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Articles avec #animation tag

Les Enfants du Temps (Tenki No Ko)

Publié le par Rosalie210

Makoto Shinkai (2019)

Les Enfants du Temps (Tenki No Ko)

"Les enfants du temps" est le dernier film de Makoto SHINKAI le réalisateur du très remarqué "Your name" (2016). Mais "Les enfants du temps" lui est encore supérieur en jouant avec virtuosité et une grande précision sur deux tableaux, celui de l'hyper réalisme et celui du fantastique poétique. Le titre est très approprié car effectivement les enfants du film sont bien de "leur temps", un temps de crise sociale et écologique aigüe. Les héros sont des adolescents laissés-pour-compte de la société, livrés à eux-mêmes et tentant de survivre dans la jungle urbaine de Tokyo comme dans "Le Garçon et la Bête" (2015). Peu à peu, on les voit tenter de reconstruire quelque chose qui ressemble à un foyer. Mais comme dans "Une Affaire de famille" (2018) ils sont rapidement inquiétés par les autorités alors que le seul adulte qui leur a tendu la main se dérobe à son tour, de peur de ne plus pouvoir rendre visite à sa propre fille, lui aussi ayant vu sa famille se faire atomiser. Et bien qu'en ces temps troublés par les catastrophes écologiques à répétition, c'est le feu qui occupe le devant de la scène, la montée des eaux est tout aussi préoccupante. Makoto SHINKAI imagine quelque chose qui ressemble au Déluge. Une pluie diluvienne qui ne peut être interrompue que par le sacrifice d'une "fille-soleil" dotée de pouvoirs paranormaux. Mais le garçon qui l'aime se révolte contre l'injustice qui consiste à échanger une innocente contre le sauvetage d'une société malade et préfère vivre avec elle dans une ville noyée sous les eaux et "sans soleil". Comment ne pas voir dans ce thème un hommage à Chris MARKER et son documentaire sur les "pôles extrêmes de la survie" incluant le Japon, seul pays riche à avoir conservé un tel degré de conscience de sa fragilité intrinsèque et de ce fait à avoir gardé un lien puissant avec les forces invisibles. Hina la "fille-soleil" étant reliée au ciel de par sa nature même, elle a le pouvoir de provoquer des éclaircies ou de faire tomber la neige en plein milieu de l'été.

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Le Monde perdu (The Lost world)

Publié le par Rosalie210

Harry O. Hoyt (1925)

Le Monde perdu (The Lost world)

"Le Monde perdu" est l'œuvre matricielle d'où sont sortis des films de monstre tels que les "Jurassic park" (du côté des USA) et les "Godzilla" (du côté du Japon). Il préfigure également le premier chef- d'œuvre parlant du genre "King-Kong" qui reprend la même technique mélangeant prises de vue réelles et animation en stop motion pour les créatures fantastiques ou disparues. "Le Monde perdu" et "King Kong" sont les deux réussites les plus éclatantes de Willis O'Brien, l'inventeur et le metteur en scène de cette technique d'effets spéciaux*. En dépit de leur âge, les scènes mettant en scène les dinosaures restent impressionnantes (dommage qu'il y ait parmi eux un homme déguisé en singe qui ne fait quant à lui pas du tout illusion). Il y a même devant leur fuite éperdue devant l'éruption volcanique et l'incendie géant qui en résulte une étrange résonnance contemporaine.

Ceci étant si "King Kong" est davantage passé à la postérité que "Le Monde perdu" (sauf via des citations dans ses avatars contemporains) c'est à cause principalement de son scénario. Celui du "Monde perdu", adapté du livre éponyme de Sir Conan Doyle (le père de Sherlock Holmes) paru en 1912 relève du récit d'aventure divertissant à la Jules Verne ou H.G Wells** alors que celui de "King-Kong", bien que présentant des similitudes avec celui du "Monde perdu" (dont il s'est sans doute inspiré) est plus érotique, plus tragique et intègre une puissante dimension de critique politique et sociale. Bref il y a comme une différence de maturité ^^. Le contexte des deux films a sans doute une incidence dans leur tonalité. "Le Monde perdu" a été écrit à la Belle Epoque et réalisé durant les "roaring twenties" alors que "King Kong" date du début des années 30 alors que sévissait la grande crise. 

