La citation de Jules Michelet qui ouvre le film "Chaque époque rêve à celle qui va lui succéder" donne à penser que le Metropolis de la dream team japonaise Rintarô (pour la réalisation) Otomo (pour la scénario) et Tezuka (pour l'œuvre originale) est une œuvre de SF classique. En fait il s'agit de ce que l'on peut voir de plus abouti en matière de rétrofuturisme. Il y a le mariage heureux de l'animation traditionnelle sur celluloïd et de l'image numérique en 3D, du graphisme daté des personnages d'Osamu Tezuka et des décors ultra-modernes, de la musique jazz-soul et du bruit de machines ultra-perfectionnées. Le tout au service d'une histoire prenante aux enjeux humains particulièrement forts, l'œuvre de Tezuka prenant souvent des accents shakespeariens.
Osamu Tezuka est le père du manga et de l'anime japonais. Il a dessiné le manga Metropolis à la fin des années 40 en s'inspirant d'une photo du film de Fritz Lang (qu'il n'avait pas vu). Cependant il y a une vraie communauté d'esprit entre les deux œuvres et le film de 2001 en tient compte en les combinant harmonieusement. On retrouve donc une cité futuriste, remplie de gratte-ciels, de routes suspendues et de ballons dirigeables divisée en castes se partageant l'espace selon une logique verticale. Les riches et les puissants vivent dans la tour centrale nommée "Ziggourat" en référence à la tour de Babel de Lang, lancée vers le ciel comme un défi à Dieu. Les pauvres s'entassent dans les souterrains du premier niveau. Contrairement au film de Lang qui se situait dans les années triomphantes du tayloro-fordisme, le film de Rintarô plus contemporain évoque le chômage de masse lié à la robotisation des tâches d'exécution. Car la société est désormais tripartite, les robots esclaves-instruments se situant tout en bas de la hiérarchie. Et tout au fond de la cité également, dans la centrale nucléaire du niveau -2 et la station d'épuration du niveau -3. Certains ont le droit de venir travailler à la surface mais une organisation paramilitaire, les Marduk veille arme à la main à ce qu'aucun robot non autorisé ne se promène "hors zone". Ses méthodes brutales et sanguinaires sont calquées sur celles des milices fascistes et nazies. Leur chef Rock est le fils adoptif du Duc Rouge qui règne sur la cité.
Rejeté par le duc, Rock découvre que celui-ci manipule un scientifique hors-la-loi, le professeur Laughton, pour construire un robot d'une espèce nouvelle, un être surhumain qui permettra au duc d'obtenir un pouvoir éternel. Un insupportable rival pour Rock d'autant plus qu'il a été fabriqué à l'image de la petite soeur décédée du Duc Rouge, Tima (une reine de Mésopotamie). Là encore, les ressemblances avec le film de Lang sont frappantes. Rock détruit le laboratoire, tue le professeur Laughton et traque Tima avec acharnement pour la détruire.
La composition tripartite de la société explique que la révolte ouvrière ne soit évoquée qu'en arrière-plan du film avec un chef, Atlas qui évoque à la fois Hugo et Delacroix. Mais c'est moins la liberté que la fureur qui guide le peuple lorsque qu'il met en pièces ceux qui sont encore plus déshérités qu'eux. Car la question de l'humanité des robots occupe le premier plan du film. L'évolution de Tima est de ce point de vue éloquente. Robot "nouveau-né" qui n'a pas conscience de son identité, elle tombe d'abord entre de bonnes mains, celles du jeune Kenichi dont l'oncle enquête sur le professeur Laughton. Traitée avec amour, elle se sent humaine et conserve son innocence au point d'être comparée à un ange. Mais lorsqu'elle est capturée par le Duc et touchée en plein cœur par la balle de Rock, elle se transforme en arme de destruction massive, échappant à tout contrôle. Le robot est en effet ce que nous en faisons: un être de lumière ou un puits de ténèbres.
