Overblog Tous les blogs Top blogs Films, TV & Vidéos Tous les blogs Films, TV & Vidéos
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
MENU

Articles avec #polar tag

Le jeu de la mort (Game of Death)

Publié le par Rosalie210

Robert Clouse, Bruce Lee (1978)

Le jeu de la mort (Game of Death)

"Le jeu de la mort" est à l'origine un film que Bruce Lee ne put achever en raison de sa mort prématurée en 1973. Qu'à cela ne tienne, six ans plus tard, Robert Clouse décida de réaliser sa propre version. Il faut dire que la popularité de Bruce Lee était telle que les "opérations filon" se multipliaient pour se faire de l'argent à titre posthume sur le dos de la star (ce que l'on a appelé la "bruceploitation"). Sur les 40 minutes tournées par l'acteur, Clouse n'en garda que 15 qui sont situées à la fin du film. Ce passage là est grandiose et laisse entrevoir ce qu'aurait dû être "Le jeu de la mort": l'histoire d'un champion de kung-fu qui doit affronter à chaque étage d'une pagode un adversaire maîtrisant une technique différente, un peu comme dans un jeu vidéo où il faut passer des niveaux. C'est peu mais cela suffit pour faire entrer l'image de Bruce Lee en combinaison jaune à bandes noires dans la légende. Une légende que saura reprendre et féminiser Tarantino dans "Kill Bill" 30 ans plus tard.

Pour le reste, on est face à une sorte de film-collage fait de pièces et de morceaux mal raccordés entre eux. Les extraits de précédents films de Bruce Lee (parfois un simple plan) se superposent à des scènes tournées par des doublures au visage plus ou moins dissimulé par des bandages ou de grosses lunettes noires (quand ce n'est pas par une photo de Bruce Lee, un "trucage grossier" à hurler de rire). Comme si tout cela se sentait déjà pas la mascarade à plein nez, Clouse bricole une intrigue de série B où un acteur et son épouse occidentale sont harcelés par la pègre. Une allusion à la vie de Bruce Lee qui est cependant surpassée dans le mauvais goût par l'insertion d'images authentiques de ses funérailles.

Voir les commentaires

La mort aux trousses (North by Northwest)

Publié le par Rosalie210

Alfred Hitchcock (1959)

La mort aux trousses (North by Northwest)

"La mort aux trousses", c'est le festival du leurre. Un simple quiproquo et Roger Tornhill, un homme d'affaires paisible (du moins en apparence) se retrouve pris pour un espion du FBI. Le voilà embringué dans une histoire qui le dépasse avec de dangereux bandits et des policiers à ses trousses sans compter une somptueuse femme fatale qui le vampe d'entrée de jeu. Entre eux, on peut dire que cela "matche" tout de suite et on est frappé par la sensualité qui se dégage de leurs échanges (quoique la main de Philipp Vandamm/James Mason caressant la nuque de Eve Kendall/Eva Marie Saint soit également très suggestive). Démasquer Eve occupe une grande partie du film et donne lieu à de trépidants retournements de situation.

Mais c'est dans la scène la plus célèbre du film que Hitchcock s'amuse le plus à leurrer le spectateur. Il s'agit bien entendu du moment où Cary Grant est poursuivi par un avion en rase campagne. Hitchcock joue à déjouer toutes les attentes du spectateur. Il fait surgir une Cadillac noire comme dans les polars urbains et nocturnes, il fait entrer dans le champ un homme qui se tient face à Tornhill de part et d'autre de la route comme dans un duel au soleil et tout ça pour détourner l'attention du vrai danger qui provient de là où on ne l'attend pas c'est à dire de nulle part. Car l'avion sulfateur, engin agricole utilitaire ne suscite lui aucune réminiscence cinéphilique chez le spectateur. Du moins avant la sortie du film.

