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Articles avec #veber (francis) tag

Le Jouet

Publié le par Rosalie210

Francis Veber (1976)

Le Jouet


"Je veux ça"
"Le Zorro? Le Cosmonaute?"
"Non ça!"

Il y a deux façons d'interpréter ce dialogue, un des moments-clés de la première réalisation de Francis VEBER dont l'outrance satirique cache une authentique tragédie de l'intime. Comme le dit Michel BOUQUET "Tout est profondément tragique dans ce film et c'est là-dessus que la comédie peut se développer."

La première interprétation consiste à ne voir dans ce désir (s'approprier un être humain et le traiter comme un objet) qu'un caprice d'enfant tellement gâté-pourri qu'il n'a plus aucune limite. C'est d'ailleurs moins la demande de l'enfant qui terrifie que la servilité des adultes qui l'entourent, tous prêts à servir ou à jouer ce jeu malsain. A l'un d'entre eux, le rédacteur en chef Blénac (Jacques FRANÇOIS), le patron et père de l'enfant (Michel BOUQUET) dira cette phrase restée dans les annales: "Qui de nous deux est le monstre, moi qui vous demande de retirer votre pantalon ou vous qui acceptez de montrer votre derrière ?" En effet Veber rappelle que la tyrannie ne peut fonctionner sans l'obéissance, le jeu se joue toujours à deux et quelle que ce soit sa situation (ici la crise économique, la hantise du chômage et des dettes) on a toujours le choix.

Mais la deuxième partie du film montre que la demande de l'enfant a un autre sens. Ce qu'il veut, c'est avoir un être humain avec lui au milieu des objets qui l'entourent. Un père plus exactement. Car le film a une résonance autobiographique aussi bien pour Francis VEBER ("j'ai raté mon père, mon père m'a raté aussi") que pour Pierre RICHARD ("mon père n'en avait pas non plus [d'affection pour moi]"). La relation qui se développe entre l'enfant et François Perrin finit par échapper à la logique de la marchandisation des êtres humains pour devenir affective. Pour François Perrin (et derrière lui Francis VEBER et Pierre RICHARD) il s'agit d'une mission sauvetage, celui de l'enfant qu'ils ont en eux et qui ne veut pas mourir (contrairement à celui qui était à l'intérieur de leurs pères).

Enfin le comique du film ne sert pas qu'à transmuer la tristesse, il est aussi un bon moyen d'expression de la colère. François Perrin apparaît comme un agent du chaos qui dynamite les normes sociales de l'intérieur et investit l'enfance comme principe de subversion. La scène où François Perrin et le gamin dévastent la garden-party du père en jouant aux cowboys et aux Indiens (rebaptisés "rouges") alors qu'une manifestation syndicale d'ouvriers injustement licenciés se déroule à l'extérieur des grilles donne une allure de lutte des classes qui ne dit pas son nom à la scène. Bien qu'à l'époque tout le monde avait reconnu Dassault derrière le personnage de Rambal-Cochet. Le licenciement sous des prétextes futiles comme des mains trop moites est hélas une histoire authentique.

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Cause toujours, tu m'intéresses!

Publié le par Rosalie210

Edouard Molinaro (1979)

Cause toujours, tu m'intéresses!

"Cause toujours, tu m'intéresses" est une comédie beaucoup plus fine que ce que son titre (débile) laisse entendre. Certes la mise en scène est sans aucun relief et la photographie a bien vieilli mais le scénario signé Veber fait mouche, hier comme aujourd'hui. Quant à l'interprétation, elle est remarquable. Jean-Pierre Marielle et Annie Girardot sont tous deux sensibles et justes.

Le contraste entre le romanesque des rencontres virtuelles et le prosaïsme de la réalité quotidienne n'est pas un thème nouveau. L'ordinateur et le smartphone se sont substitués aux téléphones fixes à fil en bakélite des années 70 mais, ce sont toujours les mêmes ultra-modernes solitudes que ces interfaces technologiques mettent en contact (comme l'a montré récemment "Her" de Spike Jonze). On peut même se passer de la technologie, remonter plus loin, jusqu'aux romances épistolaires où l'on fantasmait déjà sur son correspondant en l'absence de tout moyen de se le représenter. Et où l'on tremblait de peur à l'idée de se montrer sous son vrai jour.

