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Articles avec #walsh (raoul) tag

Annie du Klondike (Klondike Annie)

Publié le par Rosalie210

Raoul Walsh (1936)

Annie du Klondike (Klondike Annie)

Au cinéma tout est possible: faire passer Mae WEST pour une bonne soeur, c'est comme déguiser Ginger ROGERS en gamine de 12 ans ou Jack LEMMON et Tony CURTIS en femmes, et pourtant, ça marche. Bien que "Annie du Klondike" ne soit pas réalisé par Billy WILDER mais par Raoul WALSH, il a quelque chose de cet état d'esprit issu du music-hall dont Mae WEST était issue, d'autant que c'est elle qui a écrit la pièce de théâtre et l'a adaptée en scénario. Mae WEST, largement oubliée aujourd'hui a été une immense star mais a tourné dans assez peu de films. Véritable bête de scène à la verve gouailleuse et aux formes particulièrement généreuses (très loin des canons de beauté occidentaux actuels), Mae WEST a beaucoup joué au chat et à la souris avec la censure pour imposer ses dialogues remplis de sous-entendus sexuels et son tempérament de croqueuse d'hommes à l'esprit canaille. "Annie du Klondike" est un film dans lequel elle s'amuse avec son image, passant donc du statut de poule de luxe à celui d'évangéliste aux méthodes peu orthodoxes, véritable pied-de-nez à l'Amérique puritaine dont elle était on s'en doute la bête noire. Le film vaut essentiellement aujourd'hui pour la performance de l'actrice forte en gueule qui certes appartient au même monde que Jean GABIN ou Marlene DIETRICH (dont elle parodie le style dans les numéros chantés de ses films pour Josef von STERNBERG) mais qui comme cette dernière apparaît aussi comme une icône féministe moderne. Ainsi on savoure sa manière de damer le pion aux hommes en leur répondant du tac au tac, de jeter sur eux le même regard de désir qu'ils ont pour elle et on apprécie ses réparties, notamment celle qui semble parfaitement la résumer: "je préfère suivre mon instinct qu'être assujettie".

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Le Voleur de Bagdad (The Thief of Bagdad)

Publié le par Rosalie210

Raoul Walsh (1924)

Le Voleur de Bagdad (The Thief of Bagdad)

Le Voleur de Bagdad est un exemple de syncrétisme réussi entre le conte européen* dont on retrouve la plupart des codes (récit initiatique où le héros après une série d'épreuves sort transformé de sa quête) et le rêve américain (le voleur est un self man man parti de rien et qui réussit à s'élever jusqu'au sommet par sa seule volonté et un peu de chance qui est ici incarnée par la magie) auquel il faut rajouter une grosse pincée d'exotisme oriental (avec sa dose de clichés, le fourbe chinois à l'apparence de Fu Manchu par exemple). Douglas FAIRBANKS alors au sommet de sa gloire est le véritable maître d'oeuvre du film. C'est lui qui a choisi la plupart des membres de l'équipe dont le réalisateur Raoul WALSH. Douglas Fairbanks réussit ainsi la fusion du courant expressionniste allemand alors maître du genre fantastique (dont il s'est chargé de distribuer un certain nombre de films au travers de sa société de production, la United Artists) et de la superproduction américaine à la manière de D.W. GRIFFITH. S'y ajoute les qualités athlétiques de l'acteur-scénariste-producteur-cascadeur qui faisaient déjà merveille dans ses précédents films d'action et d'aventures où il jouait les bandits au grand coeur tels que "Robin des Bois" (1922). Douglas Fairbanks semble plus que jamais libéré des contraintes de la pesanteur, à l'image des décors verticaux imaginés par William Cameron MENZIES et des différents moyens de transport magiques qu'il expérimente (cheval ailé, tapis volant, corde qui se dresse toute seule). Le résultat, fastueux, spectaculaire, merveilleux est entré dans les annales du cinéma et n'en est plus ressorti depuis. Un sommet du genre.

* En dépit de son titre, l'histoire n'est pas tirée des mille et une nuits mais a été écrite spécialement pour le film.

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Regeneration (The Regeneration)

Publié le par Rosalie210

Raoul Walsh (1915)

Regeneration (The Regeneration)

"Regeneration" est le plus ancien film de Raoul WALSH à avoir été conservé (à ce jour). C'est aussi son premier film pour la Fox. C'est enfin l'un des précurseurs du film de gangsters, genre qui s'épanouira à Hollywood avec le début du cinéma parlant.

