Overblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Split

Publié le par Rosalie210

M. Night Shyamalan (2016)

Split

Bien avant le caméo de Bruce WILLIS à la fin de "Split" et la réunion des trois super-héros/super-vilains Kevin Wendell Crumb (James McAVOY), David Dunn (Bruce WILLIS) et Elijah Price (Samuel L. JACKSON) dans "Glass" (2018), M. Night SHYAMALAN avait voulu intégrer le héros de "Split" dans "Incassable" (2000) mais cela s'était avéré impossible. Kevin y prenait bien trop de place avec ses 24 personnalités et avait besoin d'avoir son propre film. Mais si la vision de cette trilogie éclaire et enrichit ses différents volets, chacun possède son identité propre et "Split" est sans doute des trois le plus remarquable. D'abord parce que M. Night SHYAMALAN maîtrise sur le bout des doigts les codes et le rythme du thriller horrifique avec lequel il n'hésite pas à s'amuser à déjouer les attentes du spectateur grâce à son héros protéiforme. L'introduction tranchante de "Split" par son rythme et son découpage (!) mérite d'être étudiée dans les écoles de cinéma tant elle est parfaite. A la vitesse de l'éclair et de façon quasi imperceptible (sauf pour Casey qui dès le premier plan est montrée comme étant une jeune fille à part et dont le regard nous est essentiel), on bascule du réalisme trivial dans une dimension angoissante et claustrophobique proche de celle du "Le Silence des agneaux" (1991) et de "L Obsédé" (1965). Mais aussi et surtout parce que le réalisateur va bien au-delà du simple film de genre aussi maîtrisé soit-il, tout comme dans les deux autres films en s'appuyant sur des personnalités asociales à la psyché torturée et à l'enfance malmenée. Casey (Anya TAYLOR-JOY) et Kevin ont deux personnalités qui se réfléchissent. Des flashbacks nous éclairent sur leurs traumatismes respectifs. Casey amorce une introspection symbolisée par son cheminement dans la tanière labyrinthique de Kevin alors que celui-ci voit s'éveiller en lui sa 24eme personnalité, surhumaine et bestiale qui menace de l'engloutir. Sa psychiatre, le Dr. Fletcher (une allusion à "Vol au-dessus d un nid de coucou") (1975) qui ne parvient plus à endiguer l'évolution meurtrière de la psychopathologie de son patient doit s'effacer non sans avoir passé le relai à Casey dont elle a l'intuition qu'elle est la seule à pouvoir empêcher que la Bête ne dévore l'homme.

Voir les commentaires

Princes et Princesses

Publié le par Rosalie210

Michel Ocelot (2000)

Princes et Princesses

Le succès de "Kirikou et la sorcière" (1998) a permis à Michel OCELOT de sortir au cinéma ""Princes et Princesses" à partir d'une série qu'il avait réalisé pour la télévision en 1989, Ciné Si. Michel OCELOT a donné une suite à "Princes et Princesses" en 2011 avec les "Les Contes de la nuit" (2011) qui repose sur des principes semblables hormis sur le plan technique (artisanale dans "Princes et Princesses", numérique dans "Les Contes de la nuit") (2011):

- Enchaînement de six contes d'une durée de dix minutes chacun. La série Ciné Si en comptait huit, Michel OCELOT en a donc supprimé deux, "Icare" et "On ne saurait penser à tout". Il a fait de même pour "Les Contes de la nuit" (2011) qui étaient au départ au nombre de dix, diffusés en 2010 sur Canal + Family sous le titre "Dragons et Princesses".

- Chaque conte est précédé d'une courte séquence qui se situe dans un cinéma abandonné. On y voit les trois personnages interprétant les héros des contes, un garçon, une fille et un vieux technicien faire également en amont dans les coulisses un travail de scénariste, costumier et décorateur à se documentant sur les époques évoquées dans les contes. Cette dimension réflexive permet de voir le processus créatif à l'œuvre et de réfléchir également à la notion d'adaptation. Une histoire n'est jamais fixée une fois pour toutes, elle est construite ou reconstruite selon les protagonistes qui lui donnent vie.

