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Articles avec #cinema japonais tag

Entre le ciel et l'enfer (Tengoku to jigoku)

Publié le par Rosalie210

Akira Kurosawa (1963)

Entre le ciel et l'enfer (Tengoku to jigoku)

Le ciel, c'est la villa du riche industriel Kingo Gondo (Toshirô MIFUNE) qui surplombe la ville de Yokohama. Elle est le théâtre du premier morceau de bravoure du film, un huis-clos d'une cinquantaine de minutes où les personnages réunis dans le salon aux rideaux tirés puis ouverts s'agitent en tous sens sous l'impulsion d'un maître-chanteur qui les observe de l'extérieur. Celui-ci, par désir de vengeance sociale a fait enlever celui qu'il pense être le fils de Kingo. Mais coup de théâtre, l'enfant qui portait son déguisement est celui de son chauffeur. Cet imbroglio brouille les pistes: la dichotomie riche/pauvre et haut/bas n'est plus si évidente. D'autant que Kingo qui est issu d'un milieu modeste pense et agit en artisan amoureux du travail bien fait alors que les actionnaires qui l'entourent se comportent en prédateurs, soucieux du profit immédiat. Kingo se trouve face à un véritable dilemme moral: s'il délivre la rançon, il se met sur la paille avec sa famille ce qui au-delà de sa déchéance personnelle livre l'entreprise qu'il souhait racheter aux requins. S'il refuse, il devient responsable de la mort d'un enfant.

La deuxième partie du film, beaucoup plus dynamique, descend dans l'arène et prend la forme d'une enquête policière pour retrouver la fortune de Kingo qu'il a remis au malfaiteur en échange de la restitution de l'enfant. Cette partie fait la part belle aux méthodes d'investigation de la police et ménage de très belles scènes de suspense hitchcockien. Enfin la troisième partie descend en enfer, jusque dans les bas-fonds de la ville pour filmer des séquences assez sordides du milieu dans lequel vit le malfaiteur. Un milieu entrevu lors de l'enquête policière mais sur lequel Akira KUROSAWA s'attarde et qui s'oppose en tous points à celui dans lequel vit Kingo. Il s'agit d'un taudis sombre et insalubre où s'entassent les bicoques dans une sorte de cloaque à ciel ouvert écrasé par la chaleur de l'été et où survivent moins des hommes que des zombies abrutis par la misère et par la drogue. Le malfaiteur vit au milieu de cette misère tout en lui étant quelque peu étranger de par son statut d'étudiant en médecine. Il fait tache dans son milieu, tout comme Kingo dans le sien. Pourtant la scène finale de dialogue avorté montre qu'aucune réconciliation n'est possible.

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Chien enragé (Nora Inu)

Publié le par Rosalie210

Akira Kurosawa (1949)

Chien enragé (Nora Inu)

Akira KUROSAWA est surtout connu en France pour ses fresques médiévales. Mais il est aussi un grand réalisateur de polars. "Chien enragé" réalisé en 1949 fait partie de cette mouvance. Le film très proche du documentaire nous immerge dans l'atmosphère du Tokyo d'après-guerre, certains passages faisant penser à "Allemagne, année zéro (1947)". Un Tokyo schizophrène à l'image d'une identité japonaise désormais scindée entre tradition et modernité.

D'un côté, Akira KUROSAWA filme les signes de l'acculturation occidentale liée à la défaite et à l'occupation: le match de baseball, les appartements meublés à l'américaine, les bars qui diffusent les adaptations japonaises de chansons françaises. Le film lui-même adopte les codes du film noir américain (commissariat, lieux interlopes, tenues vestimentaires typiques, clairs-obscurs etc.) et du néoréalisme italien tout en s'inspirant d'un auteur français, Georges Simenon et de son fameux commissaire Maigret (rebaptisé Sato pour l'occasion et joué par Takashi SHIMURA).

