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L'aventure de Mme Muir (The Ghost and Mrs. Muir)

Publié le par Rosalie210

Joseph L. Mankiewicz (1947)

L'aventure de Mme Muir (The Ghost and Mrs. Muir)

L'aventure de Mme Muir est un film fascinant que l'on peut lire de plusieurs façons. C'est un film sur l'émancipation d'une femme qui réussit à vivre comme elle l'entend, guidée par une voix intérieure, celle du capitaine qui représente une part socialement inavouable d'elle-même (masculine, sauvage, libre...) C'est un film sur la solitude qu'entraîne le courage de suivre sa propre route. C'est un film sur la foi "je suis réel puisque vous y croyez", sur les liens entre les vivants et les morts, sur le mystère de l'au-delà, l'éternité (la mer) et le temps qui passe (le bout de bois gravé qui se détériore). C'est enfin un film sur les désillusions et les regrets. Mme Muir a une âme d'aventurière mais vit l'aventure par procuration au travers des mémoires du capitaine. La mer elle la regarde de son balcon et le portrait du capitaine, de son fauteuil. On peut voir aussi l'existence qu'elle a choisi comme celle d'une morte-vivante qui préfère rester fidèle à un fantôme plutôt que de vivre avec un homme réel (forcément décevant, le personnage joué par Sanders cynique et manipulateur agissant comme un repoussoir). En revanche on apprend que la petite-fille de Mme Muir qui porte le même prénom qu'elle (Lucy) s'est fiancée avec un capitaine (d'aviation). Alors que sa grand-mère a dû se contenter de rêver et d'attendre la mort pour être réunie à son cher fantôme.
Le film de Mankiewicz est une sorte de romance fantastique sans une once de mièvrerie qui réunit une somme impresionnante de talents (acteurs, photo, musique...) Sa beauté et sa poésie ont inspiré de nombreux cinéastes (pour ne citer qu'un exemple le personnage joué par Sabine Azéma dans Les herbes folles d'Alain Resnais s'appelle Mme Muir...)

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Le joueur de flûte

Publié le par Rosalie210

Jacques Demy (1971)

Le joueur de flûte

La continuité entre Peau d'âne et le film suivant de Demy Le joueur de flûte n'est que de façade. Certes il s'agit d'adaptations de contes qui avaient bercé l'enfance du réalisateur. Le contexte libertaire du début des années 70 imprègne les deux films. Enfin chacun bénéficie de l'ombre tutélaire d'une idole pop-rock: Morrison pour le premier, Donovan pour le second, imposé par le commanditaire du film, le producteur anglais David Putnam. Donovan est aujourd'hui oublié mais à l'époque il était une star (White is white, Dylan is Dylan; White is white, viva Donovan chantait alors Michel Delpech.)
Mais Le joueur de flûte n'est pas une féérie, c'est une peinture sombre et politique d'une micro-société obscurantiste et cupide sur le point de s'écrouler sur elle-même. Une société qui sacrifie ses enfants, mariés de force pour de l'argent ou enrôlés à la guerre. La peste noire est ainsi la métaphore des maux qui rongent la ville de Hamelyn close sur elle-même. La séquence où les rats surgissent du gâteau de mariage en forme de cathédrale est très symbolique. Les seules portes de sortie à la bêtise humaine sont les artistes et les saltimbanques. On retrouve en effet les forains des Demoiselles de Rochefort qui en s'installant dans la ville cristallisent les désirs de fuite et d'aventure. La route ensoleillée devient l'alternative à la claustration dans l'enceinte exigue du bourg. Car les bourgeois rejettent les planches de salut qui leur sont tendues. L'art donc mais aussi la science au travers du personnage du savant juif humaniste Melius. En brûlant ce dernier, ils se condamnent eux-même. Cette critique sociale rapproche davantage Le joueur de flûte d'Une chambre en ville que de Peau d'âne.
Jacques Demy réalise donc une oeuvre personnelle mélangeant les références picturales du Moyen-Age (Jérôme Bosch) et le psychédélisme des années 70 (les forains ont des allures de hippies). Sa mise en scène est particulièrement fluide avec des plans-séquences ponctués de zooms à la Ophüls. Il bénéficie enfin du travail remarquable du chef opérateur Peter Suschitzky.
Hélas le film fut très mal distribué à sa sortie et invisible pendant des années ce qui en fait une oeuvre méconnue du rèalisateur au même titre que Model Shop par exemple.

