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Articles avec #cinema japonais tag

Boro la petite chenille (Kemushi no boro)

Publié le par Rosalie210

Hayao Miyazaki (2018)

Boro la petite chenille (Kemushi no boro)

En 2013, Hayao MIYAZAKI annonçait qu'il arrêtait la réalisation de longs-métrages après "Le vent se lève (2013), avant de faire volte-face comme il l'avait déjà fait après "Princesse Mononoké (1997)" qui devait déjà être son ultime film. En attendant son prochain long-métrage attendu pour 2020, il a réalisé ce merveilleux petit film de 14 minutes pour le musée Ghibli. Celui-ci y a été projeté en exclusivité du 21 mars au 14 août 2018.

Dans son roman de science-fiction "L'homme qui rétrécit", Richard Matheson nous offre une très belle description de la nature du point de vue de l'infiniment petit. C'est également le tour de force de ce court-métrage : donner corps au monde vu par les yeux d'une chenille minuscule. Une prouesse visuelle mais aussi auditive car il n'y a pas de dialogues, juste des onomatopées. Hayao MIYAZAKI créé des images merveilleuses (les molécules d'eau et de lumière) ou surprenantes (des insectes aussi gros que des bulldozers). Comme dans tous ses films, il allie le plus trivial (les déjections des chenilles donnent lieu à des gags étonnants et sont même reproduites en peluche au premier étage du musée) au plus existentiel (Boro ne cherche pas seulement à survivre mais à trouver sa place dans l'univers).

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La maison au toit rouge (Chiisai o-uchi)

Publié le par Rosalie210

Yoji Yamada (2014)

La maison au toit rouge (Chiisai o-uchi)

Yôji YAMADA est peu connu en France. S'il a quand même réussi à se faire reconnaître en Europe, c'est grâce au festival de Berlin qui l'a récompensé pour sa carrière. En effet c'est un vétéran du cinéma nippon qui a réalisé près de 80 films! 

En France on le situe dans la lignée de Yasujirô OZU en raison du caractère intimiste de ses films. "La maison au toit rouge" l'annonce dans son titre: l'essentiel de l'intrigue se situe entre les murs de cette maison construite en 1935 et détruite 10 ans plus tard lors des bombardements américains sur Tokyo. Cet aspect historique est très important dans le film qui traite de la grande Histoire (l'invasion de la Mandchourie, le sac de Nankin, l'Alliance avec le nazisme et enfin la guerre) par le biais de la petite histoire, celle de la famille qui habite sous ce fameux toit. 

L'autre aspect très intéressant du film réside dans la pluralité de ses points de vue. Ce n'est pas celui de la famille qui nous est montré mais celui de leur servante, Taki. Ou plutôt des souvenirs qu'elle en garde, son récit étant rétrospectif. En montrant le travail de mémoire de Taki âgée et le regard critique de son jeune neveu sur le récit qu'elle est en train d'écrire, le film interroge de façon passionnante la notion d'autobiographie et la relation compliquée entre histoire et mémoire (qui ne peut être réduite à la dualité objectif-subjectif). Le cinéaste ajoute une troisième temporalité, celle qui suit la mort de Taki quand son neveu retrouve le fils de la famille bourgeoise qui vivait dans la maison au toit rouge et lui apporte la preuve de l'infidélité de sa mère. 

L'histoire de cet adultère n'est pas aussi "classique" et "mélodramatique" que le prétendent les critiques. Yôji YAMADA redonne en effet du sens au mot transgression. La couleur du toit en est une, le comportement de la mère de famille japonaise qui subvertit son rôle social pour vivre sa passion en est l'illustration. La personnalité arty de l'amant qui est féminin jusqu'au bout des ongles, en est une autre (surtout dans le contexte militariste de l'époque). Et les émotions de la servante dont on ne sait par qui elle est le plus attirée (sa maîtresse, son amant, les deux?), encore une autre. Tout cela reste très pudique et feutré mais c'est bien le désir féminin qui est au centre du film, ce qui n'a rien de classique.    

