"Il transforme les inconnus en stars et les stars en légende": cette phrase de Jamie FOXX alias "Django Unchained" (2012) résume bien le mythe Quentin TARANTINO dont la réalisatrice du documentaire consacré à ses huit premiers films dresse les contours. Une incontestable success story pour cet employé de vidéoclub californien fou de cinéma et notamment de cinéma de genre et autodidacte devenu, qu'on l'aime ou non l'un des réalisateurs les plus importants du cinéma contemporain. Riche en témoignages, le documentaire reste cependant assez superficiel dans l'analyse de ses films et surtout, trop hagiographique. Certes, les questions qui fâchent sont abordées (l'accident de Uma THURMAN sur le tournage de "Kill Bill", l'étroite collaboration au long cours avec Harvey WEINSTEIN) mais elles sont traitées comme des parenthèses très vite refermées par un mea culpa (pour Uma THURMAN) et une désolidarisation suivie d'une rupture (pour Harvey WEINSTEIN). La célébration de l'esprit d'équipe du cinéaste qui conclut le film avec force photos à l'appui (dont beaucoup avec Uma THURMAN) vient de toute façon contredire et effacer ce qui avait été dit un peu plus tôt. La même technique est employée avec Weinstein tant le documentaire ne cesse d'insister sur les femmes puissantes mises en scène par Quentin TARANTINO ainsi que sur les personnages issus des minorités. Reste tout de même le plaisir de revoir les extraits les plus percutants de sa filmographie et quelques précieux témoignages de plusieurs de ses acteurs. Mon film préféré du cinéaste étant "Jackie Brown" (1997), j'ai eu un très grand plaisir à entendre celui de Robert FORSTER que Quentin TARANTINO a sorti des limbes comme beaucoup d'autres dont il a relancé la carrière (John TRAVOLTA, Kurt RUSSELL, Harvey KEITEL...)
Le cinéma muet fut un espace d'expérimentation et de liberté pour les hommes mais encore plus pour les femmes. La mémoire de cette période a été largement tronquée mais avant l'instauration du parlant et la transformation du cinéma en industrie commerciale*, les femmes étaient plus nombreuses que les hommes dans des postes clés du cinéma hollywoodien. Ainsi l'américaine Clara BERANGER écrivit près de 80 scénarios pour le muet entre 1913 et 1929 et seulement quatre pour le cinéma parlant, le dernier datant de 1934. " De toutes les différentes industries qui ont offert des opportunités aux femmes, aucune ne leur a ouvert autant de portes que celle du cinéma " disait-elle en 1919, année de la sortie de "Phil-for-Short" (1919), le titre en VO de "Mariage blanc" alors qu'elle avait déjà écrit la moitié de sa prolifique production.
"Mariage blanc" est une comédie féministe dans laquelle une jeune femme est élevée très librement par son père hélléniste à qui elle doit son prénom Damophilia, qu'elle abrège en "Phil" ce qui est bien pratique pour se faire passer pour l'autre sexe. En effet son éducation de "sauvageonne" est réprouvée par l'entourage puritain du père qui à sa mort veut reprendre les choses en main et dans la plus pure tradition patriarcale, marier le garçon manqué à un vieux barbon. Mais Phil ne l'entend pas de cette oreille et fuit, habillée en homme. Sur son chemin, elle rencontre un professeur de grec qui à la suite d'une déception sentimentale est devenu misogyne. Mais comme il croit que Phil est un homme, ils sympathisent ce qui rend plus compliqué pour ce professeur l'hostilité vis à vis de la soi-disant soeur jumelle de Phil qui vient opportunément enseigner le grec à ses côtés.