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Chercheurs d'or (Go West)

Publié le par Rosalie210

Edward Buzzell (1940)

Chercheurs d'or (Go West)

Go West est le meilleur des 3 films tournés par les Marx dans leur seconde période MGM. En effet le scénario fut écrit juste après Une nuit à l'opéra du vivant de Thalberg et les Marx purent roder leurs gags sur scène. Mais après la mort prématurée de leur mentor les Marx n'étaient plus la priorité du studio et le tournage fut repoussé jusqu'en 1940 date à laquelle il eut enfin lieu.
La différence avec At the Circus et The Big store saute aux yeux. Go west est beaucoup plus rythmé. On entre immédiatement dans le vif du sujet avec Groucho qui tente d'escroquer le guichetier de la gare avant de se faire escroquer par Chico et Harpo (une scène dans la lignée du célèbre scketch tutsi-frutsi d'Un jour aux courses.) Les scènes s'enchaînent ensuite quasiment sans temps mort. Celle de la diligence (qui évoque une parodie de la chevauchée fantastique) utilise les cahots de la route pour mélanger la cabine surpeuplée dUne nuit à l'opéra, les échanges de chapeaux de Soupe au canard et le corps envahissant de Harpo des premiers films. Même les numéros musicaux sont bien intégrés à l'intrigue, interagissent avec les Marx et ne cassent pas le rythme du film. Groucho y expose par exemple sa conception de la séduction. Le film se termine en apothéose avec le démontage du train lancé à toute vapeur, un gag keatonien réapproprié par les Marx.

La MGM a assagi, domestiqué les Marx. Ceux-ci n'ont plus rien de dangereux. Mais leur énergie subversive colore tout ce qu'elle touche. Ainsi à partir d'Un jour aux courses, les films MGM se parent d'une scène "ethnique" digne des pires clichés coloniaux et racistes. Les noirs comme les indiens sont caricaturés et ghettoisés. Un seul homme blanc est autorisé à franchir la barrière: Harpo, l'homme-enfant innocent. Le but est d'amadouer (et manipuler) ces peuples dominés. Mais Harpo (ou plutôt Adolph/Arthur) comme ses frères a subi toute sa vie l'antisémitisme des dominants WASP (white anglo-saxons protestants) et lorsqu'il joue pour les afro-américains ou les native americans il se retrouve en communion avec ces peuples "muets" dont le seul langage autorisé est la musique. Pas étonnant que le chef indien finisse par poser sa main sur son épaule. Tel est pris qui croyait prendre.

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Un jour au cirque (At The Circus)

Publié le par Rosalie210

Edward Buzzell (1939)

Un jour au cirque (At The Circus)

Après leur incursion (ratée) à la RKO, les Marx retournèrent à la MGM pour tourner trois nouveaux films. Mais ils ne bénéficiaient plus des attentions d'Irving Thalberg. Par conséquent les moyens alloués à ces films furent réduits. Ainsi Un jour au cirque se contente de décliner la formule scénaristique d'Un jour aux courses. Mais les personnages et l'intrigue sont négligés (ce n'était pas le cas avec Thalberg) si bien que leur interaction avec les Marx est quasi-nulle. Cette faiblesse scénaristique pèse sur le film qui connaît plusieurs passages à vide. Restent les numéros des Marx. Certes, ils ont perdu leur esprit corrosif et ils ne nous surprennent plus (un critique évoque At the circus comme le premier de la trilogie du "trio fatigué") mais ils restent si bons que l'on prend beaucoup de plaisir devant certains passages: le numéro de flatteries-goujateries Groucho-Dumont, la fouille de la cabine de Goliath par Chico et Harpo (où affleure même un peu du surréalisme d'autrefois), le dialogue absurde Chico-Groucho, le premier empêchant le second de monter à bord du train car il n'a pas de badge. Enfin la scène de trapèze finale est très réussie avec Margaret Dumont qui donne de sa personne au point de se retrouver en sous-vêtements avec les frères accrochés à ses basques.
La chanson interprétée par Groucho " Lydia the tatoo lady" est reprise par Robin WILLIAMS dans Fisher King de Terry Gilliam, fervent admirateur des Marx.

