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Articles avec #drame tag

Flo

Publié le par Rosalie210

Géraldine Danon (2023)

Flo

Un portrait de femme combattif et libre, vraiment? Au vu de l'affiche, j'espérais une sorte d'épopée montrant les démêlés de la navigatrice Florence Arthaud (dont le film propose une biographie romancée) avec le monde de la mer et des marins et je trouve qu'on en voit bien trop peu. Il y a d'ailleurs des questions que je me suis posé et auxquelles le film n'apporte aucune réponse comme de savoir par exemple comment elle a acquis et amélioré son savoir et sa technique, comment elle a obtenu son premier bateau pour faire la route du Rhum etc. Au lieu de quoi, le film raconte de façon ultra répétitive des anecdotes sur ses frasques diverses et variées (alcool, fête, accidents, aventures) qui ne lui donnent aucune envergure. Alors qu'il y avait de quoi faire un portrait puissant à la "All is lost" (2013) d'une "dompteuse d'océans" ou bien un roman d'apprentissage au féminin, le scénario est d'une désespérante platitude. Visiblement, la peur de perdre le grand public avec un développement trop pointu du monde des marins conduit à la superficialité malgré quelques beaux passages (la route qu'elle a gagné et la fin). L'actrice principale (Stephane CAILLARD) est bluffante dans le rôle et il y a de belles images mais ce que le public risque de retenir, c'est moins ses exploits que sa liaison animale avec un Olivier de Kersauson "plus macho tu meurs". Pfff...

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Les Dents de la mer (Jaws)

Publié le par Rosalie210

Steven Spielberg (1975)

Les Dents de la mer (Jaws)

Il y a des films que l'on croit avoir vu parce qu'ils sont tellement cultes qu'ils sont cités, repris, déclinés partout et tout le temps (dernier exemple en date de "sharksploitation", "En eaux (tres) troubles" (2023) avec Jason STATHAM). L'avantage est qu'ils entretiennent la flamme, l'inconvénient est qu'ils finissent par brouiller le souvenir du film original, quand ils ne se substituent pas à lui. Steven SPIELBERG s'est lui-même autocité cinq ans après la sortie de "Les Dents de la mer" en reprenant sa scène d'ouverture pour "1941" (1979) actant le succès de son troisième film, tourné pour neuf millions de dollars mais qui en a rapporté cinq cent millions.

Car par bien des aspects, "Les Dents de la mer" se situe à la croisée des chemins: film de genre et film d'auteur, film de série B hérité de Roger CORMAN et acte de naissance du blockbuster, film du nouvel Hollywood et suite logique des "Universal Monsters" (à qui Robert ZEMECKIS prédit un bel avenir dans "Retour vers le futur II" (1989) et son "Jaws 19"!) "Les Dents de la mer" c'est tout cela à la fois. Cela donne un film très riche dont l'intelligence de la mise en scène saute aux yeux à chaque instant et se substitue aux effets spéciaux défaillants. Les requins mécaniques n'étant pas optimaux, ils apparaissent le moins possible et sont remplacés par la caméra qui adopte leur point de vue, la musique mythique de John WILLIAMS qui fait monter la tension quand il le faut ou bien des métonymies visuelles à commencer par le titre du film!

Mais ce qui fait de "Les Dents de la mer" un chef-d'oeuvre et pas simplement le résultat d'un habile savoir-faire est que son histoire possède plusieurs niveaux de lecture. L'affiche le montre d'ailleurs avec sa nageuse en surface et sous les eaux son énorme requin. Là, on n'est plus dans la métonymie mais dans la métaphore. Le personnage principal Brody (Roy SCHEIDER) traîne un passé traumatique avec l'eau qu'il ne peut exorciser qu'en affrontant le monstre des mers en "Duel" (1971) ^^ comme le capitaine Achab face à Moby Dick. Son comparse dur à cuire et fonceur, Quint (Robert SHAW) est un rescapé de la seconde guerre mondiale sur qui plane l'ombre de la bombe nucléaire d'Hiroshima. Hooper enfin (Richard DREYFUSS) est le scientifique rationnel qui s'avère néanmoins impuissant à dompter la bête. Laquelle à force d'abstraction finit par incarner toutes les angoisses humaines. Dans sa première partie, "Les Dents de la mer" contient une satire toujours actuelle du tourisme balnéaire de masse où les baigneurs oscillent entre déni et psychose alors que le maire pense surtout à sauver la saison estivale quitte à dénicher des "faits alternatifs" pour expliquer les "accidents" qui se produisent. Bien plus que le requin qui obéit à ses instincts naturels, le semeur de mort, c'est lui et ses semblables que l'on a pu voir à l'oeuvre lors de catastrophes bien réelles comme la tempête Xynthia il y a treize ans.