Si la mise en scène n'est pas terrible car assez décousue (peut-être est-ce dû également à l'ancienneté du film) et parfois théâtrale (avec un jeu sur un paravent dissimulateur qui devient répétitif à la longue), le scénario est astucieux, les intertitres sont élégamment incrustés dans les plans et l'actrice principale, Evelyn GREELEY a un sacré abattage pour défendre son indépendance, ses goûts (notamment pour la danse grecque) et pour faire tourner en bourrique ceux qui lui résistent.
* La crise de 1929 et la syndicalisation de la profession dont les femmes étaient exclues a également contribué à leur marginalisation. Pour plus d'information, voir le documentaire des soeurs Kuperberg, "Et la femme crea Hollywood" (2015).
En salle depuis le 11 juin, "Crasse" est un film emmêlant inextricablement amour et folie et donc franchement éprouvant à regarder. Dès l'introduction, on comprend que l'on va être pris dans une toile très difficile à détricoter. Celle du lien fusionnel unissant Maria et sa mère borderline contre le reste du monde. Un lien fait de torrents d'amour mais aussi de déchets que la mère de Maria collecte la nuit dans les poubelles et amasse dans leur maison au point de rendre celle-ci impraticable, dangereuse et insalubre. La magie d'une fête permanente pleine de lumières et de couleurs côtoie le chaos et l'ordure à chaque instant, rendant la vie sociale de Maria à l'école rapidement impossible. Jusqu'au jour de la catastrophe annoncée qui entraîne l'éloignement de la mère et le placement de l'enfant.
Que faire d'un tel héritage? C'est ce qu'interroge le film qui se concentre sur le destin de Maria dix ans après avoir été séparée de sa mère. Une Maria un peu fofolle mais qui semble s'être épanouie auprès de Michèle, sa mère adoptive et d'une copine d'école tout aussi azimutée qu'elle. Seulement la nouvelle du décès de sa mère dont elle réceptionne les cendres et le retour dans la maison de Michael, un ancien pensionnaire de Michèle en apparence rangé vont tout faire basculer. Maria va-t-elle devenir le double de sa mère avec ce deuil à traverser et ce partenaire de jeu dangereux qui porte sa propre bombe prête à exploser en lui? Encore plus qu'avec la mère de Maria, la mise en scène s'immerge dans la spirale d'une dinguerie sans limite confinant à l'horreur.
S'il est clair que le film ne plaira pas à tout le monde et que son hystérie fatigue à la longue (le film dure plus de 2h et aurait gagné à être plus resserré), et s'il semble peu réaliste que Michèle laisse ses deux protégés s'enfoncer dans leur délire sans réagir ou si peu, il est d'une trempe peu commune.
"Le Sel de la terre" est un film puissant qui sublime l'oeuvre du photographe franco-brésilien Sebastiao SALGADO disparu le 23 mai dernier à l'âge de 81 ans. A partir des années 70, il s'est fait le témoin des tragédies humaines aux quatre coins du globe (guerres, famines, grandes migrations) avant de se consacrer à un vaste projet nommé "Genesis" sur la nature et les hommes vivant en osmose avec elle à l'écart des ravages environnementaux causés par les sociétés productivistes modernes.
Le film comporte un aspect biographique, incluant les témoignages de proches et de Sebastiao SALGADO lui-même qui permet de se familiariser avec le photographe et son histoire. On y apprend notamment qu'il a suivi une formation d'économiste qui lui a donné des clés pour contextualiser ses photographies et qu'après toutes les atrocités dont il a été le témoin, c'est le travail de reforestation de la terre de ses ancêtres qui lui a redonné le goût de vivre (qu'il a poursuivi avec "Genesis"). Une polémique a d'ailleurs éclaté à la suite de la sortie du film entre autres sur les liens entre le photographe et une industrie minière qui finançait ses voyages (lien non évoqué dans le film). Mais ce sont les stupéfiantes photographies en noir et blanc, la plupart commentées qui constituent le coeur du film. C'est par leur biais que Wim WENDERS, lui même photographe l'a découvert, est devenu ami avec lui et lui a consacré le film, co-réalisé avec son fils aîné.
