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Articles avec #wellman (william) tag

L'ennemi public (The Public Enemy)

Publié le par Rosalie210

William Wellman (1931)

L'ennemi public (The Public Enemy)

"L'ennemi public" sorti en 1931 fait partie des œuvres matricielles du film de gangsters. Si le genre a été éclipsé dès le début de la décennie suivante par celui du film noir, il s'est perpétué dans le cinéma américain sous forme de clins d'oeils. "Key Largo" (1948) rend hommage à "Little Caesar" (1930) au travers du personnage joué par Edward G. ROBINSON, "Certains l'aiment chaud" (1959) dans lequel joue George RAFT reprend le tic de la pièce qu'il lançait dans "Scarface" (1931), le pamplemousse pressé de "L'Ennemi public" et le surnom "Petit Bonaparte" est décalqué sur "Little Caesar" (1930). Dans les années 70-80, le genre connaît une véritable consécration avec une nouvelle génération de cinéastes qui proposent d'éblouissantes versions "opératiques" des films des années 30: la saga du "Parrain" de Francis FORD COPPOLA, le remake de "Scarface" (1983) de Brian De PALMA ou encore "Il était une fois en Amérique" (1984) de Sergio LEONE qui s'inspire beaucoup de "L'Ennemi public".

Ce qui frappe à la vision du film de William A. WELLMAN, c'est sa touche de réalisme. Lequel s'incarne dans un aspect documentaire et biographique (voire psychologique, la brutalité du père flic s'avérant déterminante dans la violence du fils et sa décision de rejoindre la pègre), le refus de l'héroïsation des personnages et l'interprétation marquante de James CAGNEY un acteur vif et teigneux qui aime aller au contact, que ce soit la pichenette par lequel il exprime son affection ou à l'inverse le jet du demi-pamplemousse sur le visage de celle qui a le malheur de l'irriter. Il aurait pu être boxeur mais en fait il était danseur, il esquisse d'ailleurs quelques pas d'une grande dextérité au cours du film. Il n'en reste pas moins que les rapports entre lui et les femmes sont brutaux et empreints de bestialité, les seules relations un tant soit peu sentimentales qu'il se permette relevant de l'amitié virile. Néanmoins, le film de William A. WELLMAN est également romanesque, ne serait-ce que par sa structure narrative qui montre l'ascension puis la chute d'un caïd au temps de la prohibition. Il ne pouvait en être autrement car bien que datant de l'ère pré-code, le réalisateur se sent obligé de prouver qu'il n'a aucune complaisance pour les gangsters. D'où des cartons moralisateurs et une image accompagnant le générique montrant un mur symbolisant la voie sans issue que représente ce choix de vie.

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La ville abandonnée (Yellow Sky)

Publié le par Rosalie210

William Wellman (1948)

La ville abandonnée (Yellow Sky)

Splendide western dont l'atmosphère expressionniste digne d'un film noir s'accompagne d'une intrigue dépouillée à l'extrême qui tire l'histoire du côté de la fable ou du mythe.

Le scénariste a avoué s'être inspiré de "La tempête" de William Shakespeare dont on reconnaît le canevas. Prospero et sa fille Miranda sont incarnés par le vieux prospecteur et sa petite-fille surnommée "Mike" à cause de son comportement de garçon manqué. Coupés du monde, ils vivent au beau milieu du désert du Nevada, près d'une ville fantôme et en ruines, en harmonie avec les éléments naturels et les esprits (l'environnement et les indiens Apaches). Autour d'eux, une redoutable mer de sel, à priori infranchissable. Pourtant 6 "naufragés" s'échouent sur les marches du saloon, à demi-morts de soif après avoir réussi à franchir l'obstacle. Ces hommes, nous le savons depuis les premières images, sont des truands qui se sont enfuis dans le désert après avoir commis un braquage. L'épreuve terrible de la traversée-purgatoire a néanmoins permis de révéler une ligne de fracture derrière l'apparente unité du groupe. Tels Ariel et Caliban, il y a ceux qui sont dominés par des pulsions de vie, Stretch (qui donne à boire aux chevaux) et Half Pint (révolté par le meurtre gratuit d'un lézard) et ceux qui au contraire sont dominés par leurs pulsions de mort, Lengthy et Dude, vicieux et violents. Bull Run le petit jeune sentimental et Walrus nounours alcoolique et trouillard naviguent entre ces deux pôles.