* Ici assisté de Marcel Delgado qui créa les modèles réduits de sauriens à l'aide d'une armature métallique recouverte de caoutchouc et de matière spongieuse afin de faire illusion à l'écran.

** Le dénouement du "Monde perdu" peut être considérée comme l'histoire de la genèse du monstre du Loch Ness.

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The Dinosaur and the missing link: a prehistoric tragedy

Publié le par Rosalie210

Willis O'Brien (1915)

The Dinosaur and the missing link: a prehistoric tragedy

"The Dinosaur and the missing link: a prehistoric tragedy" est le premier film réalisé par Willis O'Brien en 1915. Il combine ses deux passions: les dinosaures et l'animation en stop motion dont il est un pionnier. C'est en effet en manipulant des figurines en pâte à modeler qu'il fabriquait lui-même qu'il a eu une idée géniale. En s'inspirant des techniques utilisées pour animer les dessins il a l'idée d'enregistrer millimètre par millimètre tous les déplacements de ses figurines pour que le défilement des images créé l'illusion du mouvement. Après un essai concluant d'une durée de une minute montrant un combat entre un homme des cavernes et un dinosaure, il décide de créer un court-métrage d'animation avec cette technique, c'est "The Dinosaur and the missing link: a prehistoric tragedy" qui en dépit de son titre est comique et se situe quelque part entre les "Pierrafeu", la partie préhistorique de "Les Trois âges" (1923) et pour les anachronismes tels que "je vous offrirai bien le thé mais celui-ci n'a pas encore été inventé", "The Three Must-Get-There" (1922). Par la suite, Willis O'Brien a perfectionné cette technique dans le domaine des effets spéciaux pour le cinéma de science-fiction en prises de vues réelles qui offrait plus de débouchés que les films d'animation avec la consécration de "King Kong" (1932). Il faut d'ailleurs souligner que si ce court-métrage a été réalisé en 1915, il n'est sorti qu'en 1917 lorsque la compagnie Edison l'a acheté et l'a distribué.

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The Ghost of Slumber mountain

Publié le par Rosalie210

Willis O'Brien (1918)

The Ghost of Slumber mountain

Georges MÉLIÈS est le père des effets spéciaux. Willis O'Brien est le père des effets spéciaux des films de monstre. Il est en effet l'un des pionniers de la technique d'animation en stop motion qui l'a rendu célèbre avec la création et l'animation du bestiaire de "King Kong" (1932) (y compris son gorille géant). Il a également réalisé un long-métrage célèbre "Le Monde perdu" (1925) dans lequel il a donné libre cours à sa passion pour les dinosaures. C'est cette passion conjuguée à celle des effets spéciaux qui l'a amené à faire du cinéma. Son premier film en 1915, "The Dinosaur and the Missing Link: A Prehistoric Tragedy" était déjà consacré à ces animaux préhistoriques.

La postérité de Willis O'Brien est immense. Elle se divise en deux grandes catégories. D'une part les cinéastes qui réalisent des films d'animation en volume et se réclament de son héritage comme Tim BURTON ou Nick PARK et de l'autre, les réalisateurs de films fantastiques et de science-fiction qui se sont fortement inspirés de son élève Ray HARRYHAUSEN: George LUCAS, Steven SPIELBERG, James CAMERON etc. Tous ont intégré de la stop motion à un moment ou à un autre dans leurs films (le jeu d'échecs animé de Star Wars par exemple) mais la filiation la plus éclatante est celle de "Jurassic Park" (1993) qui par sa thématique, ses choix de mise en scène et de techniques d'effets spéciaux a rendu "Le Monde perdu" (1925) éternel. Le titre de la suite est d'ailleurs sans équivoque, "THE LOST WORLD: JURASSIC PARK" (1997).