L'histoire s'articule autour d'un drame social, celui d'un jeune orphelin qui est recueilli par des voisins misérables dont le mari est une brute et qui préfère donc fuir et se débrouiller par lui-même. A 25 ans, il dirige un gang sur les docks de New-York. Cela préfigure de ce fait "Sur les quais" (1954) de Elia KAZAN d'autant que l'acteur ressemble pas mal à Marlon BRANDO et que la morale chrétienne y est très présente (c'est lié aux origines des réalisateurs, la Grèce pour Elia KAZAN, l'Irlande pour Raoul WALSH). Le titre annonce la couleur si je puis dire mais surtout le personnage féminin principal est une jeune bourgeoise qui fonde un institut de charité pour venir au secours des miséreux et qui est prête à aller jusqu'au sacrifice pour accomplir sa mission. En cela, elle est bien plus active que son homologue dans le film de Kazan car elle endosse aussi les rôles masculins (celui du directeur de conscience et celui du christ rédempteur): dans une scène spectaculaire, elle échappe avec ses protégés à l'incendie du bateau où elle avait organisé une fête (dans le style du secours populaire) tandis que Owen sauve deux fillettes qui avaient été prises au piège. Plus tard, elle se retrouve aux prises avec Skinny, le nouveau chef du gang d'Owen, ce dernier ayant préféré le quitter pour se rapprocher d'elle.

Bien que le film soit par moments assez abîmé, il donne déjà une idée du talent du réalisateur. La vie dans les bas-fonds est restituée avec beaucoup de réalisme grâce notamment à l'utilisation de la profondeur de champ dans laquelle on voit se démener de nombreux enfants déguenillés qui semblent sortir de tous les coins de l'image. Raoul WALSH utilise aussi comme D.W. GRIFFITH (dont il a été l'assistant) le montage parallèle pour dynamiser les scènes et leur donner du suspens. Celle du bateau dans laquelle il dirige de main de maître l'évacuation d'une foule est un morceau d'anthologie. Il recourt également au flashback pour illustrer le dilemme du héros. Enfin, en ce qui concerne l'émotion, il utilise beaucoup le gros plan, notamment sur les visages charismatiques de Rockliffe FELLOWES et de Anna Q. NILSSON ce qui fait passer la pilule de la morale édifiante.

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L'Esclave libre (Band of Angels)

Publié le par Rosalie210

Raoul Walsh (1957)

L'Esclave libre (Band of Angels)

"Autant en emporte le vent" (1938) numéro 2, "L'esclave libre"? Superproduction hollywoodienne certes, traitant du même thème certes (esclavage et guerre de Sécession), avec le même acteur certes (Clark GABLE avec vingt ans de plus) mais dans lequel le racisme et ses ravages joue un rôle bien plus important, Raoul WALSH ayant un point de vue nettement plus engagé sur la question que Victor FLEMING. Il y a quand même quelques (grosses) couleuvres à avaler. Yvonne DE CARLO n'est pas métisse et aucun effort n'est fait pour qu'elle passe pour telle sans doute pour que l'américain blanc moyen de 1957 s'identifie à elle et compatisse à son sort. Le scénario, adapté du roman "Band of Angels" de Robert Penn Warren comporte quelques grosses invraisemblances. On ne peut guère imaginer qu'un planteur du XIX° siècle élève la fille qu'il a eu d'une esclave noire comme si elle était sa fille légitime (puisqu'elle porte son nom) au vu et au su de tout le monde (sauf de la principale intéressée) sans que cela ne pose le moindre problème dans une société phobique du métissage. Et encore moins que celui-ci meure sans avoir pris la moindre disposition pour la protéger des esclavagistes après avoir passé vingt ans à la faire éduquer dans les meilleures écoles. Le personnage de Clark Gable est également un peu trop beau pour être vrai en ancien négrier cherchant à se racheter, même si on devine qu'une histoire d'amour interdite est (encore!) derrière tout ça et que ce n'est pas par hasard si la rédemption de Hamish Bond a commencé le jour où il a sauvé son rejeton. Lequel devenu adulte éprouve un sentiment inextricable d'amour et de haine vis à vis de son maître qui se comporte avec lui en père adoptif et dont on se demande s'il n'est pas son père biologique. La relation entre Rau-Ru (Sidney POITIER dans un de ses meilleurs rôles) et Hamish Bond (qui veut dire "lien") est autrement plus intéressante que celle, très balisée par les conventions romantiques et romanesques de l'époque entre Hamish Bond et Amantha Starr. Un des passages que je trouve parmi les plus remarquables du film est ce leitmotiv lancinant (il revient trois fois!) de l'homme traqué et en fuite. Le film s'ouvre sur deux esclaves cherchant à s'échapper de la plantation du père d'Amantha puis c'est Rau-Ru qui après avoir frappé un prétendant trop entreprenant avec Amantha doit s'enfuir vers le nord où il s'enrôle chez les nordistes. Enfin, dans un saisissant renversement de situation, c'est Amish Bond qui fuit les nordistes lancés à sa poursuite dans les marais. Nordistes dont Raoul WALSH souligne les préjugés racistes tout aussi ancrés dans leurs mentalités que dans celles des sudistes. Seuls des individus isolés parviennent à échapper à l'aliénation générale et à se libérer semble dire la mise en scène qui montre Rau-Ru observant Amish fausser compagnie à ceux qui l'ont arrêté grâce aux menottes qu'il avait lui-même truqué avant de s'embarquer avec Amantha pour on ne sait quel ailleurs.