- Utilisation de l'animation de silhouettes en papiers découpés filmés en ombres chinoises sur des fonds colorés qui confère à l'ensemble une esthétique visuelle de toute beauté. Les dessins en papier découpé que ce soit pour les silhouettes ou les décors sont tellement minutieux et détaillés qu'ils font penser à de la dentelle se détachant sur de superbes horizons bleu, vert, or, rose. Bref, un raffinement qui est aussi un enchantement pour les yeux.

- Enfin dans les thèmes abordés, on reconnaît bien l'auteur de "Kirikou et la sorcière" (1998), "Azur et Asmar" (2006) ou encore "Dilili à Paris" (2018). Son intérêt pour les civilisations étrangères et de façon plus générale, l'Autre nous fait voyager en Egypte antique ("Le garçon des figues") au Japon du XVIII° siècle ("Le manteau de la vieille dame"), dans des contrées imaginaires relevant du merveilleux ("Princes et Princesses") mais aussi de la science-fiction ("La Reine cruelle et le montreur de Fabulo"). Et si "La Princesse des diamants" nous offre une variante du schéma éculé de la belle prisonnière qui attend le prince charmant qui viendra la délivrer, Michel OCELOT délivre un message féministe dans "La Sorcière" et dans "Le manteau de la vieille dame". "La Sorcière" ressemble beaucoup à "Kirikou et la sorcière" (1998). On y retrouve la haine des villageois pour une femme puissante mais solitaire qu'ils veulent agresser voire détruire parce qu'elle leur fait peur. Le héros comme Kirikou se pose des questions et finit par comprendre que la clé pour entrer dans son château est celle de son consentement. La sorcière n'est en effet une sorcière que dans la culture du viol. Quant au "Manteau de la vieille dame", lui aussi repose sur la notion d'agression et de consentement ainsi que sur l'éveil et l'élévation, la vieille dame d'apparence vulnérable se transformant en maître à penser du voleur tout en lui donnant une bonne leçon!

Voir les commentaires

Le Procès Paradine (The Paradine Case)

Publié le par Rosalie210

Alfred Hitchcock (1947)

Le Procès Paradine (The Paradine Case)

"Le Procès Paradine" aurait pu être un grand Hitchcock. On reconnaît d'ailleurs par moments l'empreinte du cinéaste. Il y a du "Vertigo" (1958) dans le duel à distance que se livrent la blonde épouse de l’avocat Anthony Keane et la brune et vénéneuse Mrs Paradine qui l’a fait chavirer en un seul regard. Il y a du "Rebecca" (1939) dans le passage gothique de la visite au manoir et dans l’allure de veuve noire de Mrs Paradine qui détruit tous les hommes qui ont le malheur de croiser son chemin. Il y a du "Les Amants du Capricorne" (1949) dans l’opposition de classe traversant le triangle amoureux du mari, de la femme et de l’amant, ce dernier étant le valet de chambre du premier. Le mépris de classe est également bien perceptible chez l'avocat Anthony Keane qui s'acharne à vouloir faire accuser le valet en lieu et place de Mrs Paradine. Il y a enfin le goût pour les expérimentations formelles telles que le plan circulaire qui tourne autour de Mrs Paradine lors de l’entrée et de la sortie de son amant du tribunal comme si elle avait des yeux derrière sa tête permettant de le voir.