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Le Goût du saké (Sanma no aji)

Publié le par Rosalie210

Yasujiro Ozu (1962)

Le Goût du saké (Sanma no aji)

On n'échappe pas au temps, telle est la conclusion de "La Jetée (1963)" dont le réalisateur Chris MARKER était un passionné du Japon et sa conscience vivace de l'impermanence des choses. C'est d'ailleurs le Kanji de l'impermanence (mu) qui orne la tombe de Yasujirô OZU, le plus intimiste des cinéastes japonais dont le style (caméra au sol, plans fixes) est reconnaissable entre mille. "Le goût du saké" est son dernier film réalisé au début des années 60. Comme dans beaucoup de ses films, il traite du moment crucial où les enfants quittent la cellule familiale, renvoyant les parents à leur solitude, leur vieillissement et la perspective de la mort. Quelques plans de pièces vides et silencieuses et tout est dit. Et lorsque le père refuse d'aller dans le sens du courant c'est à dire garde sa fille auprès de lui, ils vieillissent ensemble dans l'amertume et les regrets. On n'échappe pas au temps.Yasujirô OZU qui n'avait jamais quitté sa mère qu'il venait de perdre peu avant de succomber lui-même à un cancer en savait quelque chose. 

Parallèlement à ce drame intimiste, le film montre également par petites touches (toujours ces plans fixes dont la répétition souligne le sens) la transformation du Japon liée à l'occupation américaine et au miracle économique : voiture, enseignes lumineuses, frigo, whisky, baseball, usines, immeubles modernes, golf, érosion du couple et de la famille patriarcale, cohabitent avec la culture du Japon éternel, celle des sols en tatamis où l'on marche déchaussés et où l'on mange en tailleur sur des tables basses et des coussins. La nourriture occupe une place centrale dans la culture japonaise et le titre d'origine y fait référence ("Le goût du congre" un poisson d'automne symbolique de ce film crépusculaire est devenu "Le goût du saké" chez nous, notre connaissance culinaire du Japon étant très limitée).

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20th Century Boys- chapitre 3 : Reprenons notre symbole (Nijisseiki shônen: Saishû-shô - Bokura no hata)

Publié le par Rosalie210

Yukihiko Tsutsumi (2009)

20th Century Boys- chapitre 3 : Reprenons notre symbole (Nijisseiki shônen: Saishû-shô - Bokura no hata)

Ce troisième et dernier volet n'efface pas d'un coup de baguette magique les défauts inhérents à cette trilogie qui lui confèrent un style de série Z. Néanmoins la noirceur du manga d'origine est retranscrite de manière plus convaincante que dans les deux premiers films. Et l'intrigue est plus facile à suivre car plus fidèle que celle du chapitre précédent (même s'il y a des incohérences ça et là). 

Ce troisième volet laisse entrevoir à quel point le scénario du manga est exceptionnel. Il décortique avec brio les mécanismes du totalitarisme, en montre notamment les coulisses grotesques (Ami a fait alliance avec un escroc pour faire des shows truqués où il se dote de super pouvoirs). Le personnage du sauveur-messie est montré par ailleurs comme un mirage. Kenji, enfin de retour après 18 ans d'absence refuse ainsi la starisation dont il fait l'objet. Son aura d'apôtre de la non-violence hippie (il en a tous les signes: le chopper d'Easy Rider, la guitare, un hymne planétaire qu'il a composé intitulé "Bob Lennon" allusion à deux idoles d'Urasawa: Bob DYLAN et John LENNON) est mis à mal par son âge avancé: il a des rhumatismes, a du mal à se hisser sur la scène, se casse la figure etc. De plus il est hanté par la culpabilité d'avoir créé Ami dans son enfance (en dessinant le scénario apocalyptique repris à son compte par Ami et en s'y donnant le beau rôle mais aussi en le faisant accuser et molester à sa place lors d'un vol à l'étalage) ainsi que d'avoir fui ses responsabilités la plus grande partie de sa vie (il ne s'est jamais engagé auprès de Yukiji et a abandonné Kanna en bas âge). Sa sœur aînée Kiriko est tout aussi coupable: elle a eu Kanna avec celui qui allait devenir Ami, l'a abandonnée à la naissance (les Endo ont décidément un problème aigu avec la parentalité !) et a développé le virus ayant tué 150 mille personnes lors du nouvel an 2000. Même si la fin sonne comme une rédemption, le temps perdu ne se rattrape pas. Ni les milliards d'êtres humains tués par la folie des attaques bactériologiques d'Ami dont l'identité est enfin révélée.