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Variétés (Varieté)

Publié le par Rosalie210

Ewald André Dupont (1925)

Variétés (Varieté)

En regardant "Variétés", le premier film où je vois Emil JANNINGS sans favoris, ni moustache, ni maquillage outrancier, ni perruque, je lui ai trouvé des airs de Jean GABIN. Et ce sans savoir qu'un remake avait été tourné dix ans plus tard, en 1935 avec Jean GABIN justement! Il faut dire que l'intrigue ressemble à ce que l'acteur français tournait à l'époque, des histoires d'adultère et de vengeance. Mais le film muet de Ewald Andre DUPONT récemment restauré retranscrit avec force l'ébullition du Berlin de la République de Weimar. La mise en scène est brillante, faisant passer l'essentiel par l'image, parfois jusqu'à l'abstraction. Néanmoins, lorsqu'elle n'illustre pas l'intériorité de son héros tourmenté, celle-ci est réaliste contrairement aux films allemands les plus connus de cette époque qui étaient expressionnistes. C'est sans doute aussi ce "naturalisme" qui m'a fait penser à Gabin en regardant Emil JANNINGS jouer sans masque. L'histoire se déroule dans le monde du spectacle comme de nombreux films muets -un héritage du cinéma premier qui se jouait dans les foires- et fait penser sur le plan de l'intrigue un peu à "L'Aurore" (1926). Un ancien trapéziste devenu bateleur de foire s'ennuie dans sa vie plan-plan avec sa femme et son bébé. l'occasion lui est donnée de retrouver le frisson du risque avec une jeune danseuse naufragée qu'il recueille avant de s'enfuir avec elle et qui s'avère aussi excellente trapéziste. Mais celle-ci est convoitée par leur partenaire commun, un artiste de music-hall qui va faire d'eux des professionnels reconnus mais va aussi précipiter le drame. La scène où Emil JANNINGS le fixe longuement sans dire un mot met les chocottes, l'acteur savait mettre une intensité dans son regard impressionnante, proche de la folie. Sa partenaire, Lya De PUTTI est également impressionnante dans sa chute finale, réalisée sans trucages. Une oeuvre importante à découvrir pour avoir une autre vision du cinéma allemand de cette période.

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L'Echine du diable (El Espinazo del diablo)

Publié le par Rosalie210

Guillermo del Toro (2001)

L'Echine du diable (El Espinazo del diablo)

