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Articles avec #polar tag

La Veuve Couderc

Publié le par Rosalie210

Pierre Granier-Deferre (1971)

La Veuve Couderc

"La veuve Couderc" est un film très réussi. Il possède de nombreuses qualités. N'ayant pas lu l'oeuvre originale de Simenon, je ne peux juger que d'après le film. Celui-ci est une fine étude de moeurs du monde paysan des années 30 qui ne semble pas avoir beaucoup évolué depuis "La Terre" de Emile Zola. Une famille déchirée (au sens propre avec cette écluse qui passe entre les deux maisons ennemies) par une sordide histoire d'héritage. Mais aussi les regards lourds, insistants, méprisants des bonnes femmes du village sur la "veuve Couderc", "femme de mauvaise vie" qui après avoir subi en tant que servante les viols de son patron et du fils de celui-ci a renversé le rapport de forces en épousant le second dont elle est veuve et rendant le premier dépendant de ses "services". Et ce, au grand dam de sa belle-soeur (Monique CHAUMETTE) et de son mari (Boby LAPOINTE) qui se sont lancés dans une guerre d'usure pour chasser l'intruse de la maison où elle réside en face de la leur. C'est dans ce cadre délétère renforcé encore par le contexte historique de l'année 1934 (l'affaire Stavisky ternissant la République et la montée en puissance de l'extrême-droite symbolisée par des ligues nationalistes comme les croix de feu) que Pierre GRANIER-DEFERRE réussit à placer quelques belles respirations poétiques. Des péniches qui traversent silencieusement le canal comme autant d'appels vers le large, vers la liberté. Et la rencontre entre la veuve Couderc et Jean le repris de justice, entre Simone SIGNORET et Alain DELON. Parce qu'il est évident qu'entre ces deux monstres sacrés, le courant est passé. Une compréhension mutuelle entre ces deux personnages de parias qui se nourrit d'une tendresse évidente, palpable entre les deux acteurs. C'est sans doute cela qui a conduit Pierre GRANIER-DEFERRE à préserver cette complicité jusqu'au bout du récit, quitte à en changer l'issue. Il n'est pas fréquent de voir Alain DELON exprimer autant d'émotions à l'écran. La romance scandaleuse qui se noue entre les deux personnages à la différence d'âge marquée est un bras d'honneur à la société de dégénérés qui les entourent, symbolisée notamment par Félicie (Ottavia PICCOLO) qui semble avoir deux ans d'âge mental mais aussi par la montée en puissance du fascisme avec une fin qui a un petit côté "Bonnie et Clyde" (1967) avant l'heure.

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Il était une fois en Anatolie (BIR ZAMANLAR ANADOLU'DA)

Publié le par Rosalie210

Nuri Bilge Ceylan (2011)

Il était une fois en Anatolie (BIR ZAMANLAR ANADOLU'DA)

"Il était une fois en Anatolie" porte un titre en forme de conte (revendiqué) et inscrit ses personnages dans les grands espaces désertiques ponctués de haltes, comme une version levantine du "Il etait une fois dans l'Ouest" (1968) de Sergio LEONE. Néanmoins la comparaison s'arrête là. Car non seulement le récit "classique", celui d'une enquête policière est particulièrement étiré mais il n'est au final que secondaire. Ce qui compte dans le film, c'est le cheminement intérieur des personnages, tous reliés par la même souffrance existentielle dont on découvre peu à peu les différentes variantes au fil du récit. Une bonne partie du film se déroule pendant la nuit dans la steppe anatolienne, à peine trouée par le convoi de trois véhicules qui transporte l'équipage composite de l'histoire: un commissaire, un procureur, un médecin, un criminel et son complice, des chauffeurs et quelques militaires. Ils sont à la recherche du cadavre de l'homme que Kemal est censé avoir tué mais les souvenirs de celui-ci se dérobent et le convoi semble tourner en rond*. Pour tuer ce temps interminable et comme suspendu au bord du vide, chacun va venir le remplir avec sa propre histoire. Le film est donc en réalité un puzzle qui se reconstitue peu à peu au fur et à mesure que le passé de chacun s'éclaircit et que la nuit dorée cède la place à un jour blafard. Car derrière la diversité des parcours de chacun existe une profonde communauté de destins marquée du sceau de la tragédie. S'il y a quelque chose qui ne peut que frapper le spectateur, c'est l'absence dans ce microcosme des femmes ou plutôt leur relégation hors-champ, dans les paroles et les pensées des hommes qui sont littéralement "hantés" par elles ou plus exactement par l'impossibilité d'être avec elles et par son corollaire, l'empêchement de la paternité. Le moment qui souligne le plus ce qui relie tous les personnages est la scène renversante de beauté dans laquelle la fille du maire vient servir le thé. Eclairée par une lampe dans la nuit noire comme dans la peinture en clair-obscur, elle semble auréolée de lumière comme une divinité descendue sur terre pour offrir à ces hommes plongés dans la nuit un bref instant de grâce, ceux-ci assis à terre étant obligés de lever les yeux l'un après l'autre pour la contempler, éblouis, émus voire bouleversés comme Kemal. Mais cet instant ne dure pas et chacun est ensuite renvoyé à son enfer personnel. Les dix dernières minutes du film qui superposent deux champs sonores opposés se prolongeant jusqu'à la fin du générique nous poursuivent bien au-delà. Splendeur esthétique et profondeur philosophique font de ce film une expérience cinématographique exigeante certes mais inoubliable.

