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Articles avec #documentaire tag

Petite Fille

Publié le par Rosalie210

Sébastien Lifshitz (2020)

Petite Fille

Sébastien LIFSHITZ est décidément le créateur d'une oeuvre d'utilité publique. J'avais déjà beaucoup apprécié son documentaire "Les Invisibles" (2012) dans lequel il donnait une généalogie à l'homosexualité, qu'elle se vive en solo ou en couple, détruisant au passage nombre de clichés en montrant par exemple des couples d'hommes ou de femmes de longue durée, âgés, au physique quelconque et vivant à la campagne de façon très simple. Bref, l'inverse du cliché collé au personnage LGBT: jeune, beau et glamour comme une gravure de mode, branché, urbain, fêtard, à la sexualité débridée etc.

C'est dans cette même perspective qu'il poursuit ce travail de déconstruction et de réhabilitation de tout un pan de l'humanité laissé dans la pénombre avec "Petite fille", remarquable documentaire sur la transidentité d'une enfant de 8 ans. Ce thème avait déjà été abordé dans la fiction avec "Ma vie en rose" (1997) mais la différence de l'enfant se heurtait presque jusqu'au bout à une réprobation générale, y compris de ses parents. "Petite fille" montre au contraire une famille qui accepte et soutient Sasha inconditionnellement. En revanche en dehors des médecins spécialisés (et donc informés) sur la question, on peut dire que l'attitude des adultes ne brille pas par sa tolérance. C'est même le parcours du combattant pour que Sascha obtienne le droit de venir à l'école avec des habits féminins qu'elle porte naturellement chez elle ou en vacances et qu'elle aimerait bien sortir du placard dans sa vie scolaire. Je rappelle qu'on est censé vivre dans un pays libre (mais qui continue à dicter aux femmes la façon dont elles doivent s'habiller, notamment à l'école alors les garçons qui se sentent filles n'en parlons même pas). Ce n'est pas la première fois que je mesure le retard de notre pays sur ces sujets. A Montréal par exemple, j'ai croisé plusieurs personnes transidentitaires dans la rue et parmi elles, une qui travaillait au supermarché du coin en tant qu'hôtesse de caisse. En France, il y a quelques années, une employée d'une célèbre enseigne dont je tairai le nom avait été obligée de retirer son piercing au nez pour être embauchée. Alors un personnage excentrique à la Almodovar derrière le comptoir, ce n'est pas pour demain. Certains articles ont reproché au réalisateur de ne pas avoir filmé le directeur et le personnel de l'école dans laquelle est inscrite Sascha mais ces derniers ont été invités à dialoguer avec la famille et les médecins et ne sont pas venus. Est-ce la caméra qui leur a fait peur ou bien n'ont-ils rien de constructif à dire sur la question? Leur absence en tout cas interroge. Les absents ont toujours tort de toute façon.

Le documentaire ne s'en tient pas qu'à la seule question de l'intégration à l'école même si elle est centrale compte tenu de l'âge de Sasha. Il évoque aussi d'autres pesanteurs: la transphobie d'une professeure de danse du conservatoire dans lequel est inscrite Sasha. Les questionnements et les doutes de sa mère (car c'est toujours la mère que l'on accuse lorsque l'enfant est différent, c'est toujours la mère qui se sent coupable et de ce point le vue les propos du médecin sont une délivrance: les parents ne sont pour rien dans la dysphorie de genre*). Et enfin l'avenir forcément compliqué de la petite fille qui pour ne pas subir le traumatisme de se retrouver dans un corps de garçon à l'adolescence doit se préparer à un cheminement compliqué tant médical que social. Peut-être que Sébastien LIFSHITZ prolongera ce documentaire passionnant avec un deuxième volet sur l'adolescence de Sasha si celle-ci y consent pour que l'on mesure les difficultés d'être à sa place et comprendre qu'il ne s'agit en rien d'une lubie ou pire encore (car la question est évoquée dans le documentaire) le fruit d'une maltraitance parentale.