Mais derrière ce vernis d'occidentalisation et de modernité, ce que filme Akira KUROSAWA, ce sont les vibrations particulières que dégage une ville, Tokyo plongée dans le chaos et la canicule. Kurosawa filme des corps en sueur, accablés par la chaleur moite qui transforme Tokyo en hammam à ciel ouvert, ralentit leurs mouvements, les attire vers les bas-fonds où se déroule l'essentiel de l'intrigue. Il montre les stigmates de la guerre, la faim et l'insécurité qui gangrènent les possibilités de reconstruction. Le Tokyo qu'il filme, à rebours de l'image que nous avons du Japon d'aujourd'hui est en proie à la délinquance et à la criminalité. la misère, la prostitution et les trafics en tous genre y règnent.

C'est dans ce substrat historique très riche que se déroule une histoire qui ne l'est pas moins. En effet, à l'image du Tokyo d'après-guerre, à l'image du film lui-même, le héros Murakami (Toshirô MIFUNE) est un homme coupé en deux qui enquête inlassablement pour retrouver sa part d'ombre avec laquelle il fusionne dans un dénouement d'anthologie. Deux sorts attendent en effet les vétérans plongés dans l'anomie ambiante: devenir flic ou devenir voyou. Une seule arme et deux usages. Murakami a choisi la police mais il se fait voler son arme par un double de lui-même, Yusa (Isao KIMURA) qui l'utilise pour voler et tuer. La traque de l'ombre devient une quête de vérité qui se termine dans la boue mais dans un champ en plein soleil, illustrant la fusion des deux facettes contradictoires du Japon.

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Silent Voice (Eiga koe no katachi)

Publié le par Rosalie210

Naoko Yamada (2016)

Silent Voice (Eiga koe no katachi)

Savez-vous ce qu'est l'ijime? ("Intimidation") C'est le mot par lequel on désigne le rejet d'une brebis galeuse par la communauté au Japon. Le harcèlement scolaire en est la manifestation la plus typique. Ce fléau n'est pas spécifique au Japon mais dans ce pays il prend des formes particulièrement intenses et dramatiques. Deux raisons au moins à cela. D'abord l'omerta généralisée qui muselle les victimes et les empêche de trouver du secours (les adultes détournent le regard et les structures d'aides sont inexistantes). Ensuite la primauté du groupe sur l'individu propre aux sociétés confucéennes entretient cette culture du silence et de la honte. On peut également ajouter le poids du patriarcat et de la hiérarchie qui entretient un droit implicite à l'humiliation. Par conséquent le pays du soleil levant détient le record du nombre de suicides d'enfants et les homicides sont également parfois la seule issue à ce déferlement de haine.

"Silent Voice", film d'animation adapté du manga éponyme sorti en 2016 au Japon mais seulement aujourd'hui chez nous (et ne nous voilons pas la face, cela nous concerne aussi) brise un double tabou: celui de l'ijime et celui du handicap. Car la différence qui détonne sur l'homogénéité du groupe est l'élément déclencheur de l'ijime. Et l'handicap facteur d'exclusion sociale est particulièrement mal toléré au Japon.

Si cette œuvre s'attaque courageusement aux tares de la société japonaise c'est qu'il y a urgence. Elle fait l'état des lieux d'une société en crise dont le symptôme est le mal-être de sa jeunesse. Le récit se concentre sur deux personnages : Shoko, une jeune fille atteinte de surdité et Shoya, son camarade de classe turbulent qui est à l'origine de la persécution dont elle est victime au quotidien avant d'être à son tour ostracisé et martyrisé par le reste de la classe (qui l'utilise comme bouc-émissaire). Victime et bourreau sont des rôles sociaux réversibles derrière lesquels on remarque surtout la similitude des difficultés qui touchent les deux jeunes gens: isolement, faible estime de soi, famille fragile et défaillante. On observe que dans les deux cas le père, dépassé, a déserté le foyer (être une famille monoparentale au Japon, c'est aussi un handicap), la sœur n'est pas "dans les clous" (celle de Shoya a une petite fille métis et celle de Shoko est un garçon manqué qui sèche l'école pour tenter de pallier l'absence du père). Les jeunes qui gravitent autour d'eux ne sont pas mieux dans leur peau même s'ils sont loin d'être aussi creusés que les protagonistes principaux

A travers l'handicap de Shoko, le film traite aussi des immenses difficultés de communication qui plombent une société du non-dit ou le contact physique est prohibé. Un occidental peut également être agacé par l'aspect larmoyant du film, surtout à la fin (qui comporte quelques longueurs) mais là encore, c'est le fruit d'une société où la colère est interdite au nom de la préservation de l'harmonie du groupe. Le personnage transgressif de Ueno ne cesse d'agresser Shoko justement parce qu'elle passe son temps à s'excuser au lieu de se défendre (en plus du fait qu'elle est jalouse de sa relation avec Shoya). Voilà donc un film courageux et subtil qui mérite d'être découvert.