Le huis clos de la ville fantôme et les attraits offerts par ses deux seuls habitants vont exacerber les tensions au sein du groupe jusqu'au point de non retour. Dude est obsédé par l'or découvert par le vieux prospecteur alors que la plupart des autres, Stretch et Lenghty en tête éprouvent un désir bestial pour Mike qui se traduit par ce qu'on pourrait qualifier aujourd'hui de harcèlement. Néanmoins, à force de se heurter lors de scènes musclées où parfois les rôles sont inversés (plan jubilatoire où l'on voit Stretch rendant les armes et arborant un drapeau blanc depuis l'intérieur du canon du fusil de Mike qui le tient en joue), on voit progressivement Stretch muer de primate à homme civilisé (comme dans "La guerre du feu", toutes proportions gardées) alors que Mike découvre sa féminité. Et Wellman d'en profiter pour fustiger la guerre (ici de Sécession) et ses ravages sur les âmes. Quant au désir de possession, il est montré dans son aspect le plus mortifère puisque ceux qui s'y accrochent sont (con)damnés alors que ceux qui y renoncent sont sauvés.

"La ville abandonnée" a eu entre autre une très forte influence sur Sergio Leone que ce soit sur le fond (la traversée du désert lui a inspiré celle du film "Le Bon, la Brute et le Truand") ou sur la forme (les visages des hors la loi captés les uns derrière les autres)

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Une étoile est née (A Star Is Born)

Publié le par Rosalie210

William Wellman (1937)

Une étoile est née (A Star Is Born)

La notoriété d'"Une étoile est née" de William A. Wellman a pâti du célébrissime remake musical de George Cukor avec Judy Garland réalisé près de 20 ans plus tard. Ce qui est injuste car sans avoir la flamboyance du film de Cukor, la réalisation de Wellman (dont Cukor est resté proche, de nombreuses scènes se ressemblent) ne manque pas de qualités: outre l'interprétation tout en finesse et sensibilité de Janet Gaynor et de Fredric March, La critique du rêve américain alors plongé en pleine crise des années 30 s'avère d'une grande acuité.

Ainsi lorsque la grand-mère d'Esther évoque avec elle son rêve d'Hollywood, elle la pousse à agir pour "conquérir ce nouveau désert", une image appartenant au mythe de la frontière si chère au cœur des américains. Mais elle ajoute que pour chaque rêve qu'elle réalisera, elle devra en payer le prix. De fait, à chaque étape de son ascension fulgurante, Esther explore l'envers peu ragoûtant du décor.

Lorsque débutante, elle court les castings pour tenter sans succès de décrocher un rôle, elle découvre que le chômage et la précarité semblent être le lot du plus grand nombre dans un milieu impitoyable qui n'est qu'un miroir grossissant de la crise de l'emploi des années 30 où les appelés sont légion mais les élus, une infime minorité.

Par la suite, lorsqu'elle devient célèbre, elle doit faire face aux intrusions dans sa vie privée de la presse à scandale et du grand public. La scène du mariage incognito s'inspire de faits réels alors que l'enterrement de Norman Maine où elle est pressée et harcelée par la foule est d'une grande cruauté.

Enfin à travers la douloureuse déchéance de son époux (qui fait écho à des destins tragiques d'acteurs ayant réellement existé tels que John Barrymore et John Gilbert), elle voit ce qu'il advient des acteurs une fois qu'ils ont été usés par le système: des épaves que le grand Moloch rejette à la mer.

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