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Articles avec #bonitzer (pascal) tag

Golden Eighties

Publié le par Rosalie210

Chantal Akerman (1986)

Golden Eighties

Très chouette, cette comédie musicale bariolée, énergique et colorée de Chantal Akerman, panaché de pop culture des années 80 et de nouvelle vague des années 60 qui annonce "Vénus Beauté institut" (qui s'en est inspiré de façon évidente). Côté années 80, les couleurs, les looks, les styles musicaux m'ont fait penser à la couverture de l'album de Lio "Pop Model" sorti la même année et que j'avais reçu pour mon anniversaire. Lio justement joue dans le film mais paradoxalement, ne chante pas. Côté nouvelle vague, deux références sautent aux yeux. Les comédies musicales aux couleurs pimpantes de Jacques Demy mettant en scène des commerçants derrière les vitres de leurs magasins sauf que années 80 oblige, ceux-ci travaillent désormais dans une galerie commerciale de studio qui fait penser à un décor de sitcom (surtout lors des scènes du bar tenu par Myriam Boyer). Je me demande même si le générique n'est pas une citation de celui de "Les parapluies de Cherbourg" avec une chorégraphie de jambes traversant le sol de la galerie en diagonale. Sans parler de l'un des personnages dont le coeur balance entre la jeune fille en fleurs un peu sage (Lio à contre-emploi comme une Audrey Tautou avant la lettre) et l'incendiaire femme fatale du salon de coiffure (Fanny Cottençon). Et "Baisers volés" de François Truffaut avec Delphine Seyrig dans le rôle d'une vendeuse de vêtements et de chaussures qui fait furieusement penser à Fabienne Tabard. Mais une Fabienne Tabard avec vingt ans de plus, mélancolique, fatiguée et marquée (son personnage est une ancienne déportée) mais prête à s'enflammer de nouveau pour un ancien amour auquel elle a renoncé pour un mariage "raisonnable" avec M. Schwartz (Charles Denner dont c'était le dernier film apparaît lui aussi bien fatigué). Elle apporte un peu de profondeur à un film qui sinon apparaît comme une bulle de légèreté avec ses marivaudages incessants commentés par un choeur de shampouineuses cancanières sur un air irrésistible (on oubliera en revanche leurs équivalents masculins, totalement ridicules). Belles idées de mise en scène utilisant les bacs à shampoings et les cabines d'essayage et une fin qui symboliquement s'échappe de son décor factice pour entrer dans le monde réel lorsque l'une de ces vies semble enfin sortir du carcan imposé pour s'accorder avec son désir.  

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Tout de suite maintenant

Publié le par Rosalie210

Pascal Bonitzer (2016)

Tout de suite maintenant

Un conte moral comme les aime Pascal BONITZER dans lequel il prend pour cible la haute finance et son "univers impitoyable" comme les hautes sphères politiques dans "Cherchez Hortense" (2011) ou le marché de l'art dans le récent "Le Tableau vole" (2023). Toute une galerie de personnages gravite dans le sillage du cabinet de conseil en fusions-acquisitions où se fait embaucher Nora (Agathe BONITZER) qui gravit rapidement les échelons au grand dam de son collègue Xavier (Vincent LACOSTE) qui n'a pas la chance, comme elle, d'être du sérail. Il faut dire que Nora est la fille d'un ancien camarade de (grande) école de Barsac, le patron (Lambert WILSON) et de son associé (Pascal GREGGORY). Barsac s'empresse d'ailleurs de prendre la jeune recrue sous son aile, tant et si bien que Nora découvre dans la maison de Barsac son double plus âgé en la personne de Solveig (Isabelle HUPPERT), l'épouse de Barsac. Celle-ci qui semble bien névrosée a également très bien connu le père de Nora, Serge Sator (Jean-Pierre Bacri). Quant à l'associé de Barsac, il n'apprécie guère d'être mis sur la touche et le fait savoir, quitte à nuire à lui-même et à la boîte. Peu à peu, on découvre la nature des liens entre tous ces personnages, Lambert WILSON incarnant une fois de plus un requin sans scrupules (comme dans "On connait la chanson") (1997) et Jean-Pierre BACRI, un idéaliste blessé. Le monde de la finance sert de prétexte à des déballages intimistes alors que les jeunes acteurs sont un peu sacrifiés au profit de leurs aînés, même si Vincent LACOSTE fait une prestation tout à fait convaincante. "Tout de suite maintenant" souffre de ce déséquilibre ainsi que d'un certain manichéisme (argent contre science, cynisme contre poésie, amour contre intérêt, coeur contre intelligence etc.) Quelques personnages sont difficiles à cerner comme celui de la bonne des Barsac ou sont survolés comme celui de la soeur de Nora. Bref l'ensemble, quelque peu superficiel et brouillon déçoit.

