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Articles avec #film d'histoire ou de memoire tag

Le labyrinthe du silence (Im Labyrinth des Schweigens)

Publié le par Rosalie210

Giulio Ricciarelli (2014)

Le labyrinthe du silence (Im Labyrinth des Schweigens)

En 1958, la spécificité du sort des juifs pendant la seconde guerre mondiale n'est pas reconnue et leur parole est étouffée. Le mot d'ordre général est de tourner la page et de se consacrer à l'ennemi du moment qui est communiste dans les Etats de l'ouest. En RFA, la restauration de la fierté nationale se traduit notamment par la réintégration de la plupart des anciens nazis dans la société, et une amnésie collective qui plonge la jeune génération dans l'ignorance de son passé.

Le film raconte l'histoire de l'enquête qui aboutit au procès de Francfort. Celui-ci se tint entre 1963 et 1965 et pour la première fois obligea l'Allemagne a regarder en face la réalité des crimes commis pendant la guerre. Concomitant du procès Eichmann (dont le film révèle que l'arrestation est également lié à l'enquête de Francfort), il s'est appuyé sur les témoignages des victimes dont la parole s'est enfin libérée. Il souligne aussi les limites du procès: 22 anciens SS d'Auschwitz jugés alors que le camp en a compté plus de 6000, une partie d'entre eux seulement condamnés à de lourdes peines. Quant aux plus gros poissons, ils ont bénéficié de complicités nombreuses et hauts placées qui leur ont permis d'échapper à la justice comme on peut le voir avec Mengele qui a pu revenir plusieurs fois en Allemagne sans être inquiété.

Le film traite son sujet à la manière d'un thriller sobre et efficace. Aux côtés des figures historiques que sont le procureur Fritz Bauer et le journaliste Thomas Gnielka, le scénario ajoute un héros fictif, le jeune procureur Johann Radmann (dans la réalité ils étaient trois). Hélas, le parcours du personnage est écrit de façon bien maladroite. On passe très (trop) vite du jeune homme ambitieux propre sur lui qui demande naïvement: "Auschwitz? C'est quoi? Un camp de détention préventive?" à l'alcoolique hanté aux yeux cernés sur le point de tout plaquer: " QUOI? Papa aussi! Tous pourris, tous nazis, vous me dégoûtez tous." Sans même parler de sa petite amie qui joue les potiches.

Malgré ce manque de subtilité dans l'écriture de ses personnages fictifs ce film s'avère être une oeuvre salutaire pour le devoir de mémoire.

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1941

Publié le par Rosalie210

Steven Spielberg (1979)

1941

1941 est le quatrième film de Spielberg et l'un des premiers scénarios du tandem Zemeckis-Gale adapté au cinéma. Ceux-ci venaient en effet tout juste de quitter l'université. Film maudit devenu culte avec le temps, 1941 est une comédie burlesque anarchisante qui comme les premiers films des Marx Brothers met en pièce le décor et tourne en dérision l'armée et la famille (au grand dam de John WAYNE qui traitera le film "d'anti-patriotique"). 1941 fait ressortir les thèmes et motifs favoris du duo de scénaristes qui sont alors dans la provocation: antimilitarisme, goût pour la subversion, attirance pour les personnages complètement cinglés, allusions sexuelles permanentes (mention spéciale à l'actrice des "Dents de la mer" embrochée non cette fois par un requin mais par un périscope sans parler de la nymphomane obsédée par l'idée de s'envoyer en l'air à bord d'un B-17). L'intérêt de Zemeckis pour l'histoire apparaît également car le film est vaguement inspiré de faits réels. C'est assez jubilatoire de voir le d'ordinaire si sérieux Spielberg s'adonner à cette nuit de folie joyeuse et libre. Bon d'accord, 2h30 d'hystérie en roue libre (sans jeu de mots puisque la grande roue quitte réellement son axe dans le film!) c'est too much mais on ne peut pas avoir le beurre et l'argent du beurre!