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Les Contes de la lune vague après la pluie (Ugetsu monogatari)

Publié le par Rosalie210

Kenji Mizoguchi (1953)

Les Contes de la lune vague après la pluie (Ugetsu monogatari)

Film d'une sublime beauté qui se caractérise notamment par son incroyable fluidité. La caméra opère par glissements si subtils que seuls les variations d'atmosphère permettent de distinguer le réalisme du fantastique. Les personnages eux-mêmes semblent en apesanteur lorsqu'ils passent dans l'au-delà. L'eau et la brume, les éclairages expressionnistes participent de cette impression d'irréalité teintée à la fois d'érotisme et de morbidité.

La mise en scène géniale épouse étroitement le propos et lui donne toute sa force. Le film commence par un travelling latéral de droite à gauche lourd de sens. Ce mouvement à contre-courant suggère que le parcours des personnages sera négatif, contre-nature. A l'inverse, le film se clôt sur le même travelling mais cette fois de gauche à droite suivi d'une élévation suggérant l'harmonie retrouvée.

A l'origine du déséquilibre, les passions vaniteuses de deux villageois du XVIeme siècle, Genjuro et Tobei son beau-frère. Tous deux veulent profiter de la guerre civile qui fait rage, l'un pour s'enrichir et l'autre pour se couvrir de gloire. Ils espèrent ainsi secrètement retrouver leur toute-puissance virile face à une épouse jugée trop soumise à la maternité pour Genjuro et trop autoritaire pour Tobei. Ils réaliseront leurs désirs au prix d'une terrible amputation puisque leurs épouses seront bien évidemment les victimes expiatoires de leurs rêves chimériques. A travers elles, c'est toute l'horreur du comportement viriliste qui est dénoncée, Kenji MIZOGUCHI se positionnant clairement du côté féminin.

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Boro la petite chenille (Kemushi no boro)

Publié le par Rosalie210

Hayao Miyazaki (2018)

Boro la petite chenille (Kemushi no boro)

En 2013, Hayao MIYAZAKI annonçait qu'il arrêtait la réalisation de longs-métrages après "Le vent se lève (2013), avant de faire volte-face comme il l'avait déjà fait après "Princesse Mononoké (1997)" qui devait déjà être son ultime film. En attendant son prochain long-métrage attendu pour 2020, il a réalisé ce merveilleux petit film de 14 minutes pour le musée Ghibli. Celui-ci y a été projeté en exclusivité du 21 mars au 14 août 2018.

Dans son roman de science-fiction "L'homme qui rétrécit", Richard Matheson nous offre une très belle description de la nature du point de vue de l'infiniment petit. C'est également le tour de force de ce court-métrage : donner corps au monde vu par les yeux d'une chenille minuscule. Une prouesse visuelle mais aussi auditive car il n'y a pas de dialogues, juste des onomatopées. Hayao MIYAZAKI créé des images merveilleuses (les molécules d'eau et de lumière) ou surprenantes (des insectes aussi gros que des bulldozers). Comme dans tous ses films, il allie le plus trivial (les déjections des chenilles donnent lieu à des gags étonnants et sont même reproduites en peluche au premier étage du musée) au plus existentiel (Boro ne cherche pas seulement à survivre mais à trouver sa place dans l'univers).

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La maison au toit rouge (Chiisai o-uchi)

Publié le par Rosalie210

Yoji Yamada (2014)

La maison au toit rouge (Chiisai o-uchi)

Yôji YAMADA est peu connu en France. S'il a quand même réussi à se faire reconnaître en Europe, c'est grâce au festival de Berlin qui l'a récompensé pour sa carrière. En effet c'est un vétéran du cinéma nippon qui a réalisé près de 80 films! 