"The Ghost of slumber mountain" durait à l'origine 40 minutes. Mais à la suite d'une querelle entre Willis O'Brien et le producteur Herbert M. Dawley (à qui certains attribuent même la paternité du court-métrage) il fut réduit à 18 minutes. Il vaut surtout pour les séquences où apparaissent les bébêtes préhistoriques dans le viseur d'un objet permettant de voyager dans le temps: un brontosaure paissant dans un sous-bois, un oiseau géant mangeant un petit serpent, un combat entre deux tricératops et enfin, le clou du film, un combat entre un tricératops et un tyrannosaure.

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Le Pôle Express (The Polar Express)

Publié le par Rosalie210

Robert Zemeckis (2004)

Le Pôle Express (The Polar Express)


"Le Pôle Express" est le premier des trois films que Robert ZEMECKIS a réalisé à l'aide de la technique de la performance capture qui en était alors à ses débuts. L'aspect expérimental de son film vient appuyer sa recherche constante d'élimination des lois physiques qui compartimentent l'existence humaine. Avec le "Pôle Express", l'impossible devient possible: les obstacles se dématérialisent, permettant à la caméra de les traverser, les humains fusionnent avec leurs jouets, devenant des êtres synthétiques affranchis des contingences spatio-temporelles. C'est ainsi qu'un même acteur (Tom HANKS) après avoir pu s'incruster dans des images d'archives (dans "Forrest Gump" (1994)) peut ici incarner en même temps six personnages différents dont un vieillard et un enfant (ainsi que son père). De même le film défie les lois de la gravité avec de nombreuses séquences de montagnes russes qui donnent l'impression de voler. La plus virtuose est celle du ticket de train, à juste titre comparé à la plume de Forrest Gump (mais aussi au ticket d'or de "Charlie et la chocolaterie" ou bien à l'aventure tout aussi magique du Poudlard Express ^^). C'est cette dimension de liberté absolue qui donne au film son aura de rêve éveillé (la musique de Alan SILVESTRI y est aussi pour quelque chose) et lui permet de dépasser un discours de surface très niais sur "l'esprit de noël" et une intrigue initiatique convenue. Le "Pôle Express" en dépit de ces grosses ficelles ouvre une autre voie aux enfants sortis de l'illustration de Norman Rockwell brisant le mythe du père Noël en leur permettant de grandir sans s'amoindrir.

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Gwen, le livre de sable

Publié le par Rosalie210

Jean-François Laguionie (1985)

Gwen, le livre de sable

"Une oeuvre telle que Gwen, le livre de sable partage souvent son public : tandis que certains pourront y rester hermétiques, d'autres la considèreront peut-être comme un chef d'oeuvre. Quoi qu'il en soit, tous s'accorderont à dire que c'est un film rare, une poésie vivante, un conte aux images animées, tout droit sorti d'un univers surréaliste comparable aux tableaux de Salvador Dali."

Voici comment commence la fiche Benshi consacrée à "Gwen, le livre de sable." Si je la cite, c'est parce que je la trouve très juste. Je fais partie de ceux qui considèrent le premier long-métrage de Jean-François LAGUIONIE comme un chef d'œuvre mais je pense de même d'un film comme "2001, l'Odyssée de l'espace" (1968) qui continue régulièrement à être rejeté d'une partie du public qui ne le comprend manifestement pas. "Gwen, le livre de sable" partage avec l'odyssée spatiale de Stanley KUBRICK un caractère énigmatique et contemplatif. On y rentre ou bien on y reste extérieur et c'est l'ennui assuré. Mais il serait dommage de passer à côté de cette pépite si délicate et subtile uniquement parce que le film est un peu difficile d'accès ou du moins ne se donne pas immédiatement.

