Overblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Articles avec #forman (milos) tag

La Pince à ongles

Publié le par Rosalie210

Jean-Claude Carrière (1969)

La Pince à ongles

Ce court-métrage qui est de plus l'unique réalisation en solo du célébrissime scénariste et écrivain Jean-Claude CARRIÈRE est un pur régal. Il a d'ailleurs obtenu le prix spécial du jury du court-métrage à Cannes en 1969. Il bénéficie de deux autres poids lourds: Milos FORMAN l'a co-scénarisé et Michael LONSDALE y interprète le rôle principal.

Bien qu'il ne soit pas présent, j'ai ressenti sur ce court-métrage assez surréaliste la parenté avec les films de Luis BUÑUEL que Jean-Claude CARRIÈRE a scénarisés (Michael LONSDALE jouait d'ailleurs dans l'avant-dernier, "Le Fantôme de la liberté") (1974). Le principe en est très simple et pourtant fascinant par les perspectives poétiques voire philosophiques qu'il ouvre. Un homme qui s'installe avec sa femme dans une chambre d'hôtel voit peu à peu les objets qu'il a apporté disparaître comme par enchantement: sa pince à ongles, sa trousse de toilette puis la valise elle-même. C'est une belle manière d'évoquer la perte de contrôle de l'homme sur son environnement. Michael LONSDALE est hilarant de par son flegme tout britannique tout en étant visiblement de plus en plus égaré au point de finir par s'égarer lui-même. Car le scénario ne s'en tient pas là et parvient à nous faire douter du réel. Un réel qui se dérobe sous nos pas quand nous pensons le tenir au travers d'objets qui semblent avoir une vie propre dès que nous avons le dos tourné (soit exactement le postulat de "Toy Story") (1995).

Voir les commentaires

Valmont

Publié le par Rosalie210

Milos Forman (1989)

Valmont

Versatiles critiques! A sa sortie, "Valmont" s'était fait étriller par la presse au profit de la version de Stephen FREARS sortie quelques mois plus tôt. Aujourd'hui, "Valmont" est réhabilité, voire considéré comme supérieur au film de Stephen FREARS. En fait c'est assez débile de les comparer. Le film de Stephen FREARS est beaucoup plus fidèle à l'esprit du roman épistolaire de Choderlos de Laclos que celui de Milos FORMAN mais cela n'a jamais été le souci de ce dernier. Il était d'ailleurs le premier à dire qu'il ne comprenait pas le roman. Il propose donc autre chose de plus léger, plus frais, plus divertissant, plus primesautier et moins théâtral* qui paradoxalement débouche sur autant sinon plus de cynisme et de cruauté. En dépit des costumes XVIII° siècle, les acteurs se meuvent avec beaucoup de naturel. Il faut dire qu'ils sont beaucoup plus jeunes que dans la version de Frears et cela, c'est en revanche fidèle à Choderlos de Laclos et à l'époque. Une époque où les jeunes filles de la noblesse étaient sorties du couvent à peine pubères pour être mariées (vendues?) vierges à des hommes beaucoup plus âgés nantis d'une "belle situation". Voir Fairuza BALK avec ses joues poupines de gamine de 15 ans être pervertie par Mme de Merteuil (Annette BENING), se faire dépuceler et engrosser par Valmont (Colin FIRTH) puis être mariée à un homme ayant trois fois son âge et beaucoup plus grand en taille (Jeffrey JONES) distille un malaise très... moderne. Il en va un peu de même pour son soupirant, Danceny (joué par le Elliott de E.T., Henry THOMAS) qui perd lui aussi son innocence dans les bras de la Merteuil. Mme de Tourvel (Meg TILLY) apparaît également comme une victime résignée du système. A l'inverse Milos FORMAN tente de donner un sens politique au libertinage de Mme de Merteuil et de Valmont en faisant de la première une féministe et du second, un subversif qui tente de remettre en cause les conventions sociales en faisant triompher l'amour au prix de sa vie. Cet aspect n'est pas convaincant car il rentre frontalement en contradiction avec l'état d'esprit de jouisseurs sans scrupules de l'infernal duo. Et les acteurs n'ont pas vraiment le profil de révolutionnaires en puissance. Le résultat est donc très plaisant, soigné, intéressant mais un peu bancal.