Ce jeu de dupes fonctionne à plein régime tout au long du film dont le rythme ne faiblit pas un instant. Parsemé d'aventures trépidantes et de morceaux de bravoure devenus cultes, ce thriller ludique brasse tous les thèmes hitchcockiens (le faux coupable, la trahison de la femme aimée) mais avec une tonalité légère et une fin heureuse où la métaphore du train entrant dans le tunnel suggère de façon limpide les ébats des héros. On est aux antipodes d'un "Vertigo" et sa sexualité mortifère.

Voir les commentaires

Le Violent (In a Lonely Place)

Publié le par Rosalie210

Nicholas Ray (1950)

Le Violent (In a Lonely Place)

Mi satire, mi étude de caractère, ce faux film noir de Nicholas Ray met effectivement un peu de temps à se mettre en place. Mais une fois ce cap franchi, c'est prenant.

La première partie dresse le portrait d'un personnage à la fois victime et rebelle d'un système ce qui est habituel chez Nicholas Ray. Bogart joue le rôle d'un scénariste emporté et instable qui est accusé de surcroît d'un crime qu'il n'a pas commis. Le thème du faux coupable est bâclé et la critique du système hollywoodien bien que plus intéressante reste assez anecdotique. On voit notamment Dixon prendre la défense d'un vieil acteur déchu de l'ère du muet et se moquer ouvertement d'un roman populaire qu'il est censé adapter.

Le film ne prend toute sa dimension que dans la deuxième partie lorsque la personnalité lunatique et tourmentée de Dixon/Bogart devient centrale. L'évidence saute effectivement aux yeux: l'acteur et son personnage ne font qu'un. On s'identifie totalement à Laurel Gray (Gloria Grahame), la femme passionnément éprise de plus en plus terrifiée par les agissements de son compagnon. Sa crédibilité est totale lorsqu'elle avoue ne plus pouvoir le supporter, ne plus lui faire confiance, le soupçonner d'avoir commis le crime. La manière dont Dixon/Bogart passe en un éclair d'une douceur et d'une tendresse craquante qui donne envie de le prendre dans les bras à une violence effrayante a en effet de quoi faire frémir. La scène de la voiture où tant qu'il n'a pas déversé sa rage il reste inaccessible à tout échange humain sonne incroyablement juste. Personnage dominé par des pulsions qu'il n'arrive pas à contrôler, on le voit se comporter de façon de plus en plus erratique et tout détruire autour de lui, à commencer par ceux qui l'aiment. Ray filme ce basculement du solaire aux ténèbres en éclairant les yeux de Bogart et assombrissant le reste du visage. Un moyen imparable de nous préparer aux accès de folie qui s'emparent de lui: les yeux sont le miroir de l'âme.  

Voir les commentaires

Hana-Bi

Publié le par Rosalie210

Takeshi Kitano (1997)

Hana-Bi

Les japonais ont eu beaucoup de mal à admettre que leur Hanouna local cachait un immense cinéaste. Il a fallu pour cela la reconnaissance internationale d'Hana-Bi qui a récolté notamment le Lion d'or à Venise. Hana-Bi réussit l'exploit de combiner harmonieusement toutes les facettes si contradictoires de ce réalisateur hors-norme. Comme l'ont dit les Inrocks, "A la fois Beat Takeshi le bouffon et Takeshi Kitano le cinéaste de génie, il trouve ici la voie étroite qui lui permet de concilier les contraires, de féconder sa schizophrénie structurelle et d'inventer le lyrisme grinçant."

A l'image de Kitano, Hana-Bi est un film profondément déconcertant de par son mélange des genres. C'est avant tout un poème visuel contemplatif d'une bouleversante beauté où Kitano se réincarne en Horibe (joué par Ren Osugi), ex-flic devenu paraplégique à la suite d'une fusillade et qui se réfugie dans la peinture. Des peintures dont Kitano est en réalité l'auteur. En 1994, il a a été victime d'un terrible accident qui lui a laissé des séquelles irréversibles, notamment une paralysie faciale partielle. Son visage impassible secoué de temps à autre par des tics nerveux hante le film. De même, les scènes contemplatives sont brusquement déchirées par des éclairs de violence secs et tranchants comme des haïkus. Des explosions qui jaillissent à la surface dont le calme et la sérénité apparentent nous trompent. Comme cette énorme tache sanglante signifiant "suicide" s'étalant au milieu des idéogrammes blancs et jaunes signifiant "neige" et "lumière". Kitano a avoué que son accident était en fait une tentative de suicide.