J'avais lu que pour "Le Labyrinthe de Pan" (2006), Guillermo DEL TORO s'était inspiré de "L'Esprit de la ruche" (1973). Mais cette influence comme celle de "La Nuit du chasseur" (1955) est tout aussi évidente dans "L'échine du diable", son troisième film réalisé cinq ans auparavant. Du film de Victor ERICE comme de celui de Charles LAUGHTON émerge le thème de l'enfance face au mal, lequel prend une double forme. Celui de la guerre d'Espagne avec l'image de l'obus fichée en plein coeur de la cour de l'orphelinat où est emmené Carlos. Mais aussi celui du monstre phallique séducteur, cupide et sanguinaire qui terrorise les enfants avant de révéler l'étendue de sa folie meurtrière et de tout détruire autour de lui. S'y ajoute une atmosphère oppressante lié au fait que le film se déroule dans le huis-clos d'un orphelinat qui en dépit des propos rassurants de sa directrice Carmen (Marisa PAREDES) ressemble à une prison d'où il s'avère impossible de s'échapper. La porte ouvre sur une route hostile et déserte sur des dizaines de kilomètres, le ciel est envahi d'avions fascistes et nazis et le sous-sol semble contenir des fantômes. Un plus précisément, celui d'un petit garçon qui détient un sombre secret et semble résider au fond d'un bassin (des images qui préfigurent "La Forme de l'eau") (2017). S'y on ajoute les foetus qui baignent dans l'alcool, l'atmosphère est plus qu'anxiogène. Néanmoins ce n'est pas d'elle que vient la menace mais bien du réel. Aussi comme dans ses autres films, face à la violence du monde qu'ils se prennent de plein fouet, les enfants apprennent à apprivoiser leurs peurs et à s'entraider. Ainsi Carlos qui est au départ un peu le souffre-douleur va par son courage, sa générosité et sa curiosité d'esprit finir par fédérer les autres membres du groupe autour de lui contre la véritable source de leurs tourments. Par ailleurs si les adultes bienveillants sont défaillants (Carmen souffre d'une infirmité, Casarès est impuissant et Conchita comme Carmen se sont laissé abuser par Jacinto qui possède tous les traits des terrifiants mâles alpha développés dans les films ultérieurs de Guillermo DEL TORO), ils ne sont pas tout à fait absents. Les lingots cachés par Carmen s'avèreront être des alliés inattendus. De même, l'esprit de Casarès veille sur les enfants survivants.

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El Perdido (The Last Sunset)

Publié le par Rosalie210

Robert Aldrich (1961)

El Perdido (The Last Sunset)

"El Perdido" est un western atypique, y compris dans la carrière de Robert ALDRICH. Scénarisé par Dalton TRUMBO et co-produit par Kirk DOUGLAS qui tient l'un des rôles principaux, le film a les apparences d'un western classique avec des thèmes archi-rebattus comme celui du convoyage de troupeau, du duel ou de la chasse à l'homme. Cependant, il s'en écarte en prenant l'allure d'une tragédie antique doublée d'un mélodrame flamboyant à la Douglas SIRK. Le fatum poursuit O'Malley (Kirk DOUGLAS), "lonesome cowboy" perdu dans le désert dont les efforts pour effacer ses erreurs passées et repartir à zéro se heurtent à une impasse existentielle nourrie de son incapacité à se connaître lui-même et donc à changer. La scène avec le chien en dit long sur le fait que son instinct meurtrier reste indompté et le rejet de Belle (Dorothy MALONE) son ancien amour qu'il a délaissé mais qu'il souhaite récupérer comme si elle n'avait pas évolué et comme si elle lui appartenait est sans appel. Quant à son transfert amoureux sur la fille de Belle, Missy (Carol LYNLEY) qu'il voit comme un nouveau départ, il ne fait que précipiter la tragédie. Le fatum pèse aussi de tout son poids sur le mari alcoolique et pathétique de Belle, John (joué par un étonnant Joseph COTTEN à contre-emploi) qui espère lui aussi échapper à son passé en refaisant sa vie en Californie. Quant au "troisième homme", le shérif qui attend son heure pour coffrer O'Malley et représente donc pour lui une épée de Damoclès, il est interprété par Rock HUDSON qui n'est pas pour rien dans l'ambiance "sirkienne" du film. Plus mature et plus lisse que les deux autres hommes, il a lui aussi un passé que l'on pourrait qualifier de "traumatique" et qui ne peut s'effacer que par le sacrifice de O'Malley. On le voit dans cette description, les personnages masculins du film sont moins des héros que des anti-héros et les seconds couteaux sont soit des mexicains qui servent de choeur, soit de sombres crapules qui se font impitoyablement corriger (dont Jack ELAM, future inoubliable trogne de l'ouverture de "Il était une fois dans l'Ouest") (1968). Par conséquent les femmes occupent une place plus importante que d'ordinaire dans les westerns et j'aime beaucoup la scène de la tempête de poussière qui symbolise le brouillage des repères. Le personnage de Belle est particulièrement fouillé et moderne, incarnant une force et une lucidité qui fait défaut à la plupart des personnages masculins. Dans la scène de la tempête où une brute tente de lui prendre les rênes et de l'abuser, elle s'en défait seule. Sa fille Missy est une adolescente qui s'éveille à la féminité et à l'amour ce qu'incarne la superbe scène de la robe jaune, véritable soleil (éphémère) dans la nuit.