A noter que comme Comme Zemeckis et Gale, Spielberg est un inconditionnel du Docteur Folamour. C'est pourquoi il a embauché Slim Pickens (le mythique major Kong du film de Kubrick) pour lui faire rejouer dans 1941 certaines scènes cultes aux côtés d'une brochette d'acteurs hauts en couleurs dont le regretté John Belushi (en frappadingue capitaine Kelso). La musique parodique de John Williams est un régal.

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Lincoln

Publié le par Rosalie210

Steven Spielberg (2012)

Lincoln

En dépit de son titre, le film de Spielberg est moins un biopic sur Lincoln qu’un film sur l’histoire du vote du 13eme amendement qui entraîna l’abolition de l’esclavage aux USA. Ce choix reflète la question très actuelle de l’intégration des minorités. Ainsi le scénariste du film n’est autre que Tony Kuschner, l’auteur marxiste, gay et juif d’Angels in America. N’oublions pas également que Spielberg s’était déjà intéressé à l’esclavage dans un précédent film, Amistad.
Lincoln remarquablement interprété par Daniel Day Lewis nous est dépeint comme un Républicain modéré friant de récits, boutades et métaphores qui navigue entre realpolitik, grands principes et sens de l’histoire. Son objectif est de parvenir à faire voter l’amendement avant la fin de la guerre qui en réintégrant les Etats du sud rendrait ce vote impossible. Sa fermeté inébranlable vis-à-vis de cet objectif s’explique avant tout par le fait qu’il est persuadé que c’est l’intérêt profond du pays (pour son rayonnement dans le monde, son économie, sa cohésion et sa cohérence, y compris vis-à-vis de ses valeurs fondatrices). De plus seul ce vote peut donner un sens à la mort des soldats de l’union (la guerre de Secession a été la plus meurtrière qu’ait connue les USA loin devant les deux guerres mondiales). Pour cela, il n’hésite pas à s’arranger avec la vérité en retardant les négociations de paix avec le Sud. De même la tambouille politicienne à base de corruption pour arracher des votes cruciaux constitue une part essentielle du film. Le Républicain radical Stevens joué par Tommy Lee Jones finit par suivre la même voie pragmatique que celle de Lincoln en mettant en sourdine les véritables motifs de son combat abolitionniste (l’égalité raciale liée à sa situation personnelle) au profit d’un discours plus consensuel (l’égalité devant la loi). Ce qui n’empêche pas le vote à la chambre des représentants d’être un grand moment épique car l’adoption de l’amendement dépend d’un certain nombre d’indécis qui jusqu’au bout font planer le suspens.

Spielberg a donc réalisé un film à la fois didactique et prenant qui fait réfléchir à ce qu’est un homme d’Etat placé dans une situation exceptionnelle tout en nous faisant comprendre certains des rouages de la vie politique américaine. En revanche les passages sur la vie privée du président sont plus convenus. L’épouse névrosée nous apparaît surtout opaque et le fils qui cherche à sortir de l’ombre de son père en se couvrant de gloire patriotique fait furieusement penser à la Guerre des mondes…

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La révolution française: les années terribles

Publié le par Rosalie210

Robert Enrico (1989)

La révolution française: les années terribles

La deuxième partie de la grande fresque du bicentenaire, beaucoup plus sombre que la première bénéficie d'un changement de réalisateur appréciable. Richard T Heffron est plus inspiré que Robert Enrico dans sa mise en scène, plus affranchie, plus lyrique, plus fluide, plus subtile, plus nerveuse. Il bénéficie également d'un matériau plus riche, digne d'une tragédie de Shakespeare. La guillotine, de plus en plus ensanglantée au fil du temps devient le centre de gravité d'une longue marche funèbre où les maîtres/bourreaux d'un jour deviennent les victimes du lendemain, où les anciens frères d'armes se trahissent et s'entre tuent dans leur lutte fratricide pour le pouvoir. D'autre part la surenchère de Marat qui réclame "10 mille têtes" à la fin du premier film et "100 mille têtes" au début du deuxième montre que l'on est passé à l'ère du crime de masse.