"Gwen, le livre de sable" m'a fait spontanément penser à deux autres œuvres: "Désert", le livre de JMJ Le Clézio et "Nausicaä de la vallée du vent" (1984) de Hayao MIYAZAKI qui est sorti peu avant le film de Jean-François LAGUIONIE (le livre de Le Clézio est également un contemporain de ces films puisqu'il a été publié en 1980). Les trois œuvres ont en commun une forte dimension spirituelle (dont le désert est le lieu de recueillement par excellence) et par conséquent leur rejet viscéral du monde industriel matérialiste. En raison sans doute de l'époque, les films de Miyazaki et Laguionie se situent tous deux dans un monde post-apocalyptique pollué ce qui les rend particulièrement pertinents au vu des préoccupations environnementales qui sont les nôtres aujourd'hui. Pas de forêt toxique chez Laguionie mais des déchets de toutes sortes qui jonchent le désert et un grand centre commercial désaffecté devenu une sorte de temple dédié à l'adoration des objets de consommation reproduits à l'échelle de totems géants dont les humains ne connaissent plus l'usage pratique, la bible permettant de célébrer l'office et de dessiner les modèles n'étant autre qu'un vulgaire catalogue de vente par correspondance! La régression sociale liée à la peur de l'inconnu est un autre thème commun aux deux films qui en plus y répondent de la même manière, c'est à dire en mettant en avant une courageuse héroïne ce qui en fait des films non seulement écologistes mais également féministes. Gwen qui est orpheline va progressivement se libérer des peurs de la communauté nomade qui l'a recueillie par amour pour un jeune garçon handicapé enlevé par une entité mystérieuse et s'aventurer au-delà des lieux fréquentés par la tribu pour le retrouver. Comment ne pas penser à la quête initiatique de Lalla, l'héroïne touareg du livre de Le Clézio, elle aussi orpheline, elle aussi marginale, elle aussi amoureuse d'un garçon handicapé dans un contexte de survie qui ne relève cette fois pas de la science-fiction mais de l'histoire récente (massacre de ses ancêtres par les colons au début du XX° siècle, sédentarisation des survivants dans des bidonvilles, misère, exploitation).

Ajoutons que cette incroyable richesse thématique et cette profondeur philosophique s'accompagnent d'images belles à couper le souffle que ce soit les nomades marchant dans le désert sur des échasses, les scènes d'amour en esquisses ou les séquences surréalistes et poétiques dans le temple qui font effectivement penser aux tableaux de Dali ou de Giorgio de Chirico. Bref, ce film est une pure merveille pour les sens et pour l'esprit.

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La Demoiselle et le Violoncelliste

Publié le par Rosalie210

Jean-François Laguionie (1965)

La Demoiselle et le Violoncelliste

Il s'agit du premier film de Jean-François LAGUIONIE réalisé en 1965 dans les studios de Paul GRIMAULT. Ce dernier qui a produit le film lui a prêté une caméra et lui a dit de se lancer alors qu'il n'avait reçu aucune formation préalable en animation. Il montait en effet à l'époque des spectacles de théâtre en ombres chinoises pour les enfants. C'est ainsi qu'est né "La Demoiselle et le Violoncelliste", délicieux court-métrage primitif dans sa technique (des pantins de papiers découpés grossièrement animés) mais au contenu délicat, étrange et poétique comme les génériques animés des années 70-80 de Jean-Michel Folon. On y voit un musicien dans un paysage maritime bordé par des falaises déchaîner sans le vouloir une tempête en jouant le concerto de Edouard Lalo. Celle-ci emporte au loin une jeune pêcheuse de crevettes. Le musicien en tentant de la sauver se retrouve avec elle au fond de la mer pour ce qui est le passage le plus surréaliste du film avec des monstres marins et un travail sur le son étouffé du concerto. Surréaliste est aussi le moment où le couple émerge de l'océan et se retrouve face à une petite société balnéaire qui incarne la civilisation. Toute l'œuvre à venir du réalisateur est déjà en gestation dans ce court-métrage qui brasse les thèmes de la nature et de la culture, du goût pour la mer et l'aventure mais aussi pour la solitude.