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Le procès Goldman

Publié le par Rosalie210

Cédric Kahn (2023)

Le procès Goldman

Le dernier film de Cedric KAHN est d'une puissance peu commune. La bande-annonce le laissait deviner. Le film le confirme. Presque entièrement réalisé dans le huis-clos d'un tribunal aux dimensions d'une scène de théâtre, il ne met pas seulement aux prises un homme brûlant (le mot est faible) d'en découdre avec la justice, la police et la société française mais il montre les fractures résidant au sein de cette même société d'une manière saisissante, nous renvoyant en miroir notre situation actuelle. Le public dans la salle ne s'y est pas trompé, interagissant avec celui du film comme s'il était dans la salle et comme si le procès avait lieu ici et maintenant, notamment lorsque les témoins soi-disant sûrs d'eux se trahissent sous l'effet de la peur ou de la colère.

Au coeur du procès, un homme donc, Pierre Goldman dont je ne savais rien avant de voir le film (même pas qu'il était le demi-frère de Jean-Jacques, incarné par un jeune acteur anonyme assis avec ses parents dans la salle), interprété avec une force de conviction impressionnante par Arieh WORTHALTER. C'est bien simple, chaque mot, chaque phrase sortie de sa bouche semble provenir du plus profond de son être, animé de puissantes émotions. Charismatique et d'une grande complexité, le personnage ne peut que fasciner. Difficile voire impossible de démêler le vrai du faux dans ses propos, d'ailleurs la justice n'y parviendra pas et Cedric KAHN se garde bien de prendre parti. L'intérêt du film est ailleurs: dans les déchirures de la société française que sa présence provoque comme je l'ai déjà évoqué avec une ambiance électrique dans le prétoire, dans le travail de mémoire que son histoire oblige à effectuer, dans ses relations tourmentées avec son principal avocat de la défense enfin. Pierre Goldman est d'abord le fruit d'un passé trop lourd à porter: enfant de polonais communistes juifs et résistants réfugiés en France, il n'a jamais trouvé sa place en son sein ni ailleurs et a erré entre désir de suivre la glorieuse trace de ses parents en tant que militant d'extrême-gauche et pulsions suicidaires liées à son incapacité à s'accomplir. Cet "enfant terrible" sans attaches, sinon celles créées avec d'autres "damnés de la terre" latinos et antillais n'est jamais parvenu à devenir adulte. Cela est particulièrement frappant dans son comportement d'écorché vif, régulièrement recadré en coulisses par son avocat, maître Kiejman (Arthur HARARI) qui est son "double inversé". Double car issu de la même histoire, inversé car aussi retenu, calme et posé que Goldman est provocateur et emporté. Les relations entre les deux hommes sont d'ailleurs tendues, Goldman ayant qualifié Kiejman de "juif de salon" et ayant voulu le dessaisir de l'affaire. Pourtant la défense de Kiejman et le film tout entier mettent en lumière l'absence de preuves matérielles et la fragilité de témoignages souvent effarants. Le comportement de la police visant par exemple à intimider les témoins à décharge ou au contraire à orienter ceux à charge est interrogé. Un passage ressemble trait pour trait au documentaire "Un coupable ideal" (2003) sur l'affaire Brenton Butler accusé à tort de meurtre: celle où témoins et jurés croient reconnaître Goldman sur photo alors qu'il ne s'agit pas de lui. Mais avec "sa gueule de métèque, de juif errant, de pâtre grec", il fait figure d'épouvantail et quelques mots malheureux lâchés ici et là par les policiers et les témoins, "mûlatre", "crouille" suffisent à nous renseigner sur les origines historiques du délit de faciès.