Le film n'est pas objectif pour autant. La famille royale est victimisée à l'excès ce qui n'empêche pas Jean-François Balmer de briller une nouvelle fois en Louis XVI notamment dans la scène émouvante où il écoute accablé les membres de l'assemblée voter un par un son arrêt de mort. De même Danton (formidable Klaus Maria Brandauer ultra charismatique) et Desmoulins (François Cluzet très convaincant) sont présentés sous un jour si favorable que l'on en oublierait presque qu'ils ne sont pas des agneaux innocents conduits à l'abattoir mais des politiques qui paient "cash" leur engagement en eaux troubles. La folie de Robespierre est en revanche soulignée et même si le film ne montre pas toute l'étendue de ses crimes, le film analyse avec justesse la psychologie d'un dictateur génocidaire obsédé par la vertu et la pureté qui détruit tout autour de lui tout en se détruisant. Comme Hitler, on est en effet frappé par la dégradation physique du personnage au fur et à mesure qu'il s'approche de sa mort. Andrzej Seweryn est immense dans le rôle.

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La révolution française: les années lumière

Publié le par Rosalie210

Robert Enrico (1989)

La révolution française: les années lumière

Le film est une reconstitution historique fastueuse mais assez académique enchaînant avec un bonheur inégal les scènes de bravoure. Si la prise de la Bastille est habilement menée avec un contraste entre l'atmosphère feutrée de la salle à manger du gouverneur et l'effervescence au-dehors, beaucoup d'autres sont traitées comme de simples tableaux figés (par exemple les Etats Généraux, le serment du Jeu de Paume ou encore la fête de la Fédération).

Le point fort du film vient du casting 3 étoiles excellemment dirigé. Les acteurs sont tous formidables, donnant vie et caractère à leurs personnages. Mention spéciale à Jean-François Balmer, génial en Louis XVI pusillanime et dépassé par les événements,
Jane SEYMOUR, belle et retorse à souhait dans le rôle de la reine, Andrzej Seweryn plus que parfait en Robespierre, Peter Ustinov savoureux en Mirabeau, Klaus Maria Brandauer composant un Danton particulièrement roublard ou François Cluzet campant un Desmoulins fougueux et irrésistible. Les seconds rôles ne sont pas en reste et on se souviendra longtemps de Dominique PINON en Drouet démasquant Louis XVI d'un "Bonsoir...Sire" ou des regards consternés de Raymond Gérôme en Necker à chaque fois que le roi s'enferme dans le refus des réformes.

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Intolérance (Intolerance : Love's Struggle Throughout the Ages)

Publié le par Rosalie210

D.W. Griffith (1916)

Intolérance (Intolerance : Love's Struggle Throughout the Ages)

D.W Griffith en quête de rédemption après Naissance d'une nation choisit de réaliser dès l'année suivante une superproduction encore plus pharaonique et ambitieuse avec quatre récits d'époques différentes s'entrecroisant autour du thème de l'intolérance combattue par l'amour. Bien que reliés par un leitmotiv, celui de la mère (Lilian Gish) au chevet du berceau de l'humanité, les quatre récits forment un ensemble assez disparate.

Les trois récits historiques (Chute de Babylone, trahison et crucifixion de Jésus et la Saint Barthélémy) traitent tous trois d'intolérance religieuse mais la primauté est donnée au premier récit en raison de son aspect spectaculaire. La reconstitution de la cour du palais du roi de Babylone avec ses 3000 figurants est grandiose. D'autre part aussi bien dans ce récit que dans celui de la Saint-Barthélémy, Griffith mêle la grande et la petite histoire de façon à accrocher l'intérêt du spectateur. La fille des Montagnes, un garçon manqué amoureuse du roi de Babylone qui l'a affranchie sert de fil conducteur au récit. Pour le 16° siècle c'est une fille protestante aux yeux bruns fiancée à un catholique qui a cette fonction. Les extraits des Evangiles en revanche servent juste à souligner tel ou tel aspect des autres récits.