Mais le film souffre de son caractère procédural et surtout d'une trop grande emprise du producteur David O. SELZNICK (avec lequel Alfred HITCHCOCK était en conflit, c'est d'ailleurs le dernier film sur lequel ils ont travaillé ensemble) qui impose un académisme étouffant, dans le choix du casting notamment. Gregory PECK, abonné aux rôles d’avocat ne fait pas british et n’arrive pas non plus à nous faire croire à son soudain envoûtement amoureux, lequel apparaît par conséquent assez ridicule. Louis JOURDAN qui joue le valet est aussi expressif qu’une huître et rend son personnage incompréhensible (il est également sans doute mal écrit). Alida VALLI la séductrice manipulatrice est belle mais trop hiératique pour susciter une quelconque émotion. Ann TODD qui joue l'épouse est transparente. Heureusement qu’il y a Charles LAUGHTON (qui a l'air de s'ennuyer ferme) pour secouer de temps à autre la torpeur de l'ensemble.

Voir les commentaires

Cyrano de Bergerac

Publié le par Rosalie210

Jean-Paul Rappeneau (1990)

Cyrano de Bergerac

"Cyrano de Bergerac" est un joyau cinématographique, une adaptation qui semble tellement couler de source que l'on en oublie ses origines théâtrales. Depuis près de 30 ans, on a eu le recul nécessaire pour analyser cet incroyable alignement de planètes ou plutôt de talents: la mise en scène minutieuse et enlevée de Jean-Paul RAPPENEAU, le brillant travail d'adaptation du texte en alexandrins du scénariste Jean-Claude CARRIÈRE, la musique de Jean-Claude PETIT, la photographie, les décors et costumes qui ont l'élégance et l'harmonie des toiles de maître et enfin le casting extrêmement bien dirigé avec en son sommet l'énorme performance de Gérard DEPARDIEU dans ce rôle de colosse aux pieds d'argile qui lui va comme un gant et dans lequel il se donne corps et âme. Tous rendent fluide, limpide, moderne (tout en conservant la poésie de la versification d'origine) et vivante l'œuvre d'Edmond Rostand. L'amour de Jean-Paul RAPPENEAU pour le grand cinéma hollywoodien transparaît dans un film qui est toujours en mouvement. Mouvements extérieurs liés aux scènes d'action qui rattachent "Cyrano de Bergerac" au genre d film de cape et d'épée et mouvements intérieurs liés aux tourments des personnages qu'à l'image des films de Alfred HITCHCOCK on voit penser. Contrairement au théâtre, le cinéma peut se passer de la parole si bien que de nombreuses scènes muettes s'intercalent entre les passages versifiés pour en accentuer la portée. Par exemple à la fin du dernier acte, Cyrano évoque le fait que sa mère ne l'a pas trouvé beau. Mais nous connaissons déjà la faille narcissique de Cyrano parce qu'elle est montrée bien plus tôt dans le film: on l'a vu renverser le miroir qui lui renvoyait son reflet juste avant qu'il découvre que Roxane (Anne Brochet) en aime un autre. On comprend alors pourquoi cet ogre maniant comme personne la langue et l'épée, capable d'embrocher 100 hommes et de rabattre le caquet de 100 autres ne puisse s'approcher d'une femme, ne pouvant s'épancher que par le biais de la plume sous une identité d'emprunt. Cyrano est par ailleurs un être entier et indomptable qui aime les actions d'éclat et refuse les compromissions et plus généralement tout ce qui peut entraver sa liberté de mouvement. Cette pureté d'âme est soulignée dans le film par un rôle muet qui vient ponctuer le film et qui est -comme par hasard- celui du Kid. Un enfant silencieux et admiratif qui donne encore plus de poids à la tirade finale du comte de Guiche (Jacques WEBER): "Il a vécu sans pacte, libre dans sa pensée autant que dans ses actes/Oui je sais, j'ai tout, il n'a rien, mais je lui serrerais volontiers la main/Oui parfois je l'envie, voyez-vous lorsque l'on a trop réussi sa vie, on sent […] mille petits dégoûts de soi dont le total ne fais pas un remord mais une gêne obscure."