* Ce dispositif m'a rappelé celui de "Le goût de la cerise" de Abbas Kiarostami, l'une des influences majeures du cinéaste turc.

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La Triche

Publié le par Rosalie210

Yannick Bellon (1984)

La Triche

Bien que par certains aspects, "La Triche" soit un film de son époque, c'est à dire la première moitié des années 80, il apparaît comme un film avant-gardiste au point que dans certains passages, on a l'impression de regarder du Christophe HONORE dans le texte: jeu de séduction entre deux hommes, nudité masculine, musique de Purcell. Pas de sida cependant (sans doute trop peu de recul pour en parler) et un des deux partenaires n'ayant pas le visage d'un éphèbe mais celui, inattendu de Victor LANOUX qui est parfait dans ce contre-emploi. Encore qu'après l'avoir vu dans "Cousin cousine" (1975) je me suis rendue compte qu'il aimait bien les rôles subversifs, loin de l'image pépère de "Louis la brocante" que le grand public a retenu le lui. Dans "La Triche", il joue donc le rôle d'un commissaire bordelais bien installé mais se permettant de petits écarts selon le contrat tacite passé avec son épouse oenologue ultra-bourgeoise (jouée par Anny DUPEREY). Cependant, il lui cache que ses préférences vont aux garçons. Son métier est la clé de sa double vie: tout en présentant une façade respectable, elle lui permet de fréquenter les milieux interlopes où se mêlent toute une faune de marginaux symbolisé par un cabaret dont le nom "Le Paradis" résonne avec une certaine ironie. La dualité du commissaire se retrouve dans celle des deux frères jumeaux joué par Michel GALABRU, l'un tout ce qu'il y a d'établi et l'autre, artiste homosexuel se produisant dans ce cabaret qui est assassiné pour une affaire de drogue. C'est le point de départ de l'enquête du commissaire qui déclenche sa rencontre avec Bernard, musicien du "Paradis" au visage d'ange vivant dans un hangar (Xavier DELUC). Bernard fait sortir Michel Verta du placard, celui-ci ne prenant plus la peine de se cacher, ce qui déclenche une crise avec sa femme et sa belle-famille et risque de compromettre sa carrière. Si la fin du film est assez convenue, rétablissant l'ordre en éliminant l'élément perturbateur, le film présente l'homosexualité d'une manière comme je le disais plus haut avant-gardiste avec le couple formé par Bernard et Michel qui déjoue tous les clichés que l'on peut craindre lors des séquences du "Paradis" avec ses folles et ses travestis. Quant à l'assimilation de l'homosexualité à la clandestinité et au monde des délinquants, elle s'explique par le fait que sa dépénalisation était alors très récente et que les mentalités n'avaient pas encore suivi.

