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Une Valse dans les Allées (In den Gängen)

Publié le par Rosalie210

Thomas Stuber (2018)

Une Valse dans les Allées (In den Gängen)

Une valse à trois temps de Strauss accompagnant le ballet des engins élévateurs dans les allées d'un supermarché est-allemand. Le film de Thomas STUBER commence comme un Stanley KUBRICK (auquel on pense pour "2001 : l'odyssee de l'espace" (1968) mais aussi pour "Shining" (1980) en raison de l'aspect labyrinthique de ces allées d'entrepôt aux étagères pouvant s'élever sur plusieurs dizaines de mètres façon Rubik's Cube géant) mais de par sa poésie un peu décalée et sa tendresse manifeste envers les petites gens, il se poursuit comme un Aki KAURISMAKI. On suit un jeune homme pris à l'essai en tant que manutentionnaire aux boissons qui apprend le métier aux côtés du responsable du rayon et tombe amoureux d'une de ses collègues en charge de la confiserie. En dépit de l'aspect archétypal de chacun de ces trois rôles (chacun prenant en charge une partie du récit et constituant l'un des temps de la valse), ils ont leur épaisseur propre qui les rendent attachants. C'est particulièrement vrai pour le héros, Christian (Franz ROGOWSKI), qui porte son passé sur son corps tatoué et son visage mélancolique, amoché et prématurément fatigué. En dépit de l'aspect que l'on peut juger aliénant de ce travail, il constitue pour lui une seconde chance, un moyen d'insertion dans la société et de rupture de son isolement. A l'inverse, pour Bruno (Peter KURTH) le chef de rayon qui le prend sous son aile, le boulot est le symbole de son déclassement, lui qui fait partie des perdants de la réunification allemande. Lorsqu'il invite Christian chez lui, un plan sur une plante morte abandonnée dans un coin suffit à nous renseigner sur son véritable état mental et la suite lève le voile sur l'étendue des dégâts. Enfin Marion (Sandra HULLER) a beau être jeune, charmante et apprécier les marques d'attention de Christian, elle n'est pas libre. Même si elle ne semble guère épanouie dans sa vie conjugale, elle bénéficie d'une certaine stabilité que les conditions de vie précaires de Christian (qui n'a pas de voiture et vit dans un logement aux allures de squat) ne peuvent lui offrir. Alors ils se contentent de rêver à une île paradisiaque qui orne leurs murs et leurs loisirs (comme dans "L'Impasse") (1993), la simple évocation de l'autre suffisant à faire venir le bruit de la mer au beau milieu des parkings et des palettes (l'utilisation de la bande-son est aussi maîtrisée que celle de l'image).

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