A ce questionnement s'en superpose un autre, celui de la différence et de l'exclusion. L'intégration sociale de François (Jean-Pierre Marielle) et de Christine (Annie Girardot) est une pure façade. En réalité ils sont seuls et en proie à un profond mal-être pour ne pas dire à une honte de soi. François le petit journaliste ne parvient pas à se comporter en mâle alpha ce qui le met sur la touche. Une des sources de comique (teinté de mélancolie) du film provient de ses tentatives pathétiques pour singer le grand reporter Georges Julienne qui travaille à RTL comme lui (son prestige, sa pipe, son 4x4, ses conquêtes). Quant à Christine la pharmacienne ou plutôt l'infirmière de service, à force d'avoir joué le rôle de la femme dévouée qui s'oublie pour les autres, elle est tout aussi perdue. La scène où on la découvre chez elle au milieu d'une collègue qu'elle héberge, son bébé braillard et la jeune fille au pair chargée de s'en occuper montre qu'elle s'est laissé envahir et qu'elle n'a plus d'espace à elle (elle se réfugie dans la baignoire de la salle de bain, le seul cocon dans lequel elle peut recevoir les appels du dénommé "Thibault"). Significativement, leurs relations "miroirs" appartiennent à des minorités discriminées. Pour François, c'est le voisin de palier sénégalais que tout le monde rejette (on est en 1979, avant la percée de l'antiracisme). Pour Christine, c'est son collègue homosexuel (joué par Jacques François) qui parle peu mais n'en pense pas moins.  

Quant à la fin, contrairement à beaucoup, je ne la trouve pas "trop simple", ou "résignée" ou "trop gentille". Je la trouve belle, tout simplement. Thibault est ce que François voudrait être et ce que Christine rêverait qu'il soit. Ils ont tous deux besoin de s'accrocher à cette illusion pour avoir le courage d'apprendre à se connaître véritablement dans toutes leurs limites et faiblesses. Car le courant passe entre eux en dépit des malentendus. Christine a sans doute compris bien avant d'aller dans son appartement que Thibault et François étaient la même personne mais il lui faut du temps pour l'accepter. François l'a compris lui aussi puisqu'il finit par prendre le risque de se montrer tel qu'il est. Et c'est cette acceptation qui est la plus intéressante. Car ce n'est pas de la résignation. Cela signifie qu'ils ont réussi à créer un lien hors d'atteinte du jugement social (exactement comme dans "La Garçonnière" de Billy Wilder qui suscite les mêmes commentaires dépréciateurs du genre "deux solitudes, "deux chômeurs" etc.) Selon ce jugement complètement aliénant, François est un minable sans avenir et Christine une vieille fille "hors service".

Mais comme le dit si bien Manfredi dans "Rome, ville ouverte" lorsqu'il s'adresse à sa maîtresse Marina (qui est sur le point de le livrer à la Gestapo contre un manteau de fourrure), le bonheur ne réside pas dans un bel appartement (ni dans une quelconque breloque, ni dans un titre ou une position, aussi avantageuse soit-elle). Vive les réalisateurs lucides qui savent voir par-delà les apparences! 

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Les Compères

Publié le par Rosalie210

Francis Veber (1983)