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They Shot the Piano Player (Dispararon al pianista)

Publié le par Rosalie210

Fernando Trueba et Javier Mariscal (2024)

They Shot the Piano Player (Dispararon al pianista)

"They shot the Piano Player" est la deuxième collaboration du réalisateur Fernando TRUEBA et du dessinateur Javier MARISCAL après "Chico & Rita" (2010). On y retrouve l'animation et la musique latino mais "They shot the Piano Player" est aussi un film politique au travers d'une enquête sur la disparition d'un pianiste de jazz brésilien virtuose, Francisco Tenório Júnior, à la veille du coup d'Etat en Argentine en 1976. Plus de 30 ans après les faits, le journaliste américain fictif Jeff Harris (l'alter ego de Fernando TRUEBA) qui doit écrire un livre sur la bossa nova découvre un enregistrement du musicien disparu. Subjugué, il part à la recherche de ceux qui l'ont connu et ressuscite l'âge d'or de la musique brésilienne au travers de ses représentants les plus prestigieux dont on entend la voix au travers de leur avatar animé. Même moi qui ne suis pas une spécialiste, j'ai reconnu Chico BUARQUE, Gilberto GIL ou encore Caetano VELOSO. Et si d'autres me sont inconnus, je les connais en réalité à travers leurs oeuvres (Vinicius de MORAES qui accompagnait le pianiste lors de la tournée durant laquelle il a disparu est l'auteur des paroles de "The girl from Ipanema"). Des anecdotes impliquant également de grands noms du jazz afro-américain comme Ella FITZGERALD sont évoquées. Et le parallèle créatif avec la nouvelle vague française (bossa nova se traduit par nouvelle vague), l'influence de Francois TRUFFAUT surtout se retrouve à travers le titre, hommage à "Tirez sur le pianiste" (1960). Mais en parallèle de cette effervescence de sons et de couleurs, le film évoque la terrible période des dictatures militaires s'étant abattues en Amérique latine avec la complicité de la CIA et leur coordination au travers de l'opération condor pour traquer leurs opposants communistes ou supposés tels. Car Tenório n'étant pas politisé, il peut être considéré comme une victime collatérale de ce terrorisme d'Etat se trouvant au mauvais endroit et au mauvais moment, embarqué à cause de son apparence l'assimilant aux révolutionnaires, torturé puis exécuté pour l'empêcher de témoigner de ce qu'il avait vu et vécu. L'enquête de Jeff Harris l'amène donc à reconstituer les lieux de détention, de torture et d'exécution, la disparition des corps, les bébés enlevés à leur mère pour être adoptés par des familles soutenant le régime et les séquelles sur les survivants (la femme de Tenório privée du statut de veuve et des ressources allant avec par exemple). Un peu ardu à suivre par moments avec quelques redites et longueurs mais on y apprend beaucoup, on y voit et y entend beaucoup et on repart avec une question lancinante "Comment tant de douceur et de beauté ont pu cohabiter avec tant de barbarie?".

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Pluto (Puruto)

Publié le par Rosalie210

Toshio Kawaguchi (2023)

Pluto (Puruto)

Naoki Urasawa est l'auteur de mes deux mangas préférés: "20th Century Boys" et "Pluto", tous deux primés à Angoulême, respectivement en 2004 et en 2011. Tout en bâtissant des intrigues palpitantes et des personnages intenses, Naoki Urasawa insuffle à ses oeuvres une dimension existentielle d'une puissance rare. Ainsi en est-il de "Pluto" qui rend hommage au père des mangas, Osamu Tezuka et à "Tetsuwan atomu" alias "Astro le petit robot" chez nous. Un auteur qui développait dans ses oeuvres nombre de thèmes religieux et philosophiques. Mais l'oeuvre d'Urasawa est plus sombre, plus adulte, plus mélancolique, plus inquiète, hantée par le mal. Elle prolonge à la fois la réflexion d'Asimov et celle de Philip K. Dick sur les robots avec un questionnement très simple mais imparable sur nos profondes contradictions humaines. L'homme a voulu créer le robot à son image mais il ne veut pas qu'il mente ni qu'il tue tout en l'utilisant comme machine de guerre dans les conflits armés. Il veut en garder le contrôle tout en lui insufflant des émotions par essence incontrôlables et ensuite s'effraie de voir celui-ci lui échapper. Le dernier avatar de Frankenstein s'appelle d'ailleurs Bora dans "Pluto" et ressemble à la créature d'eau et de glaise de Prométhée.  

Le résultat est que les robots de "Pluto" sont des vétérans de guerre remplis de tourments. Les plus sophistiqués d'entre eux ont une apparence humaine qui les rend indécelables à l'oeil nu. Ils ont un subconscient, une mémoire traumatique, sont submergés par la haine ou l'empathie, jouent du piano, peignent, jardinent, ont une famille, ne comprennent pas d'où viennent leurs larmes, mentent aux autres comme à eux-mêmes. Alors évidemment en dépit du tabou nimbé d'une épaisse couche de déni, il apparaît évident que ces robots peuvent tuer, et pas seulement d'autres robots. L'enquête porte d'ailleurs sur une intelligence artificielle qui commet des meurtres, sur les robots les plus puissants du monde mais aussi sur des humains qui leur sont liés. Tous ont trempé dans un conflit sanglant qui s'inspire de l'invasion de l'Irak par les USA en 2003, le "39° conflit d'Asie centrale".

