Spectateurs !
Arnaud Desplechin (2025)
La bande-annonce m'avait donné envie mais les mauvais retours m'ont dissuadé d'aller voir le dernier film de Arnaud DESPLECHIN et malheureusement, force est de constater qu'il rate dans les grandes largeurs sa déclaration d'amour au cinéma. L'hommage est vibrant, sincère mais décousu, abscons, désincarné, pontifiant. Le découpage en chapitres et la présence d'un alter ego à l'écran, Paul Dedalus (interprété par différents acteurs selon l'âge représenté à l'écran) ne suffisent pas à donner une structure et une chair à ce fourre-tout autocentré mélangeant fiction, documentaire, propos philosophiques etc. Les passages avec Francoise LEBRUN font particulièrement sourire: qui peut croire aujourd'hui que des enfants vont sursauter d'effroi devant de vieux films en noir et blanc alors qu'ils sont abreuvés d'images depuis le berceau? On me rétorquera que ces passages sont sans doute autobiographiques et donc datés des années soixante mais il n'y a guère d'effort de reconstitution historique permettant de cerner le contexte. On me rétorquera encore qu'il s'agit sans doute d'un hommage à "Arrivee d'un train a La Ciotat" (1896) mais le film des frères Lumière est déjà cité et illustré à travers un extrait de "Dracula" (1992) dans le film de Arnaud DESPLECHIN.
Celui-ci est en effet ultra-référencé sans que ces références prennent vie: un véritable déluge s'abat sur le spectateur qui ne sait plus où donner de la tête entre Claude LANZMANN (l'un des meilleurs segments ceci dit mais mieux vaut bien connaître le réalisateur de "Shoah") (1985), Jean-Luc GODARD et sa vérité "24 fois par seconde", Stanley Cavell, théoricien du cinéma que je connais pour son travail sur la comédie du remariage mais dont les idées ne sont pas véritablement mises en valeur, Francois TRUFFAUT dont un apprenti-réalisateur analyse les premières images de "Les Quatre cents coups" (1959) etc. Il manque un fil directeur qui empêche ce film d'imprimer contrairement au travail documentaire d'un Bertrand TAVERNIER ou d'un Thierry FREMAUX ou bien fictionnel d'un Woody ALLEN ou d'un Steven SPIELBERG par exemple qui ont tous su transmettre leur amour du cinéma. Arnaud DESPLECHIN semble lui s'être surtout fait plaisir et avoir voulu asséner des "vérités" concernant un art dont fort heureusement il n'a pas l'exclusivité. L'ironie étant qu'il en a oublié au passage de faire du cinéma.
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