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Le Goût du riz au thé vert (Ochazuke no aji)

Publié le par Rosalie210

Yasujiro Ozu (1952)

Le Goût du riz au thé vert (Ochazuke no aji)

Les titres des films de Yasujiro OZU sont de petites merveilles de poésie. Certains parmi les plus célèbres se réfèrent au passage des saisons, de "Printemps précoce" (1956) à "Fin d'automne" (1960) (l'hiver est indirectement présent dans "Crepuscule a Tokyo") (1957). D'autres insistent sur le sens gustatif de plats typiquement japonais comme "Le Gout du sake" (1962) son ultime film et celui-ci "Le goût du riz au thé vert". Yasujiro OZU le considérait comme raté mais souvent les cinéastes ne sont pas de bons juges de leurs propres films. "Le goût du riz au thé vert" est plein de charme et dépeint avec finesse un couple en crise qui ne communique plus, celui de Taeko et Mokichi. La jeune nièce de Taeko, Setsuko qui représente la nouvelle génération observe et désapprouve les effets de cette mésentente conjugale sur le comportement de Taeko qui fuit son mari, lui ment et se moque de lui derrière son dos en le surnommant "M. L'Engourdi". Aussi quand Taeko et sa mère veulent arranger son mariage, elle en tire les conclusions qui s'imposent. Plutôt que de se plier aux traditions qui ont conduit à l'union malheureuse de sa tante et de son oncle, elle préfère passer du bon temps sous la houlette de Mokichi et de son jeune protégé. Derrière le masque indéchiffrable de son visage et des propos mollement réprobateurs, Mokichi s'avère en réalité d'une grande bienveillance et sans illusions sur son couple. Cependant alors que la rupture semble consommée, Yasujiro OZU met en scène une merveilleuse scène de réconciliation du couple autour de la préparation et de la dégustation d'un plat tout simple, le fameux riz au thé vert. La scène est préfigurée par un plan tout simple et très significatif: celui où Taeko contemple un paquet de cigarettes vide oublié par Mokichi alors qu'elle croit qu'il l'a quittée pour partir en Uruguay. Alors qu'elle lui reprochait ses goûts trop simples, trop frustes pour elle qui est issue d'un milieu social plus élevé, voilà qu'en un seul plan, on devine qu'il lui manque. Plus exactement, elle découvre qu'il est finalement à son goût, exactement de la même manière par laquelle Noriko dans "Ete precoce" (1951) découvrait qu'elle était amoureuse « Je me suis éprise de cet homme comme lorsque l’on cherche en couture une paire de ciseaux que l’on ne trouve pas et qui est pourtant sous nos yeux ». C'est avec ce genre de petits riens déclencheurs de mémoire sensorielle et affective à la manière d'une madeleine de Proust que Yasujiro OZU nous cueille.

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