*La dysphorie de genre est caractérisée par une identification forte et permanente à l'autre genre associée à une anxiété, à une dépression, à une irritabilité et, souvent, à un désir de vivre en tant que genre différent du sexe attribué à la naissance.

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Asperger's Are Us

Publié le par Rosalie210

Alexandre Lehmann (2016)

Asperger's Are Us

"Asperger's Are Us" est un documentaire Netflix portant sur la résilience par rapport à l'handicap de l'autisme grâce à l'art. Les américains étant beaucoup plus avancés que les français sur cette question, il est logique que l'offre culturelle le soit aussi que ce soit en matière de films, séries ou comme ici, théâtre. "Asperger's Are Us" est en effet le nom de la première troupe de comédiens entièrement composée de personnes atteintes du syndrome d'asperger. Elle se compose de quatre jeunes hommes qui se sont rencontrés lors d'un camp d'été réservés aux autistes dans le Massachussetts en 2010. Après avoir obtenu leur diplôme, Jack, Ethan, New Michael (qui préfère "new" à "junior", son père s'appelant également Michael) et leur animateur plus âgé Noah décident d'écrire des sketchs à l'humour décalé et de les interpréter dans de nombreuses villes du Massachussetts, suscitant l'intérêt des médias. Leur démarche pionnière les amènent à se comparer aux "Beatles" dans leur domaine. Le documentaire suit les préparatifs de leur dernière représentation avant la séparation du groupe. Il permet de se familiariser avec chacun des membres qui a droit à un portrait individuel ainsi qu'avec leur humour absurde et parfois morbide. C'est aussi bien sûr un moyen de montrer comment ces garçons surmontent leurs difficultés ("I don't want your pity" peut-on lire sur le t-shirt de Noah) pour parvenir à interagir avec les autres membres et le reste de la société et aussi comment cette expérience a pu les aider pour ensuite poursuivre des études et s'intégrer. La pensée positive à l'américaine peut agacer parfois mais ici, le handicap n'est pas édulcoré et si l'humour est un formidable moyen de se faire apprécier et accepter, il n'est pas consensuel ce qui est logique, les aspies étant des gens plutôt intègre. L'un des garçons dit d'ailleurs très justement que le jogging est étranger au fonctionnement aspie qui soit marche ou soit court en se donnant à fond.

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Histoires d'amour et d'autisme (Love on the Spectrum)

Publié le par Rosalie210

Cian O'Cléry (2019)

Histoires d'amour et d'autisme (Love on the Spectrum)

Entre documentaire sur les infinies variations de l'autisme et émission de télé-réalité de dating façon "L'Amour est dans le pré", "Love on the Spectrum" qui se décline pour l'instant en une saison de cinq épisodes est une série australienne qui vient de faire son apparition sur Netflix. Elle ne manque pas totalement d'intérêt mais elle est bancale. Si l'on exclue les considérations mercantiles, l'idée de départ est plutôt bonne puisqu'elle consiste à aider les autistes à trouver l'âme soeur tout en faisant mieux connaître ce trouble auprès des neurotypiques (les non autistes soit l'immense majorité des spectateurs). De fait les portraits des candidats sont tous intéressants et permettent de mieux comprendre la diversité des troubles du spectre autistique (TSA), un handicap encore très mal connu en France. L'autisme se décline en effet sur un spectre, des formes les plus "légères" aux formes les plus sévères. Ce sont les personnes dont les troubles sont les moins accusés qui sont mises le plus souvent en avant dans les médias car elles peuvent parler et "jouer le jeu" social, du moins en surface, j'y reviendrai. L'autre intérêt de la série est de montrer le rôle positif que jouent les thérapies comportementales dans l'intégration des personnes autistes. En effet le coaching propre aux émissions de télé-réalité est utile dans le sens où il permet aux autistes de décrypter le langage non-verbal qu'ils n'ont pas acquis naturellement et qui est important dans la relation amoureuse et à l'inverse d'adopter un comportement approprié dans cette situation.