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L'île de Black Mor

Publié le par Rosalie210

Jean-François Laguionie (2004)

L'île de Black Mor

Cela commence comme "Oliver Twist" c'est à dire par un orphelinat-bagne où les enfants sont enfermés, exploités et maltraités. Parmi les pensionnaires se trouve le Kid, un jeune de 15 ans qui ignore sa véritable identité. Sa seule source d'évasion est le récit d'aventures qu'un vieux professeur sous couvert d'éducation religieuse leur dispense le soir. Mais la supercherie est découverte et le professeur renvoyé. C'est alors que le mystérieux père du Kid surgit du néant pour demander par lettre la libération de son fils et lui donner des informations sur un mystérieux trésor caché sur l'île de Black Mor. Refus catégorique du tyrannique directeur du pensionnat (une "poire" à la Honoré Daumier dont Jean-François LAGUIONIE s'est ouvertement inspiré). Alors le Kid saute par la fenêtre et prend le large en dérobant un voilier "La Fortune" avec l'aide d'un duo de brigands (eux aussi caricaturés à la façon du XIX°). On passe ainsi du roman social à la Charles Dickens au récit d'aventures à la Robert Stevenson et Daniel Defoe en un clin d'œil. Le Kid a de faux airs du Corto Maltese de Hugo Pratt, le style épuré évoque la ligne claire de Hergé (tout particulièrement l'île Noire et le secret de la Licorne) mais aussi l'art pictural des îles exotiques (celui de Gauguin et d'Hokusai). Et les sons, enregistrés sur un véritable bateau (breton) sont authentiques, ils "sentent le mer". Comme tous les films de Jean-François LAGUIONIE, l'aspect divertissant du récit se double d'une fable initiatique et philosophique autour de la notion de liberté (et son contraire, l'esclavage). En effet ce n'est pas le trésor que recherche le Kid mais son père et à travers lui, son identité. Sa soif de liberté s'exprime par des phrases telles que "Il y aura des fenêtres à ta maison, que je puisse m'évader?" qui m'a fait penser à une phrase quasi-identique que j'avais lue à propos de Bernard GIRAUDEAU (qui avait été marin et pétri par les lectures de Stevenson et de Conrad avant d'être acteur) " "Il construisait des maisons. Quand elles étaient finies, il ouvrait les fenêtres pour partir". Pas étonnant que le Kid préfère le grand large aux pièces d'or, lui, l'ancien reclus pour qui la mer est le seul vrai trésor (et puis le véritable nom de l'île est Erew(h)on, l'anagramme de "nowhere", nulle part en français d'après le roman éponyme de Samuel Butler).

Un parcours qu'il n'accomplit toutefois pas seul. Car les récits de Jean-François LAGUIONIE sont libertaires mais ils sont aussi toujours sensuels (comme chez Gauguin les femmes y dénudent leur poitrine) et féministes. Alors que le monde des pirates bannit les femmes, il en est une pour s'accrocher au navire et apporter au Kid ses (indispensables) lumières et tout son savoir-faire, c'est "petit-moine". La manière dont se construit ce couple mériterait un développement à lui tout seul, couple à la fois solidaire mais non fusionnel: chacun conserve son indépendance et laisse de l'espace (et même beaucoup d'espace!) à l'autre. Bref le film de Jean-François LAGUIONIE (comme toute son œuvre que je recommande chaudement) est un trésor à multiples entrées. A chacun de trouver la sienne.