Les Compères

Deuxième film de la trilogie Depardieu/Richard, "Les Com-pères" a comme son titre l'indique pour thème principal la paternité. Lucas et Pignon qui ont des personnalités opposées représentent en fait deux moitiés de père. Lucas en est le versant viril, macho, celui dont les injonctions type se résument à "sois un homme" et "je veux pas que mon fils soit PD". Pignon représente le versant féminin, doux, hypersensible, maladroit et dépressif (vu la considération que la société porte au féminin ce n'est guère étonnant). Comme son alter ego de "l'Emmerdeur" il a accumulé les déboires et les suicides ratés. La façon dont chacun s'imagine et se projette dans son fils supposé puis évoque sa difficulté à communiquer ou à comprendre son propre père dégage une vraie mélancolie à l'intérieur de la comédie (renforcée par la musique de Vladimir Cosma). La manière dont Tristan le fils (Stéphane Bierry) s'extrait du conflit en réconciliant les contraires (qui vont jusqu'à inverser les rôles) lui permet de renouer avec son vrai père, Paul (joué par Michel Aumont). La fugue de Tristan fait prendre conscience à ce dernier qu'il a été transparent. C'est d'ailleurs cette inexistence qui a poussé la mère, Christine (jouée par Annie Duperey) à faire appel à ses deux anciens amants pour retrouver son fils.

Cette réflexion assez fine sur la paternité (prolongée de façon tout aussi pertinente dans les "Fugitifs") n'empêche pas les "Compères" d'être aussi un divertissement très amusant. L'univers eighties fait sourire par son côté exotique (les jeunes rebelles en blouson de cuir noir ou en jean et leurs pères en costard 24h sur 24, les patinoires pour patins à roulettes, les salles de jeux etc.) et les scènes comiques ne manquent pas comme celle où Pignon tente de "parler djeun's" ou celle dans laquelle Lucas lui apprend la technique du coup de boule.

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L'Emmerdeur

Publié le par Rosalie210

Edouard Molinaro (1973)

L'Emmerdeur

Chaque personne trimballe son univers avec elle et quand deux visions du monde diamétralement opposées se rencontrent cela peut donner des associations incongrues comme celle d'un parapluie et d'une machine à coudre sur une table de dissection.

"L'Emmerdeur" repose sur deux caractères que tout oppose: un tueur à gages flegmatique joué par l'imposant Lino Ventura et un imbécile malheureux et gaffeur joué par Jacques Brel qui colle aux basques du premier et lui porte la poisse. Le comique jaillit du décalage entre les genres cinématographiques d'où leurs personnages sont issus (le polar pour le premier, le mélodrame pour le second) et celui dans lequel ils se retrouvent plongés à leur insu: un énorme vaudeville! Outre l'excellence de l'interprétation, le film bénéficie d'un savoir-faire dû à une autre association fructueuse: celle d'Edouard Molinaro et de Raoul Coutard, le chef opérateur de Jean-Luc Godard qui réussit à faire oublier les origines théâtrales du film. Enfin "L'Emmerdeur" marque la naissance de François Pignon, le personnage emblématique de Francis Veber (l'auteur de la pièce originale et du scénario). Mais contrairement à beaucoup, je ne considère pas "L'Emmerdeur" comme le meilleur cru de la série Pignon. La mécanique comique est ultra efficace mais elle repose sur un grand vide à l'image du passage où les deux personnages sont suspendus au balcon. La trilogie Depardieu/Richard ou "Le Dîner de cons" ont plus de substance et peuvent être comparés aux meilleures comédies populaires de Gérard Oury. Francis Veber n'était d'ailleurs pas satisfait du film et c'est pourquoi il prit la décision de réaliser à l'avenir ses scénarios. Il finit par faire un remake de "l'Emmerdeur" en 2008 sans parvenir cependant à retrouver la recette magique du film de Molinaro.

"L'Emmerdeur" fit également l'objet d'un remake américain (lié au succès du film de Molinaro outre-Atlantique): "Buddy Buddy", le dernier film de Billy Wilder, malheureusement ce fut un ratage.

À noter la présence dans le rôle du maître d'hôtel de Nino Castelnuovo, 10 ans après "Les Parapluies de Cherbourg" où il interprétait le rôle de Guy.

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Victor la Gaffe (Buddy Buddy)

Publié le par Rosalie210

Billy Wilder (1981)

Victor la Gaffe (Buddy Buddy)

"Buddy Buddy" sorti en France directement en VHS sans passer par la case cinéma sous le titre "Victor la Gaffe" est un nanar théâtral à grosses ficelles joué par des acteurs vieillissants qui ont du mal à placer une jambe devant l'autre. Il est dommage que Billy Wilder ait terminé sa carrière sur un film aussi médiocre mais en même temps celui-ci confirme à quel point il n'était plus en phase avec l'époque.