En France on le situe dans la lignée de Yasujirô OZU en raison du caractère intimiste de ses films. "La maison au toit rouge" l'annonce dans son titre: l'essentiel de l'intrigue se situe entre les murs de cette maison construite en 1935 et détruite 10 ans plus tard lors des bombardements américains sur Tokyo. Cet aspect historique est très important dans le film qui traite de la grande Histoire (l'invasion de la Mandchourie, le sac de Nankin, l'Alliance avec le nazisme et enfin la guerre) par le biais de la petite histoire, celle de la famille qui habite sous ce fameux toit. 

L'autre aspect très intéressant du film réside dans la pluralité de ses points de vue. Ce n'est pas celui de la famille qui nous est montré mais celui de leur servante, Taki. Ou plutôt des souvenirs qu'elle en garde, son récit étant rétrospectif. En montrant le travail de mémoire de Taki âgée et le regard critique de son jeune neveu sur le récit qu'elle est en train d'écrire, le film interroge de façon passionnante la notion d'autobiographie et la relation compliquée entre histoire et mémoire (qui ne peut être réduite à la dualité objectif-subjectif). Le cinéaste ajoute une troisième temporalité, celle qui suit la mort de Taki quand son neveu retrouve le fils de la famille bourgeoise qui vivait dans la maison au toit rouge et lui apporte la preuve de l'infidélité de sa mère. 

L'histoire de cet adultère n'est pas aussi "classique" et "mélodramatique" que le prétendent les critiques. Yôji YAMADA redonne en effet du sens au mot transgression. La couleur du toit en est une, le comportement de la mère de famille japonaise qui subvertit son rôle social pour vivre sa passion en est l'illustration. La personnalité arty de l'amant qui est féminin jusqu'au bout des ongles, en est une autre (surtout dans le contexte militariste de l'époque). Et les émotions de la servante dont on ne sait par qui elle est le plus attirée (sa maîtresse, son amant, les deux?), encore une autre. Tout cela reste très pudique et feutré mais c'est bien le désir féminin qui est au centre du film, ce qui n'a rien de classique.    

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Le Goût du saké (Sanma no aji)

Publié le par Rosalie210

Yasujiro Ozu (1962)

Le Goût du saké (Sanma no aji)

On n'échappe pas au temps, telle est la conclusion de "La Jetée (1963)" dont le réalisateur Chris MARKER était un passionné du Japon et sa conscience vivace de l'impermanence des choses. C'est d'ailleurs le Kanji de l'impermanence (mu) qui orne la tombe de Yasujirô OZU, le plus intimiste des cinéastes japonais dont le style (caméra au sol, plans fixes) est reconnaissable entre mille. "Le goût du saké" est son dernier film réalisé au début des années 60. Comme dans beaucoup de ses films, il traite du moment crucial où les enfants quittent la cellule familiale, renvoyant les parents à leur solitude, leur vieillissement et la perspective de la mort. Quelques plans de pièces vides et silencieuses et tout est dit. Et lorsque le père refuse d'aller dans le sens du courant c'est à dire garde sa fille auprès de lui, ils vieillissent ensemble dans l'amertume et les regrets. On n'échappe pas au temps.Yasujirô OZU qui n'avait jamais quitté sa mère qu'il venait de perdre peu avant de succomber lui-même à un cancer en savait quelque chose. 

Parallèlement à ce drame intimiste, le film montre également par petites touches (toujours ces plans fixes dont la répétition souligne le sens) la transformation du Japon liée à l'occupation américaine et au miracle économique : voiture, enseignes lumineuses, frigo, whisky, baseball, usines, immeubles modernes, golf, érosion du couple et de la famille patriarcale, cohabitent avec la culture du Japon éternel, celle des sols en tatamis où l'on marche déchaussés et où l'on mange en tailleur sur des tables basses et des coussins. La nourriture occupe une place centrale dans la culture japonaise et le titre d'origine y fait référence ("Le goût du congre" un poisson d'automne symbolique de ce film crépusculaire est devenu "Le goût du saké" chez nous, notre connaissance culinaire du Japon étant très limitée).

