Overblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Articles avec #jaoui (agnes) tag

Parlez-moi de la pluie

Publié le par Rosalie210

Agnès Jaoui (2007)

Parlez-moi de la pluie

Ayant déjà écrit sur tous mes films préférés scénarisés et/ou interprétés par Jean-Pierre BACRI, je suis allée chercher dans ce qu'il restait de la filmographie de cet artiste et j'ai choisi "Parlez-moi de la pluie" (2007), réalisé par Agnès JAOUI. En dehors du "Le Goût des autres" (1999), inégal mais proposant quelques personnages et situations fortes, je ne suis pas convaincue par les films qu'elle a réalisé. "Parlez-moi de la pluie" (2007) ne fait pas exception, je le trouve académique sur la forme et faible sur le fond en ce qui concerne particulièrement l'analyse des crises de couple. Si je l'ai néanmoins revu, c'est moins pour son cadre géographique agréable (pour une fois, on sort de Paris et on s'aère un peu) que pour l'analyse ô combien juste qui est faite du racisme ordinaire. C'est même, je dois l'avouer la seule chose qui m'a marquée. Agathe et Florence Villanova (Agnès JAOUI et Pascale ARBILLOT) sont des filles de pieds-noirs rapatriés d'Algérie. Dans leurs bagages, leurs parents ont emporté leur domestique, Mimouna (Mimouna Hadji) qui perpétue un rôle devenu anachronique. Son fils, Karim (Jamel DEBBOUZE) qui tente de sortir du lumpenprolétariat en devenant cinéaste et de préserver son identité dans une société qui n'est pas faite pour lui subit la condescendance d'Agathe Villanova à qui il explique pourquoi il ne supporte pas les humiliations ordinaires que sa mère accepte sans broncher, en particulier le tutoiement. Un marqueur soulignant dans ce contexte le racisme mais aussi les inégalités sociales issues de la décolonisation. La finesse d'observation des Jabac fait ici d'autant plus mouche que tous deux sont issus de cette histoire coloniale douloureuse aux cicatrices mal refermées.

Voir les commentaires

On connaît la chanson

Publié le par Rosalie210

Alain Resnais (1997)

On connaît la chanson

"On connait la chanson" est le plus gros succès public de Alain RESNAIS en plus d'avoir raflé une pluie de récompenses. L'histoire très boulevardière est heureusement doublement transcendée, d'une part par le brillant jeu sur le contraste entre la norme sociale bourgeoise et l'intériorité et de l'autre par le dispositif ludique consistant à insérer des bribes de chansons en play-back au milieu des dialogues. Ce double effet donne de la profondeur à ce qui sinon n'aurait été qu'un médiocre vaudeville à base d'adultère et de questions de patrimoine. Mais le spectateur est intelligemment invité à participer à la pièce qui se déroule sous ses yeux. Il a souvent un coup d'avance sur les personnages tout en se joignant musicalement à eux. Le film est basé sur un festival de mensonges et de malentendus. Ainsi Camille (Agnès JAOUI) tombe amoureuse de Marc (Lambert WILSON) parce qu'elle le croit en souffrance alors qu'il a un rhume et parle au téléphone de transaction immobilière et non d'amour (ce qui définit bien le personnage). Au restaurant, une jeune femme en pleurs (Charlotte KADY, ex-présentatrice de Récré A2) envie le couple qui est derrière elle, prenant un geste de rectification d'une imperfection pour une marque de tendresse. A l'inverse, la femme du couple, Odile (Sabine AZÉMA) envie ce qu'elle croit être la conversation de deux amies alors que son couple n'a plus rien à se dire. Plus tard, elle voit son ex, Nicolas (Jean-Pierre BACRI) en compagnie d'une femme et croit à tort à son adultère alors qu'elle croise juste après son mari Claude (Pierre Arditi) embrassant une autre femme dans une voiture mais s'aveugle en pensant qu'il s'agit d'un sosie. Bref, tout le monde en dépit des apparences est un peu à côté de la plaque, aveugle, escroc, rongé
par la culpabilité, dépressif ou hypocondriaque et exprime ses états d'âme en chanson.