Mais cette enquête en rejoint une autre, beaucoup plus intime. Gesicht, le robot-inspecteur chargé des investigations veut comprendre l'origine des cauchemars qu'il fait toutes les nuits, comprenant peu à peu que sa mémoire a été trafiquée par ses supérieurs humains pour reprendre le contrôle sur lui et les armes redoutables qu'il possède dans son corps. Armes et démons intérieurs ne faisant pas bon ménage, il éprouve le besoin d'interroger Brau 1589, seul robot a avoir officiellement tué un humain en violation de la législation inspirée des lois d'Asimov. Celui-ci est prisonnier mais n'a pas été détruit parce que les humains, dépassés par son cas ont peur des conséquences. Peu à peu, Gesicht reprend possession de ses souvenirs et de son identité et c'est de cette mémoire que hérite Astro. Tous deux sont reliés par le souvenir d'un enfant mort et des émotions extrêmes qu'elle a déclenché, des émotions incontrôlables qui les ont propulsé à un stade d'évolution supérieur. Alors bien évidemment, la question angoissante qui se pose aux humains dépassés face à ces robots ayant acquis le libre-arbitre c'est "que vont-ils choisir?" 

 

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Mean Streets

Publié le par Rosalie210

Martin Scorsese (1973)

Mean Streets

"Mean Streets", le troisième film de Martin SCORSESE est une plongée dans les bas-fonds de Little Italy qui a des airs de "Les Quatre cents coups" (1959) d'autant plus qu'on y rencontre pour la première fois celui qui deviendra l'alter ego du cinéaste, Robert De NIRO. Mais en beaucoup plus trash et torturé. Le film déconcerte de par son hétérogénéité voire ses nombreuses contradictions. D'un côté, un aspect néoréaliste voire documentaire, pris sur le vif, nerveux, souvent caméra à l'épaule. De l'autre, des effets maniéristes qui deviendront la signature du réalisateur tels que le rouge écarlate, les ralentis, les explosions de violence, l'utilisation flamboyante de la musique. Les contradictions sont également au coeur du personnage de Charlie, joué par le premier acteur important du cinéma de Scorsese, Harvey KEITEL. En quête de respectabilité et de réussite dans la mafia de son quartier dont l'un des bonnets est son propre oncle, le jeune homme ne peut pas s'empêcher de risquer de tout perdre en protégeant envers et contre tout Johnny Boy (Robert De NIRO), un jeune chien fou inconscient et incontrôlable. Le catholicisme est aussi important que la pègre chez Scorsese et Charlie ne cesse d'osciller entre l'Eglise et le bar comme si Johnny boy était sa croix et son rachat. Même contradictions vis à vis de la gent féminine car le quartier est un théâtre où il ne faut pas montrer qu'on en pince pour une afro-américaine ou pour une épileptique. Le machisme, le racisme et la morale chrétienne font écran aux désirs et aux sentiments. "Mean Streets" avec son apparence de patchwork désordonné, son absence de véritable scénario, ses personnages de petites frappes immatures n'est franchement pas un film aimable ni confortable. Mais il vaut la peine d'être vu non seulement parce qu'il annonce la filmographie d'un grand cinéaste mais parce qu'une direction finit par émerger de tout ce chaos. Comme dans "Les Vitelloni" (1953) qui décrivait également le marigot dans lequel vivotait une bande de jeunes paumés soudés comme des frères, le salut est à chercher seul et dans l'exil lors d'une fin autrement plus violente que dans le film de Federico FELLINI (également largement autobiographique). Une fin dans laquelle Martin Scorsese apparaît d'ailleurs en personne dans un rôle des plus symboliques.

