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Les Moissons du ciel (Days of Heaven)

Publié le par Rosalie210

Terrence Malick (1978)

Les Moissons du ciel (Days of Heaven)

Deuxième film de Terrence MALICK après "La Balade sauvage" (1972), "Les Moissons du ciel" a souvent été comparé avec raison au film de John FORD "Les Raisins de la colère" (1940) (même si le contexte historique est différent, le film parle de la brutalité des rapports de classe sociale sur fond de ruralité en crise) mais aussi au méconnu et pourtant magnifique "CITY GIRL" (1929) de Friedrich Wilhelm MURNAU dont il adopte le caractère naturaliste. Mais c'est avec le "Barry Lyndon" (1975) de Stanley KUBRICK que "Les Moissons du ciel" a le plus d'affinités, aussi bien sur le plan esthétique que narratif:

- Une composition picturale des images avec des références aux peintres américains Edward Hopper (la maison du maître) ou Andrew Wyeth (le corps humain perdu dans l'immensité des espaces champêtres).

- Un usage exclusif de la lumière naturelle avec une prédilection comme Stanley KUBRICK pour les heures magiques entre chien et loup de l'aube et du crépuscule. Ce qui signifie les mêmes prouesses techniques et la même maniaquerie perfectionniste. Comme Stanley KUBRICK, Terrence MALICK est un cinéaste de la rareté. Pour "Les Moissons du ciel" il a bénéficié de l'aide de deux chefs opérateur surdoués Néstor ALMENDROS et son assistant Haskell WEXLER, le premier travaillant à l'époque notamment pour François TRUFFAUT et Éric ROHMER (une illustration parmi d'autres de la connexion étroite existant entre le cinéma indépendant américain et la Nouvelle Vague française).

- Une narration distanciée à l'aide de l'utilisation d'une voix-off, celle de Linda (Linda MANZ) la petite sœur du protagoniste principal, Bill (Richard GERE) qui est le témoin privilégié des événements racontés dans le film (c'est d'ailleurs l'unique raison d'être de ce personnage).

Néanmoins le film de Terrence MALICK est inférieur à celui de Stanley KUBRICK. En effet si la dimension macrocosmique du film est une splendide réussite avec des plans d'une beauté à tomber par terre, une captation frémissante et sensuelle de la nature et la puissance allégorique de la séquence biblique de l'invasion des sauterelles et du grand incendie, il n'en va pas de même en ce qui concerne la dimension microcosmique. Terrence MALICK a voulu effacer au maximum les personnages et leurs relations pour montrer l'aspect dérisoire de la vie humaine et souligner son imperfection et sa petitesse dans l'univers. Le problème est que ce parti-pris rend la comédie humaine du film (que ce soit en terme de relations sociales ou de rapports amoureux) inconsistante là où celle de Stanley KUBRICK conservait toute sa puissance. L'homme n'est qu'une poussière dans l'univers mais il en fait aussi partie. A ce titre, il l'exprime tout entier. Le priver de cette puissance expressionniste le vide de sa substance. Cela peut expliquer l'ennui que certains peuvent ressentir en regardant un film qui peut laisser froid de par son positionnement inhumain.

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