Alain RESNAIS est un formidable expérimentateur, il aime croiser les arts (théâtre, opérette, BD) et invite régulièrement des familles d'artistes à se joindre à sa troupe. Le couple Bacri-Jaoui alors à l'apogée de sa créativité ne se contente pas de jouer dans le film, il l'a scénarisé et le choix des chansons mixe l'époque de la jeunesse de Resnais (airs populaires des années 30-40) et celle des Jabac (tubes des années 60 à 80). Si pour le spectateur lambda d'aujourd'hui, les airs anciens à une ou deux exceptions près sont des découvertes (mais qui impriment bien car judicieusement insérés et répétés), ceux de la période la plus récente ont imprégné de façon durable la mémoire collective et font partie du patrimoine universel. Enfin comment ne pas souligner la formidable prestation de André DUSSOLLIER qui n'a pas volé son César? Il joue le rôle de l'intrus qui tente de compenser par son érudition son infériorité sociale (Quoi ma gueule? Qu'est ce qu'elle a ma gueule? Ou l'invention du tube sur le délit de faciès par Johnny HALLYDAY ^^). Bien que mentant par omission sur son métier, il est le seul personnage fondamentalement honnête de l'histoire, faisant surgir la vérité chez les autres, notamment pour la fragile Camille, une brillante intellectuelle qu'il est le seul à vraiment reconnaître*. Enfin on oubliera pas de sitôt sa délirante rêverie autour des "Vertiges de l'amour" de Alain BASHUNG.

* Parmi les running gags du film, il y a le sujet hyper-pointu de la thèse de Camille devenu culte "Les chevaliers paysans vers l'an 1000 au lac de Paladru".

Voir les commentaires

Un air de famille

Publié le par Rosalie210

Cédric Klapisch (1997)

Un air de famille

Une comédie culte qui bénéficie de trois atouts majeurs:

-La réalisation inspirée de Cédric Klapisch qui réussit à donner du relief et du rythme à une adaptation théâtrale et à faire oublier la grisaille des décors: bistrot décrépi, terrain vague, cité. A l'image de certains cuisiniers qui parviennent à concocter des recettes savoureuses avec trois fois rien, Klapisch réussit une leçon de mise en scène avec un comptoir de bar, un juke-box, une table et quatre chaises.

-La finesse d'observation et d'écriture du duo Jaoui/Bacri qui fait mouche et a donné lieu à des répliques cultes à la fois cruelles et tendres qui écornent les relations familiales. Loin d'être un refuge, la famille est montrée comme un milieu d'incommunicabilité ou tout le monde parle mais personne ne s'écoute tant chacun est enfermé dans les projections-préjugés des autres autant que dans ses propres préoccupations.

-L'interprétation si remarquable qu'on a du mal à imaginer d'autres comédiens dans la peau de ces personnages. Catherine Frot joue génialement Yoyo l'épouse soumise et pas très maligne du suffisant et égocentrique Philippe (Vladimir Yordanoff), le fils préféré de la famille qui la méprise et la houspille. De même, Jean-Pierre Bacri compose un inénarrable Henri dont le "petit gilet du vendredi" est passé à la postérité. Henri est le mal-aimé de la famille, un homme bourru et irascible enfermé en lui-même mais non dénué de bonté. Ma préférence va toutefois au duo moins connu et assez anticonformiste Betty-Denis. Betty (Agnès Jaoui) la sœur cadette est une éternelle adolescente rebelle un peu garçon manqué qui forme un couple touchant avec Denis (Jean-Pierre Darroussin) le garçon de café rêveur délicat et lettré qui apporte une grande humanité au film.

Voir les commentaires

Le Goût des autres

Publié le par Rosalie210

Agnès Jaoui (2000)

Le Goût des autres

Ces gens-là n'auraient jamais dû se rencontrer. Des barrières (des gouffres) de classes, de culture, d'opinion les séparent. Chacun vit dans son petit entre soi (et les vaches seront bien gardées): les beaufs avec les beaufs (la famille Castella), les prolos avec les prolos (Frank-Bruno-Manie), les intermittents du spectacles snobinards fauchés avec les artistes snobinards fauchés (la bande de Clara). Mais au fond chacun se sent bien seul. Castella (Jean-Pierre Bacri) déprime dans la bonbonnière de sa femme dans laquelle il ne se reconnaît pas. Manie et cie jouent les durs alors qu'ils sont tous blessés, perdus et phobiques de l'engagement. Enfin Clara (Anne Alvaro) résume sa situation par une punchline bien sentie: "tu sais ce que c'est qu'une actrice de 40 ans au chômage? Un pléonasme." Sans parler de l'horloge biologique qui tourne et pas d'enfant ni d'homme pour le faire à l'horizon. D'autant que Clara est une romantique "Je veux être un peu amoureuse, que ça veuille dire quelque chose, ça n'a rien d'extraordinaire." Car et c'est tout le génie de cette comédie de mœurs, sommet d'écriture dans la carrière du couple "Jabac" (Jaoui/Bacri), les préjugés et les sentiments sont deux choses bien différentes. Au point que les deuxièmes peuvent démonter les premiers ce que cette comédie s'emploie à faire avec jubilation et non sans cruauté au passage.