Néanmoins tout cela reste en surface. L'adaptation comportementale est insuffisante à ouvrir aux autistes le champ des rencontres amoureuses. On remarque qu'à la fin de la série, aucun des candidats n'a réussi à établir une relation avec les partenaires qui leur ont été présentés. Cet échec est camouflé par le portrait de deux couples autistes déjà constitués (qui n'ont pas eu besoin de l'émission donc). En effet le problème est plus profond car les autistes ont non seulement du mal à capter les signaux d'intérêt qu'une autre personne peut leur envoyer et à adopter un comportement approprié mais beaucoup n'arrivent pas non plus à savoir ce qu'ils ressentent vis à vis d'elle, du moins à court terme. La série "Atypical" également diffusée sur Netflix décrit très bien la difficulté à régler le curseur émotionnel qui est soit sur "off" (aucune émotion n'est ressentie) soit sur "100%" (la personne est au contraire submergée par l'émotion). Le coaching ne peut rien face à cette difficulté à accéder à ses émotions et ne parlons pas du speed dating qui est l'inverse de ce qu'un autiste a besoin (du temps). J'ajoute que la série a un autre gros défaut, elle présuppose que les autistes ne peuvent s'entendre qu'avec d'autres autistes puisque les rencontres se déroulent exclusivement entre personnes ayant des TSA. Ce communautarisme est démenti par la réalité. Il existe de nombreux cas de couples mixtes mais surtout cela occulte le fait que l'immense majorité des autistes, y compris légers, faute de prise en charge reste célibataire à vie.

 

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Whitney

Publié le par Rosalie210

Kevin MacDonald (2018)

Whitney

Les fans de Whitney Houston seront soit comblés, soit déçus par le documentaire de Kevin MacDonald qui mêle images d'archive et entretiens de ses proches face caméra. Ce sont en effet moins ses performances vocales qui sont au cœur du film que les raisons de son succès qui paradoxalement sont également celles de sa déchéance physique, professionnelle, matérielle et morale. En effet, ce qui ressort beaucoup, ce sont les problèmes affectifs et identitaires de la jeune femme, modelée très tôt par sa famille (le clan puis avec les dollars l'empire Houston) pour sortir du ghetto et plaire à l'Amérique WASP (d'où son rejet par une partie de l'Amérique noire qui l'avait renommée "Whitey"). Une famille toxique en dépit de nombre de membres talentueux mais restés dans l'ombre comme Cissy la mère de Whitney qui fut choriste d'Aretha Franklin ou ses cousines Dionne et Dee Dee Warwick également chanteuses. Du choix de son prénom (en référence au personnage d'une série mettant en scène la middle class blanche) à ses études dans une école privée catholique puis à une carrière orientée vers des tubes grand public, tout a été fait pour blanchir Whitney. Avec le succès que l'on sait mais au prix d'un déracinement, d'une perte d'identité et de repères qui l'a plongé dans le chaos et fait d'elle la marionnette de tous les appétits et névroses de son clan. Entre son père (et d'autres) qui l'ont exploité financièrement, sa mère et ses cousines qui ont pu profiter de son succès par procuration sans parler de celle qui l'a en plus abusé sexuellement, son demi-frère avec lequel elle a plongé dans la drogue jusqu'au cou, son mari jaloux d'avoir moins de succès qu'elle et qu'elle avait épousé tout en restant proche de sa directrice artistique Robyn Crawford avec laquelle elle avait eu une relation qui remontait à son adolescence, tout cela constituait une charge que n'a pas non plus supporté la fille de Whitney, Bobbi Kristina morte trois ans après sa mère dans les mêmes circonstances (overdose et noyade dans la baignoire). Le film effectue un parallèle non dénué de fondement avec Michael Jackson, lui aussi un afro-américain blanchi dressé et exploité par sa famille qui avait de gros problèmes d'identité. Néanmoins le manque de personnalité de Whitney Houston et le fait que les chanteuses à voix ne soient pas ma tasse de thé constituent des limites à mon intérêt pour ce documentaire.