Quel qu'en soit le sujet, les photographies de Sebastiao SALGADO sont pleines de grandeur. Tout y apparaît magnifié, tant les paysages que les gens qui se transforment en figures héroïques ou bien martyres. Bien que ces photographies s'inscrivent dans un contexte très bien documenté (la famine en Ethiopie, le génocide du Rwanda, la guerre civile en Yougoslavie, le conflit irakien, la migration des paysans du Nordeste brésilien etc.), elles échappent au temps et semblent appartenir à l'éternité. Beaucoup les qualifient d'ailleurs d'images bibliques à l'image de l'incroyable ouverture consacrée aux photographies d'une mine d'or à ciel ouvert au Brésil envahie telle une fourmilière par des dizaines de milliers d'hommes couverts de boue piochant et portant des fardeaux. Certains ont pensé à "Aguirre, la colere de Dieu" (1972) à raison mais il y a aussi quelque chose de Sisyphe dans ce labeur mené dans des conditions terribles, la soif de l'or étant plus forte que la peur de la mort. Toute cette beauté pour décrire les pires horreurs est destinée à pousser le spectateur à la regarder (l'horreur) en face et à s'interroger. L'art élève et en élevant, il touche là où la simple information laisse le plus souvent indifférent. Montrer la part divine de l'homme au sein des populations les plus déshéritées de la terre lui donne par ailleurs une noblesse que les sociétés occidentales lui dénient par ailleurs (haine des migrants, mépris ou condescendance vis à vis des plus pauvres).
Parmi les films conservés de Alice GUY, plus de la moitié de ceux qui ont été tournés entre 1906 et 1907 se situent en extérieurs. Ainsi "Une héroïne de quatre ans" a pour cadre le parc des Buttes-Chaumont, tout près des studios construits par Gaumont en 1905. Alice GUY aimait visiblement tourner en décors naturels et s'échapper des contraintes du studio comme son héroïne en culottes courtes qui profitant de l'assoupissement de sa gouvernante part à l'aventure et multiplie les B.A. (bonnes actions). Une partie du film est abîmée, ne permettant pas de voir clairement le plan où la petite fille sauve un aveugle. En revanche le plan suivant où elle ferme le passage à niveau pour empêcher trois ivrognes de se faire écraser par un train est digne par son timing d'un Buster KEATON. Une fulgurance au sein d'un film sinon plutôt pépère car bardé d'agents de police à tous les coins de rue ce qui limite grandement la prise de risque et lui donne même une tournure quelque peu moralisatrice.
Je suis complètement tombée sous le charme de ce film mêlant aventure, comédie et romance dans lequel Howard HAWKS s'est surpassé. Comme dans "Rio Bravo" (1959) réalisé juste avant, il créé de toutes pièces une petite communauté hétéroclite par l'âge et les origines (devant comme derrière la caméra) mais soudée à travers laquelle circule une chaleur humaine rare. Plusieurs scènes emblématiques scellent l'union du groupe avec ses éléments les plus perturbateurs lorsque Gerard BLAIN donne son sang ou lorsque Elsa MARTINELLI joue au piano l'hymne américain. Le pouvoir fédérateur de la musique est célébré comme dans "Rio Bravo" (1959) mais cette fois, les femmes ne sont pas tenues à l'écart du groupe et de leurs péripéties, elles en font partie intégrante, même si c'est un peu par "effraction". Un malentendu sur un prénom pour l'une, l'image d'une éternelle enfant pour l'autre, illusions qui se dissipent assez vite ce qui permet à Howard HAWKS d'introduire un soupçon de rivalité masculine et de guerre des sexes au sein de sa joyeuse confrérie masculine. "Hatari!" se distingue également par la qualité de sa photographie, des prises de vue des scènes de capture immersives et époustouflantes de réalisme et une bande originale envoûtante de Henry MANCINI. S'il est important de se replacer ce safari africain dans le contexte colonial de l'époque du tournage où l'on ne se posait pas les questions d'aujourd'hui quant au pillage des ressources et au respect de l'environnement, les animaux ne sont pas là pour faire tapisserie, ils font partie intégrante de l'intrigue. Ils symbolisent ce que chacun porte en soi. D'ailleurs on retrouve au sein de la ménagerie l'emblématique léopard apprivoisé de "L'Impossible monsieur Bebe" (1937). Si l'objectif fondamental est de "capturer des coeurs", les modes de capture comme les animaux capturés diffèrent d'un individu à l'autre. Cela va de la dangereuse chasse aux bêtes à cornes pour les plus intrépides à l'astucieuse méthode du comique de la troupe pour attraper les singes au filet tandis que ce sont les éléphanteaux qui choisissent Dallas comme mère adoptive jusqu'à une hilarante scène de fin où elle ne parvient plus à s'en dépêtrer!
