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Promenade avec l'amour et la mort (A Walk with love and death)

Publié le par Rosalie210

John Huston (1969)

Promenade avec l'amour et la mort (A Walk with love and death)

Le XIV° siècle en 1968, il fallait y penser! Les points communs entre la guerre de 100 ans et le soulèvement de la jeunesse occidentale contre les institutions ne semblent pas évident au premier abord. Pourtant John HUSTON entremêle les deux événements historiques (le Moyen-Age du film, la révolution de 1968 contemporaine du tournage) avec bonheur. Aux antipodes de la reconstitution historique spectaculaire et héroïque, il choisit d'adapter l'oeuvre de Hans Koningsberger avec une certaine humilité. Il parvient à rendre ces événements lointains intemporels et donc proches de nous. Pour cela, il fait le double choix du réalisme (comme Bertrand TAVERNIER) et de l'épure (comme Ingmar BERGMAN), le film se déroulant pour l'essentiel dans des paysages naturels (forêt, dunes) ou dans des décors dépouillés de châteaux et d'abbaye. Et il se concentre sur un aspect méconnu de la guerre de 100 ans et beaucoup plus important et structurant dans l'histoire de la France que ceux qui sont mis en avant dans les films consacrés à cette période: la guerre civile qui oppose les nobles aux paysans révoltés. En réalité cette guerre de castes a commencé dès la mise en place de l'ordre féodal vers l'an mille et s'est poursuivie par intermittences jusqu'à la Révolution française huit siècles plus tard (et même un peu plus tard comme le raconte Eugène le Roy dans "Jacquou le Croquant" qui se déroule sous la Restauration). La guerre de 100 ans étant une période de chaos, elle a entraîné la résurgence des actes de jacquerie contre les châteaux, férocement réprimés par les nobles et condamnés par l'Eglise. John HUSTON qui fait une brève apparition dans le film joue un noble "Robin des bois" qui soutient la paysannerie et accable particulièrement le puritanisme religieux, faisant ainsi le lien avec mai 1968. C'est en effet dans ce contexte troublé que deux jeunes gens déracinés, Heron de Foix et Claudia de Saint-Jean errent à la recherche d'un lieu où ils seraient libres de s'aimer en paix. Mais la violence rattrape partout le couple "love and peace" au point que leur désir de s'échapper par la mer apparaît de plus en plus comme une chimère. Il y a une parenté très frappante entre la dramaturgie de ce film et celle de "The African Queen" (1951) à savoir un rapprochement amoureux entre deux êtres a priori éloignés jetés dans un "trip movie" sur l'eau ou sur les chemins en pleine nature et en pleine guerre et ce jusqu'au final à savoir un mariage improvisé dans une situation désespérée. Ce sont les premiers pas à l'écran de Anjelica HUSTON alors âgée de 16 ans et dont la beauté singulière m'a fait penser à celle de Alana HAIM, l'interprète de Alana Kane dans "Licorice Pizza" (2021). Amusant quand on sait que son partenaire à l'écran, Assaf Dayan est le fils d'un héros de guerre israélien qui a préféré comme son personnage choisir la vie de bohème. John HUSTON aura eu ainsi la particularité d'avoir dirigé au cours de sa carrière son père, Walter HUSTON et sa fille, Anjelica HUSTON.

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