C'est un voyage en eaux troubles. Celles du trou de mémoire d'un vétéran israëlien de la guerre du Liban qui part à la reconquête de ses souvenirs. Les camarades de son ancien régiment qu'il interroge ne se contentent pas de lui raconter cliniquement ce qu'ils ont vécu. Lui racontent-ils d'ailleurs vraiment ce qu'ils ont vécu? "La mémoire est dynamique, vivante, il manque des détails, il y a des trous remplis de choses qui ne sont jamais arrivées". Ce qu'ils font remonter à la surface, ce sont des sensations, des impressions (ici une odeur de patchouli, là un tube des années 80...), des rêves aussi. Et peu à peu dans la tête de l'ex-soldat Ari, une image émerge du brouillard, une seule, toujours la même celle de lui-même et ses camarades sortant nus de la mer sous les tirs de fusées éclairantes. Une image ambiguë tant la scène est irréelle. Peu à peu, Ari réussit à retrouver le souvenir traumatique qui se cache derrière cette image. Les eaux troubles, ce sont aussi celles des pulsions humaines d'ordinaire les mieux enfouies et qui dans un contexte de guerre, éclatent au grand jour. La scène irréelle d'un soldat qui danse sous les balles en tirant en rafales devant un portrait de Bachir Gemayel, le président chrétien de la République libanaise qui vient d'être assassiné l'exprime parfaitement. En effet c'est la soif de venger cet assassinat (et la fascination érotique que suscite Gemayel chez ses partisans) qui pousse les milices chrétiennes phalangistes à faire une orgie de sang dans les camps de réfugiés palestiniens de Sabra et Chatila en 1982. Le tout avec la complicité de l'armée israélienne qui tire des fusées éclairantes pour permettre aux phalangistes de continuer leur sale besogne pendant la nuit. Ce massacre des innocents est le point d'orgue d'une rage de destruction qui touche toutes les formes de vie (la scène "prémonitoire" du massacre des chiens puis des pur sangs arabes de l'hippodrome de Beyrouth).
Valse avec Bachir qui est largement autobiographique est donc à la fois un film historique, un film sur la mémoire, un film-enquête et un film-thérapie. Comme L'image manquante de Rithy Panh, la reconstitution du passé retravaillé par la mémoire passe par l'animation qui fait la part belle à l'imaginaire (et lui donne paradoxalement sa vérité). Seule la séquence de fin recourt aux archives documentaires qui témoignent mais ne retranscrivent pas l'expérience subjective de l'individu.
Toy Story 3 élève encore le niveau d'un cran par rapport au film précédent qui était déjà un chef-d'oeuvre. Tout en ménageant quelques moments hilarants (Buzz en latin lover et Ken en fashion victim sont deux moments cultes à ne rater sous aucun prétexte), le 3° film entre dans une dimension crépusculaire aux confins du tragique qui préfigure le magnifique Vice Versa réalisé 5 ans plus tard. Ces deux films évoquent la difficulté inhérente au fait de grandir, une mue qui ne peut se faire qu'au prix de la perte et du deuil ("grandir, c'est mourir un peu"). La force de Toy story 3 résidant dans le fait de pouvoir nous identifier aux jouets mais aussi dans un final qui prend littéralement à la gorge, à Andy au seuil de sa vie d'adulte. Quel chemin parcouru depuis le premier opus où les humains n'étaient que de vagues silhouettes en arrière-plan!