Court-métrage appartenant à une série exploitant la popularité de l'artiste vedette de café-concert parisien DRANEM alias Armand Ménard, son nom de scène étant l'anagramme de son véritable patronyme. Plus grande star dans son registre de la Belle-Epoque, il s'est inventé un personnage aux caractéristiques immuables: une sorte d'imbécile ahuri revêtu d'une veste étriquée, d'un pantalon trop large et trop court jaune rayé de vert, de grosses chaussures sans lacets et d'un petit chapeau qu'il a baptisé du nom de "Poupoute". Au vu de son énorme succès qui a fait de lui l'archétype du clown chansonnier, il eut beaucoup de pâles imitateurs mais inspira par la suite de grands artistes qui contrairement à lui sont restés dans la mémoire collective. La filiation avec BOURVIL saute aux yeux, de même que celle avec Boby LAPOINTE mais il a eu une influence également sur Maurice CHEVALIER et COLUCHE.
"Le ménage Dranem" est un film burlesque construit autour du renversement des rôles genrés assez typique de cette époque. Contrairement aux apparences, il ne s'agit pas d'un film progressiste mais d'une sorte de carnaval. Après s'être bien amusés ( PAQUERETTE surtout en suffragette qui prend toutes les initiatives face à sa chiffe molle de mari en singeant avec un certain délice les activités masculines telles que boire, fumer, jouer au billard, se bagarrer...), chacun reprend sa place à la fin. L'épouse inconvenante est matée et se retrouve avec une ribambelle de petits Dranem à élever en prime.
J'étais curieuse de découvrir l'adaptation officieuse de "Lettre d'une inconnue", la nouvelle de Stefan Zweig par John M. STAHL, quinze ans avant celle, beaucoup plus célèbre -et assumée celle-là- de Max OPHULS. A condition d'oublier les dernières minutes, une concession au "happy end" de mise dans le cinéma hollywoodien, le film de John M. STAHL est une réussite. Astucieusement transposée dans le contexte alors récent de l'histoire mouvementée des USA de la première guerre mondiale au krach boursier de 1929, l'intrigue n'en reste pas moins fidèle à l'esprit de l'oeuvre originale (si l'on excepte encore une fois le dénouement). Elle offre un écrin à l'interprétation absolument remarquable de Margaret SULLAVAN dont c'était le premier grand rôle. Contrairement à tant de films (y compris récents) où l'on ne ressent pas le passage du temps, elle fait subtilement évoluer son personnage progressivement gagné par la mélancolie au fil de la perte de ses illusions. Néanmoins sa lettre n'est "pas seulement" le terrible récit d'une amante de l'ombre se consumant d'amour pour un homme qui l'ignore. C'est aussi une femme moderne qui décide de prendre son destin en main en allant vivre avec son fils chez une tante aux moeurs progressistes dans le contexte de l'émancipation féminine des roaring twenties. Et puis comme souvent chez John M. STAHL, quelques touches d'humour bien placées viennent alléger ce que l'intrigue a de mélodramatique.