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A.K.: Akira Kurosawa

Publié le par Rosalie210

Chris Marker (1985)

A.K.: Akira Kurosawa

Chris Marker a consacré plusieurs documentaires au Japon, l'une de ses terres de prédilection*: "Le mystère Koumiko" en 1965, le magnifique "Sans soleil" en 1982 et donc "A.K.", les initiales de Akira Kurosawa qu'il a pu filmer en train de tourner les séquences lunaires de "Ran" sur les pentes du mont Fuji en 1984. Mi portrait, mi journal de bord, "A.K." tire son originalité de sa forme. Il est en effet découpé en petites séquences avec un titre écrit en kanji qui au-delà de la description des méthodes du "maître" ("sensei" en japonais) invite à méditer sur sa capacité à faire avec l'imprévisibilité des éléments naturels, "cette beauté qui n'était pas la sienne" et qu'il sait pourtant admirablement capter. L'un des chapitres s'intitule en effet "patience", un autre "pluie", un autre "feu" et encore un autre "brouillard". Par contraste, une séquence que Chris Marker intitule "laque et or" d'après une technique décorative japonaise et qui se caractérise par sa complète artificialité (lune de Méliès dessinée par Kurosawa lui-même et épis peints en dorés) sera coupée au montage, sans doute justement parce qu'elle devait trop jurer avec le reste et ce bien qu'il y ait nombre de trucages disséminés dans le film. Le passé d'Akira Kurosawa est également évoqué quand il peut éclairer le présent, que ce soit un événement traumatique ayant eu lieu en 1923 et ayant pu lui inspirer la grande scène de massacre au milieu du film ou ses débuts en tant qu'assistant au travers de son amour des chevaux ou encore les films ayant pu préfigurer "Ran" comme "Le Château de l'araignée". Le résultat est un making of atypique assez aride et énigmatique mais qui rend bien compte de la démesure d'une telle entreprise que seul un génie du cinéma pouvait accomplir. On peut reprocher à Marker son admiration absolue pour Kurosawa mais au vu du chef d'oeuvre qu'est "Ran" et du travail titanesque qu'il a demandé, on ne peut qu'éprouver un profond respect et accepter de remettre la dimension critique à plus tard. 

* Un bar de Golden Gai dans le quartier de Shinjuku à Tokyo s'appelle "La Jetée" d'après son œuvre la plus célèbre.

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Buena Vista Social Club

Publié le par Rosalie210

Wim Wenders (1999)

Buena Vista Social Club

Si l'inspiration de Wim Wenders en matière de films de fiction s'est tarie à partir du début des années 90, son talent de documentariste a pris le relai pour offrir quelques pépites supplémentaires à sa filmographie, dont ce superbe "Buena Vista Social Club" qui a transformé un groupe de (géniaux) vieux musiciens cubains en stars mondiales.

Le Buena Vista Social Club était à l'origine une boîte de nuit située dans la banlieue de la Havane où ces musiciens se produisaient dans les années 40 et 50 pour des américains en goguette venus se payer des prostituées (la Havane était alors surnommée "le bordel des Caraïbes" et toute une industrie du tourisme sexuel en découlait). Mais avec la révolution castriste, le lieu, symbole de la sujétion de Cuba aux USA fut détruit. Les musiciens furent les victimes collatérales de l'effondrement de ce système néo colonial mafieux car ils perdirent leur travail et furent réduits pour la plupart d'entre eux au silence et à la misère. Jusqu'au jour où au milieu des années 90 un britannique, le producteur Nick Gold fondateur du label World Circuit et un américain le guitariste et producteur Ry Cooder eurent l'idée d'aller à Cuba pour faire des enregistrements avec ces vieilles légendes oubliées qui ne s'étaient plus côtoyées depuis des lustres*. L'album du groupe fut un succès international et conduisit Ry Cooder à retourner à Cuba en 1998 pour l'enregistrement d'un second album collectif, cette fois accompagné de son ami et collaborateur Wim Wenders bien décidé à filmer la résurrection du groupe et par la même, rétablir un pan oublié de l'histoire cubaine**. 