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20th Century Boys- chapitre 3 : Reprenons notre symbole (Nijisseiki shônen: Saishû-shô - Bokura no hata)

Publié le par Rosalie210

Yukihiko Tsutsumi (2009)

20th Century Boys- chapitre 3 : Reprenons notre symbole (Nijisseiki shônen: Saishû-shô - Bokura no hata)

Ce troisième et dernier volet n'efface pas d'un coup de baguette magique les défauts inhérents à cette trilogie qui lui confèrent un style de série Z. Néanmoins la noirceur du manga d'origine est retranscrite de manière plus convaincante que dans les deux premiers films. Et l'intrigue est plus facile à suivre car plus fidèle que celle du chapitre précédent (même s'il y a des incohérences ça et là). 

Ce troisième volet laisse entrevoir à quel point le scénario du manga est exceptionnel. Il décortique avec brio les mécanismes du totalitarisme, en montre notamment les coulisses grotesques (Ami a fait alliance avec un escroc pour faire des shows truqués où il se dote de super pouvoirs). Le personnage du sauveur-messie est montré par ailleurs comme un mirage. Kenji, enfin de retour après 18 ans d'absence refuse ainsi la starisation dont il fait l'objet. Son aura d'apôtre de la non-violence hippie (il en a tous les signes: le chopper d'Easy Rider, la guitare, un hymne planétaire qu'il a composé intitulé "Bob Lennon" allusion à deux idoles d'Urasawa: Bob DYLAN et John LENNON) est mis à mal par son âge avancé: il a des rhumatismes, a du mal à se hisser sur la scène, se casse la figure etc. De plus il est hanté par la culpabilité d'avoir créé Ami dans son enfance (en dessinant le scénario apocalyptique repris à son compte par Ami et en s'y donnant le beau rôle mais aussi en le faisant accuser et molester à sa place lors d'un vol à l'étalage) ainsi que d'avoir fui ses responsabilités la plus grande partie de sa vie (il ne s'est jamais engagé auprès de Yukiji et a abandonné Kanna en bas âge). Sa sœur aînée Kiriko est tout aussi coupable: elle a eu Kanna avec celui qui allait devenir Ami, l'a abandonnée à la naissance (les Endo ont décidément un problème aigu avec la parentalité !) et a développé le virus ayant tué 150 mille personnes lors du nouvel an 2000. Même si la fin sonne comme une rédemption, le temps perdu ne se rattrape pas. Ni les milliards d'êtres humains tués par la folie des attaques bactériologiques d'Ami dont l'identité est enfin révélée.

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20th Century Boys chapitre 2 : Le dernier espoir (20-seiki shônen: Dai 2 shô - Saigo no kibô)

Publié le par Rosalie210

Yukihiko Tsutsumi (2009)

20th Century Boys chapitre 2 : Le dernier espoir (20-seiki shônen: Dai 2 shô - Saigo no kibô)

Ce deuxième volet peine à rendre compte de la richesse du matériau d'origine (les tomes 6 à 15 du manga éponyme de Naoki Urasawa). Il se contente d'un copié-collé des meilleures scènes, sacrifiant la cohérence d'ensemble qui cependant est essentielle dans une histoire contenant autant de personnages et faisant des allers-retours incessants dans le temps. Autre point faible, l'interprétation, tellement outrancière qu'elle tire le film vers la farce alors que l'histoire est dramatique en dépit de passages humoristiques.

Volet de transition, le chapitre 2 se concentre sur les héritiers du premier film: Kanna, la nièce de Kenji et le petit-fils de l'inspecteur Chôno. La première combat pour réhabiliter la mémoire de son oncle disparu, le second garde une touchante probité au milieu d'une police gangrenée comme le reste du pays par le pouvoir d'Ami et de sa secte. Ceux-ci sont passés maître dans l'art de manipuler la population, provoquant des catastrophes sanitaires pour mieux la contrôler tout en les mettant sur le dos de Kenji et ses amis. Les techniques d'asservissement de la population sont explorées dans ce deuxième volet, des livres d'histoire falsifiés aux camps de rééducation pour la jeunesse avec lavage de cerveau intégré. L'aspect millénariste de l'histoire atteint son apogée avec la résurrection d'Ami, sorte de Jésus inversé qui revient parmi les hommes non pour les sauver mais pour les anéantir. Derrière la manifestation surnaturelle se cache un homme sans visage susceptible d'être incarné par plusieurs personnes qui ont des problèmes d'identité et des comptes à régler avec leur enfance.