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Le Tableau volé

Publié le par Rosalie210

Pascal Bonitzer (2024)

Le Tableau volé

Après le Conseil d'Etat de "Cherchez Hortense", l'hôtel Drouot de "Le Tableau volé". Aux requins des cabinets politiques succèdent ceux du marché de l'art dans lequel il est beaucoup plus question de marché que d'art. Un milieu semblable à celui d'un casino où tous les coups sont permis, surtout les plus retors: minimiser la valeur d'un tableau par exemple pour tenter d'arnaquer vendeurs et intermédiaires. Il est beaucoup question en effet de mensonges dans "Le Tableau volé". Et pas que dans le domaine de l'expertise d'oeuvres d'art. Le commissaire-priseur André Masson (Alex Lutz) étale sa réussite d'une manière trop ostentatoire pour être honnête. Il est flanqué de son ex-femme et collègue (Léa Drucker) et d'une stagiaire mythomane et désagréable qui paradoxalement est très franche, Aurore. Louise Chevillotte porte le même prénom que le personnage lumineux d'Isabelle Carré dans "Cherchez Hortense". Et ce n'est pas un hasard car c'est guidé par elle (alors qu'il prétendait tout lui apprendre!) que André Masson parvient à éviter les chausse-trappes et à conclure la vente avec succès. Celui-ci a une portée historique et sociologique qui donne son sel au film, celui-ci étant inspiré de faits réels (un tableau d'Egon Schiele spolié à un collectionneur juif autrichien par les nazis et retrouvé en 2005 dans une maison ouvrière de la banlieue de Mulhouse). André Masson y trouve le moyen de conquérir son indépendance, Aurore venge par procuration son père (Alain Chamfort), marchand d'art ruiné par des concurrents sans scrupules, les héritiers du tableau obtiennent une réparation symbolique et enfin Martin (Arcadi Radeff), l'ouvrier gardien involontaire du tableau devenu riche choisit l'option inverse du parvenu rongé de solitude qu'est André Masson: rester invisible, ne rien changer à sa vie d'ouvrier à l'image du tableau ayant orné pendant 70 ans la demeure dont il a hérité sans que personne ne remarque qu'il était cousu d'or*.

* "Pour vivre heureux, vivons cachés".

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Ma saison préférée

Publié le par Rosalie210

André Téchiné (1993)

Ma saison préférée

"Ma Saison préférée" est un film étrange et quelque peu "bâtard". D'ailleurs une scène résume assez bien le film tout entier: celle dans laquelle Berthe (Marthe VILLALONGA) qui cueille des cerises dans son jardin a une attaque et s'évanouit. André TÉCHINÉ filme d'abord en plongée la terre, les feuilles tombées au sol près de la vieille femme puis il lui fait ouvrir les yeux et contempler le ciel et les branches du cerisier en contre-plongée. On peut rajouter une troisième dimension qui est le temps: des plans sur de vieilles photos en noir et blanc que l'on devine être celles de Marthe VILLALONGA jeune qui voit ainsi son passé défiler. Le film navigue ainsi entre les vestiges d'un passé révolu idéalisé (les photos de jeunesse, l'évocation nostalgique des souvenirs, la maison de la mère, le temps qui passe et découpe le film en quatre temps, allusion aux saisons du titre), un présent solidement ancré dans une réalité sociale, familiale et territoriale qui est la principale force du film et ce qui semble relever du domaine du fantasme, qui est sa principale faiblesse. André TÉCHINÉ filme admirablement bien sa région d'origine (qui est aussi la mienne donc je peux d'autant plus apprécier que je connais bien la plupart des endroits où a été tourné le film*) et analyse avec un esprit pénétrant l'ambivalence de rapports familiaux dans lesquels chacun peut se reconnaître. Une mère inculte mais instinctive qui s'est sacrifiée pour la réussite sociale de ses enfants dans le monde "moderne" et en paye le prix (une fin de vie de décrépitude tristement solitaire), un frère, Antoine (Daniel AUTEUIL) et une soeur, Emilie (Catherine DENEUVE) fusionnels (le générique de début effectue un travelling sur une peinture qui montre des bébés siamois) qui en dépit de leur brillante réussite sociale (lui est neurologue, elle notaire) ne sont jamais parvenus à s'épanouir dans leur vie d'adulte. Antoine qui semble bloqué dans une éternelle adolescence (il rejette les montres, casse les horloges par procuration) vit seul et a un comportement assez immature. On comprend qu'il éprouve pour sa soeur une passion incestueuse assez proche de celle que Tony Montana éprouvait pour la sienne. Il ne va pas jusqu'à tuer son mari Bruno (Jean-Pierre BOUVIER) mais leur relation est électrique. Emilie paraît entourée mais est tout aussi seule. Son couple est en crise et sa relation avec ses enfants est tout aussi lointaine qu'elle ne l'est de sa mère (la culpabilité en moins). Catherine DENEUVE est l'interprète idéale de ce type de personnage bourgeois ayant une façade respectable mais rongé de doutes intérieurement.