Voir les commentaires

The Party

Publié le par Rosalie210

Sally Potter (2017)

The Party

Une réunion à huis-clos qui tourne au règlement de comptes: "Festen (1998)" de Thomas VINTERBERG? "Carnage" (2011) de Roman POLANSKI? "Le Prénom (2011)" de Mathieu DELAPORTE et Alexandre de la PATELLIÈRE? "Juste la fin du monde" (2015) de Xavier DOLAN? Tous ces exemples pour montrer que ce dispositif d'origine théâtrale est souvent utilisé au cinéma notamment pour son efficacité dû au respect des unités de lieu, de temps et d'action. "The Party" de Sally POTTER, version noire et corrosive (et noir et blanc!) du film coloré et burlesque de Blake EDWARDS s'inscrit parfaitement dans cette lignée. Son cocktail à base de satire du milieu bobo british fonctionne à l'aide de personnages borderline frisant la caricature mais qui parviennent parfois à faire mouche. La mise en scène est plutôt inspirée, soulignant le contraste entre les apparences (le couple uni qui fête le triomphe politique de madame) et la réalité (la déréliction en direct d'un couple qui n'en est plus un avec la revanche du mari sur sa femme carriériste et adultère). Cette mise à nu contamine les autres personnages, contraints à leur tour d'aller "cracher au bassinet" (c'est l'image qui me vient à la vue des nombreuses scènes où un ou plusieurs d'entre eux s'enferment dans les toilettes pour y vomir ou s'y confesser, la poubelle de la cour servant à l'inverse à tenter de cacher le ressentiment). Cela pourrait être juste un torrent de fiel dans la lignée directe du spécialiste de la satire en huis-clos qu'est Roman POLANSKI, heureusement le film va plus loin que le masque grimaçant et tente d'atteindre la chair à l'image de la coupure au genou de Janet (Kristin SCOTT THOMAS). Son mari Bill (campé par un Timothy SPALL considérablement amaigri) n'ayant plus rien à perdre décide de faire voler en éclats les "Secrets et mensonges" (1996) comme dans le film de Mike LEIGH. C'est le seul personnage qui n'est pas agité du bocal parce qu'il est en paix avec lui-même. Mais son acte lui vaut d'en prendre plein la figure au sens propre. A l'inverse la palme du rire est remportée par l'impayable Gottfried, le "coach de vie" légèrement illuminé (et au destin prédestiné avec un prénom pareil!) qui fait tache au milieu de tous ces british (et joué génialement par le regretté Bruno GANZ qui pouvait briller dans tous les registres). Il faut le voir méditer au milieu de la bagarre générale, jouer les conseillers spirituels, s'improviser docteur universel, tenter de réconcilier l'amant et l'époux trompé ("Vous avez déjà un point commun" ah ah ah!) et même essayer de réveiller les morts! Sans parler des échanges avec son épouse à la langue aussi tranchante qu'un rasoir (Patricia CLARKSON). Le couple de lesbiennes et l'avocat dépressif ont moins de relief mais complètent l'étude de mœurs de ce petit milieu. En revanche et en dépit de ce qu'en a dit la presse, je suis moins convaincue par la satire politique du système britannique, celle-ci existant à travers des allusions mais restant périphérique à l'histoire ce qui est logique avec le choix de filmer un noyau en intérieur. Au final "The Party" est un film bien troussé, excellemment interprété, contenant de beaux moments mais dont la durée très courte et le rythme effréné ne permettent pas de dépasser le stade du très bon divertissement.

Voir les commentaires

Les Quatre filles du docteur March (Little Women)

Publié le par Rosalie210

Mervyn Leroy (1949)

Les Quatre filles du docteur March (Little Women)

