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Le Criminel (The Stranger)

Publié le par Rosalie210

Orson Welles (1945)

Le Criminel (The Stranger)

"Le Criminel" est à Orson WELLES ce que "Blue Velvet" (1986) est à David LYNCH ou "L'Ombre d'un doute" à Alfred HITCHCOCK. Le rêve américain mis à mal par des monstres tapis dans l'ombre s'incarne ici non dans une oreille coupée ou un double maléfique mais dans un étrange clocher importé de la Mitteleuropa qui avec sa ronde de l'ange et du démon incarne la lutte éternelle des forces du bien contre celles du mal. C'est dans ce clocher incongru que niche le démon, un nazi ayant refait sa vie sous une fausse identité dans une bourgade américaine un peu trop tranquille pour être tout à fait honnête. Non seulement l'homme est parfaitement intégré mais il s'apprête pour parfaire sa couverture à épouser la fille d'un juge de la cour suprême ce qui traduit la perméabilité de la société américaine vis à vis de l'idéologie hitlérienne. Le détective chasseur de nazis joué par Edward G. ROBINSON n'a pas besoin de plus de quelques phrases pour comprendre à qui il a affaire. Cependant, il n'est pas à proprement parler un représentant du "bien" étant donné que pour lui, la fin justifie les moyens. Il fait donc libérer l'ancien bras droit du nazi pour le suivre et parvenir à retrouver sa trace, puis se sert de son épouse pour le coincer en sachant pertinemment qu'il les envoie tous deux à la mort. Mary l'épouse (Loretta YOUNG) est particulièrement agaçante dans son obstination à nier l'évidence. On se dit qu'elle est sous emprise ou bien qu'elle est morte de peur ce qui rend son revirement final particulièrement invraisemblable. Mais ces faiblesses scénaristiques sont largement compensées par la mise en scène et l'interprétation de Orson WELLES. Au départ il ne devait que jouer mais il a finalement remplacé John HUSTON à la réalisation pour démontrer à la RKO qu'il était capable de tenir les délais et le budget d'un film. Aussi, même s'il n'en a pas eu le total contrôle, celui-ci porte bien sa marque avec des échappées baroques collant à la folie meurtrière de son personnage rêvant d'un nouvel Hitler pour reprendre le flambeau de la revanche. Et ce alors même que durant le tournage du film se tenait le procès de Nuremberg où des films de la libération des camps étaient diffusés. Ce sont ces mêmes films que l'on voit dans "Le Criminel", réputé pour être le premier film de fiction à les montrer.

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