* La version de Stephen FREARS est l'adaptation de la pièce de théâtre que Christopher HAMPTON avait tirée du roman d'origine.

Voir les commentaires

Hair

Publié le par Rosalie210

Milos Forman (1979)

Hair

"Hair" et son hymne "Let the Sunshine in" peut être considérée comme la première comédie musicale rock de l'histoire. Elle a été créée en 1967, en plein mouvement contestataire de la jeunesse contre la guerre du Vietnam. Une jeunesse qui rejette également les valeurs conservatrices des parents en adoptant le mode de vie hippie, son pacifisme (le flower power, l'attirance pour les religions orientales), sa liberté de mœurs (en matière sexuelle et de consommation de drogues), son rejet du productivisme, du puritanisme et de la société de consommation, son esthétique (par rejet des institutions militaires et bourgeoises corsetées, les hippies portaient des tenues décontractées et colorées, s'adonnaient au naturisme et filles comme garçons laissaient leurs cheveux pousser librement ce qui explique le titre de la comédie musicale "Hair"). "Hair" a décoiffé (et dénudé) Broadway tout comme tous les lieux par lesquels elle est passée ensuite, la troupe de comportant dans la salle comme sur scène et suscitant parfois des réactions de rejet comme à Paris en 1969 avec la tentative de l'Armée du Salut pour arrêter le spectacle.

Milos Forman conjugue donc dans son film réalisé dix ans plus tard l'esprit d'une époque avec ses thèmes de prédilection, ceux d'un cinéaste en révolte contre toutes les formes d'oppression institutionnelle. Sous sa direction, "Hair" se transforme en ballet tragi-comique autour d'une liberté ardemment recherchée mais dont l'accomplissement se paye d'un prix aussi amer que dans "Vol au-dessus d'un nid de coucou". Le système social que dépeint Milos Forman est en effet menacé par la subversion de ceux qui le défient. Dans "Hair", ils s'invitent dans la société bourgeoise pour y renverser la table et commencent à convertir à leur cause les jeunes pousses. Aussi, chez Forman, les deux camps se livrent une lutte à mort où le système ne laisse que deux possibilités à ceux qui le remettent en cause: rentrer dans le rang ou être écrasé. Berger (Treat Williams), le leader des hippies sacrifie ainsi sa vie sans le vouloir pour permettre à son ami Claude (John Savage) de recouvrer la liberté, un peu comme le faisait (symboliquement) Mc Murphy pour "Chef" dans "Vol au-dessus d'un nid de coucou". Toutes les séquences de happening filmées dans Central Park sont admirables dans leur composition, de même que celle où Berger secoue le cocotier d'un grand repas de cérémonie bourgeoise, tout comme la fin où l'hymne "Let The Sunshine in" prend une résonance poignante.

Voir les commentaires

Amadeus

Publié le par Rosalie210

Milos Forman (1984)

Amadeus

Milos Forman ne pouvait qu'être séduit par le Mozart de la pièce de Shaffer en qui il a sans doute reconnu le frère de Randle McMurphy de Vol au dessus d'un nid de coucous et du hippie de Hair. Tous trois seront rejoints par la suite par Larry Flint et Andy Kaufman de Man on the Moon. L'ADN du héros de Forman, c'est le solitaire incompris, provocateur et anticonformiste aux prises avec une société aliénante qui l'oblige à se sacrifier pour faire triompher son art ou sa cause.

Peu importe que la vie de Mozart ne soit pas retranscrite avec fidélité, ce qui compte c'est la fidélité à l'esprit. Par son iconoclasme, le film est fidèle à ce qu'a été Mozart. Comme tous les génies, il n'entrait dans aucune case et était rétif à tout ce qui pouvait brider son génie créatif. On réalise mieux en visionnant le film l'audace qu'a représenté certains de ses choix comme "L'enlèvement au sérail" ou "Les noces de Figaro". Des choix largement rejetés par la cour viennoise, snob et gangrenée par les querelles de chapelle ce qui a conduit Mozart à composer "La flûte enchantée" pour un public plus populaire.

