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Articles avec #schoendoerffer (pierre) tag

La 317ème section

Publié le par Rosalie210

Pierre Schoendoerffer (1965)

La 317ème section

Immersion dans la jungle vietnamienne à la fin du conflit indochinois, "La 317° section", adaptation au cinéma du roman de Pierre SCHOENDOERFFER par lui-même est un film qui frappe par son réalisme quasi-documentaire mais aussi par son humanisme. Sans doute le meilleur film de guerre français à ce jour, en tout cas celui qui a eu le plus d'influence. L'expérience du réalisateur comme vétéran et reporter de guerre y est manifeste plus que celle de son imaginaire nourri de lectures de romans d'aventure. S'y ajoute l'influence de la Nouvelle Vague: le film est produit par Georges de BEAUREGARD et le chef opérateur n'est autre que Raoul COUTARD, lui-même vétéran de la guerre d'Indochine où il officiait comme photographe. On notera d'ailleurs le clin d'oeil à "A bout de souffle" (1960) dans le dialogue à la fin du film entre Torrens (Jacques PERRIN) qui dit en parlant de sa blessure "Ah c'est dégueulasse" et Willsdorf (Bruno CREMER) qui lui répond "Qu'est ce que ça veut dire dégueulasse, c'est la guerre". "La 317° section" dépeint l'évacuation sans issue d'une garnison isolée dans la jungle et la disparition progressive mais inexorable de ses membres. Au travers de l'amitié qui se noue progressivement entre le jeune et idéaliste lieutenant Torrens et l'expérimenté et pragmatique adjudant Willsdorf, un ancien malgré-nous qui enchaîne les conflits, Pierre SCHOENDOERFFER dépeint à hauteur d'homme la lente agonie d'une compagnie plongée en terrain hostile, la pluie, la boue, la dysenterie, la précarité du ravitaillement en vivres et de médicaments les traversées dangereuses des rivières, les embuscades dans une jungle qui semble ne pas avoir de fin tout comme la guerre. C'est d'autant plus réaliste que l'équipe du film s'est vraiment mise dans les conditions vécues par les personnage durant le tournage au Cambodge qui a dû être éprouvant.

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Le Crabe-Tambour

Publié le par Rosalie210

 Pierre SCHOENDOERFFER (1977)

Le Crabe-Tambour

C'est le premier film que je vois de Pierre SCHOENDOERFFER et ce qui m'a frappé tout de suite, c'est à quel point il respire le vécu: un vécu de marin, de soldat et de reporter de guerre nourri aux mêmes livres d'aventures que l'acteur Bernard GIRAUDEAU qui avait été mécanicien dans la marine nationale (celle-ci joue un rôle central dans "Le Crabe-Tambour"). D'ailleurs le père de Bernard Giraudeau qui était militaire avait été envoyé en mission en Indochine et en Algérie alors que Pierre SCHOENDOERFFER avait été fait prisonnier à la fin de la première de ces deux guerres de décolonisation avant de partir documenter la seconde. Enfin les deux hommes outre une carrière dans l'armée et au cinéma étaient eux-mêmes devenus romanciers, les livres de Pierre SCHOENDOERFFER ayant servi de support à ses deux films les plus célèbres, "La 317ème section" (1964) et donc "Le Crabe-Tambour". Deux films entretenant une relation étroite au travers de l'itinéraire des frères Willsdorff inspirés par l'histoire des frères Guillaume, le premier tué en Algérie à la tête de son commando, le second devenu lieutenant de vaisseau. Dans la fiction, l'adjudant Willsdorff (Bruno CREMER), central dans "La 317ème section" qui se déroule en Indochine est juste mentionné sur un journal dans "Le Crabe-Tambour" lorsqu'il meurt en Algérie. Dans "le Crabe-Tambour", on découvre au travers de flashbacks l'existence de son frère, le lieutenant Willsdorff (joué par Jacques PERRIN qui dans "La 317ème section" était le sous-lieutenant que Bruno Cremer secondait) ayant également traversé les deux guerres avant de devenir capitaine de pêche sur un chalutier au large de Terre-Neuve.

C'est donc vers cet homme devenu un fantôme hantant les souvenirs de ceux qui l'ont croisé que vogue le navire d'escadre Jauréguibbery. A son bord un commandant taciturne, dissimulant sa maladie et son infirmité sous son code d'honneur (Jean ROCHEFORT alors à contre-emploi), son confident, le médecin du bord (Claude RICH) et enfin le chef-mécanicien, un vieux loup de mer breton friand d'histoires bigoudènes (Jacques DUFILHO). On est pris dans une expérience immersive puissante oscillant entre le documentaire (de nombreuses scènes sont saisissante de réalisme et minutieusement documentées: vie à bord d'un navire de guerre en mission d'assistance à la Grande pêche sur les bancs de Terre-Neuve, transfert et soins des marins-pêcheurs blessés et malades, découpe du poisson en haute-mer etc.) et le mythe à la manière d'un roman de Emile Zola. La manière dont la mer est filmée par Raoul COUTARD, compagnon de route de Pierre SCHOENDOERFFER sur les théâtres de guerre et chef-opérateur de la nouvelle vague (c'est le cas de le dire) en fait un être vivant, actrice du film à part entière tous comme les bateaux qui ressemblent à de grands animaux marins. Quant au code d'honneur des militaires qui est lui aussi central dans le film, il m'a fait penser avant même que je ne le découvre à celui de Arthur HARARI, "Onoda, 10 000 nuits dans la jungle" (2021). Je ne savais pas encore (et Arthur Harari non plus puisqu'il ne l'a découvert qu'a postériori) que "Le Crabe Tambour" s'ouvre justement sur une référence directe au véritable Onoda qui venait alors à peine de se rendre en 1974 après trente ans passés dans une réalité parallèle à continuer une guerre officiellement terminée en 1945 au nom de la parole donnée et des engagements pris et non révoqués, le lien d'homme à homme étant plus important que les décisions de l'Etat.

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