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Le Criminel (The Stranger)

Publié le par Rosalie210

Orson Welles (1945)

Le Criminel (The Stranger)

"Le Criminel" est à Orson WELLES ce que "Blue Velvet" (1986) est à David LYNCH ou "L'Ombre d'un doute" à Alfred HITCHCOCK. Le rêve américain mis à mal par des monstres tapis dans l'ombre s'incarne ici non dans une oreille coupée ou un double maléfique mais dans un étrange clocher importé de la Mitteleuropa qui avec sa ronde de l'ange et du démon incarne la lutte éternelle des forces du bien contre celles du mal. C'est dans ce clocher incongru que niche le démon, un nazi ayant refait sa vie sous une fausse identité dans une bourgade américaine un peu trop tranquille pour être tout à fait honnête. Non seulement l'homme est parfaitement intégré mais il s'apprête pour parfaire sa couverture à épouser la fille d'un juge de la cour suprême ce qui traduit la perméabilité de la société américaine vis à vis de l'idéologie hitlérienne. Le détective chasseur de nazis joué par Edward G. ROBINSON n'a pas besoin de plus de quelques phrases pour comprendre à qui il a affaire. Cependant, il n'est pas à proprement parler un représentant du "bien" étant donné que pour lui, la fin justifie les moyens. Il fait donc libérer l'ancien bras droit du nazi pour le suivre et parvenir à retrouver sa trace, puis se sert de son épouse pour le coincer en sachant pertinemment qu'il les envoie tous deux à la mort. Mary l'épouse (Loretta YOUNG) est particulièrement agaçante dans son obstination à nier l'évidence. On se dit qu'elle est sous emprise ou bien qu'elle est morte de peur ce qui rend son revirement final particulièrement invraisemblable. Mais ces faiblesses scénaristiques sont largement compensées par la mise en scène et l'interprétation de Orson WELLES. Au départ il ne devait que jouer mais il a finalement remplacé John HUSTON à la réalisation pour démontrer à la RKO qu'il était capable de tenir les délais et le budget d'un film. Aussi, même s'il n'en a pas eu le total contrôle, celui-ci porte bien sa marque avec des échappées baroques collant à la folie meurtrière de son personnage rêvant d'un nouvel Hitler pour reprendre le flambeau de la revanche. Et ce alors même que durant le tournage du film se tenait le procès de Nuremberg où des films de la libération des camps étaient diffusés. Ce sont ces mêmes films que l'on voit dans "Le Criminel", réputé pour être le premier film de fiction à les montrer.

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Astrid et Raphaëlle (saison 4)

Publié le par Rosalie210

Laurent Burtin, Alexandre de Seguins (2023)

Astrid et Raphaëlle (saison 4)

Quatrième saison de "Astrid et Raphaëlle" dévorée en quelques heures sur le site de France tv. Le format est toujours le même, huit épisodes d'environ 50-55 minutes mais à l'exception du premier qui s'inspire de "Ocean's Eleven" (2001) et ses suites et qui ne va pas chercher plus loin que le divertissement, la plupart des autres sous des dehors ésotériques tournent autour de problèmes autrement plus graves touchant au domaine de la bioéthique, de l'inceste et du viol, de l'exploitation des enfants dans le sport ou de traumatismes subis sous des régimes tortionnaires. De son côté, le commissariat s'enrichit d'un nouveau membre, la geek Norah Mansour (Sophia YAMNA) en lieu et place de Arthur (Meledeen YACOUBI) qui avait été pensé seulement comme un rouage des enquêtes. Norah est un personnage plus étoffé qui en dehors de ses activités de décryptage des systèmes informatiques s'interpose involontairement entre Raphaëlle et Nicolas qui ont bien du mal à assumer leur attirance mutuelle. Quel plaisir de retrouver Lola DEWAERE dans le rôle de cette post-adolescente bordélique, franche, fougueuse et pas très à cheval sur les règles. Astrid de son côté se confronte à de nouveaux défis dans son cheminement au royaume des neurotypiques: jamais autant de gens ne sont entrés chez elle! Outre Raphaëlle provisoirement SDF à la suite de problèmes de déménagement, elle doit héberger son jeune demi-frère une fois par semaine et donc apprendre la fonction parentale. Enfin il y a la relation avec son ami japonais, Tetsuo (Kengo SAITO) qui devient de plus en plus intime. Sara MORTENSEN maîtrise sur le bout des doigts son personnage et parvient à le faire évoluer sans pour autant le dénaturer. Le final ne laisse aucun doute sur le fait qu'il y aura une saison 5.