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Les Marx au grand magasin (The Big Store)

Publié le par Rosalie210

Charles Reisner (1941)

Les Marx au grand magasin (The Big Store)

Les Marx au grand magasin est le 11° film des frères Marx et le 5° tourné à la MGM. Comme ses deux prédécesseurs (At the Circus et Go West) The Big Store enregistre le lent mais inexorable déclin du trio. Certes ceux-ci restent excellents (et c'est pourquoi le film est passé à la postérité) mais ils ne se renouvellent plus et surtout l'âge entame sérieusement leur condition physique ce qui affaiblit leur puissance comique. Par exemple la scène de course-poursuite finale en patins à roulette aurait été meilleure 10 ans plus tôt car elle n'aurait pas été assurée par des doublures et donc filmée de loin (néanmoins ce style de scène n'a plus rien à voir avec les gags visuels personnels des Marx). Il faut dire que les scénarios sentimentaux et répétitifs de la MGM n'aident pas à emballer le rythme. Sans parler de numéros musicaux encore plus ennuyeux que d'habitude hormis ceux des Marx. La scène où Chico et Harpo jouent du piano à 4 mains est drôle et émouvante et ce d'autant plus qu'elle comporte une part d'autobiographie. La mère des Marx qui voulait rentabiliser au maximum le professeur qu'elle payait voulait en effet que son fils aîné Léonard (Chico) donne des leçons de seconde main à son cadet Adolph (Harpo) qui en réalité a appris plus ou moins à en jouer tout seul. Ce dernier donne justement dans le film un solo de harpe particulièrement ravissant, costumé comme un marquis du XVIII et entouré de miroirs qui dupliquent son image ou la dédoublent, l'une faisant du violon, l'autre du violoncelle etc.

The Big store marque également la dernière collaboration des Marx avec Margaret Dumont ce qui donne lieu comme toujours à de superbes scènes de marivaudage avec Groucho. Le maintien aristocratique de Margaret Dumont, son excellent sens du rythme et de la mise en place, son infinie patience et sa bonne humeur sans limites (les frères lui en faisaient voir de toutes les couleurs mais elle était sous leur charme) ont fait d'elle plus qu'une bonne partenaire. Elle a incarné à elle seule toute la pompe et la prétention de l'aristocratie ce qui en a fait une cible portative de choix pour les Marx tout au long de leur carrière.

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Certains l'aiment chaud (Some Like it Hot)

Publié le par Rosalie210

Billy Wilder (1959)

Certains l'aiment chaud (Some Like it Hot)

Some like it classic and some like it hot. Un des maîtres-mot du chef-d'oeuvre de Billy Wilder est la diversité et pas seulement celle des musiques. Celle des genres: poursuite du film noir/gags burlesque/comédie romantique d'un côté, filles/garçons/transgenres de l'autre. Celle des sexualités: hétérosexuelles et homosexuelles (féminine et masculine). Celle des climats: neige et mort à Chicago/soleil, palmiers et désirs torrides en Floride.

Car les autres thèmes majeurs du film sont le travestissement et la transgression. La Prohibition (le film se situe dans les années 20) cache le vrai sujet du film qui est le code de censure Hays encore en vigueur au moment du tournage à la fin des années 50. Seul le travestissement permet la transgression. Le cercueil contient des bouteilles de whisky, le corbillard contient des armes, les pompes funèbres abritent un tripot, le gâteau d'anniversaire cache un tueur, Joséphine et Daphné sont deux hommes, le millionnaire aux faux airs de Gary Grant (star glamour connu pour ses tendances bisexuelles et son goût pour le travestissement) est un saxophoniste fauché etc.

Certains l'aiment chaud s'avère donc être outre une comédie irrésistible un film très moderne dans son approche du désir, de la sexualité et de la féminité. Le film raconte l'initiation de deux hommes plutôt machistes au féminisme en les faisant passer de l'autre côté de la barrière. Ils découvrent la complicité et l'intimité avec des femmes et ils découvrent aussi les désagréments d'être considérés comme des objets sexuels par la gent masculine. En définitive ils découvrent surtout leur propre part de féminité. Joe acquiert une sensibilité qui lui faisait défaut dans son rapport à l'autre sexe alors que Jerry se retrouve coincé dans une hybridité comique dans laquelle son identité (de genre et sexuelle) vacille lorsqu'il se prend au jeu de la séduction avec le désopilant et néanmoins adorable millionnaire Osgood Fielding III. La scène finale ouvre tous les possibles comme le souligne la dernière réplique devenue culte, véritable provocation lancée à la face du puritanisme. Il est significatif que cette fin ouverte donne lieu aujourd'hui à deux interprétations diamétralement opposées. Pour la critique traditionnelle plutôt machiste, Jerry est pris au piège. Son "je suis un homme" est interprété comme une volonté d'être reconnu comme tel et le nobody's perfect d'Osgood est perçu comme une castration. Pour les gender studies, les féministes et les critiques LGTB il est au contraire libéré du poids de l'hétéro-machisme symbolisé par Joe et la mafia et l'on assiste à la naissance du premier couple homosexuel de l'histoire du cinéma, le nobody's perfect d'Osgood résonnant comme une déclaration d'amour inconditionnelle. Quant à Marilyn, elle est absolument parfaite dans le rôle de Sugar car elle est aussi hybride, ingénue d'un côté, bombe sexuelle de l'autre (et le film ne se prive pas de le souligner par tous les moyens!) 