A la fin de Toy Story 2, Woody avait fait un choix, celui de rester un jouet vivant auprès d'Andy, acceptant de ce fait d'être tôt ou tard cassé, oublié, abandonné. 10 ans ont passé et les angoisses des jouets semblent devenues une triste réalité "On est finis, has been, on nous abandonne." Entassés pêle-mêle dans un coffre et plongés dans le noir depuis des années, les jouets attendent que leur sort soit scellé par l'entrée d'Andy à l'université. Sa mère lui a en effet ordonné de vider sa chambre et de trier ses affaires, lui donnant des boîtes en carton pour le grenier et des sacs poubelle pour les objets à jeter. Prenant les devants, les soldats de plastique décident de prendre la poudre d'escampette "Andy a grandi. Mission accomplie. Face aux sacs poubelles, on n'a aucune chance. On lève le camp." Pour les autres, rescapés de tris antérieurs (dont notamment Siffli, le télécran et la bergère ont fait les frais), deux choix s'offrent à eux ce qui les rend exactement semblables aux humains. Ou comme Woody rester fidèle à Andy en gardant l'espoir qu'il conserve ses jouets pour les transmettre à ses propres enfants. Ce qui implique une foi en sa capacité à ne pas oublier ses émotions d'enfance et donc à accorder une valeur plus grande à ses jouets que celle d'objet périssable. Ou cyniquement, espérer "se vendre" au plus offrant "allons voir ce que l'on vaut sur internet" lance ainsi Bayonne le cochon-tirelire qui en connaît un rayon sur les lois du capitalisme et de l'objet de consommation jetable. Le choix est d'autant moins facile à faire qu'Andy ne semble plus tenir à ses jouets sauf à Woody qu'il décide de prendre avec lui à l'université. Le moral au plus bas à cause d'un quiproquo qui a failli les faire terminer dans la benne à ordures, les compagnons de Woody décident de tenter l'aventure de la crèche "Sunnyside" où ils espèrent trouver un foyer pérenne. Au lieu de quoi ils se retrouvent dans un "lieu de ruine et de désespoir régi par un ours maléfique parfumé à la fraise" qui sous l'apparence d'une peluche rose bonbon se révèle être un monstre. Ce personnage tyrannique et mafieux, entourée d'une garde rapprochée soumise par la corruption ou par la force, condamnant à mort les nouveaux jouets (perçus comme des rivaux potentiels) en les donnant en pâture aux touts petits s'avère être d'une noirceur absolue. Aucune rédemption ne lui est accordée ce qui fait de lui un personnage résolument tragique. Il illustre les pires choix que l'on peut faire à partir d'une même histoire traumatique (lui aussi a été abandonné et oublié). Même en regardant la mort en face, Woody et ses amis se donnent la main. Et c'est encore Woody qui souffle à Andy le bon choix à faire. Celui-ci se résout difficilement à se séparer de lui pour le transmettre en même temps que ses amis à un autre enfant, digne de cet héritage. Tellement digne même qu'il possède un Totoro chez lui (bel hommage à Miyazaki en passant). Et pour marquer ce rite de passage, Andy joue une dernière fois avec ses jouets avant de les quitter définitivement.
Toy Story 3 comporte quelques scènes vraiment grandioses: l'ouverture épique dans les grands espaces du Far West magnifie les personnages dans des proportions jamais vues jusque là; la crèche transformée en forteresse-prison est le théâtre d'une scène d'évasion spectaculaire (avec clins d'oeils à Mission Impossible, à la Grande Evasion etc.). Enfin l'incinérateur de la déchetterie prend la dimension d'un gouffre apocalyptique menaçant pour de bon d'anéantir définitivement les personnages.
Le deuxième volet de la saga Toy Story surpasse le premier opus à tous les niveaux. L'animation en images de synthèse a fait des progrès considérables en quelques années permettant à des humains comme Al le collectionneur cupide d'occuper une place importante dans l'histoire. L'univers s'élargit dès la superbe scène d'ouverture intergalactique qui fait de Buzz un virtuel ranger de l'espace avec plein de petits clins d'œil jubilatoires à Star Wars et 2001 l'odyssée de l'espace. Clins d'oeils prolongés avec la scène ou Buzz et sa Némésis Zurg rejouent le "je suis ton père" "Aaaaaaah!" Plusieurs scènes d'action haletantes mettent les jouets en relation avec des espaces démesurés pour eux (tour de 23 étages, immenses rayonnages de la ferme aux jouets, route à traverser, aéroport). Mais ce sont surtout les caractères des personnages et les thèmes du film qui gagnent en profondeur. Woody