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Elémentaire (Elemental)

Publié le par Rosalie210

Peter Sohn (2023)

Elémentaire (Elemental)

Pixar m'a beaucoup manqué. Depuis "Soul" qui m'avait déçue, je n'y étais pas retourné et pourtant j'ai Disney +. Mais les studios Pixar racontent des histoires trop fondamentales pour être cantonnés à un robinet consumériste qui détruit l'expérience culturelle collective. Ce retour en salles avec un film original est donc une excellente nouvelle même si elle est déjà ternie par l'insuccès du film aux USA. Au moins aura-t-il fait la clôture du festival de Cannes qui a manifesté une remarquable constance dans son refus d'adouber le cinéma sur plateforme.

On a beaucoup décrit "Elémentaire" comme un croisement entre "Zootopie" pour l'esthétique de la ville (inspirée de New-York) et "Vice-Versa" pour le principe consistant à donner corps à l'intangible. C'est exact. L'influence des studios Ghibli pourtant cités à travers le nom d'un personnage n'a en revanche pas été analysée et c'est bien dommage. En effet Flam et ses parents doivent beaucoup esthétiquement à Calcifer, le "principe actif" qui fait tenir debout le "Château ambulant" alors que les métamorphoses de Flack ne sont pas sans rappeler celles de "Ponyo sur la falaise". Si ces deux personnages peuvent se rencontrer c'est justement parce que leur enveloppe corporelle est plastique. A condition de ne pas être soumis à des conditions extrêmes, l'eau et le feu ne s'annulent pas mais se complètent selon le principe du ying et du yang. Le film doit donc beaucoup (comme nombre de films Pixar) à la culture asiatique et Peter Sohn le réalisateur qui est d'origine coréenne a justement injecté beaucoup de son histoire personnelle dans le film. Les flamboyants y jouent le rôle des réfugiés climatiques quelque peu ghettoïsés dans une ville qui est davantage faite pour les trois autres éléments (l'air avec ses personnages-nuages et la terre avec ses plantes en pot vivantes auraient mérités un traitement plus approfondi: un deuxième volet ne serait pas de trop d'autant que Peter Sohn a réalisé en 2009 un court-métrage, "Passages nuageux" qui préfigure les personnages maîtres de l'air de "Elémentaire"). Flam représente l'enfant d'immigré tiraillée entre sa loyauté vis à vis des rêves de ses parents et ses aspirations propres. Flack est lui issu d'une famille aisée et ouverte d'esprit ce qui explique qu'innover ne lui fait pas peur. On remarque également que l'équipe s'est amusée à inverser les stéréotypes de genre. Flam est impulsive et intrépide alors que Flack est doux, empathique et déploie des torrents de larmes façon cartoon chaque fois que l'occasion se présente. 

Même si l'histoire d'amour peut surprendre dans un univers qui s'est surtout surpassé dans son analyse du deuil, ce thème n'est pas complètement absent de "Elémentaire". Car pour s'intégrer, il faut muer comme le montrait avec tant de brio "Vice Versa" donc abandonner quelque chose de soi. Dans nombre de leurs films ("Monstres et Cie", "Cars"), les studios Pixar ont évoqué les quartiers d'immigrés, essentiellement d'origine italienne tenant des commerces. Le père de Flam qui a dû rompre avec son père pour émigrer possède une échoppe qu'il souhaite léguer à sa fille. Mais en rencontrant la famille de Flack, Flam se découvre un talent d'artiste verrière. Quant on disait que le film avait une portée personnelle...

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