Paradoxalement ce n'est pas la censure ou l'oppression qui est la plus nuisible à la création mais le vide des valeurs. Wilder avait besoin de l'hypocrisie des moeurs bourgeoises conservatrices pour exprimer son talent. Celles-ci ayant été pulvérisées par la révolution sexuelle des années 70, Wilder s'est retrouvé privé de son punching-ball préféré et incapable d'envisager le sujet autrement. Son incapacité à changer de logiciel fait sombrer "Buddy Buddy" dans le ridicule et la lourdeur, notamment vis à vis de tout ce qui concerne la clinique de sexologie dirigée par le docteur Zuckerbrot (Klaus Kinski, grand-guignolesque). L'éveil à la sexualité est considéré comme quelque chose d'exotique, relevant de bonnes femmes hystériques, de pervers ou d'illuminés.

"Buddy Buddy" sent donc un peu la naphtaline ou le beurre rance (voire le sapin) et ce ne sont pas les acteurs qui vont relever le niveau. Pour la troisième et dernière fois, Wilder réunit Walter Matthau et Jack Lemmon qui ont du savoir-faire mais ne sont plus de la première jeunesse eux non plus. Ils font donc du Walter Matthau et du Jack Lemmon, le premier ronchonnant à qui mieux mieux et le second multipliant les gaffes. Quant à Paula Prentiss qui joue la femme de Lemmon elle était mieux employée chez Howard Hawks dans la screwball comedie "Le sport favori de l'homme".

Remake de "L'emmerdeur" d'Edouard Molinaro qui avait eu un certain succès aux Etats-Unis (on reconnaît d'ailleurs la patte de Francis Veber qui est l'auteur de la pièce d'origine et du scénario), "Buddy Buddy" est un film de commande tout à fait dispensable. Billy Wilder était d'ailleurs le premier à le renier. La plupart des critiques préfèrent à juste titre considérer que la carrière de Billy Wilder s'achève sur "Fedora", son testament cinématographique.

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La Chèvre

Publié le par Rosalie210

Francis Veber (1981)

La Chèvre

"La Chèvre" est le deuxième film de Francis Veber (après "Le Jouet" en 1976 avec Lino Ventura qui devait d'ailleurs initialement interpréter le rôle de Campana avant de poser des conditions qui rendirent caduque sa participation au film.) C'est aussi l'un de ses plus gros succès avec "Le Dîner de cons" (Villeret devait d'ailleurs jouer à l'origine le rôle de Perrin mais Lino Ventura s'y était opposé, pfff...). C'est enfin le premier volet de sa trilogie avec le duo Depardieu/Richard (les deux autres étant "Les Compères" et "Les Fugitifs"). Et enfin c'est le film qui révéla le potentiel comique de Depardieu, lequel était jusque là cantonné aux rôles dramatiques.

Veber montre dans ce film à l'efficacité imparable qu'il connaît les secrets (je préfère parler de secrets que de recettes) de la comédie fondée sur une savante mécanique et sur l'art du décalage. La mécanique comique de "La Chèvre" fonctionne avec une efficacité redoutable. Le duo Perrin/Campana est comparable à celui de l'auguste et du clown blanc, la drôlerie des maladresses du premier étant décuplée par les expressions incrédules ou furieuses du second grâce au jeu du champ et du contrechamp. D'autre part, cette opposition de caractères est aussi une opposition d'univers. D'un côté le monde logique et rationnel de Campana qui ne croit qu'aux faits. De l'autre le fonctionnement irrationnel et fantaisiste de Perrin, sorte de Pierrot lunaire un peu rêveur. Cette opposition est celle de deux facettes de l'humain. La première survalorisée car si elle rassure et contrôle, elle limite aussi comme le montre l'échec initial de l'enquête sur la disparition de la petite Bens. La seconde nettement plus refoulée car elle demande lâcher-prise, abandon et humilité face à ce qui nous échappe. Pourtant c'est l'alliance des deux hommes (et donc de ces deux facettes) qui permettra de faire aboutir l'enquête histoire de rappeler au passage que l'homme marche sur deux jambes.