"Les Quatre filles du docteur March" a quasiment droit à une nouvelle adaptation pour le cinéma ou la télévision à chaque génération depuis un siècle. Celle de Mervyn LeROY qui date de 1949 est la troisième après celle de Harley KNOLES en 1918 et celle très célèbre de George CUKOR en 1933 avec Katharine HEPBURN dans le rôle de Jo. La version de Mervyn LeROY est très fidèle au roman de Louisa May Alcott mais elle est alourdie par des conventions surannées (les costumes empesés et surchargés, le tournage en studio, l'aspect moralisateur de l'histoire avec sa sanctification des valeurs de la famille, de la patrie, du courage et du sacrifice). Elle bénéficie heureusement d'un casting trois étoiles avec Janet LEIGH dans le rôle de Meg, June ALLYSON dans celui de Jo, Margaret O BRIEN dans celui de Beth et Elizabeth TAYLOR (blonde pour l'occasion!) dans celui d'Amy avec Mary ASTOR dans le rôle de la mère. Il est amusant de voir les deux bombes sexuelles que sont déjà Janet LEIGH et Elizabeth TAYLOR (âgées respectivement à l'époque de 22 et 17 ans) jouer les poupées de cire en robe à fanfreluche et boucles anglaises ^^. Celle qui tire le mieux son épingle du jeu est Margaret O BRIEN (la seule qui ait l'âge du rôle!), impressionnante de finesse et de sensibilité. Elle rend justice au personnage plutôt effacé de Beth que l'on découvre sous un autre jour car c'est la seule qui s'avère radicalement incapable de trouver sa place dans un monde aux perspectives étriquées ce qui la condamne. On comprend mieux à travers cette prestation la place privilégiée qu'elle possède dans le cœur de Jo, l'autre "vilain petit canard" de la famille bien que sous des dehors radicalement opposés à ceux de Beth (ce qui l'oblige tôt ou tard à rentrer dans le rang). Il y a une belle mélancolie qui traverse le personnage lorsqu'elle sort de son déni et accepte de faire le deuil de son enfance à jamais perdue.

Voir les commentaires

L'Aventure intérieure (Innerspace)

Publié le par Rosalie210

Joe Dante (1987)

L'Aventure intérieure (Innerspace)

"L'aventure intérieure", c'est l'histoire d'un corps de cinéma. Un corps qui représente tellement le cinéma qu'il est devenu par la suite le héros ou plutôt l'anti-héros de la formidable attraction Cinémagique qui fut projeté au Walt Disney Studios de Disneyland Paris jusqu'à sa marvelisation en 2017. Dans Cinémagique, le corps atteint de vis comica de Georges alias Martin SHORT se retrouvait comme celui de Buster KEATON dans "Sherlock Junior" (1923) aspiré à l'intérieur de la toile et bourlingué de film en film depuis les burlesques muets jusqu'au romantisme déchirant de "Les Parapluies de Cherbourg" (1964) en passant par le dynamitage du western, du space opera, du massacre de la Saint-Valentin, du Titanic et des épopées guerrières médiévales.

Dans "L'aventure intérieure", remake culte parodique du film de Richard FLEISCHER, "Le Voyage fantastique" (1966) ce n'est pas le corps de Martin SHORT qui voyage dans l'histoire du cinéma mais celui du lieutenant Tuck Pendleton (Dennis QUAID) qui voyage… à l'intérieur du corps de Jack Putter alias Martin SHORT! Ce film toujours aussi jouissif malgré son âge (c'est le miracle de la SF des eighties: elle était incarnée et a donc survécu à l'obsolescence programmée) ne s'amuse pas seulement avec les échelles, il parle aussi de transsubstantiation au sens mystique mais aussi charnel du terme (les baisers de Jack et Lydia permettent la migration de Tuck d'un corps à l'autre). Tuck le lieutenant de la US navy a chopé le melon? Il se retrouve réduit à l'état microscopique et totalement dépendant des agissements d'un autre, ce modeste magasinier qu'il aurait regardé de haut s'il l'avait croisé par hasard à la caisse du supermarché alors qu'il doit faire corps avec lui pour espérer survivre. Jack est un loser bourré de complexes, hypocondriaque, méprisé et exploité par les autres? Il va pouvoir à l'inverse de Tuck endosser le rôle du héros à la James Bond qui fait mordre la poussière aux méchants et tomber les filles au point qu'il ne pourra plus jamais revenir en arrière. Les transformations de son identité n'affectent pas que son comportement, elles touchent aussi son apparence quand il prend brièvement la tête du Cowboy (Robert PICARDO). Quant à Lydia (Meg RYAN) elle se retrouve définitivement liée à un homme à deux visages, sa grossesse étant quelque peu assimilée au fœtus astral de "2001, l'odyssée de l'espace" (1968).