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20th Century Boys chapitre 2 : Le dernier espoir (20-seiki shônen: Dai 2 shô - Saigo no kibô)

Publié le par Rosalie210

Yukihiko Tsutsumi (2009)

20th Century Boys chapitre 2 : Le dernier espoir (20-seiki shônen: Dai 2 shô - Saigo no kibô)

Ce deuxième volet peine à rendre compte de la richesse du matériau d'origine (les tomes 6 à 15 du manga éponyme de Naoki Urasawa). Il se contente d'un copié-collé des meilleures scènes, sacrifiant la cohérence d'ensemble qui cependant est essentielle dans une histoire contenant autant de personnages et faisant des allers-retours incessants dans le temps. Autre point faible, l'interprétation, tellement outrancière qu'elle tire le film vers la farce alors que l'histoire est dramatique en dépit de passages humoristiques.

Volet de transition, le chapitre 2 se concentre sur les héritiers du premier film: Kanna, la nièce de Kenji et le petit-fils de l'inspecteur Chôno. La première combat pour réhabiliter la mémoire de son oncle disparu, le second garde une touchante probité au milieu d'une police gangrenée comme le reste du pays par le pouvoir d'Ami et de sa secte. Ceux-ci sont passés maître dans l'art de manipuler la population, provoquant des catastrophes sanitaires pour mieux la contrôler tout en les mettant sur le dos de Kenji et ses amis. Les techniques d'asservissement de la population sont explorées dans ce deuxième volet, des livres d'histoire falsifiés aux camps de rééducation pour la jeunesse avec lavage de cerveau intégré. L'aspect millénariste de l'histoire atteint son apogée avec la résurrection d'Ami, sorte de Jésus inversé qui revient parmi les hommes non pour les sauver mais pour les anéantir. Derrière la manifestation surnaturelle se cache un homme sans visage susceptible d'être incarné par plusieurs personnes qui ont des problèmes d'identité et des comptes à régler avec leur enfance.

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20th Century Boys chapitre 1 (20-seiki shōnen: Honkaku kagaku bōken eiga)

Publié le par Rosalie210

Yukihiko Tsutsumi (2008)

20th Century Boys chapitre 1 (20-seiki shōnen: Honkaku kagaku bōken eiga)

A l'origine de cette adaptation efficace mais platement illustrative, il y a un des meilleurs manga jamais créés. "20th Century boys" de Naoki Urasawa, un dieu du genre au même titre que son maître, Osamu Tezuka est riche, complexe et haletant de bout en bout. Il a obtenu une pléthore de récompenses prestigieuses et méritées aussi bien au Japon qu'en France et aux USA. Il a contribué avec "Monster" à la reconnaissance internationale de son auteur.

En dépit des allers-retours constants entre plusieurs temporalités, l'histoire est finalement assez simple à résumer. A la fin des années 60, un enfant d'une dizaine d'années, Kenji Endo écrit et dessine avec l'aide de sa bande d'amis un récit d'anéantissement de l'humanité par une arme bactériologique. Trente ans plus tard à la fin des années 90, il voit ce récit apocalyptique qu'il a complètement oublié en grandissant se réaliser point par point. Derrière l'accomplissement de ce sinistre scénario, un gourou qui se fait appeler "Ami" et sa secte qui grandit tel un cancer pour noyauter progressivement toutes les institutions du Japon ou les faire exploser. Le parallèle avec la montée du nazisme s'impose d'autant plus aisément que Naoki Urasawa a souvent donné à ses récits des références germaniques ("Monster" se déroule en Allemagne, "Pluto" a pour héros le professeur Gesicht etc.) Et ce, même si une référence plus contemporaine s'impose immédiatement, celle des attentats au gaz sarin commis par la secte Aum entre 1989 et 1995. Kenji comprend rapidement que "Ami" est l'un de ses anciens camarades de classe qui a gravité autour de sa bande des années 60 sans jamais parvenir à s'y intégrer. A partir de cette exclusion, il a développé une haine qui le pousse à accomplir le récit de Kenji en lui faisant porter le chapeau des attentats. Kenji et ses amis, tous devenus des quadragénaires à la petite vie médiocre doivent alors affronter leurs responsabilités (et une dernière chance de se réaliser en tant qu'individu). La scène où ils déterrent la boîte contenant les souvenirs de leur passé commun a une valeur éminemment symbolique.