Mais si l'analyse de ces trois personnages (Antoine, Emilie et leur mère Berthe) est remarquable, il n'en va pas de même avec les enfants d'Emilie et leur entourage, peu et mal utilisés (de plus était-ce une si bonne idée que cela de donner ces rôles à Chiara MASTROIANNI, la fille de Catherine DENEUVE et Carmen CHAPLIN, la petite-fille de Charles CHAPLIN dont le questionnement sur la sororité appartient à un tout autre plan que celui auquel le spectateur peut s'identifier). Enfin les passages relevant du fantasme sont pour la plupart très maladroitement amenés. Si la chute d'Antoine du balcon fait écho à celle de sa mère sous le cerisier et à la défenestration imaginaire de sa soeur, le passage où un jeune homme sorti de nulle part et qui ne prononce pas un mot poursuit Emilie de ses assiduités est grotesque. De même, le plan sur Ingrid CAVEN se mettant à chanter paraît gratuit à qui ne comprend pas la référence et la fin apparaît bien convenue et décevante.

* La scène de l'enterrement à Puycheval offre un aperçu des panoramas de coteaux que l'on peut admirer dans toute la région (à Cordes-sur-Ciel par exemple) alors qu'à l'image d'autres natifs du coin, les frères Larrieu, André TÉCHINÉ filme la place du Capitole et les bords de la Garonne à Toulouse, depuis l'appartement d'Antoine (là où Claude Nougaro s'en est offert un, une fois devenu célèbre).

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Tricheurs

Publié le par Rosalie210

Barbet Schroeder (1984)

Tricheurs

Barbet Schroeder a beaucoup filmé l'addiction et ce dès son premier long-métrage, "More". Dans "Tricheurs", c'est le jeu qui remplace la drogue comme source de vertige et de perdition. Cela va de pair avec une certaine fascination pour les abysses insondables de l'être humain et pour l'insularité: "Tricheurs" se déroule principalement à Madère et même lorsque le héros voyage, il entoure les pays visités par des cercles sur les cartes. D'ailleurs ce ne sont pas les pays qu'il visite mais leurs casinos et plus précisément leurs roulettes: encore des figures circulaires. Le casino de Madère conçu par l'architecte Oscar Niemeyer a lui-même cette forme, on évoque même à son propos les tentacules d'un poulpe de béton. Enfin, c'est un film qui pour moi lie inextricablement Barbet Schroeder à la Nouvelle Vague dont il a été un des artisans. En effet le plus grand film que je connaisse sur la passion destructrice du jeu est "La Baie des Anges" de Jacques Demy dont "Tricheurs" reprend certains motifs. Celui du couple co-dépendant (sauf que chez Demy la joueuse invétérée est la femme qui entraîne l'homme dans sa spirale infernale alors que chez Barbet Schroeder, c'est à l'inverse l'homme le joueur compulsif qui entraîne la femme avec lui), celui de l'enfermement claustrophobique dans le vice, celui du tentateur qui s'immisce dans le couple, métaphore de la place du jeu dans leur vie, celui des avers et des revers de fortune qui se traduisent par des chambres d'hôtel luxueuses ou miteuses et enfin celui d'une fin ouverte mais ambigüe où on ne sait si le couple s'échappe enfin du cadre qui l'enferme ou bien passe de Charybde en Scylla. Mais le film de Schroeder se focalise moins sur le hasard que sur la triche dont on découvre deux facettes: l'une qui relève du tour de passe-passe et l'autre, plus sophistiquée faisant appel à la technologie. La peur de se faire prendre ajoute encore une dose d'excitation à la pratique en elle-même. Mais pour le reste, la possibilité de gagner par la triche est annihilée par le besoin tout aussi compulsif de perdre (pour pouvoir goûter à nouveau le plaisir de gagner, c'est un cercle vicieux sans fin).