Voir les commentaires

Purl

Publié le par Rosalie210

Kristen Lester (2019)

Purl

Chez Pixar, le court-métrage a toujours été un maillon crucial, tant pour expérimenter de nouvelles techniques que pour révéler de nouveaux talents. "Purl" est le premier court-métrage Sparkshorts. Sparkshorts est un nouveau programme des studios Pixar qui permet à ses employés qu'ils soient réalisateurs, animateurs ou techniciens de réaliser leur propre court-métrage, diffusé ensuite directement sur Youtube. L'objectif des studios est de promouvoir de nouveaux artistes et de nouveaux contenus pour maintenir au sommet la créativité de la firme sans passer par la sortie en salles (hormis durant une semaine au El Capitan Theatre à Los Angeles qui appartient à Disney) et sans forcément viser le public habituel de Pixar: “Ces films ne ressemblent à rien de ce que nous ayons jamais fait chez Pixar. Ils permettent de libérer le potentiel d’artistes individuellement et leur approche inventive du cinéma à une plus petite échelle que notre échelle habituelle.”

C'est exactement ce que propose "Purl", un court-métrage féministe d'une actualité brûlante qui s'adresse aux adultes et qui montre les difficultés pour une femme de s'intégrer dans un milieu professionnel conçu par et pour les hommes. Le terme "boys club" popularisé par l'affaire du LOL trouve ici tout son sens tant le logiciel de l'entreprise est formaté pour un entre-soi masculin blanc-bourgeois compétitif et macho qui ne laisse aucune place à la diversité. Purl se retrouve donc exclue du cercle des blagues à la machine à café, des réunions de staff, de l'ascenseur, des soirées au restaurant entre collègues. La réalisatrice évoque à travers le film son propre vécu dans le milieu du cinéma d'animation lui aussi touché par le sexisme contrairement aux propos tenus lors de la dernière cérémonie des César par les acteurs Alice Belaïdi et Lucien Jean-Baptiste: “L’animation peut être un cinéma exemplaire. C’est un cinéma sans différence de salaire entre les acteurs et les actrices, un cinéma où ils peuvent être noir, blanc, jaune, vert, rouge et ça ne pose aucun problème. Un cinéma où aucun producteur n’a eu de geste déplacé à l’encontre de ses personnages, un cinéma où Minnie n’a jamais eu à créer un hashtag”. "Purl" avec son open-space rempli de clones en costards-cravates offre un démenti cinglant à cette affirmation. Car pour s'intégrer, la petite boule de laine rose n'a d'autre choix dans un premier temps que de s'adapter en adoptant les codes vestimentaires, langagiers et gestuels de la virilité et en se faisant une tête au carré: c'est l'effet "Zelig" (1983). Seule la mixité symbolisée par des boules de laine de toutes les couleurs peut sortir Purl de son aliénation en lui redonnant la fierté d'être une femme, condition sine qua non pour espérer changer le monde.

Voir les commentaires

Un million clés en mains (Mr. Blandings Builds His Dream House)

Publié le par Rosalie210

H.C. Potter (1948)

Un million clés en mains (Mr. Blandings Builds His Dream House)