La force de "20th Century boys" est de jouer sur plusieurs niveaux. Derrière le récit spectaculaire millénariste et apocalyptique se cache une histoire intimiste mélancolique voire nostalgique sur le thème des illusions perdues. Tout lecteur ou spectateur lambda ne peut que se demander après la lecture ou la vision de cette oeuvre ce qu'il a fait de ses idéaux et rêves de jeunesse. Mais Urasawa ne se contente pas d'être dans le passé, il trace aussi des perspectives d'avenir. Ce guitariste autodidacte pour qui "le rock est une philosophie et Bob Dylan est son prophète" parsème son oeuvre de références à son idole et plus généralement au rock des années 60 et 70, à commencer par le titre de son manga, référence au tube éponyme du groupe T-Rex. Cependant dans le film, il souligne que le "club des 27" (rockeurs ayant pour point commun le fait d'être morts à l'âge de 27 ans) n'est pas une fin et qu'il est possible de s'accomplir ou de rester au zénith à tout âge, y compris à 80 ans. Phrase clé pour le destin de Kenji et de ses amis, tous des quadragénaires ratés qui ne deviendront des adultes accomplis qu'aux alentours de la soixantaine.

L'adaptation cinématographique, très fidèle au manga est comme je le disais plus haut platement illustrative mais efficace. Elle a le mérite de la clarté, utilisant des codes couleurs aisément identifiables pour se répérer (sépia pour le passé, bleu pour l'avenir et une ambiance naturaliste pour le présent). L'interprétation surjouée tire le film vers la série Z mais la qualité du scénario est telle que l'on s'y laisse prendre. L'ampleur de l'histoire (le manga fait 22 tomes) explique le choix de la découper en trilogie, le premier volet couvrant les 5 premiers tomes.

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Perfect Blue (Pafekuto Buru)

Publié le par Rosalie210

Satoshi Kon (1997)

Perfect Blue  (Pafekuto Buru)

"Qui es-tu?" Mima voudrait bien choisir ce qu'elle voudrait être. Mais cette jeune fille sans histoire, sans aspérité n'y arrive pas, prisonnière des images que les autres façonnent, prisonnière de leurs fantasmes et de leurs projections. Progressivement, elle se perd dans ce labyrinthe d'images jusqu'aux limites de la folie alors qu'autour d'elle, les cadavres s'accumulent dans la pure tradition du thriller hitchcockien et de son héritier, celui de Brian de Palma.

Film culte et visionnaire, le premier long-métrage de Satoshi Kon l'est assurément puisqu'en 1997, la révolution numérique n'avait pas encore envahi les foyers. Pourtant Mima découvre que sur Internet, quelqu'un tient un blog en se faisant passer pour elle. Ce vol d'identité numérique n'est que le dernier avatar d'une longue chaîne d'illusions véhiculées par les médias (presse, affiches, photos, TV, cinéma). La première Mima que nous voyons, c'est la pop idol, ces jeunes chanteuses kleneex véhiculant une image fraîche, gaie et innocente fabriquées par une industrie du divertissement qui les médiatise à outrance durant quelques années avant de les rejeter pour en prendre d'autres. Dans l'espoir d'échapper à ce destin, Mima décide d'arrêter en pleine gloire pour saisir l'opportunité qu'on lui propose de devenir actrice et mannequin. Elle tombe ainsi dans un autre système d'exploitation d'images, sauf que celui-ci la sexualise à outrance, la faisant poser nue et la soumettant à une scène de viol. Mais l'ancienne Mima maintenue en vie par ses fans otakus les plus acharnés ne veut pas périr et revient tel un fantôme harceler la nouvelle Mima et massacrer ceux (des hommes évidemment) qui l'ont créé. De façon significative, le tueur crève les yeux de ses victimes pour les punir de leur transgression. Chez Kon, tout est affaire de mise en abyme. Au Japon, les poils pubiens sont un véritable tabou culturel, or Satoshi Kon n'hésite pas à l'exploser en montrant ceux de Mima ce qui le place dans une position très provocatrice, susceptible de provoquer des réactions violentes à son égard. Une vraie note d'intention pour son cinéma.