Bien sûr il faut quand même un lien pour que tous ces gens se rencontrent. L'usine de Castella est pourtant tout sauf glamour. Mais relookée par l'un des artistes qui gravitent autour de Clara (Anne Alvaro), elle présente déjà beaucoup mieux. L'artiste en question méprise soit disant ceux qui sont "bankables"... jusqu'à ce que Castella dégaine son chéquier. Et puis il y a un gros contrat à signer avec des iraniens. En attendant que l'affaire soit conclue, on colle à Castella un coach polytechnicien (Xavier de Guillebon) et un garde du corps, Frank (Gérard Lanvin) qui sympathise avec le chauffeur Bruno (Alain Chabat) lequel est un des anciens amants de passage de Manie (Agnès Jaoui) laquelle vend de l'herbe et écoute les confidences de Clara qui donne des cours d'anglais accélérés à Castella (toujours dans le but de faciliter la signature du contrat).

Mais cela ne suffit bien évidemment pas même si au fil du temps, certains malentendus seront levés. Un autre lien essentiel est celui de l'art. A priori incompatible avec Castella, son côté bling-bling, ses blagues grossières, jusqu'à ce qu'il tombe fou amoureux de Clara en train de déclamer avec feu du Bérénice sur scène (Anne Alvaro n'est pas tragédienne pour rien). Laquelle le rejette même si elle refuse de participer aux scènes de lynchage collectif (type "Le dîner de cons") avant de s'apercevoir mais un peu tard (ou pas, suspens) qu'elle est peut-être passée à côté du grand amour.

Voir les commentaires

Smoking/No Smoking

Publié le par Rosalie210

Alain Resnais (1993)

Smoking/No Smoking

Smoking et No Smoking qualifiés de "cinéma expérimental pour grand public" sont deux films complémentaires que l'on peut voir dans n'importe quel ordre. Il s'agit en effet avant tout d'un exercice de style au dispositif extrêmement ludique (on l'a comparé aux livres dont on est le héros). A partir d'un début identique, l'idée est de faire bifurquer le récit selon les décisions des personnages à tel ou tel moment clé de leur vie.

Pour éviter que le résultat ne soit confus, la construction des films est très rigoureuse avec des embranchements à des moments précis:

-Choix initial commun aux deux films: Un des personnages féminins de l'histoire est confronté à un choix. Va-t-elle ou non allumer une cigarette? (Evidemment dans le premier film elle fume, dans le second elle y renonce.)

-5 secondes plus tard: deux versions différentes de la suite de l'histoire, une dans Smoking, l'autre dans No Smoking.

-5 jours plus tard: quatre versions différentes de la suite, deux dans Smoking, deux dans No Smoking.

-5 semaines plus tard: six versions différentes de la suite, trois dans Smoking, trois dans No Smoking.

-5 années plus tard: douze versions différentes du dénouement, six dans Smoking et six dans No smoking.

Tout un dispositif accompagne cette progression arborescente, un dispositif à l'artificialité revendiquée qui convoque d'autres arts (BD, théâtre). Des vignettes dessinées par Floc'h posent le décor et le contexte puis accompagnent chaque bifurcation de destin. Les scènes sont tournées en studio alors que les décors peints représentent des extérieurs, une manière de rappeler que ce double film est l'adaptation de 6 des 8 pièces d'Alan Ayckbourn, Intimate exchanges. Enfin deux acteurs jouent tous les rôles (5 pour Sabine Azéma et 4 pour Pierre Arditi) et sont parfaitement reconnaissables sur le mode de "on joue à être."

Néanmoins et c'est tout l'intérêt de cette oeuvre, Resnais transcende ce qui n'aurait pu être que du théâtre filmé grâce aux codes du cinéma qui permettent notamment les distorsions du temps. Derrière l'exercice de style, on perçoit une réflexion profonde sur les notions de hasard et de destin ainsi que sur l'inutilité des regrets. Beaucoup de critiques ont souligné le pessimisme général des films qui semblent annihiler la notion de choix, chaque décision aboutissant à une impasse symbolisée par un final se déroulant le plus souvent dans un cimetière. On peut nuancer cette appréciation. Effectivement la plupart des décisions s'avèrent non satisfaisantes (quand elles ne sont pas purement et simplement avortées). Chaque personnage reste avec ses problèmes non résolus. Néanmoins il y aussi de belles échappées, temporaires ou définitives suggérées par la caméra ou bien incarnées par l'émancipation d'un personnage. Arditi en particulier est habité par ses rôles et n'a pas volé son César.

Voir les commentaires

<< < 1 2