Le résultat est une galerie de portraits attachants et hauts en couleur célébrant la vitalité intacte et le talent incroyable de ces musiciens qui ont été ainsi immortalisés par la caméra de Wim Wenders. Le grand public a pu ainsi découvrir entre autre au moment du tournage:

- Le chanteur et joueur de guitare cubaine Compay Segundo, 90 ans alors au compteur mais toujours vert (il évoque quand même face caméra le bonheur des nuits d'amour et son désir d'avoir un sixième fils), son éternel cigare, l'élégance de ses costumes et de ses panamas;

- Le chanteur Ibrahim Ferrer, 70 ans, issu d'un mélange sino-africain, sa panoplie de casquettes et sa grande douceur (à l'image de sa musique);

- Ruben Gonzalez, 80 ans le pianiste prodige à la barbe blanche et aux chemises bariolées;

- Eliades Ochoa, 50 ans (il est d'ailleurs encore en vie contrairement à ses trois aînés et d'autres membres du club), le chanteur et guitariste aux chapeaux de cowboy.

Avec eux et d'autres, le public international a découvert le son cubain, un genre musical ancêtre de la salsa, du mambo et du cha-cha-cha, mais plus lent et mélancolique. Le tube planétaire "Chan-Chan" donne un bon aperçu de ce genre musical.

* La genèse du premier album est en fait le fruit d'un heureux concours de circonstances. Ni Nick Gold, ni Ry Cooder ne connaissaient l'histoire et les membres du Buena Vista social club. Ils étaient allés à Cuba pour rechercher des musiciens dans l'idée de faire un album de musique cubaine et africaine dans la ligne éditoriale du label World Circuit Records. Mais les musiciens maliens n'obtinrent pas leur visa pour rejoindre la Havane et restèrent bloqués à Paris. Dans l'urgence, Ry Cooder se tourna vers le coordinateur du projet à la Havane, Juan de Marcos Gonzales qui en quelques jours parvint à retrouver Ibrahim Ferrer qui en était réduit à faire les poubelles pour vivre, Ruben Gonzales qui n'avait plus touché un piano depuis dix ans et de fil en aiguille tous les autres avec la suite que l'on connaît.

** On le devine, gérer le succès triomphal et international d'un groupe lié à une histoire que Castro avait voulu effacer s'est avéré délicat pour le régime cubain.

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La Petite Histoire de Gwen la bretonne

Publié le par Rosalie210

Agnès Varda (2008)

La Petite Histoire de Gwen la bretonne

Court-métrage inédit de Agnès VARDA mis en ligne par l'American Cinematheque, "La petite histoire de Gwen la bretonne" s'ajoute à ceux, courts et longs qu'elle a réalisé à Los Angeles où elle a vécu à deux reprises, d'abord à la fin des années soixante ("Oncle Yanco" (1967), "Black Panthers" (1968) et "Lions Love") (1969) puis au début des années quatre-vingt ("Mur, murs" (1980) et "Documenteur") (1981).

"La petite histoire de Gwen la bretonne" a été réalisé en marge du tournage de "Les Plages d'Agnès" (2007). En effet Agnès VARDA a retrouvé à Los Angeles une amie, Gwen Deglise qu'elle avait connu à Paris en 1996 et dont elle retrace le parcours en forme de "success story". Gwen était venu vendre des livres au domicile de Agnès Varda rue Daguerre pour financer son voyage outre-Atlantique où vivait son petit ami de l'époque. Bien qu'ayant rompu avec lui, elle est resté et a "fait son trou" dans le milieu du cinéma avec bonheur puisqu'en 2008, elle est devenue la directrice de l'une des salles de la cinémathèque américaine. Son histoire se mêle à celle de Agnès VARDA qui reconstitue des souvenirs de son second séjour à Los Angeles au début des années 80 selon la technique du film-collage qu'elle affectionne. Gwen lui rappelle en effet une autre jeune française fauchée qui tentait alors sa chance à Los Angeles, Patricia MAZUY. Agnès Varda et Patricia Mazuy s'étaient liées d'amitié en se partageant la même salle de montage et cette dernière a par la suite assuré celui de "Sans toit ni loi" (1985) avant de devenir réalisatrice à son tour. Agnès Varda réussit ainsi par un jeu de va et vient temporel à dresser un portrait d'un Los Angeles intimiste à travers le portrait de trois femmes de générations différentes réunies par une expérience commune car si la France est le berceau du cinéma, Los Angeles est sa "Mecque".