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Mystère à Venise (A Hauting in Venice)

Publié le par Rosalie210

Kenneth Branagh (2023)

Mystère à Venise (A Hauting in Venice)

Après l'Orient-Express et la croisière sur le Nil, Kenneth BRANAGH adapte une troisième fois Agatha Christie, plus précisément son roman "La Fête du potiron" connu aussi sous le titre "Le crime d'Halloween". Comme les deux autres, il met en scène le détective Hercule Poirot sommé de résoudre une enquête criminelle dans un lieu clos, non plus un train ou un bateau mais cette fois un palais vénitien. Ce qui n'est pas le cas du roman d'origine qui situe l'intrigue en Angleterre, plus propice à développer l'imaginaire autour de la fête de Halloween. Qu'à cela ne tienne. Pour accentuer l'effet huis-clos, Kenneth BRANAGH fait se dérouler l'intégralité de l'enquête de nuit et par une tempête déchaînée. Il ne lésine pas non plus sur les effets visuels et sonores du type jump scare qui tendent à faire croire que le palais est envahi d'esprits frappeurs. La question de la croyance est en effet le fil rouge de l'histoire. Le très shakespearien Hercule Poirot joué par Kenneth BRANAGH s'est réfugié dans la Venise d'après-guerre pour y finir ses jours en se terrant dans sa demeure en véritable misanthrope qui ne croit plus en rien ni en personne. Son amie écrivaine, Ariadne Oliver (Tina FEY) au visage aussi couturé que le sien vient l'en exhumer pour le mettre au défi de résoudre une énigme mêlant mettant en oeuvre des phénomènes soi-disant surnaturels. Si le film a du cachet et figure désormais dans la liste des nombreuses oeuvres mettant en scène la cité des Doges (dont le côté mortifère se marie très bien avec les fantômes de Halloween), l'intrigue à la "Shining" (1980) ne tient pas toutes ses promesses, nombre de pistes restant sous-exploitées. Peut-être est-ce dû au trop grand nombre de personnages qui ne peuvent pas être aussi développés qu'il le faudrait. De même tous les phénomènes "surnaturels" (dont certains tombent dans le grand-guignol, pauvre Michelle YEOH!) trouvent une explication rationnelle décevante. J'aurais aimé plus d'ambiguïté, notamment dans tous ces fantômes que croise Hercule Poirot dont Kenneth BRANAGH a fait une âme tourmentée mais qui cette fois-ci s'efface un peu trop au profit de sa galerie survolée de suspects.

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L'Autre Laurens

Publié le par Rosalie210

Claude Schmitz (2023)

L'Autre Laurens

En dépit de quelques longueurs, "L'Autre Laurens" est un film surprenant qui nous dépayse en nous promenant à travers plusieurs genres (le film noir, le road movie et le western surtout) et plusieurs contrées (Belgique, France, Espagne). On y parle trois langues (espagnol, français et anglais) et bien que le terreau soit européen, il y a plusieurs moments où on a l'impression d'être à la frontière américano-mexicaine. C'est le fruit d'un travail remarquable sur la photographie qui joue tantôt sur une ambiance de polar urbain à la "Sin City" (2005) et tantôt au contraire met en avant le paysage, qu'il soit maritime, désertique ou rural. Un choc des mondes que l'on retrouve dans les habitations, notamment une copie de la Maison-Blanche et une grange de ferme où se dénoue une partie du film ainsi que dans les personnages secondaires: un groupe de motards, les "Perpignan bikers" (!) et deux policiers qui auraient pu figurer dans un film de Quentin DUPIEUX ou de Bruno DUMONT. Là-dessus se greffe l'intrigue principale qui joue sur la dualité du personnage joué par Olivier RABOURDIN, détective privé usé et endetté dont on découvre assez rapidement qu'il possède un frère jumeau qui est son miroir inversé (d'où le sens du titre), qu'il déteste et qui s'est tué dans un accident de voiture. Mais sa nièce, Jade (Louise Leroy) débarque dans sa vie pour l'obliger à enquêter sur la mort suspecte de son père. Le duo formé par le privé vieillissant et la jeune nymphette est très charismatique et m'a une fois encore rappelé "Sin City", plus précisément la partie avec Bruce WILLIS. Et j'aime beaucoup la scène finale qui m'a fait penser à un autre film avec ce même acteur, "Pulp Fiction" (1994), plus précisément l'histoire de la montre léguée par le père. Jade se retrouve larguée au milieu de nulle part. Elle a le reste de sa vie à écrire, avec ou sans cette montre et ce qu'elle représente, "telle est la question" (allusion au fait que le réalisateur, Claude SCHMITZ est fasciné par le théâtre de Shakespeare et plus particulièrement "Hamlet").