 

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La pêche au trésor (Love Happy)

Publié le par Rosalie210

David Miller (1950)

La pêche au trésor (Love Happy)

La pêche au trésor est le dernier film tourné par les Marx Brothers en tant que trio. Mais le coeur n'y est plus aussi le film souffre-t-il de gros défauts. L'histoire est téléphonée, le rythme est poussif, les numéros de music-hall ennuyeux. Et surtout la dynamique du trio est brisée ne permettant pas à la mayonnaise comique marxienne de prendre. En effet on ne voit jamais les 3 frères ensemble. Et pour cause. A l'origine le film avait été conçu seulement pour Harpo. Mais les producteurs refusèrent de le financer si ses frères ne jouaient pas avec lui. Chico qui était pris à la gorge par ses dettes de jeu ne fut pas difficile à convaincre. Mais Groucho tourna le film tellement à contrecœur qu'il ne le cita même pas dans son autobiographie. De fait on ne le voit que très peu, dans un rôle de narrateur "homme-tronc" quasi statique hormis l'impayable scène finale. Son abandon se mesure au fait que pour la première fois il porte une vraie moustache. Bref il n'a plus envie de jouer. Et par conséquent le rôle de Chico qui dans le trio a toujours fait la pendule d'un frère à l'autre est réduit de moitié. Ce déséquilibre pèse terriblement sur le film.

Si celui-ci échappe quand même au naufrage absolu, c'est pour deux raisons:
- La première apparition (éclair) de Marilyn Monroe qui a fait plus pour la postérité du film que la prestation des Marx.
- Le numéro quasiment en solo de Harpo (Chico continue tout de même à "lire dans son esprit" et à traduire ses rébus mimés) qui contrairement à Groucho a conservé son enthousiasme et son énergie intacte. En dépit du fait qu'il a vieilli et qu'il s'est adouci, sa nature profonde reste inchangée. Son abattage impressionne tout autant que sa poésie subjugue. Comme il est l'auteur du scénario il a pu également donner plus d'amplitude à son personnage de clown muet. Les admirateurs de Harpo ont d'ailleurs renommé le film (dont le titre en VO est Love Happy) " Love Harpo".

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Panique à l'hôtel (Room Service)

Publié le par Rosalie210

William A. Seiter (1938)

Panique à l'hôtel (Room Service)

Après la mort d'Irving Thalberg, le "pygmalion" des Marx à la MGM, ceux-ci se retrouvèrent dans l'incertitude. Louis B Mayer le patron de la MGM les haïssait ce qui était de mauvais augure pour la prolongation de leur contrat. En attendant d'y voir plus clair et avec la bénédiction de la société, les Marx partirent donc faire un tour chez un concurrent, la RKO qui leur proposa l'adaptation d'une pièce de Broadway dont elle avait acheté les droits: Room Service (alias Panique à l'hôtel en VF.)

Le moins que l'on puisse dire c'est que le 8eme film des Marx Brothers n'est pas une expérience concluante. Il est même de l'avis général l'un de leurs plus mauvais films (il fut d'ailleurs un échec à sa sortie). En effet pour la première fois les personnages principaux n'avaient pas été créés pour les trois frères. Ils n'étaient donc pas adaptés à leurs personnalités et cela se ressent. Quant au réalisateur William Seiter qui appartenait pourtant à l'équipe de Max Sennett et avait fait tourner Astaire et Rogers, il ne fut guère inspiré. Le film (qui ne dure pourtant qu'1h18) met un temps interminable à démarrer, son rythme reste ensuite poussif et 95% de l'action se déroule dans la même pièce ce qui est lassant à la longue. Ce n'est certes pas la première fois qu'un film des Marx se contente d'être du théâtre filmé. Mais Cocoanuts et Animal Crackers à défaut d'être de vrais films étaient un feu d'artifice comique verbal et visuel grâce à la liberté totale laissée aux délires des 3 frères (alors au sommet de leur génie.) De plus il y avait les interludes musicaux poétiques de Chico et de Harpo, deux merveilleux musiciens. Dans Panique à l'hôtel il n'y a aucun intermède musical (il paraît que les chansons de la pièce ont été enregistrées par les Marx mais non insérées dans le montage final), peu de mots d'esprit, pas d'image surréaliste. Pas de poésie, pas de grain de folie. C'est triste.