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Parabola

Publié le par Rosalie210

Mary Ellen Bute (1937)

Parabola

Mary Ellen Bute est une cinéaste américaine qui s'est spécialisée dans le cinéma d'animation expérimental dont elle est une pionnière. Elle a ainsi réalisé entre 1934 et 1953 une quinzaine de courts-métrages abstraits et musicaux dont ce "Parabola" filmé image par image en noir et blanc. Son intérêt esthétique consiste à faire dialoguer les arts entre eux tels que les effets spéciaux (Theodore Nemeth), la musique (Darius Milhaud et sa Création du monde), la sculpture (Rutherford Boyd) mais aussi la science et les arts (avec l'utilisation de machines pour dessiner et le goût pour les figures géométriques). Le résultat est forcément hermétique pour qui ne s'intéresse pas aux expérimentations artistiques contemporaines. Son travail les jeux d'ombres et de lumières m'a un peu fait penser à la peinture de Pierre Soulages mais en volume et en mouvement.

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Les Noces funèbres (Corpse Bride)

Publié le par Rosalie210

Tim Burton et Mike Johnson (2005)

Les Noces funèbres (Corpse Bride)

Tim Burton est le maître d'un imaginaire macabre qui n'est pourtant pas morbide. Il le prouve encore avec "Les Noces funèbres", le premier film d'animation en volume qu'il a lui-même réalisé (même s'il s'est appuyé sur une grande partie de l'équipe de "L'étrange noël de M. Jack" et sur les studios Laika futurs producteurs de "Coraline" et de "Kubo et l'armure magique") et où il inverse astucieusement les clichés, comme il le faisait déjà dans "Edward aux mains d'argent". Le monde des vivants n'a de "vivant" que le nom, il est peuplé de personnages mangés aux mites depuis longtemps, véritables caricatures de la société victorienne que n'aurait pas renié Honoré Daumier (on pense aux fameuses "Poires"). D'un côté les aristocrates fauchés, de l'autre les bourgeois parvenus qui espèrent par une alliance matrimoniale renflouer les caisses chez les uns, s'anoblir chez les autres. Sans parler du séducteur opportuniste qui trucide ses épouses pour s'emparer de leur dot. De sordides calculs qui se combinent avec un puritanisme tout ce qu'il y a de plus mortifère. A l'inverse chez les morts qui n'ont plus rien à perdre ou à gagner puisqu'elle est la même pour tous, on est déchargé du poids qui pèse sur les vivants et on peut s'amuser en toute insouciance, prendre du bon temps au cabaret et aller se mêler aux vivants pour danser la sarabande (Tim Burton s'est ouvertement inspiré du court-métrage Disney de 1929 "La danse macabre"). Ce monde est celui de la fantaisie la plus débridée où Tim Burton s'amuse avec les possibles offertes par l'animation et le film de zombies: une tête qui se déplace sur des insectes, un ver qui occupe une loge dans l'orbite de la mariée et joue un peu le rôle de son Jiminy Cricket, un homme qui peut se séparer en deux moitiés, un pirate nabot arborant un sabre en travers des côtes etc. Et au beau milieu de tout cela il y a Victor, le maladroit et attachant fils des bourgeois parvenus (clone animé de Johnny Deep qui le double ^^) écartelé entre sa fiancée bien vivante Victoria (Emily Watson) dont il est amoureux mais qui l'effraie et Emily (Helena Bonham-Carter), une jeune femme en robe de mariée morte-vivante à qui il s'est uni par mégarde et qui l'entraîne dans son monde. On comprend qu'il soit tenté à un moment donné de la préférer à Victoria d'autant qu'ils ont plus de goûts en commun. Emily par sa grandeur d'âme qui la prédispose au sacrifice a quelque chose de la petite sirène. En renonçant à Victor (c'est à dire en lui laissant épouser Victoria) son corps se désintègre mais au lieu de devenir de l'écume il se transforme en une multitude de papillons qui s'envolent vers la lune. Enfin, Tim Burton rend hommage à travers son film au cinéma de genre horrifique et ses figures imposées. Ainsi le pasteur est doublé par Christopher Lee, le légendaire comte Dracula des studios Hammer.

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