Il ne faut pas s'y tromper en effet, Nishi, autre facette de Kitano, joué cette fois par Kitano lui-même, Nishi a la rage. Une rage froide qui lui fait décharger son arme sur un cadavre, crever un œil à l'aide de baguettes ou braquer une banque avec un calme olympien. Nishi est une sorte de Robin des bois qui règle ses comptes à la société japonaise, sa corruption, son hypocrisie, sa brutalité vis à vis des plus faibles. Les plus faibles justement, il les prend sous son aile: Horibe à qui il offre le matériel de peinture, la veuve de son collègue assassiné à qui il offre une partie du butin pris à la banque et enfin sa propre épouse condamnée par la maladie à qui il offre un beau voyage à la montagne et à la mer. Un voyage ponctué de petites séquences burlesques et enfantines qui montrent que Takeshi le clown n'est jamais très loin. Mais un voyage profondément mélancolique aussi: les peintures qui l'accompagnent en contrepoint font ressurgir le fantôme de l'enfant du couple, trop tôt disparu. C'est pourquoi l'amour (dont le symbole est la fleur "Hana" en japonais) cohabite avec la mort ("bi" le feu, symbole de la mort "Hana bi" les fleurs de feu signifiant "feu d'artifice") jusque dans la scène finale où la sublime musique lyrique de Joe Hisaishi (le compositeur des films de Miyazaki) est interrompue brusquement par des coups de feu.

Voir les commentaires

J. Edgar

Publié le par Rosalie210

Clint Eastwood (2011)

J. Edgar

Je n'avais pas envie de voir ce film pour deux raisons: je ne suis pas spécialement fascinée par les hommes de pouvoir et je n'aime pas particulièrement Léonardo Dicaprio. Mais en dépit de sa photographie très (trop) sombre, ce film est en réalité une bonne surprise grâce au regard intelligent du réalisateur. Loin d'être une reconstitution poussiéreuse et désincarnée, le film est intimiste et dissèque avec une humanité inattendue une psychologie particulièrement torturée, celle de J. Edgar Hoover, inamovible patron du FBI durant près d'un demi-siècle. Paranoïaque obsédé par la peur de la contamination (des rouges, des truands, des roses, puis des noirs), éternel petit garçon bégayant sous la coupe d'une mère castratrice (Judi Dench), Hoover possède de nombreux démons intérieurs qui expliquent d'autant mieux son autoritarisme, son besoin de contrôle et sa mythomanie. Son homosexualité refoulée (toujours d'après le film à cause de sa mère qui ne supporte pas qu'il soit "de la jaquette") le contraint à vivre une relation aussi forte qu'entravée avec son adjoint Tolson. Paradoxalement les plus belles scènes du film émanent de cet amour (réel ou extrapolé, la nature de la relation entre les deux hommes n'ayant jamais été tirée au clair). Ainsi on voit cet homme qui ne supporte pas que l'on touche aux scènes de crime et qui s'essuie la main après l'avoir serrée, se tamponner le visage avec un mouchoir tenu un instant auparavant par Tolson puis réclamer toujours plus de proximité avec lui tout en se dérobant sans cesse. Cette contradiction donne lieu à une deuxième lecture assez bouleversante de la lettre révélant les amours saphiques d'Eleanor Roosevelt.