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Sicko

Publié le par Rosalie210

Michael Moore (2007)

Sicko

Si la grandeur d'une nation se mesure comme le dit Michael MOORE (et beaucoup d'autres humanistes d'hier et d'aujourd'hui à travers le monde tel le Mahatma Gandhi) à la façon dont elle traite ses citoyens les plus faibles, alors les Etats-Unis qui sont pourtant la soi disant première puissance mondiale pointent à l'une des dernières places du classement mondial. De toutes les nations industrialisées, les USA sont les seuls à ne pas posséder de système de santé universel et leurs indicateurs dans ce domaine sont indignes de leur rang. Et l'Obamacare, largement attaqué par Trump n'a pas fondamentalement changé la donne tant les intérêts en jeu (comme dans le domaine des armes) sont puissants.

Dans la première partie de son documentaire-pamphlet de 2007, de loin la plus réussie, Moore démontre à l'aide d'exemples édifiants et d'images d'archives l'inhumaine logique d'un système de santé entièrement sous la botte du libéralisme autoritaire. Le résultat fait froid dans le dos. La santé est à la fois un juteux business abandonné aux mains des industries pharmaceutiques et des assurances privées et un moyen de coercition des masses, terrorisées à l'idée de perdre leur emploi sur lequel est indexé la plupart du temps leur droit ou non d'avoir une assurance santé. Moore se focalise moins sur les 50 millions d'américains (un sur 6) dépourvus d'assurance que sur les classes moyennes sensées être assurées mais qui découvrent à leurs dépends toutes les combines que celles-ci imaginent pour les priver des soins auxquels elles ont droit. Les logiques de profit qui les sous-tendent les pousse à refuser d'assurer les plus fragiles et à cesser de prendre en charge leurs clients dès que les problèmes de santé de ceux-ci deviennent trop coûteux. Cette marchandisation sordide de la vie humaine aboutit au sacrifice délibéré de milliers de personnes sur lesquelles prospèrent ces institutions financières avec la complicité de l'ensemble du monde politique dont elles financent généreusement les campagnes électorales avec l'argent qu'elles volent aux malades. Moore démontre ainsi une société gangrenée par des sommets de corruption et de cynisme à des années lumières des idéaux fondateurs de l'Etat-nation américain.

La deuxième partie de son documentaire, beaucoup plus fantaisiste consiste à comparer le système de santé des USA à celui de quatre autres pays: le Canada, le Royaume-Uni, la France et Cuba. Moore ne fait pas dans la dentelle et idéalise les systèmes de santé de ces quatre pays. N'importe quel français sait (et particulièrement en ce moment) à quel point notre système de santé est malade à force de rabotages budgétaires mais Moore le trouve merveilleux et en rajoute dans les clichés même si en 2007, il était beaucoup moins dégradé qu'aujourd'hui. En revanche sa comparaison entre les USA et Cuba bien connu pour la qualité de son système de santé en dépit de sa pauvreté fait réfléchir. En particulier lorsqu'y emmène des malades américains laissés pour compte du 11 septembre et que ceux-ci découvrent ébahis que les soins que l'on paie des fortunes aux USA ne coûtent rien à Cuba alors que la "médecine socialisée" est diabolisée aux USA, cette désinformation prospérant sur la crédulité des américains persuadés de vivre dans le meilleur pays du monde.