Construit sur le même principe que celui de "Le piano irrésistible" (1907) à l'époque où Alice GUY travaillait pour Leon GAUMONT, celui de la contagion et de l'accumulation à la façon de la scène de la cabine de "Une nuit a l'opera" (1935), "Starting something" qui date de la période américaine de Alice GUY lorsqu'elle était à la tête de la Solax est hilarant. Le début est un peu tronqué. On voit une suffragette habillée en homme (la rétrospective de la Cinémathèque consacrée actuellement aux "nasty women" c'est à dire aux pestes de l'époque du muet montre que le travestissement et le renversement des rôles genrés était monnaie courante à cette époque dans le cinéma burlesque) se quereller avec son mari (aux faux airs de Raphael QUENARD) qui se met à boire. Afin de le guérir de son alcoolisme, sa femme et sa tante pratiquent l'hypnose en lui suggérant que ce qu'il a bu est du poison et qu'il doit danser sous peine de mourir sur le champ. Sauf que peu à peu tous les membres de la maisonnée, puis de l'entourage et du voisinage (policier, docteur) vont se servir l'un après l'autre dans la carafe avec une délectation coupable (on pense aux pulsions primaires de "Madame a des envies") (1906) puis se laisser persuader que ce qu'ils ont bu est un dangereux poison, formant une farandole endiablée de plus en plus longue et de plus en plus folle.
Je n'ai pas lu le roman qui a l'air passionnant mais la restitution qu'en donne le film m'a paru superficielle. Jamais on n'entre vraiment dans la vie des personnes que le film suit et dont il ne nous montre que des bribes. Qui plus est, cela manque de progression dramatique. A quoi bon scander le film avec des dates pour nous montrer des jeunes qui n'évoluent pas ou si peu? Certes ils sont condamnés à tourner en rond dans le marasme ambiant mais un contexte socio-culturel de crise ne peut se réduire à quelques plans sur une friche industrielle, une moto brûlée, un père alcoolique, des bagarres et des trafics. L'impression que le film m'a donné c'est qu'avec ses acteurs parisiens, cela semblait plaqué sur la France périphérique à la différence d'un "Vingt dieux" (2024). Avec un discours simpliste en trois temps:
1. Avant, quand il y avait du travail, les ouvriers étaient tous dans le même bateau. Néanmoins celle d'Anthony vit dans un pavillon, celle de Hacine dans un HLM et ce n'est certainement pas le fruit du hasard.
2. Dans les années 90, époque où se déroule le film, le chômage et la précarité entraînent une atmosphère de guérilla urbaine entretenue par les clivages sociaux et ethnico-religieux symbolisés par les affrontements entre Anthony et Hacine.
3. La coupe du monde 1998 réconcilie tout le monde autour de l'équipe "blanck-blanc-beur".
Mais si ce contexte est si peu creusé, c'est parce qu'il reste à l'arrière-plan tout comme l'est Hacine (Sayyid EL ALAMI) alors que le film préfère se focaliser sur les émois amoureux de Anthony (Paul KIRCHER) pour une fille réduite comme sa copine à n'être qu'une silhouette. Seul Gilles LELLOUCHE apporte un peu de relief au film lors de quelques séquences dramatiques dans le rôle du père déclassé puis anéanti mais c'est insuffisant.
Un film avec un vrai potentiel donc mais gâché par un traitement convenu, le sempiternel récit d'apprentissage d'un adolescent au parcours balisé le reste n'étant que du saupoudrage, pour ne pas dire de la poudre aux yeux.
"Etre critique, ce n'est pas donner son avis, c'est se construire comme sujet travers les films que l'on voit" (Emmanuel Burdeau)
"La cinéphilie est moins un rapport au cinéma qu'un rapport au monde à travers le cinéma" (Serge Daney)