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Les Misérables 2ème époque: Les Thénardier

Publié le par Rosalie210

Raymond Bernard (1933)

Les Misérables 2ème époque: Les Thénardier

Cette version du roman de Victor Hugo dont j'ai beaucoup entendu parler après avoir vu celle, postérieure de vingt ans de Jean-Paul LE CHANOIS possède un relief saisissant. Même s'il s'agit d'un film parlant, l'influence du muet se fait sentir dans le bouleversement des perspectives, des images prises souvent de biais et en contre-plongée, comme dans l'expressionnisme allemand. Mais il n'y a pas que les images qui ont du caractère, les voix également sont puissantes, même quand elles sortent des petits corps de Cosette et de Gavroche. Car la mise en scène de Raymond BERNARD les fait extraordinairement exister. La sortie nocturne de Cosette pour aller chercher de l'eau prend des allures de film d'épouvante. Ses bras dressés devant son visage en réflexe à chaque approche de la Thénardier suffisent à ellipser les mauvais traitements subis. La mort de Gavroche est filmée comme si le réalisateur le suivait avec une caméra à l'épaule (vu la taille des engins dans les années 30, cela ne peut être qu'une impression). A propos d'épaule Quand Harry BAUR apparaît dans le premier plan du film, celui-ci a une valeur programmatique: il porte le film sur ses épaules comme la croix pesante et invisible que Jean Valjean traîne avec lui partout où il va. Le paradoxe de Jean Valjean s'incarne à la perfection dans son interprétation qui fait ressortir sa force colossale mais aussi son aspect insaisissable. Tour à tour M. Madeleine, maire bienfaiteur de Montreuil-sur-mer, Champmathieu le voleur que tout le monde prend pour Valjean et qu'il vient sortir d'affaire en se dénonçant et Fauchelevent, le charretier dont le sauvetage l'a dénoncé aux yeux de Javert, Jean Valjean n'est pas loin d'incarner la figure de l'ange rédempteur depuis qu'il a été désigné par l'évêque de Dignes (dont l'acteur a joué Valjean dans une version antérieure) comme un missionnaire du bien, chandeliers à la main. On comprend pourquoi cette force de la nature et du ciel fait plier sept ou huit brigands comme elle finit par terrasser Javert (Charles VANEL). J'aime aussi beaucoup la fin, sobre et intimiste, où Marius pour une fois n'est pas une tête à claques pleine de préjugés mais s'incline devant l'autorité naturelle du grand homme. Quant aux Thénardier, ils sont délicieusement crapuleux. Bref une réussite dans les grandes largeurs, en trois parties totalisant près de 5h.

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