Mais ce qui m'a le plus marqué dans ce film, c'est l'humanité qui s'en dégage, la tendresse palpable vis à vis de personnages névrosés mais que l'on est invité à ne pas juger*, à accepter tels qu'ils sont. En cela je retrouve l'approche d'un John Cassavetes (qui a dépeint aussi le monde du jeu dans "Meurtre d'un Bookmaker chinois" et qui s'y connaissais en addictions). "Tricheurs" dépeint un homme, Elric (Jacques Dutronc) tellement enfermé dans son vice qu'il en est devenu impuissant et asocial (il parle seul, il boîte, il a des pulsions d'automutilation, bref il est bien amoché). Son compère escroc (joué par Kurt Raab, un acteur sorti tout droit de chez Fassbinder) qui semble avoir la fièvre perpétuelle le suit comme une ombre. Seule une femme les sépare: Suzie (Bulle Ogier) qui apporte un peu de rationalité à toute cette folie hallucinogène. Amoureuse de Elric, elle devient sa complice tout en parvenant à modérer ses pulsions les plus autodestructrices. En effet, contrairement à lui, elle n'est pas saisie par le démon du jeu et sait toujours s'arrêter à temps tout comme elle parvient à conserver le contact avec le monde réel. C'est pourquoi je n'ai absolument pas été gênée par le dénouement (jugé amoral) du film car ce que j'en ai retenu, c'est le regard bienveillant de cette femme sur cet homme qui accepte de se mettre à nu devant elle et qui accepte le soutien qu'elle lui apporte. Bref qui accepte tout de même de s'ouvrir quelque peu. D'où la fin ouverte...

* Qualité que j'avais déjà soulignée dans "Amnésia".

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Les soeurs Brontë

Publié le par Rosalie210

André Téchiné (1979)

Les soeurs Brontë

"Les Sœurs Brontë" est un très beau film de André TÉCHINÉ, soutenu par une équipe technique de grande qualité (Pascal BONITZER au scénario, Bruno NUYTTEN à la photographie, Philippe SARDE à la musique) qu'il faut absolument redécouvrir. Il est aux sœurs Brontë ce que "2001, l'odyssée de l'espace" (1968) est… à l'espace. Autrement dit les partis pris de dépouillement extrême de l'intrigue comme du jeu peuvent déconcerter mais ils sont cohérents avec le sujet traité et ne cherchent pas à l'enjoliver artificiellement. Cette volonté d'authenticité a pour but de comprendre le lien entre la vie des sœurs Brontë et leur œuvre. Et effectivement, il apporte quelques éléments de réponse. Emily (jouée par Isabelle ADJANI à qui le rôle va à la perfection) est dépeinte comme le double de Catherine, son héroïne des "Hauts de Hurlevent". Sauvage, secrète, irascible et passionnée, on la voit arpenter la lande du Yorkshire en habits d'hommes. Son asociabilité et sa vie à l'écart du monde lui octroient une grande liberté doublée d'une proximité avec la nature. D'autre part le film répond à une question que se sont posés de nombreux spécialistes à savoir comment elle a pu raconter une histoire d'amour aussi puissante en n'en ayant pas vécue une elle-même. Le réponse semble se trouver dans sa relation fusionnelle avec son frère autodestructeur, Branwell (Pascal GREGGORY dont c'était le premier rôle important au cinéma) qu'elle suit comme son ombre et à qui elle ne survivra pas. Bien que n'ayant pas laissé d'œuvre en propre (on le voit symboliquement s'effacer du portrait familial), Branwell semble avoir été extrêmement important dans le processus créatif de ses sœurs et le film lui donne une grande place si ce n'est la première. Enfin, l'autre personnage important est bien évidemment l'aînée, Charlotte (Marie-France PISIER) plus mature et ouverte sur l'extérieur que le reste de la famille. Sans son intervention déterminante, les œuvres de ses sœurs n'auraient jamais été publiées. Elle prit également la décision de dévoiler à l'éditeur leur véritable identité (toutes trois avaient pris des pseudonymes masculins pour des raisons évidentes). Elle fut la seule à connaître le succès de son vivant et à avoir accès à une vie sociale et mondaine même si la scène de fin à l'opéra montre que sa simplicité est en décalage complet avec les codes en vigueur dans la bonne société. D'autre part, la genèse de "Jane Eyre" semble se trouver dans la passion non réciproque de Charlotte pour l'un de ses professeurs à Bruxelles bien plus âgé qu'elle, Constantin Heger (Xavier DEPRAZ) qui lui aurait inspiré le personnage de Rochester, elle-même s'étant dépeinte sous les traits de Jane (qui est d'ailleurs préceptrice, comme elle). Si Emily est en effet attirée par son frère, attirance qui est la colonne vertébrale de la relation Cathy-Heathcliff, Charlotte est en revanche attirée par des figures paternelles. Elle finit d'ailleurs par épouser le vicaire de ce dernier, M. Nicholls (Roland BERTIN). Reste la troisième sœur, Anne qui tout comme dans la réalité apparaît en retrait par rapport ses deux aînées, ses romans n'ayant pas connu le même succès et d'après les spécialistes, n'ayant pas la même qualité littéraire. Isabelle HUPPERT est tout à fait convaincante dans le rôle mais elle était en rivalité avec Isabelle ADJANI alors star montante comme elle ce qui rendait l'ambiance sur le plateau irrespirable. Cette absence de solidarité qui s'est manifestée jusqu'au festival de Cannes ne se ressent pas dans le film, mais celui-ci a été tout de même amputé d'une heure à la demande des producteurs et jamais restauré depuis, les scènes coupées ayant été définitivement perdues entre temps.

