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Articles avec #sfar (joann) tag

Le Chat du Rabbin

Publié le par Rosalie210

Joann Sfar, Antoine Delesvaux (2010)

Le Chat du Rabbin

Vraiment très sympa, "Le Chat du rabbin". En dépit d'un scénario décousu qui a tendance à survoler nombre de personnages avant de se terminer en queue de poisson, la faute sans doute à la volonté de synthétiser les albums BD en 1h30, le charme opère. Cette fable philosophique qui se déroule dans l'Afrique coloniale de l'entre-deux-guerres évoque la coexistence religieuse des juifs et des musulmans, certains ouverts et tolérants et d'autres, beaucoup moins. Le rabbin et le cheik font partie des seconds et se lancent à l'aventure en quête d'une nouvelle Jérusalem en Ethiopie avec un attelage aussi hétéroclite qu'eux. Leur périple est l'occasion d'envoyer des piques bien senties sur l'interprétation des textes religieux. Le statut des images fait par exemple l'objet d'un passage bien ironique dans lequel le chef d'une tribu de musulmans fondamentalistes ne voit aucun inconvénient à se faire tirer le portrait tant que cela flatte son ego. Ses justifications alambiquées montrent que les dogmes sont à géométrie variable: ainsi dans sa bouche la peinture n'est plus de l'idolâtrie contrairement à la sculpture. Même traitement ironique du colonialisme à travers l'hilarant passage où nos amis rencontrent Tintin au Congo flanqué d'un accent belge à couper au couteau (c'est Francois DAMIENS qui le double) et qui les prend de haut. Comme dans toutes les fables il y a des animaux, ici un âne, un perroquet et surtout un chat qui parle et ne croit en rien. Les questions gênantes qu'il pose à son maître remettent en question les croyances religieuses alors que le racisme pseudo-scientifique se prend un gros coup de poing dans la figure et que la violence des pogroms est mise à distance par l'effet cartoon. Seule l'étrange séquence du cauchemar du chat où il voit la fille de son maître mourir et celui-ci sombrer vient véritablement rompre l'atmosphère plutôt bon enfant de l'ensemble mais elle ne trouve pas d'explication ultérieure dans le film, laissant le spectateur qui n'a pas lu les BD à ses conjectures.

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Les Beaux Gosses

Publié le par Rosalie210

Riad Sattouf (2008)

Les Beaux Gosses

"Les Beaux Gosses" ce n'est pas "De Nuremberg à Nuremberg" mais "De la BD à la BD". Le film, sorti en 2009 est la libre adaptation par Riad Sattouf de deux de ses bandes dessinées consacrées à la jeunesse, "Le manuel du puceau" (2003) et "Retour au collège" (2005). En 2021 paraît le premier tome de la série "Le jeune acteur" qui revient sur l'histoire du premier film de Riad Sattouf mais pour se focaliser cette fois sur Vincent Lacoste dont c'était le premier rôle au cinéma. Sattouf y explique notamment comment il lui a fallu faire un casting sauvage dans les collèges pour y dénicher un adolescent aux prises avec les ravages biologiques de la puberté et non une belle image léchée très éloignée de "l'âge ingrat" telle qu'il voulait le représenter à l'écran. Un adolescent ordinaire plutôt timide et complexé qui n'avait jamais rêvé d'être acteur et qui n'était pas spécialement doué au départ. Mais qui a appris très vite le métier (en travaillant...) avec le résultat qu'on connaît: un vilain petit canard devenu depuis un beau cygne ^^.

C'est ce souci de réalisme ainsi que le ton sarcastique qui l'accompagne qui fait de "Les Beaux Gosses" un teen-movie savoureux* et non son intrigue (un récit d'apprentissage à base de "pelles" et de "râteaux"). En effet dès les premières images, on est dans le vif du sujet, au plus près de visages gras et boutonneux s'embrassant goulûment, bref on sait qu'on va parler de choses très organiques et pas forcément ragoûtantes. De fait les premiers émois amoureux et sexuels de Hervé (Vincent Lacoste) s'inscrivent dans un corps disgracieux et gauche, affublé d'un petit rire niais (et bagué évidemment) devant les situations gênantes qu'il vit avec sa première copine, Aurore: la technique du baiser qu'il faut perfectionner, l'éjaculation précoce et puis les détails concrets du corps de l'autre qui peuvent faire peur voire dégoûter (des pieds sales par exemple). Ladite Aurore n'est pas elle-même plus à l'aise. On comprend à demi-mot que son attirance pour Hervé est liée au manque d'assurance de celui-ci (parce que justement c'est rassurant) et elle refuse ses caresses dès qu'elles deviennent plus poussées. Evidemment comme si cela n'était pas déjà assez compliqué comme ça, Camel (Anthony Sonigo) le copain de Hervé collant, obsédé et si possible encore plus frustré ne fait rien pour arranger les choses et ne cesse de s'incruster. De même que la mère de Hervé divorcée, collante, obsédée et si possible encore plus frustrée (Noémie Lvovsky). Bref, Hervé a la lose qui lui colle aux baskets et le comique jaillit évidemment du décalage entre les efforts qu'il fait pour donner l'apparence qu'il contrôle la situation et une réalité qui ne cesse de lui échapper.

En dépit de son caractère très ancré dans la réalité hormonale des adolescents, le film de Riad Sattouf a aussi quelques liens avec la BD. De nombreux amis bédéastes célèbres y font des apparitions clin-d'oeil (de Marjane Satrapi à Joann Sfar). Les personnages ont une dégaine facilement transposable dans l'univers de la BD (dont une tenue vestimentaire faite pour leur coller à la peau). Une des raisons qui a poussé Riad Sattouf à choisir Vincent Lacoste était justement le fait qu'il semblait sortir d'une planche de ses BD (et comme je le disais au début il a fini par devenir un personnage de BD). Enfin le générique est traité à la manière d'une série de vignettes de BD ce qui accentue la drôlerie des chutes humoristiques.

* Evidemment on pense aux films américains spécialisés dans le genre et notamment à "American Pie", la masturbation étant une des principales activités de "Les Beaux Gosses" ^^.

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