Le quatrième récit, contemporain du film est très différent. Il n'évoque pas l'intolérance religieuse mais la lutte des classes (c'est à dire l'intolérance sociale). Il critique de façon virulente la morale bourgeoise et dénonce l'utilisation de la charité. Il montre que l'argent des bonnes oeuvres est pris sur les salaires des ouvriers, que les grèves sont réprimées dans le sang, que les chômeurs réduits à la misère des bas-fonds sont traités en criminels et que leur réinsertion est impossible. Là encore, Griffith illustre son propos en prenant un couple en exemple. L'homme qui a déjà purgé une peine de prison est condamné à mort pour un meurtre qu'il n'a pas commis, la femme est contrainte de confier son enfant aux dames des "bonnes oeuvres" qui jugent qu'elle n'est pas capable de l'élever. C'est le seul des quatre récits où l'amour triomphe de l'intolérance annonçant la fin et son message pacifiste alors que l'Europe était plongée en pleine guerre mondiale.

On retrouve toutes les qualités de ce réalisateur, par exemple l'utilisation brillante du montage alterné pour faire monter le suspens, particulièrement à la fin, du gros plan pour souligner l'expressivité ou un leitmotiv (les yeux bruns) ou encore une utilisation magistrale de l'espace, des décors, des figurants et des acteurs.

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Lady Oscar

Publié le par Rosalie210

Jacques Demy (1978)

Lady Oscar

Comment expliquer le naufrage de ce film en bonne place sur le site Nanarland (tout comme Parking) alors qu'il avait tant d'atouts au départ? Trop d'écueils se sont dressés sur le chemin de Jacques Demy sans doute et trop de paramètres non maîtrisés.

- La barrière de la langue et de la culture japonaise tout d'abord. En 1978 qui connaît les mangas en France alors que les animés commencent tout juste à remplir les grilles des programmes jeunesse d'Antenne 2? Celui de Lady Oscar n'existe d'ailleurs pas encore puisqu'il sera diffusé au Japon l'année suivante et en France à partir de 1986 avec le succès que l'on sait. La grandeur tragique et le souffle épique du manga de Riyoko Ikeda ainsi que la touche shojo si particulière (ce mélange unique et délicieux d'androgynie, de kitsch et de raffinement) disparaissent complètement. On retrouve certes chez Demy le même raffinement, la même élégance (dans l'harmonie des couleurs ou les mouvements de caméra tourbillonants par exemple) mais il vide le scénario de tout élément dramatique pour le tirer du côté du divertissement à la française du style "les mariés de l'an II." La figure transgenre d'Oscar devient ainsi un simple effet de mode, exactement comme pour Marco enceint dans L'Evénement le plus important depuis que l'homme a marché sur la lune. Mal à l'aise avec un thème qui le touche manifestement de trop près, Demy désamorce ce qu'il peut avoir d'explosif. Or la transgression subversive est au coeur de l'histoire et donne un relief extraordinaire à la Révolution dans le manga et l'anime qui est aussi l'histoire d'une émancipation. Rien de tel ici.

-Les choix scénaristiques réduisent les personnages et situations à des caricatures. Oscar devient une potiche (le plus beau poireau de France en fait...), Marie-Antoinette, une idiote écervelée qui bécote Fersen sous les fenêtres de Louis XVI, Rosalie une fille facile, Girodet un gros pervers (fous rires garantis dans la salle).

- Le choix des décors et des acteurs. Tourner à Versailles en décors naturels était en soi une idée séduisante. Mais Demy l'a fait pour des raisons de contraintes budgétaires et a bien du mal à habiter ces vastes espaces auxquels il n'a pas le droit de toucher. De même il doit renoncer à Dominique SANDA qui aurait été parfaite pour le rôle d'Oscar parce qu'elle est trop chère. Il choisit une danseuse anglaise inconnue Catriona Mc Coll parce qu'elle est blonde, sait faire de l'escrime et monter à cheval. Problème: elle ne dégage aucun trouble d'aucune sorte et son jeu est disons...limité. Le reste de la distribution est à l'avenant. Conséquence de ce manque de moyens et d'une direction d'acteurs approximative: de nombreuses scènes deviennent ridicules comme la prise de la Bastille, les Etats Généraux ou les mouvements théatraux de Catriona Mc Coll et des autres (fous rires garantis dans la salle bis repetita). Quant à la fin qui s'inspire clairement de celle des Enfants du Paradis elle achève de dénaturer les personnages, privés de rôle actif dans les événements et au final séparés alors que dans la mémoire japonaise ils sont indissociables. Franchement quel sens aurait Roméo et Juliette si Juliette lui avait survécu?