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Le retour du grand blond

Publié le par Rosalie210

Yves Robert (1974)

Le retour du grand blond

Cette suite du "Grand blond avec une chaussure noire" est assez décevante. Elle n'est pas mauvaise parce que les acteurs restent géniaux. Pierre Richard vaut à lui seul le déplacement (je l'adore!) mais Rochefort aussi est parfait jusque dans sa dernière réplique en forme de pirouette (il va terriblement me manquer!) Il faut dire que l'un des ressort majeur du retour du grand blond tient dans cette opposition entre un indécrottable candide et un cynique bien retors dont on suit les déconfitures avec jubilation.

Mais le hic provient d'une intrigue qui bégaye sérieusement. De même, plusieurs gags/situations sentent le réchauffé (la robe décolletée de Mireille Darc, les fausses hallucinations de Jean Carmet, les chaussures dépareillées de Pierre Richard etc.) Le capitaine Cambrai (Michel Duchaussoy) ne parvient pas à combler le trou lié à la disparition du personnage joué par Blier. Certes, l'épluchage des dossiers secrets des uns et des autres arrache quelques sourires mais ils ne sont pas exploités à fond. Enfin le premier volet avait réussi à rester léger tout en égratignant les pratiques totalitaires des services secrets car il était resté dans la suggestion. Le deuxième lui souligne lourdement cette critique avec une fin moralisatrice qui n'est pas du meilleur goût. Au final on ne retrouve pas la fraîcheur et le charme qui faisaient la magie du premier volet et c'est dommage.

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Le grand blond avec une chaussure noire

Publié le par Rosalie210

Yves Robert (1972)

Le grand blond avec une chaussure noire

Il y a quelque chose de glaçant derrière cette parodie des films d'espionnage. Ce n'est pas étonnant car les bonnes comédies (et celle-là, même avec ses imperfections l'est, sinon elle n'aurait pas imprimé les rétines et traversé le temps) ont toujours quelque chose de la "politesse du désespoir." Beaumarchais ne disait pas autre chose "Je me presse de rire de tout plutôt que d'être obligé d'en pleurer".

Ce grand blond étourdi, candide et lunaire, innocent en un mot (irremplaçable, unique Pierre RICHARD qui à lui seul porte un univers tout entier) est une proie de choix pour ce panier de crabes que sont les services secrets qui dans les années 70 -en plein contexte de Guerre froide- semblent former un "Etat dans l'Etat" dont l'éthique n'est pas la préoccupation première (euphémisme). Entre les mains de ces hommes de l'ombre, il devient à son insu une marionnette ce que souligne l'excellentissime générique, ses petits tours de passe-passe et sa petite musique ironique à la flûte de pan (à moins que ce ne soit du pipeau). Les méthodes des services secrets ont beau être tournées en dérision, elles sont effectivement "une horreur". Celles du colonel Toulouse en particulier (Jean Rochefort), grand manipulateur en chef sans scrupules qui échafaude le "piège à con" dans lequel il veut faire tomber son adjoint Milan (Bernard Blier) qui souhaite prendre sa place. Véritables animaux à sang froid, ils se livrent un duel à mort où la vie du pauvre François est prise en otage.

Mais parce que l'on est dans une comédie (qui plus est un peu surréaliste et décalée), le second de Toulouse, Perrache a davantage de scrupules que son patron car c'est lui qui s'est arrogé un pouvoir quasi divin en choisissant la victime et le fait qu'un innocent meure par sa faute tourmente sa conscience. Il y a l'ami de François, Maurice (Jean Carmet qui lui aussi habite sur une autre planète) qui devant une réalité qui dépasse la fiction "a des visions et entend des voix". Et puis il y a Christine bien sûr, alias Mireille Darc dont le visage d'ange blond se marie si bien avec celui de Pierre RICHARD. Parodiant les femmes fatales des films d'espionnage avec sa cultissime robe au décolleté ultra-plongeant, elle se retrouve entraînée dans l'univers loufoque et poétique du grand Blond (leur grande scène fait penser aussi bien aux screwball comédies de Hawks qu'à la "Party" d'Edwards) et ce pour ne plus en sortir. La boîte dans laquelle elle se dissimule ne fait-elle pas penser à un tour de magie de plus?