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20th Century Boys chapitre 1 (20-seiki shōnen: Honkaku kagaku bōken eiga)

Publié le par Rosalie210

Yukihiko Tsutsumi (2008)

20th Century Boys chapitre 1 (20-seiki shōnen: Honkaku kagaku bōken eiga)

A l'origine de cette adaptation efficace mais platement illustrative, il y a un des meilleurs manga jamais créés. "20th Century boys" de Naoki Urasawa, un dieu du genre au même titre que son maître, Osamu Tezuka est riche, complexe et haletant de bout en bout. Il a obtenu une pléthore de récompenses prestigieuses et méritées aussi bien au Japon qu'en France et aux USA. Il a contribué avec "Monster" à la reconnaissance internationale de son auteur.

En dépit des allers-retours constants entre plusieurs temporalités, l'histoire est finalement assez simple à résumer. A la fin des années 60, un enfant d'une dizaine d'années, Kenji Endo écrit et dessine avec l'aide de sa bande d'amis un récit d'anéantissement de l'humanité par une arme bactériologique. Trente ans plus tard à la fin des années 90, il voit ce récit apocalyptique qu'il a complètement oublié en grandissant se réaliser point par point. Derrière l'accomplissement de ce sinistre scénario, un gourou qui se fait appeler "Ami" et sa secte qui grandit tel un cancer pour noyauter progressivement toutes les institutions du Japon ou les faire exploser. Le parallèle avec la montée du nazisme s'impose d'autant plus aisément que Naoki Urasawa a souvent donné à ses récits des références germaniques ("Monster" se déroule en Allemagne, "Pluto" a pour héros le professeur Gesicht etc.) Et ce, même si une référence plus contemporaine s'impose immédiatement, celle des attentats au gaz sarin commis par la secte Aum entre 1989 et 1995. Kenji comprend rapidement que "Ami" est l'un de ses anciens camarades de classe qui a gravité autour de sa bande des années 60 sans jamais parvenir à s'y intégrer. A partir de cette exclusion, il a développé une haine qui le pousse à accomplir le récit de Kenji en lui faisant porter le chapeau des attentats. Kenji et ses amis, tous devenus des quadragénaires à la petite vie médiocre doivent alors affronter leurs responsabilités (et une dernière chance de se réaliser en tant qu'individu). La scène où ils déterrent la boîte contenant les souvenirs de leur passé commun a une valeur éminemment symbolique.

La force de "20th Century boys" est de jouer sur plusieurs niveaux. Derrière le récit spectaculaire millénariste et apocalyptique se cache une histoire intimiste mélancolique voire nostalgique sur le thème des illusions perdues. Tout lecteur ou spectateur lambda ne peut que se demander après la lecture ou la vision de cette oeuvre ce qu'il a fait de ses idéaux et rêves de jeunesse. Mais Urasawa ne se contente pas d'être dans le passé, il trace aussi des perspectives d'avenir. Ce guitariste autodidacte pour qui "le rock est une philosophie et Bob Dylan est son prophète" parsème son oeuvre de références à son idole et plus généralement au rock des années 60 et 70, à commencer par le titre de son manga, référence au tube éponyme du groupe T-Rex. Cependant dans le film, il souligne que le "club des 27" (rockeurs ayant pour point commun le fait d'être morts à l'âge de 27 ans) n'est pas une fin et qu'il est possible de s'accomplir ou de rester au zénith à tout âge, y compris à 80 ans. Phrase clé pour le destin de Kenji et de ses amis, tous des quadragénaires ratés qui ne deviendront des adultes accomplis qu'aux alentours de la soixantaine.

L'adaptation cinématographique, très fidèle au manga est comme je le disais plus haut platement illustrative mais efficace. Elle a le mérite de la clarté, utilisant des codes couleurs aisément identifiables pour se répérer (sépia pour le passé, bleu pour l'avenir et une ambiance naturaliste pour le présent). L'interprétation surjouée tire le film vers la série Z mais la qualité du scénario est telle que l'on s'y laisse prendre. L'ampleur de l'histoire (le manga fait 22 tomes) explique le choix de la découper en trilogie, le premier volet couvrant les 5 premiers tomes.

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