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Prick Up Your Ears (Prick Up)

Publié le par Rosalie210

Stephen Frears (1987)

Prick Up Your Ears (Prick Up)

Merci Maggie. Sans la politique antisociale et homophobe de Margaret Thatcher, il n'y aurait pas eu de renouveau du cinéma anglais dans les années 80, porté par des cinéastes engagés comme Ken LOACH, Mike LEIGH ou Stephen FREARS. Bien que n'étant pas lui-même gay, ses premiers films pour le cinéma revêtent les atours engagés et transgressifs des débuts de Pedro ALMODOVAR ou du cinéma de Rainer Werner FASSBINDER. "Prick Up your ears", son deuxième film après "My Beautiful Laundrette" (1985) a des faux airs de "Querelle" (1982) (l'allusion au phallus dressé n'est pas dans l'affiche mais dans le jeu de mots du titre). Sexe et mort unissent étroitement un duo totalement improbable par ailleurs, celui formé par l'insolent et sensuel dramaturge Joe Orton (Gary OLDMAN) et son amant soumis et jaloux Kenneth Halliwell (Alfred MOLINA) qui s'est donné la mort après l'avoir assassiné. Construit sur un flashback à partir de la découverte de leurs corps par la police, le film prend l'allure d'une enquête, celle du biographe d'Orton John Lar (Wallace SHAWN) assisté de son épouse pour reconstituer la vie de Orton à l'aide du journal intime que lui a confié son agent, Peggy (Vanessa REDGRAVE).

Issu du prolétariat avec lequel il a rompu les amarres de par sa sexualité considérée comme déviante en Angleterre au début des années soixante (le film fait allusion à "La Victime" (1961) premier film à avoir abordé frontalement la question de l'homosexualité au Royaume-Uni), Joe Orton se lance dans une carrière d'acteur avant d'opter pour l'écriture sur les conseils de Kenneth rencontré à l'Académie royale d'art dramatique de Londres. Les pièces de Joe, comme son journal intime que Kenneth prétend ne pas lire en cachette ont pour fonction d'exciter sa jalousie comme si Joe avait besoin du regard de Kenneth pour jouir pleinement de ses frasques. Exhibitionnisme et voyeurisme sont au coeur de leur histoire, de leur sexualité et sont une mise en abyme du théâtre qu'ils pratiquent et du film lui-même. Sexe et mort deviennent entre leurs mains des mises en scène de théâtre où l'on s'invente des rôles, où l'on prend la pose. Joe Orton en Christ offrant son corps à la "passion" dans une pissotière juste après avoir reçu la statuette de son prix préfigure le moment où il se fait tuer, Kenneth regrettant de ne pas avoir utilisé l'objet pour en finir avec lui et s'adressant face caméra au spectateur-témoin. L'aspect outrancier, grotesque de cette mort qui rappelle l'os de jambon de "Qu'est-ce que j'ai fait pour meriter ca ?" (1984) transforme la tragédie en grosse farce. Alors que Joe qui attire la lumière et est fou de son corps opprime Kenneth (y compris en se refusant à lui), ce dernier, complexé et aigri trouve ainsi le moyen cynique de s'offrir une revanche et de passer à la postérité aux côtés de son amant.

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