Les soeurs Brontë

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Cherchez Hortense

Publié le par Rosalie210

Pascal Bonitzer (2011)

Cherchez Hortense
Damien Hauer (Jean-Pierre Bacri) est professeur de civilisation chinoise. Sur l’insistance de sa femme Iva, metteur en scène de théâtre (Kristin Scott Thomas), il a accepté de rendre un service : parler à son père, président du conseil d’État (Claude Rich, hallucinant),du cas d’une certaine Zorica, menacée d’expulsion par la justice, et tenter de le convaincre d’intercéder en sa faveur auprès d’un homme de pouvoir qui travaille dans l’ombre et répond au nom d’Henri Hortense (d'où le titre du film).
Seulement, comme l’avoue Damien à sa bande de copains de bistrot, il n’a “de rapports simples avec personne”, et surtout pas avec son père, homme inaccessible, narcissique, séducteur et fier de l’être. Les choses vont donc mal se dérouler. Le père de Damien l’évite par tous les moyens, toutes les portes du conseil d’État s’avérant de merveilleux passages dérobés pour fuir les problèmes humains. Par manque de courage et pour plaire à sa femme, Damien va pourtant laisser croire que tout est en bonne voie. Mais il y a complication quand il se rend compte qu'Aurore, la jolie employée du restaurant qu’il fréquente quotidiennement (Isabelle Carré) a un rapport avec l’affaire.
Damien est un personnage dépressif qui semble avoir baissé les bras. Tout indique qu'il traîne sa vie comme un boulet. Une vie qu'il n'a pas vraiment choisie et qui derrière le paravent bourgeois s'avère faite de solitude et d'incommunicabilité que se soit avec sa femme, avec son fils ou encore avec son père.
 
Heureusement, il a en Damien un minuscule jardin secret qu'il ne révèle qu'à la fin et qui va le réconcilier avec la vie. Ce jardin secret est lié à son métier. Certes, il enseigne la civilisation chinoise aux entrepreneurs ce qui offre une façade compatible avec son statut social et le fait périr d'ennui.
Mais le lien qui existe entre la Chine et lui est bien plus profond, c'est la promesse d'un ailleurs, d'un autre horizon, d'un autre possible qui lui a été révélé lors d'un voyage quand il était très jeune.
Néanmoins cet autre possible reste à l'état latent pendant des dizaines d'années jusqu'à ce que Damien fasse une rencontre décisive, celle d'Aurore (dont le prénom, traduction du serbe Zorica, sonne comme une promesse de renouveau). Aurore est serbe mais symboliquement pour Damien, elle représente la Chine. Devant elle, Damien tombe le masque, devient vulnérable et fragile et partage ses sentiments les plus intimes (Jean-Pierre Bacri est absolument admirable).
 
Mais dans cet univers bourgeois conformiste et mortifère, Aurore n'a pas sa place. Elle est menacée d'expulsion car elle n'a pas de titre de séjour. Toutes les démarches de Damien pour la faire régulariser tournent court face à des hommes de pouvoir impitoyables qui symbolisent le père castrateur. Alors Damien n'a pas le choix: pour construire enfin son bonheur, il doit "tuer" le père, briser son couple en mettant à jour l'infidélité de sa femme et enfin s'engager auprès d'Aurore. La scène où Damien est arrêté parce qu'il refuse de montrer ses papiers montre bien ce basculement.
Le jaillissement des désirs refoulés irrigue la fin du film lorsque Damien et Aurore prennent un nouveau départ sous les yeux d'un vieux chinois, absolu contrepoint du père vaincu.
 

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