Le film a été un nouvel échec cuisant pour Demy. Il n'a évidemment pas marché au Japon puisqu'il dénaturait trop l'oeuvre d'origine. En France il n'a tout simplement pas été distribué. Il a fallu attendre 1997 pour qu'il sorte enfin en salles. Cependant tout n'aura pas été négatif. Un lien est né entre deux mondes bien différents exactement comme avec Harrison Ford et Model Shop. Lorsque Riyoko Ikeda s'est reconvertie en chanteuse lyrique, elle a donné un récital des airs chantés par Marie-Antoinette dans son petit théâtre à Versailles et Agnès Varda est venue l'écouter.

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Une journée particulière (Una giornata particolare)

Publié le par Rosalie210

Ettore Scola (1977)

Une journée particulière (Una giornata particolare)

Le plus grand film d'Ettore Scola, un cinéaste plus intimiste et "modeste" en apparence qu'un Fellini, un Pasolini un Visconti ou un Antonioni mais non moins talentueux.

Une journée particulière est un film historique, un film humaniste et une leçon de mise en scène.
Après une séquence d'archives qui pose le contexte historique du film à savoir la visite d'Hitler à Mussolini le 8 mai 1938 qui donne lieu à une grande cérémonie festive, la fiction démarre dans un immeuble de cette époque. Tout évoque l'oppression: les couleurs délavées, l'agencement de l'immeuble, conçu pour permettre aux gens de s'espionner, la concierge véritable relais du régime qui pavoise les façades, surveille les allées et venues et tente de s'ingérer dans la vie des appartements . La caméra passe d'ailleurs de fenêtre en fenêtre comme l'oeil de Big Brother avant de se rapprocher de l'une d'entre elle et d'y entrer.

On découvre alors le quotidien d'Antonietta, une mère de famille d'une quarantaine d'années. Une mère écrasée de tâches ménagères, première levée et dernière couchée, méprisée par son mari et accablée par sa nombreuse progéniture que la caméra nous fait découvrir de façon virtuose. Cette mère de famille inculte et trop pauvre pour avoir une bonne est exclue de la fête fasciste mais elle ne s'en rend pas compte. Au contraire elle voue un culte au Duce qui compense l'insatisfaction de sa vie conjugale. Son aliénation est totale.

C'est alors que l'impossible se produit. Restée seule (croit-elle) dans l'immeuble déserté, elle rencontre grâce à l'évasion de son mainate (tout un symbole) un autre exclu de la fête fasciste, Gabriele, un intellectuel homosexuel sur le point d'être déporté au confino. Tout oppose ces deux êtres sauf l'essentiel, leur dignité bafouée, leurs désirs et aspirations déniées, et leur immense solitude. Leur union par delà toutes les barrières qui les séparent (politiques, culturelles, sociales, sexuelles) devient un acte de résistance face au fascisme omniprésent en hors-champ par le biais de la retransmission radio, véritable viol de l'espace intime.

Bien que le film s'inscrive dans une réalité historique bien définie, son message est aussi contemporain. Scola lutte contre l'esprit de système, la délimitation de chacun dans des cases. Il délivre ses acteurs de l'image qui les enferme et leur donne la liberté d'être autre. Sophia LOREN, actrice glamour devient une ménagère terne et fatiguée aux chaussons troués. Marcello Mastroianni passe de latin lover (une étiquette qu'il ne supportait pas d'ailleurs) à homosexuel.

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Le Pianiste (The Pianist)

Publié le par Rosalie210

Roman Polanski (2002)

Le Pianiste (The Pianist)

Si la liste de Schindler est le grand film de la réconciliation entre juifs et allemands Le pianiste est celui de la réconciliation entre polonais catholiques et juifs. Le film est l'adaptation du roman autobiographique de Władysław Szpilman un pianiste célèbre en Pologne rescapé du ghetto de Varsovie. Ecrit en 1946, son roman fut censuré par les autorités pro-soviétiques durant un demi-siècle. Il contient également de nombreux éléments autobiographiques de l'enfance de Roman Polanski lui-même rescapé du ghetto de Cracovie. Polanski avait d'ailleurs été pressenti pour la Liste de Schindler mais il avait refusé car le film était trop proche de son vécu.