Autre intérêt majeur du film, l'affrontement entre Mozart et Salieri, deux hommes que tout oppose. D'un côté le jouisseur dont les manières grossières et le rire tonitruant détonent avec le génie musical, de l'autre l'ascète dissimulant sa jalousie derrière ses manières policées et compensant ses frustrations par sa gloutonnerie. Entre eux, une relation complexe, faite de fascination et de répulsion. Salieri a joué le rôle du mauvais génie du compositeur qu'il a contribué à ruiner et dont il a écourté la vie. Mais en s'abaissant ainsi, il s'est aussi condamné lui-même à une interminable agonie. En homme torturé qu'il est, Salieri est capable de reconnaître le génie chez l'autre tout en étant lucide sur sa propre médiocrité. Le film suggère également avec pertinence que Salieri n'est autre que la figure du père castrateur que Mozart n'a jamais réussi à tuer comme le démontre la fin de "Don Giovanni" où le jouisseur est précipité dans les flammes de l'enfer par le Commandeur.

Enfin, une fois n'est pas coutume, je suis très attachée à la VF années 80 de ce film. Les voix de Luq Hamet (Mozart), Claude Giraud (L'empereur) et Jean Topart (Salieri) sont inoubliables.

Voir les commentaires

Larry Flynt (The People VS. Larry Flynt)

Publié le par Rosalie210

Milos Forman (1996)

Larry Flynt  (The People VS. Larry Flynt)

"On refait toujours le même film" disait Jean Renoir. C'est particulièrement frappant dans le cas de Milos Forman. Ses films sont pour la plupart centrés sur des personnages masculins de fiction (Mc Murphy, Coalhouse Walker Junior) ou ayant réellement existé (Amadeus, Larry Flynt, Andy Kaufman). Des mauvais garçons charismatiques, provocateurs, showmen (plusieurs sont artistes) luttant le plus souvent pour la liberté d'expression ou le respect de leurs droits fondamentaux contre un système tyrannique. Ces leaders quelle que soit la noblesse de leur cause sont très imbus d'eux-même, manipulateurs et parfois grossiers. Néanmoins ils finissent tous par devenir des personnages christiques en se sacrifiant pour leur cause.

Larry Flynt est emblématique de ce type de personnage et parcours. La célèbre et polémique affiche qui le montre crucifié sur un ventre féminin en string avec pour seul vêtement un drapeau américain ainsi que celle moins sulfureuse qui le montre baillonné avec ce même drapeau dit tout.

Larry est en effet au départ un type plutôt minable, tenancier d'une boîte de strip-tease qui va avoir une idée de génie: créer Hustler un magazine concurrent de Playboy sans la caution "porno chic et bon teint" de celui-ci". Ce simple magazine va déchaîner les passions et confronter Larry à l'intégrisme religieux mais aussi au déferlement de haine raciste (car son magazine abolit toutes les barrières du bon goût de l'époque, y compris celle des "races.") C'est pourquoi son avocat très BCBG (Edward Norton) le défend bec et ongles y compris contre lui-même. Il dit en substance "je n'aime pas ce que vous dites mais je me battrai pour que vous puissiez le dire." On ne peut que penser à Charlie Hebdo où le débat sur la liberté d'expression a croisé la violence et le terrorisme (Flynt a été victime d'un serial killer suprémaciste blanc et la rédaction de Charlie Hebdo de deux islamistes fanatiques).

A noter que le véritable Larry Flynt fait une apparition dans le film où il joue...le juge de Larry Flynt!

Voir les commentaires

Ragtime

Publié le par Rosalie210

Milos Forman (1981)

Ragtime

Film historique se déroulant au début du XX° siècle aux USA, Ragtime est l'un des opus les moins connus de Milos Forman. Il mérite cependant d'être (re)découvert. Bien que polyphonique, le film se concentre sur un jeune pianiste noir, Coalhouse Walker Junior. Il aspire à réussir socialement mais son destin se transforme après une agression raciste en descente aux enfers. De façon édifiante, Milos Forman montre que les dés sont pipés et que le rêve américain est fermé aux noirs. Walker est un homme méritant dont les signes extérieurs d'embourgeoisement (symbolisés par sa voiture) déclenchent la jalousie et la haine des "petits blancs" incarnés par les pompiers. A toutes ses demandes de réparation, les institutions dominées par les blancs opposent une fin de non recevoir. On lui demande de ravaler sa fierté et de se soumettre ce qu'il refuse. Ayant épuisé tous les moyens légaux, il ne lui reste plus que la violence pour se faire entendre et restaurer sa dignité bafouée.
Autour de Walker gravitent toute une série de personnages plus ou moins liés à lui. Une famille bourgeoise qui recueille sa femme et son fils et dont l'un des membres épouse sa cause au point de lui apprendre à fabriquer des explosifs et de rejoindre sa bande, grimé en noir. Une starlette prête à tout pour réussir. Un juif immigré d'Europe de l'est qui veut devenir cinéaste etc.