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L'Affaire Thomas Crown (The Thomas Crown Affair)

Publié le par Rosalie210

Norman Jewison (1968)

L'Affaire Thomas Crown (The Thomas Crown Affair)

"L'Affaire Thomas Crown" est un film policier divertissant et charmant grâce au glamour de ses deux interprètes (Steve McQUEEN et Faye DUNAWAY) qui jouent à "Arrête-moi si tu peux" (2002) et à toutes sortes d'autres jeux risqués sur fond d'érotisme. Par leur classe et leur goût de l'aventure, ils m'ont tous deux fait penser à James Bond ce qui est logique car le premier choix de casting pour jouer Thomas Crown était Sean CONNERY. De même le côté ludique du film lorgne vers Alfred HITCHCOCK au point qu'on croirait voir surgir l'ombre de Eva Marie SAINT (pressentie pour le rôle de Vicki Anderson) dans la scène de vente aux enchères. Néanmoins, si Vicki Anderson a un rôle actif à jouer contrairement à celui souvent décoratif des James Bond girls des années 60, elle n'est pas pour autant à égalité avec son partenaire et son rôle n'est pas dénués de clichés. Je pense notamment au fait qu'elle fonde son enquête sur la séduction et non sur la recherche de preuves. Ou encore le fait que lors de la partie d'échecs, si la caméra adopte plusieurs fois le point de vue de Thomas Crown observant avec désir tel ou tel détail, tel ou tel geste de sa partenaire, l'inverse ne se produit jamais. En langage actuel, on dirait que cette célèbre séquence est un monument de "male gaze".

Le film n'est donc moderne qu'en apparence et cela se retrouve sur la forme. Si les chorégraphies géométriques des casses et du jeu d'échecs se répondent avec bonheur, la gestion des split-screen est moins heureuse. Cette technique venait d'être découverte et Norman JEWISON en met partout sans que cela soit justifié. L'aspect tape-à-l'oeil de la mise en scène se retrouve aussi dans la bande-son omniprésente voire parfois envahissante (composée par Michel LEGRAND dont c'était la première collaboration dans une production hollywoodienne) dont on retient surtout la chanson "Les moulins de mon coeur".

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Mystère à Venise (A Hauting in Venice)

Publié le par Rosalie210

Kenneth Branagh (2023)

Mystère à Venise (A Hauting in Venice)

Après l'Orient-Express et la croisière sur le Nil, Kenneth BRANAGH adapte une troisième fois Agatha Christie, plus précisément son roman "La Fête du potiron" connu aussi sous le titre "Le crime d'Halloween". Comme les deux autres, il met en scène le détective Hercule Poirot sommé de résoudre une enquête criminelle dans un lieu clos, non plus un train ou un bateau mais cette fois un palais vénitien. Ce qui n'est pas le cas du roman d'origine qui situe l'intrigue en Angleterre, plus propice à développer l'imaginaire autour de la fête de Halloween. Qu'à cela ne tienne. Pour accentuer l'effet huis-clos, Kenneth BRANAGH fait se dérouler l'intégralité de l'enquête de nuit et par une tempête déchaînée. Il ne lésine pas non plus sur les effets visuels et sonores du type jump scare qui tendent à faire croire que le palais est envahi d'esprits frappeurs. La question de la croyance est en effet le fil rouge de l'histoire. Le très shakespearien Hercule Poirot joué par Kenneth BRANAGH s'est réfugié dans la Venise d'après-guerre pour y finir ses jours en se terrant dans sa demeure en véritable misanthrope qui ne croit plus en rien ni en personne. Son amie écrivaine, Ariadne Oliver (Tina FEY) au visage aussi couturé que le sien vient l'en exhumer pour le mettre au défi de résoudre une énigme mêlant mettant en oeuvre des phénomènes soi-disant surnaturels. Si le film a du cachet et figure désormais dans la liste des nombreuses oeuvres mettant en scène la cité des Doges (dont le côté mortifère se marie très bien avec les fantômes de Halloween), l'intrigue à la "Shining" (1980) ne tient pas toutes ses promesses, nombre de pistes restant sous-exploitées. Peut-être est-ce dû au trop grand nombre de personnages qui ne peuvent pas être aussi développés qu'il le faudrait. De même tous les phénomènes "surnaturels" (dont certains tombent dans le grand-guignol, pauvre Michelle YEOH!) trouvent une explication rationnelle décevante. J'aurais aimé plus d'ambiguïté, notamment dans tous ces fantômes que croise Hercule Poirot dont Kenneth BRANAGH a fait une âme tourmentée mais qui cette fois-ci s'efface un peu trop au profit de sa galerie survolée de suspects.

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