Le pianiste est bien plus qu'une remarquable reconstitution historique. C'est un film vivant, sensible qui nous fait ressentir de l'intérieur ce qu'a été la Shoah. Les conditions inhumaines de la vie dans le ghetto, l'impression de piège se refermant sur ses victimes, la brutalité sans nom des allemands et le vide abyssal laissé par la déportation à l'aide de plans montrant des rues et des places jonchées d'objets laissés à l'abandon.

Il donne également des clés pour comprendre l'oeuvre de Polanski, son goût pour le huis-clos par exemple. Szpilman passe en effet l'essentiel de la guerre enfermé: dans le ghetto de Varsovie tout d'abord puis dans les différents appartements où ses amis polonais le cachent puis dans un grenier où il reçoit l'aide d'un officier allemand repenti, Wilm Hosenfeld. A cette sensation physique de claustrophobie se rajoute la déshumanisation progressive de l'individu, privé peu à peu de tous ses proches puis de tout contact humain. La folie guette comme dans d'autres oeuvres du cinéaste mais Szpilman garde une raison de vivre: son art.

Szpilman et Polanski sont des survivants et des artistes. Et ce dernier montre durant tout le film à quel point l'art permet de survivre dans les conditions les plus inhumaines. Même privé de son piano et réduit à l'état de loque humaine, errant dans les ruines de Varsovie à la recherche de nourriture, Szpilman continue à entendre la musique dans sa tête et à jouer avec ses mains sur un clavier imaginaire. Aussi animalisé qu'il soit, il reste supérieur à ses bourreaux qui ont jeté aux orties tout ce qu'ils avaient d'humains et de civilisé. Pour le plus grand malheur de l'Europe qui depuis à bien du mal à s'en remettre...

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Shoah

Publié le par Rosalie210

Claude Lanzmann (1985)

Shoah

Shoah est un film écrasant dans l'histoire de la représentation de la Shoah au cinéma. Claude Lanzmann très (trop) conscient d'avoir réalisé un film monument de 9h30 qui allait faire date eut d'ailleurs la prétention de vouloir normer les films sur le sujet selon ses propres canons. C'est pourquoi il s'en pris violemment à la liste de Schindler par exemple. Or dans les formations sur le cinéma de la Shoah, les deux films cohabitent sans problème, preuve qu'il n'y a pas qu'une seule voie possible.

Shoah est un documentaire qui repose sur un certain nombre de principes. Il refuse la reconstitution pour se concentrer sur le témoignage dont la puissance avait été révélée au grand public lors du procès d'Eichmann en 1961. Témoignage des victimes, des témoins et des bourreaux qui parlent dans une multitude de langues ce qui fait dire à Raoul Hilberg qu'il s'agit d'un film mosaïque. Lanzmann fait le choix de la lenteur pour leur laisser le temps de s'exprimer et pour que les spectateurs puissent s' imprégner de ce qui est dit. Les témoignages s'accompagnent d'images des lieux du crime, lieux qui frappent par l'absence de traces visibles des événements racontés. Les nazis ont en effet tenté d'effacer leurs crimes, rasant les camps jusqu'aux fondations, brûlant les corps et replantant des arbres. A Auschwitz où ils n'ont pas eu le temps d'aller aussi loin, ils ont dynamité les chambres à gaz et Lanzmann en filme les ruines. Lanzmann filme également avec insistance les lieux de la vie juive d'avant guerre, les synagogues transformées en dépôt de bois, les maisons récupérées par les polonais. Il filme le vide, l'absence, les traces ou l'absence de traces dans un silence lourd de sens.

A noter qu'en dépit de son titre Shoah n'évoque pas toute la Shoah mais se concentre sur l'un de ses épicentres: la Pologne. De ce fait il parle surtout des chambres à gaz dont on sait aujourd'hui qu'elles n'ont pas été le seul moyen de pratiquer des massacres massifs (les fusillades et les mauvais traitements ont été également pratiqués à grande échelle.)

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