A noter la présence de
Samuel L. JACKSON dans un petit rôle et d'Elisabeth Mac Govern, la Cora de Downton Abbey qui avait tout juste 20 ans.

Voir les commentaires

Vol au-dessus d'un nid de coucou (One Flew Over the Cuckoo's Nest)

Publié le par Rosalie210

Milos Forman (1975)

Vol au-dessus d'un nid de coucou (One Flew Over the Cuckoo's Nest)

Hymne à la liberté et à la résistance, grand film humaniste qui n'a pas pris une seule ride en 41 ans et qui garde intacte toute sa puissance émotionnelle et son caractère de brûlot politique. Le film possède d'ailleurs plusieurs niveaux de lecture (comme souvent avec les bons films).

Sur le plan historique tout d'abord, la métaphore politique est limpide. Le film date de 1975 (guerre froide) et son réalisateur, Milos Forman a fui la Tchécoslovaquie juste après le printemps de Prague réprimé dans le sang par les soviétiques. L'hôpital psychiatrique aux allures de camp de concentration c'est la Tchécoslovaquie et Mildred Ratched l'infirmière tyrannique personnifie le pouvoir communiste. Quant à McMurphy (Jack Nicholson) c'est bien sûr Milos Forman lui-même, un résistant et un rebelle qui tente par tous les moyens de s'évader et de faire évader ses camarades soumis (le peuple tchécoslovaque), tente de leur redonner le goût de la vie et de la liberté avec à chaque escapade un retour de bâton plus terrifiant que le précédent. L'hôpital psychiatrique était d'ailleurs largement utilisé par l'URSS pour enfermer et détruire la personnalité des opposants à coup de médicaments, d'électrochocs et de lobotomies (ce qui arrive finalement à McMurphy).

Mais le film de par son caractère universel symbolise la résistance à toutes les oppressions y compris occidentales. Ainsi les malades mentaux sont en réalité plutôt des hommes en souffrance qui n'arrivent pas à se conformer aux normes sociales. Ce n'est d'ailleurs pas un hasard si Danny de Vito et Christopher Lloyd qui débutaient au cinéma ont ensuite fait des films avec Zemeckis (A la poursuite du diamant vert pour le premier, Qui veut la peau de Roger Rabbit et la trilogie Retour vers le futur pour le second). Zemeckis développe une thématique autour de la normalité et de la folie dans son oeuvre et cite directement le film de Forman au début de la mort vous va si bien. Quant au personnage de Big Chief, il incarne le sort du peuple indien tout entier, aliéné et muselé par la domination des blancs (y compris McMurphy) à laquelle il oppose une farouche résistance passive. L'évolution de McMurphy qui passe au cours du film du petit voyou égoïste au leader charismatique et manipulateur en lutte frontale avec Ratched puis à la figure christique sacrificielle altruiste permet au final un miracle, celui de libérer l'indien (en lui? Sa part la plus noble sans doute...)

Enfin l'hôpital psychiatrique incarne également l'abus parental. Mildred Ratched a tout de la mère castratrice qui abuse de son pouvoir, culpabilise et infantilise ses patients "pour leur bien" (pour reprendre l'expression d'Alice Miller.) D'ailleurs elle finit par se confondre avec la mère de l'un des patients, Billy qui interdit à son fils de devenir un homme. On peut rajouter que si sa confrontation avec McMurphy révèle de profondes similitudes entre eux (le narcissisme, la quête de pouvoir et d'attention, le rapport déréglé à la sexualité) on ne peut pas les mettre sur le même plan. Ratched joue sur les sentiments négatifs de ses patients pour mieux les contrôler alors que McMurphy joue sur leurs sentiments positifs et après avoir occupé le centre de la scène accepte au final de s'effacer du tableau (on peut y voir une attitude réflexive de l'artiste sur lui-même).

Voir les commentaires