Ce film de la fin des années 40 est une satire pertinente de l'american dream bénéficiant d'un ton ironique savoureux et de la prestation haute en couleurs de Cary GRANT dans le rôle de Jim, un bourgeois new-yorkais à l'étroit dans son appartement de Manhattan qu'il partage avec sa femme et ses deux filles (le pauvre!). Le film montre avec beaucoup d'humour que le désir du citadin d'avoir une grande maison individuelle à la "campagne" (c'est à dire dans l'espace périurbain des villes, la villa dans le Connecticut se situant à une heure de train du bureau de Jim) est fabriqué de toutes pièces pour faire tourner la machine à cash du capitalisme US (et du capitalisme tout court d'ailleurs car en France, c'est aussi un puissant moteur de l'étalement urbain qui continue aujourd'hui). Car si c'est un gouffre financier pour les nouveaux propriétaires, c'est une affaire juteuse qui entretient la job machine du système: agents immobiliers, architectes, ouvriers et techniciens du BTP, décorateurs et publicitaires, tous font leur beurre sur le dos de cette famille typique de la upper middle class victime de sa naïveté et de sa folie des grandeurs. Le film va même au-delà en égratignant l'idéologie familiale à l'origine de la périurbanisation. En effet le couple formé par Jim et Muriel (Myrna LOY) est en crise. Les désirs des deux membres du couple ne s'accordent guère et ils sont perpétuellement en conflit. De plus ils forment un drôle de ménage à trois avec leur ami Bill Cole (Melvyn DOUGLAS), un avocat célibataire qui est amoureux de Muriel depuis la fac et tend à prendre la place de Jim dans son nouveau foyer, celui-ci étant désormais obligé de se lever à 5 heures du matin pour aller travailler. Néanmoins Myrna LOY n'est pas à la hauteur du jeu de Cary GRANT, le rythme n'est pas assez soutenu et le happy end conventionnel annihile tout ce que le film pouvait avoir de subversif.

Voir les commentaires

Le Petit César (Little Caesar)

Publié le par Rosalie210

Mervyn Leroy (1930)

Le Petit César (Little Caesar)


"Le Petit César" est l'un des piliers fondateurs du film de gangsters dont il a contribué à fixer les codes dans le cinéma parlant, repris et popularisés ensuite notamment par "Scarface" (1931) de Howard HAWKS. C'est aussi un film novateur de par son approche. Il infiltre le milieu des gangsters et le montre de l'intérieur au lieu de se placer du point de vue des forces de l'ordre. C'est également un film de crise (le contexte de Grande Dépression a imposé un budget réduit), sans fioritures. Il va à l'essentiel. Comme ses successeurs, il narre l'ascension, l'apogée et la chute éclair d'un caïd d'origine immigrée issu des bas-fonds (librement inspiré de la biographie d'Al Capone). Rico se distingue par son ambition et son ego démesuré ainsi que sa détermination sans scrupules qui lui permet de gravir les échelons dans une version perverse du rêve américain. Perverse et grotesque car en dépit de ses costumes de plus en plus élégants et de ses tentatives d'imitation des codes de la haute sphère de la pègre, Rico conserve son comportement de rustre mal dégrossi. Et en dépit de ses attitudes bravaches, Rico a une faille et pas des moindres puisqu'elle le perdra. En effet tout au long du film, il ne cesse de proférer des propos virilistes glorifiant l'inflexibilité et fustigeant la mollesse et le sentimentalisme ("l'amour c'est de la guimauve"), tous ceux qui s'y livrent étant qualifié du terme homophobe de "lavette". Pourtant c'est un autre homme qui le fait reculer, Joe Massera qu'il n'arrive pas à complètement plier à cette loi puisqu'il le considère comme son ami (alors qu'il combat par ailleurs tout espèce de sentiment jugé comme une faiblesse). De plus Joe est danseur ("ce n'est pas le travail d'un homme") at a une fiancée qui veut lui faire quitter un milieu "qu'on ne quitte pas". Bref, cela sent la transgression à plein nez et c'est bien cela qui donne toute son envergure tragique au personnage de Rico (qui sinon en serait juste resté au statut de pitoyable petit psychopathe). C'est le film qui a révélé Edward G. ROBINSON dans un rôle à contre-emploi de ce qu'il était vraiment (il détestait les armes à feu). Il crève l'écran et impose son physique singulier à la Jabba The Hutt, loin, très loin des standards hollywoodiens.

Voir les commentaires

<< < 1 2 3 4 > >>