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Ce gamin, là

Publié le par Rosalie210

Renaud Victor (1975)

Ce gamin, là

J'aime beaucoup le titre du film "Ce gamin, là" parce qu'il résume tout le projet de Fernand Deligny, éducateur spécialisé révolté par le sort réservé aux "enfants difficiles" en France qu'ils soient délinquants ou handicapés: l'enfermement et la stigmatisation. "Ce gamin-là", celui que les "normaux" désignent avec mépris et que filme Renaud VICTOR devient "ce gamin, là", c'est à dire dans le lieu de vie créé par Deligny dans les années soixante à Monoblet dans les Cévennes pour accueillir un réseau d'enfants autistes et parmi eux, Janmari, recueilli à l'âge de 12 ans dont les amis de Deligny cartographient les "lignes d'erre" (les déplacements dénués de but apparent) que Deligny compare ensuite les unes aux autres. Une phrase revient dans sa bouche comme un mantra durant tout le film, épousant les rituels, routines et autres stéréotypies de Janmari (tourner en rond les mains dans le dos, se balancer) "Ce gamin, là, in-curable, in-supportable, in-vivable et aussi in-visible" se révèle dans le cadre de la communauté créée par Deligny et ses amis vif, adroit, actif. On le voit couper du bois, pétrir la pâte, trouver des sources d'eau (là où il tourne sur lui-même) et tout cela sans un mot puisque Janmari ne parle pas. Ce mutisme pousse Deligny à s'interroger sur le langage et ses fonctions (ce qui est aussi le sens du titre). Deligny ne cherche pas à "rééduquer" ces enfants pas plus qu'il ne prétend définir ce qu'est l'autisme mais leur fonctionnement "étrange" l'interroge et à travers lui interroge notre société. En ce sens, il retrouve la fonction première de la carte qui consiste à explorer un territoire inconnu et non à chercher à dominer son milieu.

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Citizenfour

Publié le par Rosalie210

Laura Poitras (2014)

Citizenfour

Le célèbre documentaire de Laura POITRAS aurait pu s'intituler "Les huit jours qui ébranlèrent le monde". Ceux qui firent entrer Edward Snowden dans l'histoire. Pour mémoire ce jeune (il avait alors 29 ans) ingénieur informaticien qui avait travaillé pour les renseignements américains (CIA puis NSA) décida de rendre public le gigantesque système de surveillance mondial post-11 septembre mis en place à l'insu des citoyens par l'Etat américain (et ses alliés anglo-saxons) grâce à sa main mise sur les NTIC* avec la complicité des géants du net que l'on appelle aussi les GAFAM**. Comme le dit Snowden, "À l'heure actuelle, sachez que chaque frontière que vous traversez, chaque achat que vous faites, chaque numéro que vous composez, chaque antenne relai que vous passez, chaque ami que vous contactez, chaque site que vous consultez et mot que vous tapez dans les moteurs de recherche est entre les mains d'un système dont la portée est illimitée mais dont les barrières n'existent pas".

Pendant huit jours, il rencontra la documentariste*** qu'il avait contacté sous son nom de code "Citizenfour" et des journalistes d'investigation du Guardian dans un hôtel à Hong-Kong pour leur confier les documents top secret qui prouvaient ses dires. A partir de ce moment-là, Edward Snowden devint à la fois l'un des hommes les plus recherchés de la planète et l'un des principaux symboles de la défense des libertés individuelles et de l'altermondialisme. Car les lanceurs d'alerte sont en quelque sorte les résistants d'un système aussi invisible que redoutable qui s'insinue dans tous les aspects de la vie publique et privée par le biais de pratiques de traçage, de profilage et de récupération de "données", les moyens de leur échapper s'amenuisant au fur et à mesure que les citoyens sont encouragés voire contraints (faute de supports matériels lesquels tendent à disparaître) de virtualiser l'ensemble de leurs pratiques et centres d'intérêts (culturels, commerciaux, financiers etc.)

* Nouvelles technologies de l'information et de la communication.
** Google, Amazon, Facebook, Apple, Microsoft et leurs satellites, les NATU, Netflix, Airbnb, Tesla, Uber.
*** Qui pu ainsi boucler une édifiante trilogie sur les conséquences délétères de la GWOT alias la "Global War On Terrorism" (après la guerre d'Irak et Guantanamo).

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