Voir les commentaires

Minuit dans le jardin du bien et du mal (Midnight in the Garden of Good and Evil)

Publié le par Rosalie210

Clint Eastwood (1997)

Minuit dans le jardin du bien et du mal (Midnight in the Garden of Good and Evil)

C'est un film qui m'a marquée, non pour son histoire assez confuse mais pour l'étrangeté de son atmosphère, un "Autant en emporte le vent sous mescaline" pour reprendre l'expression du seul personnage extérieur de l'histoire, John Kelso joué par John Cusack. Celui-ci est un journaliste new-yorkais des plus rationnels qui va se laisser envoûter par la moiteur sudiste de la ville de Savannah et l'ambivalence romanesque et haute en couleurs de ses habitants. Lui-même en effet est double puisque sa vocation de romancier va revenir le titiller au contact de cet univers plein de mystère où les contraires se côtoient pour le meilleur et pour le pire. Les vivants communiquent avec les morts, le raffinement des mœurs cache une violence sauvage alors que les normes sexuelles et genrées sont profondément bousculées. Jim Williams (joué par Kevin Spacey) est un notable qui cache son homosexualité jusqu'à ce que celle-ci ne sorte du placard ou plutôt de l'horloge de façon fracassante. Son amant Billy (joué par Jude Law) est une petite frappe entretenue prête à tout faire exploser sur son passage. Lady Chablis, connaissance de Billy est une drag-queen aussi extravagante et irrévérencieuse que touchante. Et enfin Minerva est une sorte de prêtresse vaudou dont le talent occulte permet à John Kelso de se frayer un chemin dans un maquis de mensonges, demi-vérités et désillusions.

Film d'atmosphère et étude d'un milieu quasi ethnographique, le film n'en est pas moins tiré de faits réels qui furent par la suite romancés. S'il est un peu trop long, sa profonde originalité mérite le détour.

Voir les commentaires

La Victime (Victim)

Publié le par Rosalie210

Basil Dearden (1961)

La Victime (Victim)

"C'est incroyable de penser que faire ce film ait pu être considéré comme un acte courageux, osé ou dangereux. A l'époque il était les trois à la fois." Dirk Bogarde savait de quoi il parlait car le rôle de Melville Farr était une sorte de mise en abyme de sa propre vie. Bogarde contrairement à son personnage ne s'était pas marié mais il vivait quand même dans le mensonge, du moins dans sa vie publique. Il jouait en effet les jeunes premiers pour midinettes et s'affichait avec des femmes séduisantes pour mieux cacher qu'il était en couple avec un autre homme. En acceptant le premier rôle d'un film engagé n'hésitant pas à appeler un chat un chat, Bogarde prit un risque qui s'avéra déterminant pour la suite de sa carrière. Les Losey et autres Visconti le repérèrent et lui offrirent les rôles majeurs qui l'ont fait passer à la postérité.

"Victim" date de 1961. À cette époque en Angleterre, l'homosexualité jugée comme une perversion contre-nature (on parle "d'invertis") est passible de prison. De sombres individus en profitent pour exercer un odieux chantage sur les homosexuels qui pris entre le marteau (la police) et l'enclume (les maîtres-chanteurs) sont nombreux à se suicider. Mi film noir, mi étude de mœurs, "Victim" entretient habilement un suspense étouffant tout en dressant le portrait d'une société rongée de l'intérieur par la haine et la peur. La paranoïa (chaque personne est filmée comme un délateur potentiel) est à la mesure de la gravité des névroses sexuelles. Les maîtres-chanteurs sont dépeints comme des personnes puritaines qui refoulent leur propre homosexualité en persécutant ceux qui l'assument. La solitude et la détresse des homosexuels est dépeinte avec sensibilité de même que la relation faite d'écoute, de compréhension mutuelle et de franchise entre Melville et sa femme qui de ce fait échappe aux clichés.

