait tout à fait pu se passer au Moyen-Age et leurs bolides (McLaren contre Ferrari) auraient alors été remplacé par une épée ou un sabre. Niki Lauda aurait pu alors arborer fièrement ses blessures de guerre sans que des journalistes de caniveau ne tentent de le pipoliser. D'ailleurs James Hunt en corrige un en bonne et due forme afin de lui rappeler que sa lutte avec Niki Lauda se situe à un autre niveau. Autrement dit l'histoire de ces deux hommes est intemporelle et universelle, elle relève du conte. Avec les caméras embarquées, on est plongé au cœur de l'action durant les séquences de course hyper-dramatisées très spectaculaires mais relativement peu nombreuses alors que par ailleurs on se régale des rugueux échanges verbaux de ces deux hommes qui lorsqu'ils se frottent l'un contre l'autre produisent des étincelles tant ils sont opposés et complémentaires à la fois. James Hunt le britannique c'est la tête brûlée qui vit à 300 à l'heure, un play-boy hédoniste style rappeur bling-bling qui brûle la chandelle par les deux bouts et considère son sport comme un moteur à adrénaline alors que Niki l'autrichien est un technicien besogneux, ascétique, méthodique et scientifique. Si le manque de sérieux (apparent) de James Hunt est une entrave, c'est l'impopularité de Niki Lauda, être quasi-asocial qui s'avère être le plus lourd handicap dans la course au succès. Tous deux sont par ailleurs arrogants et tête à claques mais ils se donnent tellement à leur sport qu'on ne peut pas rester indifférent devant leur engagement jusqu'au-boutiste et le spectacle qui en résulte. Un véritable matériau de fiction pour film à suspense haletant et plein de rebondissements.

Voir les commentaires

<< < 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 20 > >>