Que pèsent au final les limites techniques face à une réflexion aussi vertigineuse et une mise en scène aussi brillante? On ne se pose pas la question lorsqu'il s'agit de films live utilisant des effets spéciaux datés, pourquoi cela devrait-il pénaliser exclusivement les films d'animation? En tout cas celui à qui cela n'a pas posé de problème, c'est Darren Aronofsky qui s'est largement inspiré de "Perfect blue" pour réaliser "Black Swan" jusqu'à reprendre à l'identique des plans entiers.

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Millenium Actress (Sennen joyū)

Publié le par Rosalie210

Satoshi Kon (2001)

Millenium Actress (Sennen joyū)

Un proverbe chinois dit que "L'important n'est pas le but, mais le chemin". C'est exactement la philosophie du deuxième film de Satoski Kon. Mieux vaut être bien accroché: en une heure et vingt-trois minutes, on parcours 40 ans de la vie d'une grande actrice japonaise, retravaillées par sa mémoire. 40 ans d'une course folle à travers les années, les films, les rêves, les genres du cinéma et de quelques uns de ses plus grands réalisateurs. Le tout ne forme qu'une seule et même expérience, l'expérience totale d'une vie d'être humain. Le film par sa construction en scènes emboîtées les unes dans les autres fait penser aux poupées russes ou aux miroirs qui se réfléchissent à l'infini.

Néanmoins ces scènes ne sont que des variations de la même histoire. Une histoire extrêmement simple, celle du désir humain voué à n'être jamais satisfait mais constituant l'aiguillon indispensable pour avancer et créer. Le film devient ainsi une réflexion sur la destinée. La vocation d'actrice de Chiyoko Fujiwara naît le jour où son chemin croise furtivement celui d'un jeune peintre traqué par le pouvoir autoritaire du Japon nationaliste des années 30. Elle passera les trente années suivante à le rechercher, traversant de multiples périls (la guerre, la répression totalitaire, les tremblements de terre), endossant de multiples rôles (princesse, geisha, cosmonaute, infirmière, maîtresse d'école etc.) et genres (mélodrame, science-fiction, film de sabre à la Kurosawa, film de guerre, film de monstres type Godzilla) sans jamais parvenir à le rejoindre.

Son désir croise sans cesse par ailleurs celui du réalisateur venu faire un documentaire sur elle, Genya Tachibana ce qui approfondit encore la mise en abyme entre vie réelle, cinéma et fantasmes. Lui aussi apparaît quasiment dans toutes les scènes du film, la plupart du temps flanqué de son caméraman. Parfois simple observateur du récit de la vieille actrice, il occupe la plupart du temps le rôle du chevalier blanc venant au secours de sa belle. Plus jeune, il a travaillé dans les mêmes studios qu'elle et l'a réellement protégé. Son désir pour elle qui perdure à travers le temps est tout aussi inaccessible que celui qu'elle porte au peintre dont on ne verra jamais le visage.

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Mes voisins les Yamada ( Hōhokekyo tonari no Yamada-kun)

Publié le par Rosalie210

Isao Takahata (2001)

Mes voisins les Yamada ( Hōhokekyo tonari no Yamada-kun)

La filmographie de Isao Takahata est moins lisible que celle de son compatriote Hayao Miyazaki car il ne dessine ni n'anime lui-même les films qu'il met en scène. Par conséquent, un certain éclectisme des styles et des thèmes caractérise son œuvre. Pour "Mes voisins les Yamada" qui au sein des studios Ghibli succédait au succès critique et public de "Princesse Mononoké", il pris de gros risques techniques et scénaristiques qui ne payèrent pas. Le film fut un tel échec au box-office qu'il ne réalisa plus de longs-métrages pendant quinze ans. Au Japon, le film fut confronté à un problème de distribution et dût faire face à une concurrence très rude dont il sortit perdant. Au niveau international, les raisons de cet échec s'expliquent par le fait qu'il est très ancré dans la culture japonaise et donc difficilement compréhensible pour ceux qui n'y connaissent rien. Il fait par exemple référence à des contes traditionnels japonais comme celui de Momotarô et de la princesse Kaguya qu'adaptera Takahata en 2013, reprend l'iconographie d'estampes comme la "Vague" d'Hokusai, est entrecoupé de haïkus qui apportent un éclairage philosophique décalé sur l'histoire.