Dommage que ce film ressorti au cinéma en 2009 ne soit pas disponible en DVD d'édition française (cela a heureusement changé depuis que j'ai écrit cet avis). Car il est un parfait exemple de la nécessité de l'engagement pour faire cesser les injustices. L'homosexualité fut dépénalisée en Angleterre 6 ans après la sortie du film qui joua un rôle certain dans cette évolution. Mais l'intolérance vis à vis des homosexuels a perduré jusqu'à nos jours car changer les mentalités est une autre paire de manches.

Voir les commentaires

Le Jour se lève

Publié le par Rosalie210

Marcel Carné (1939)

Le Jour se lève

"Le jour se lève" c'est d'abord ce décor incroyable imaginé par Alexandre Trauner. Un immeuble de 5 étages dont la verticalité et la hauteur menaçante tranchent avec l'environnement encore très villageois d'une ville ouvrière d'avant guerre.

Il en va de même avec les plans extérieurs de l'usine. Le "temple de la révolution industrielle" est une architecture surdimensionnée et son éclairage à contre-jour par le chef-opérateur Curt Courant renforce encore l'impression d'un monstre écrasant ses proies comme dans Métropolis de Lang ou Les Temps modernes de Chaplin réalisé seulement trois ans avant "Le jour se lève".

L'intérieur de l'usine est tout aussi cauchemardesque. Des alignements de scaphandres qui travaillent dans la poussière et dans le bruit. "Je t'l'avais dit, c'est tout ce qui a de sain ici" dit ironiquement François (Jean GABIN) à Françoise (Jacqueline Laurent) qui contemple avec désolation son bouquet de fleurs fané en quelques minutes au contact de l'air vicié. C'est un poète insurgé contre l'aliénation de l'homme à la machine qui parle: Jacques Prévert.

On retrouve d'ailleurs son personnage fétiche du Roi et l'Oiseau: l'aveugle au costume noir et aux lunettes rondes. Dans les deux films, il fait partie de ce monde ouvrier filmé en plongée, écrasé, opprimé, balayé par la police qui désire faire place nette (adieu les espoirs du Front Populaire et bonjour Vichy!)

Mais ce n'est pas un roi qui trône tout en haut de la tour d'ivoire. C'est un ouvrier qui s'est barricadé dans sa chambre après avoir craqué et tué l'homme qui le torturait psychologiquement (Jules Berry, pervers à souhait). Un drame passionnel indissociable de sa révolte contre sa condition d'éternel soumis:"Y'a une place à prendre, une bonne petite place, un bon ptit boulot avec des heures supplémentaires. Alors allez-y qu'est ce que vous attendez. Un bonheur là, tout un ptit bonheur!"

Oui François a changé comme tous ne cessent de le dire, il ne se reconnaît même plus dans la glace au point de la briser en mille morceaux. Certes, sa révolte solitaire est sans issue, condamnée à l'image de sa porte murée par l'armoire normande. Mais qu'on ne vienne pas me dire que le réalisme poétique est incapable de contestation et de courage politique. Ce sont ces critiques là qui sont aveugles.

Voir les commentaires

Un monde parfait (A Perfect World)

Publié le par Rosalie210

Clint Eastwood (1993)

Un monde parfait (A Perfect World)

" Un soldat, jeune, bouche ouverte, tête nue/ Et la nuque baignant dans le frais cresson bleu,/ Dort; il est étendu dans l'herbe, sous la nue/ Pâle dans son lit vert où la lumière pleut."