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Le dîner de cons

Publié le par Rosalie210

Francis Veber (1998)

Le dîner de cons

"Le dîner de cons" est une comédie à l'efficacité imparable. En effet elle repose sur le principe originel de "l'arroseur arrosé" puisque tel est pris qui croyait prendre. Quant à sa mécanique réglée au millimètre, elle rappelle la fameuse phrase de Bergson "le rire est du mécanique plaqué sur du vivant." Comme en plus l'arroseur, Brochant (Thierry Lhermitte) est un parfait salaud qui méprise, trahit et manipule les autres (son soi-disant meilleur ami, ses complices, sa femme, sa maîtresse sans parler des "cons" qu'il recrute pour le plaisir sadique de se payer leur tête), on est enchanté de voir les ennuis s'accumuler au dessus de sa tête. Et ce d'autant plus que c'est le dindon de la farce qui déclenche sans le vouloir toutes les catastrophes qui s'abattent sur Brochant du tour de rein au contrôle fiscal, séquence absolument jubilatoire où celui-ci se révèle encore plus pathétique que nous le pensions.

A ce travail d'orfèvre sur la forme s'ajoute la critique sociologique acérée du réalisateur, servi par la composition géniale de Jacques Villeret. Celui-ci joue à la perfection son personnage candide débarquant dans un monde nanti et cynique dont il ignore tous les codes et qui pour compenser est envahi par le besoin irrépressible d'aider, déclenchant une sorte de "revanche sociale" inconsciente. Revanche sociale, oui car l'attitude de Brochant et de ses pairs (de grands bourgeois snobinards et fraudeurs) s'apparente à du mépris de classe vis à vis "des petits gris", employés modestes dont les hobbies cheap font l'objet de toutes les moqueries. Et Veber s'appuie sur des témoignages pas du tout comiques (ceux du "Tout Paris" où des dîners de cons étaient réellement organisés) pour tourner en dérision la bêtise humaine, celle du cœur encore plus que celle du cerveau.

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Les fugitifs

Publié le par Rosalie210

Francis Veber (1986)

Les fugitifs

Troisième et dernier épisode de la trilogie de Francis Veber consacrée à François Pignon avec le duo Gérard DEPARDIEU/Pierre RICHARD, les Fugitifs mélange avec bonheur le rire, les larmes et la tendresse. D'un côté on retrouve des situations burlesques irrésistibles (comme la grossesse "nerveuse" de Pignon ou la scène culte de l'extraction de la "ba-balle" chez un Jean Carmet vétérinaire maniant l'absurde avec brio). De l'autre, le film repose sur un lourd contexte social avec des héros marginalisés. Pignon est un chômeur et un SDF au bout du rouleau alors que Lucas est un ex-taulard dont la réinsertion est compromise par le harcèlement du commissaire Duroc qui rêve de le remettre en prison pour obtenir une promotion. Là-dessus se greffe un troisième personnage, la petite fille de Pignon, mutique et fragile que son père ne parvient plus à protéger et qui est placée à l'assistance publique où elle dépérit. Plusieurs décennies avant leur reconnaissance officielle, Veber met en scène la naissance d'une nouvelle famille de type homoparental, chacun de ses membres étant sauvé par les autres. On pense au moment où Pignon fait soigner Lucas, à la très belle scène où Lucas porte dans ses bras le père et la fille mais aussi aux échanges de regards entre Lucas et la petite. En l'adoptant comme second père, Jeanne lui donne une responsabilité qui le met à l'abri de la récidive.

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