Quelques scènes surnagent cependant dans la médiocrité ambiante. Celle du repas express où Harpo démontre qu'il a un sacré coup de fourchette et celle du faux malade qui laisse entrevoir ce que peut être le délire marxien. Mais ce n'est vraiment pas le film à conseiller à celui ou celle qui veut découvrir ce trio génial et immortel.

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La grande vadrouille

Publié le par Rosalie210

Gérard Oury (1966)

La grande vadrouille

Les chefs-d'œuvre se rencontrent dans toutes les catégories. Roi de la comédie populaire française, Gérard Oury a hissé un genre longtemps méprisé par l'intelligentsia au rang d'œuvre d'art. Non seulement La grande vadrouille a battu tous les records d'entrées à sa sortie (un record battu seulement 30 ans après avec Titanic) mais il est devenu un classique multirediffusé qui a su résister à l'épreuve du temps tout comme La folie des grandeurs ou Rabbi Jacob. Le point commun de ces trois films c'est Louis de Funès, un génie du comique burlesque plébiscité par les enfants génération après génération ce qui le rend proprement immortel!

Pourtant le thème choisi par Oury (comme pour les autres films cités plus haut) était audacieux. En 1966, la seconde guerre mondiale était encore un sujet contemporain et hautement sensible dans la société française. Les plaies de l'occupation n'étaient pas cicatrisées. Oury choisit d'en rire avec ses allemands ridicules façon légionnaires dans Astérix mais il met également du poil à gratter dans sa comédie. En effet les deux "héros", Stanislas De Funès et Augustin BOURVIL issus de deux milieux sociaux différents (bourgeois et ouvrier) et dont le comique est complémentaire deviennent résistants à leur corps défendant. Et Stanislas en particulier est particulièrement ambigu en chef d'orchestre égoïste, mesquin, flagorneur, veule devant les puissants, tyrannique avec les faibles. Il tend ainsi un miroir peu reluisant à la société française comme il le fera avec son inénarrable Pivert raciste dans Rabbi Jacob. Tout le génie de De Funès consistant à nous rendre ces personnages détestables sympathiques à force de drôlerie!

Le film regorge de scènes d'anthologie comme celle des chambres d'hôtel ou du bain turc sans parler du jeu de mots célèbre "Il n'y a pas d'hélice hélas, c'est là qu'est l'os."

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Les aventures de Rabbi Jacob

Publié le par Rosalie210

Gérard Oury (1973)

Les aventures de Rabbi Jacob

Une des meilleures comédies de Gérard Oury avec La grande vadrouille et La folie des grandeurs. Sur un sujet particulièrement délicat et d'une brûlante actualité en 1973 (le film est contemporain de la guerre du Kippour et des actions terroristes de l'OLP), Oury dresse le portrait du français de souche grincheux et borné confronté aux affres de la multiculturalité. Son film, d'une énergie et d'une inventivité folle est porté par un Louis de Funès monté sur pile électrique. Son Victor Pivert raciste et antisémite par ignorance subit un traitement de choc (homme noir puis homme vert puis rabbin) qui l'oblige à ouvrir des yeux effarés sur l'altérité puis à s'y adapter ce qui donne lieu à des scènes tour à tour cocasses, bondissantes, émouvantes. Même mutation pour Larbi Slimane contraint de devenir le rabbin Seligman qui coopère avec Salomon le chauffeur de Pivert et est attiré par la fille de ce dernier. La cuve à chewing-gum est d'ailleurs symbolique: tous dans le même bain! Comme toujours Oury titille les mentalités racornies de la France profonde. Ainsi Claude Piéplu et ses collègues se comportent à la synagogue comme des Dupont-Dupond (Lajoie) bien français.

Il s'agit également d'un film très personnel. Oury était d'origine juive alors que De Funès n'était pas loin de partager les opinions de Pivert. De son propre aveu le film lui a "décrassé l'âme."

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