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Mélo

Publié le par Rosalie210

Alain Resnais (1986)

Mélo

De ses origines boulevardières, "Mélo" a gardé un dispositif théâtral (livret, rideau rouge, décor extérieur factice) et son titre qui fait référence au drame populaire. Mais Alain RESNAIS a transformé la pièce vaudevillesque de Henri Bernstein en tragédie dans le prolongement de "L Amour à mort" (1984). Il est courant d'opposer les deux films mais ce que je vois, c'est surtout la continuité. Pas seulement parce que Alain RESNAIS réemploie le même quatuor de comédiens mais parce que les thèmes abordés et surtout la manière de les mettre en scène sont fondamentalement les mêmes. La passion amoureuse symbolisée par le bouquet de roses rouges débouche sur le suicide de Romaine, l'héroïne (Sabine AZÉMA). Se consumant dans l'adultère, elle fait l'objet d'un interdit qui en accroît l'intensité tout comme le caractère mortifère. De plus à l'exception de Christiane joué par Fanny ARDANT (mais que l'on voit peu), les personnages ont des caractères infantiles assez marqués. Romaine ressent le besoin d'échapper à son époux Pierre (Pierre ARDITI) qui ressemble à un petit garçon aux besoins tyranniques mais elle-même se comporte de façon capricieuse et puérile. On comprend d'emblée pourquoi le couple ne peut avoir d'enfant puisqu'ils en sont encore à faire des "piou-piou", "culbutes" et autres "poum-poum" en guise de jeux (?) Leur ami Marcel (André DUSSOLLIER) n'est pas en reste en terme d'immaturité. Son addiction aux amours malheureuses cache un féroce narcissisme que Resnais révèle lors du monologue où il prend ses états d'âme pour objet mais surtout lorsqu'il formule ses exigences envers Romaine qu'il contribue ainsi à pousser au suicide. Tous rêvent de fusion et ont une peur bleue de la séparation comme s'ils n'avaient jamais coupé le cordon.

C'est dans ce film que je me suis rendue compte à quel point Alain RESNAIS avait un talent incroyable pour filmer les voix des acteurs. Le monologue de 10 minutes de André DUSSOLLIER est d'autant plus prenant que la caméra le serre et l'isole, mettant en valeur aussi bien les expressions de son visage que les moindres nuances de sa voix dont il fait ressortir la musicalité particulière. De quoi faire vibrer le spectateur à l'unisson du visage fasciné de Romaine. Dans le même esprit je recommande la déclaration d'amour de Lionel à Célia dans "Smoking" (1992) où la caméra s'envole vers le ciel en osmose avec le lyrisme de la voix de Pierre ARDITI: frissons garantis. Car la passion amoureuse, c'est peut-être puéril mais c'est beau à en mourir.

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