C'est par cette scène rimbaldienne à la fois tragique et paisible que s'ouvre et se clôt "Un monde parfait", road-movie qui mêle indistinctement récit de cavale et récit d'apprentissage. Réalisé juste après "Impitoyable", "Un monde parfait" fait partie des nombreux récits de transmission mis en scène par Eastwood où un vieux briscard (Eastwood himself) tend la main aux parias de l'Amérique pour leur donner une seconde chance. Néanmoins la tonalité d'"Un monde parfait" est plutôt amère et désenchantée. Eastwood joue un flic (pour changer) qui dans le passé a pris une mauvaise décision: il a envoyé un jeune délinquant récidiviste dans une maison de redressement pour l'arracher aux griffes de son père maltraitant ce qui a achevé de le faire plonger dans la criminalité. Devenu adulte, Butch Haynes (Kevin COSTNER dans l'un de ses meilleurs rôles) s'évade de prison et prend en otage un petit garçon de 8 ans, Phillip (T.J Lowther) en qui il se reconnaît aussitôt, au point de se mettre immédiatement à sa hauteur. L'enfant n'a pas de père et il est emprisonné dans une éducation rigide qui le met à l'écart des autres enfants et le prive de la plupart des plaisirs de son âge. Butch rêve de réparer le passé en retrouvant son père en Alaska tout en se donnant un avenir en éduquant Phillip. Mais son destin est à l'image des routes inachevées du Texas profond, il se termine en cul de sac. Notamment parce que la maltraitance infligée aux enfants déclenche chez lui une violence incontrôlable et que Phillip qui trouve en Butch un père de substitution va répéter les actes de celui-ci enfant.

Le caractère fataliste du film est également souligné par les scènes satiriques grinçantes servant de contrepoint à l'odyssée tragique de l'anti-héros. Par exemple un père de famille qui semble davantage se soucier de sa voiture que de ses enfants, un magasin où les employées sont payées pour sourire, des forces de l'ordre surarmées dont la gâchette facile va de pair avec la bêtise abyssale, une course-poursuite grotesque en caravane de luxe laquelle devait servir de QG au gouverneur pour la visite de Kennedy au Texas (dont on connaît l'issue fatale) etc.

Néanmoins ce qui l'emporte n'est ni la tristesse, ni l'amertume mais l'espoir. Les petites graines semées par la révolte de l'enfant blessé qu'a été Butch dans l'urgence et parfois la violence porteront-elles leurs fruits? La fin ouverte laisse la réponse en suspens.

 

Voir les commentaires

Divines

Publié le par Rosalie210

Houda Benyamina (2016)

Divines

Ce qui m'a le plus gêné dans ce film c'est son manque de simplicité et de rigueur. Il y a plein de fulgurances poétiques (la scène de la Ferrari suggérée par les mouvements de caméra et le son, la scène où Djigui et Dounia tourbillonnent dans le magasin...) mais il y a aussi des maladresses et des longueurs. Un manque d'émotion aussi. Car ce que la caméra filme, c'est surtout un "ego trip", celui de Dounia qui parce qu'elle part de très bas se rêve au sommet de la puissance et de la richesse façon clip de rappeur bling-bling (son slogan préféré? "Money, money, money!"). La séquence où elle humilie sa prof de lycée pro en montant sur la table est particulièrement révélatrice de ses rêves de pouvoir et de grandeur. Des rêves qui prennent pourtant corps dans les bas-fonds du trafic de drogue et de la prostitution. Pour donner du lyrisme à sa mise en scène et rendre ce personnage moins étriqué, la réalisatrice imagine une autre porte de sortie possible pour Dounia: l'art et de façon plus générale, la spiritualité (d'où la grande musique et les chants religieux omniprésents). Seulement, cela ne marche pas vraiment. Dounia reste à la porte de ce monde comme elle reste à la porte de la mosquée ou à la surface de l'église. De plus, la réalisatrice abuse pour conforter son propos des plans de plongée et contre-plongée si bien que la danse de Djigui fait plus penser au serpent tatoué sur son dos qui rampe au sol qu'à un ballet aérien. Ce n'est pas très gracieux. Enfin si j'ai omis de parler de Maimouna c'est à dessein. En dépit du titre pluriel très trompeur, elle n'est que le faire-valoir de sa copine. C'est le personnage le plus sacrifié du film (au sens propre comme au sens figuré) et c'est bien dommage car c'est celui que je trouvais le plus intéressant. Seulement les grandes gueules ont souvent le dessus, au cinéma comme dans la vie.

Voir les commentaires

<< < 10 20 21 22 23 24 25 26 27 > >>