"Mes voisins les Yamada" est l’adaptation d’une bande dessinée du dessinateur Hisaichi Ishii, publiée dans le journal quotidien Asahi Shinbun. Sa particularité est qu’il s’agit d’une BD en quatre cases (appelée « yonkoma ») dont l'équivalence scénaristique est le sketch. On a donc un film découpé en tranches de vie décrivant avec un réalisme teinté d'humour caustique le quotidien d'une famille japonaise traditionnelle. Takashi le père est un salaryman, Matsuko la mère une femme au foyer, Noboru le fils est un adolescent maladroit, Nonoko est la fillette kawai, Shige la mère de Matsuko vit avec eux ainsi que Pochi le chien. L'humour naît du comportement décalé des membres de la famille par rapport à celui qui est attendu d'eux. Par exemple le père est un distrait qui "oublie" parfois ses obligations et se met dans des situations impossibles. La séquence des motards montre également qu'il a moins d'autorité que les femmes de sa famille. La mère au foyer use de toutes sortes de stratégies pour en faire le moins possible, notamment en ce qui concerne la cuisine. De façon plus générale, chacun tend à se décharger de ses obligations sur les autres.

Sur le plan technique, le dessin est crayonné avec remplissage à l'aquarelle. Tranchant avec le réalisme de l'histoire, le film reprend le style graphique du manga qui est caricatural avec des personnages SD (Super Deformed avec grosse tête et membres courts) ce qui atténue le sérieux des situations. Il y a cependant une exception avec la séquence des motards qui menacent la famille, traitée avec des proportions plus réalistes et un crayonné plus sombre. Il s'agit du premier film Ghibli réalisé entièrement par ordinateur, la technique choisie étant trop compliquée à réaliser manuellement. Il y a même deux séquences en 3D habilement camouflées dans le long-métrage.

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Goshu le violoncelliste (Serohiki no gōshu)

Publié le par Rosalie210

Isao Takahata (1981)

Goshu le violoncelliste (Serohiki no gōshu)

Adaptation d'une nouvelle tirée du recueil de contes "Train de nuit dans la voie lactée" de Kenji Miyazawa, "Goshu le violoncelliste" est le quatrième film d'Isao Takahata, huit ans avant le "Tombeau des lucioles" et six ans avant de fonder les studios Ghibli. Il s'agit d'un récit d'apprentissage ou plutôt de réapprentissage. Violoncelliste au sein d'un orchestre municipal, Goshu subit les foudres du chef d'orchestre à cause de la médiocrité de son jeu, maladroit et sans âme. Retranché dans sa cabane au fond des bois, il répète sans relâche la sixième symphonie de Beethoven sous les yeux menaçants du portrait de l'artiste. C'est alors qu'il reçoit la visite d'esprits de la forêt sous la forme de petits animaux qui lui indiquent comment il doit jouer. Au début, il leur tourne le dos, se moque d'eux voire les rudoie. Puis dans un second temps, il s'ouvre à eux, et s'éveille à lui-même devenant en une nuit un prodige de la musique.

Si "Goshu le violoncelliste" est peu connu en France, sa sortie ayant été confidentielle c'est qu'une partie du sens de ce conte animiste semble échapper aux occidentaux. Et ce en dépit du pont jeté entre les cultures puisque la musique prédominante est celle de Beethoven (la culture européenne est très appréciée au Japon). La version française (la seule actuellement disponible en DVD) gomme la spiritualité liée à la mythologie japonaise. Par exemple le tanuki est traduit par "blaireau" et le chat tricolore porte-bonheur est doté d'une voix mâle alors que ce type de chat est presque toujours une femelle. Comme le coucou oriental, ces animaux sont des yokai c'est à dire des esprits de la forêt. Chacun apporte une leçon à Goshu: la patience, la rigueur, l'empathie, l'envie de communiquer. Les paysages eux-mêmes semblent vivants et expriment les émotions du personnage principal. Alors certes il n'y a pas d'action dans Goshu et le graphisme date du début des années 80 mais cette œuvre assez magique mérite d'être mieux comprise et réévaluée.

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