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Péril en la demeure

Publié le par Rosalie210

Michel Deville (1985)

Péril en la demeure

"Péril en la demeure" que je n'avais jamais vu et qui a été en son temps un succès me semble être un film complètement surfait. Il y a certes une atmosphère un peu étrange qui court tout au long du film et pourrait presque le faire passer pour un rêve éveillé. Aucun réalisme dans les situations mais une succession de clichés-fantasmes autour du sexe, de la mort et de l'argent. Des photos prises sur les lieux du crime (comme dans "Blow-up" (1966), des vidéos tournées en caméra cachée (comme dans le film au titre éponyme de Michael HANEKE), des dessins, des plans-tableaux à base de nus et de natures mortes, des morceaux de guitare, une ambiance de maison hantée avec des portes et des fenêtres qui claquent, du vent qui souffle, de trop grands intérieurs vides. Il faut dire que le film semble peuplé de fantômes plus que d'êtres humains. le personnage joué par Christophe MALAVOY se complaît dans les lieux délabrés et les situations dangereuses et malsaines. Les gens qu'il fréquente sont à son image et ce mélange mortifère d'opacité et de perversité finit par lasser, l'érotisme étant lui-même assez froid. Au final, on a un film incontestablement chic mais creux.

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Je suis un fugitif (They made me a fugitive)

Publié le par Rosalie210

Alberto Cavalcanti (1947)

Je suis un fugitif (They made me a fugitive)

Malgré les apparences, il n'y a pas plus cosmopolite que "Je suis un fugitif": film noir britannique réalisé par le franco-brésilien Alberto CAVALCANTI et produit par La Warner dans l'après-guerre. Cependant, si les codes du film sont américains, l'identité qui ressort le plus est britannique avec une brutalité, un pessimisme et un humour noir typiquement british. "Je suis un fugitif" est ainsi un exemple de "spiv film", genre de l'après-guerre désignant les malfrats de petite envergure ("spiv" dans le langage argotique anglais) régnant sur des bas-fonds creusés par la misère, les privations et le rationnement. Venu du documentaire, Alberto CAVALCANTI peut ainsi affûter son sens de l'observation de la réalité sociale sordide régnant dans les grandes villes britanniques au sortir de la guerre. Les décors eux-mêmes rappellent fortement les bas-fonds du Londres de Charles Dickens tandis que les deux acteurs principaux incarnent des personnages qui font penser pour Narcy (abréviation de Narcisse) joué par Griffith JONES à Dorian Gray et pour Morgan à un prolongement du rôle joué par Trevor HOWARD dans "Breve rencontre" (1945) de David LEAN. Le parallèle que je fais entre Narcy et Dorian Gray est lié à son apparence quelque peu dandy, à la façade de respectabilité qu'il recherche en recrutant Morgan et au plan déformant son visage dans le miroir où il apparaît pour ce qu'il est, un psychopathe particulièrement sadique envers les femmes. Morgan est quant à lui un vétéran de guerre alcoolique qui pour tromper son désoeuvrement fait l'erreur de s'acoquiner avec la bande de Narcy, laquelle, comme Lime et ses comparses dans "Le Troisieme homme" (1948) (film contemporain de celui de Alberto CAVALCANTI) se livrent à toutes sortes de trafics. Autre point commun avec le film de Carol REED, l'expressionnisme avec une superbe lumière de Otto HELLER. Car Narcy, figure profondément malfaisante jusqu'à son dernier souffle de vie (comme Lotso dans le final mémorable de "Toy Story 3") (2010) règne sur un monde gangrené d'où il s'avère impossible de s'échapper. La violence et la désespérance sont omniprésentes, on n'est pas prêt d'oublier la scène où Morgan en cavale se réfugie chez une femme qui veut l'utiliser pour abattre son mari. Morgan lui-même est un desperado qui sait que la rédemption est hors de sa portée (les symboles sont nombreux jusqu'à la bagarre spectaculaire et hitchcockienne sur un toit surmonté des lettres "RIP") lancé dans une course contre le temps qui se dérobe.

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