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Naissance d'une nation (The Birth of a Nation)

Publié le par Rosalie210

D.W. Griffith (1915)

Naissance d'une nation (The Birth of a Nation)

Considéré hier comme aujourd'hui comme le film matriciel de l'histoire du cinéma, cette fresque suscite le malaise en mélangeant reconstitution historique et vision occidentale du monde (messianique, christique, utopiste, raciste). En effet ce qu'il nous montre surtout c'est l'utopie de l'union des blancs (symbolisée par les mariages entre nordistes et sudistes) contre un bouc-émissaire: le monde noir, montré comme extérieur à la nation américaine. Une scène retirée au montage devait d'ailleurs montrer les anciens esclaves re-déportés en Afrique. Cette vision excède largement le racisme historiquement daté du livre de Thomas Dixon "The Clansman" dont le film est une adaptation. Obsédé par la pureté raciale, Thomas Dixon a une phobie du métissage que l'on retrouve dans le film où les mariages mixtes sont dépeints comme le mal absolu et où le noir fait figure de violeur en puissance de la virginité blanche. Il faut dire que la société esclavagiste et ségrégationniste des USA considérait qu'une seule goutte de sang noir faisait de vous un noir d'où la haine que suscitent les mulâtres, les personnages les plus négatifs du film. De même le KKK est une armée de chevaliers blancs bardé de rouge (défense de la pureté du sang blanc). Si ce racisme biologique a pris du plomb dans l'aile depuis la Shoah, ce n'est pas le cas du racisme historique. Il est encore largement répandu de nos jours dans nos sociétés post-coloniales (comme le montre le discours de Dakar de Sarkozy selon lequel "l'homme africain n'est pas assez entré dans l'histoire") et explique en partie la tolérance bienveillante que continue à susciter le film dont les noirs sont en réalité absents (car ce sont des blancs maquillés de noir qui jouent les rôles de premier plan). Les films pro-nazis de Léni Riefensthal qui présentent bien des points communs avec l'oeuvre de Griffith ne bénéficient pas d'une telle mansuétude. Pourtant ils allient les mêmes qualités cinématographiques (ce sont des chefs d'oeuvre artistiques) à une propagande idéologique à caractère racial. Le tout a assez de force pour séduire c'est à dire manipuler les émotions du spectateur.

Griffith voulait faire un film moins historique qu'allégorique c'est à dire hors du temps. Le problème est qu'au final il manipule l'histoire et les émotions du spectateur contraint de prendre fait et cause pour ces pauvres blancs opprimés par ces méchants noirs, et fait oeuvre de propagande en désignant une communauté opprimée comme étant l'incarnation du mal. Son film a notamment encouragé la renaissance du KKK en 1915.

Comme le dit Pierre Berthomieu dans son analyse des films de Zemeckis (qui détourne les images de chevauchée du KKK de naissance d'une nation dans Forrest Gump, autre fresque dans laquelle l'Amérique s'est reconnue mais qui elle donne la première place aux minorités) "aucune image n'est innocente." De fait naissance d'une nation est celui de la nation blanche la plus intolérante, une représentation que les USA se font d'eux-même qui occulte tout ce qu'ils doivent aux autres communautés. 

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