est confronté à un véritable dilemme existentiel qui dépasse de loin son statut de jouet pour toucher à l'universalité de la condition humaine. D'une part il découvre ses origines et son glorieux passé. Il est l'un des multiples produits dérivés d'une série TV de la fin des années 50, "Woody's Roundup" dont il était la vedette. Il s'agit d'un hommage nostalgique à l'émission pour enfants américaine "Howdy Doody" qui connut un grand succès entre 1947 et 1960 avant d'être éclipsée par la conquête spatiale. D'autre part il doit choisir son avenir entre deux voies possibles. Un destin d'objet de collection de musée vitrifié pour l'éternité ou un destin de sujet qui se sent vivant car l'enfant qui joue avec lui le voit ainsi "la vie ne vaut d'être vécue que si l'on est aimé". Mais choisir d'être vivant et aimé implique aussi l'acceptation du vieillissement ("si vous jouez avec, il ne durera pas"; "Les jouets ne sont pas éternels"), de la perte, de l'abandon et de l'oubli sous un lit, sur une étagère, dans un vide-grenier... ("on n'oublie pas des enfants comme Emily ou Andy, ce sont eux qui nous oublient"; "Crois-tu qu'Andy t'emmènera avec lui à l'université ou en lune de miel?") et enfin la mort (Woody rêve qu'il est jeté à la poubelle et englouti, Jessie qui a été mise dans un carton et donnée à une œuvre de charité a peur de retourner dans le noir etc.) C'est ce questionnement qui donne tout son relief psychologique au personnage du "méchant", le chercheur d'or, Papy Pépite qui vit depuis son premier jour dans une boîte que personne n'a jamais ouvert. Jaloux et aigri de n'avoir jamais été acheté (choisi et aimé par un enfant), il déteste "les jouets frimeurs" et de ce fait est prêt à tout pour forcer Woody à entrer au musée avec lui. En guise de punition, il devra apprendre "la vraie vie d'un jouet" entendez, devenir mortel.
La sortie du premier Toy Story en 1995 a fait date dans l'histoire du cinéma d'animation au même titre que la sortie de Blanche-Neige en 1937. Pour trois raisons:
- Premier long-métrage d'animation entièrement en images de synthèse. - Premier long-métrage des studios Pixar. - Premier film d'une série culte (trois films à ce jour, un quatrième en préparation).
Bien sûr ce rôle de précurseur explique que certains aspects du film aient aujourd'hui vieilli (l'animation des humains et du chien Scud). Mais l'essentiel n'est pas là. L'essentiel est que ce film pose aussi bien les bases de l'univers Toy Story que celui des studios Pixar. Dès cet opus, ceux-ci se démarquent des studios Disney (les seconds n'avait pas encore racheté les premiers mais John Lasseter avait travaillé pour Disney comme animateur au début des années 80 et Toy Story a été le fruit de la collaboration des deux studios).
Le postulat de Toy Story repose sur des jouets qui prennent vie dès que les humains leur tournent le dos. Des jouets attachants dotés d'une véritable complexité humaine. En dépit de leur apparence colorée, ils se comportent comme les employés consciencieux d'une entreprise soucieuse d'accomplir sa mission: se mettre au service de leur petit propriétaire, Andy. Leur plus grande peur est d'être oubliés, remplacés, jetés au rebut. Une angoisse d'anéantissement qui traverse toute la série Toy story. Dans le premier, le pic d'angoisse a lieu lors des anniversaires et des noël d'Andy. Chaque jouet est à l'affût de celui qui pourrait le détrôner et tout particulièrement Woody le cow-boy, jouet préféré d'Andy et qui de ce fait est celui qui a le plus à perdre. L'arrivée de Buzz l'éclair provoque la jalousie de Woody qui rêve de se débarrasser de l'intrus. Non sans l'avoir auparavant remis à sa place car Buzz est persuadé d'être un véritable ranger de l'espace et non un simple jouet. Ce qui donne lieu à un dialogue parmi les plus brillants du film " Tu viens d'où? Singapour? Hong-Kong?", "De Gamma 4", "Moi de Playschool", "Moi de Mattel ou plutôt de la petite société qu'ils ont absorbé." Mais son conflit avec Buzz va l'entraîner "du côté obscur" incarné par Sid, un gamin sadique qui fait exploser ses jouets ou les transforme en mutants hybrides.
Derrière l'univers enfantin, on voit poindre toute une série de thèmes traités de façon adulte: peur de l'abandon et de ne plus être aimé, maltraitance, préjugés, perte des illusions et de l'innocence etc. Le tout est emballé dans des décors et scènes plus réussis les uns que les autres: l'inquiétante maison de Sid et sa moquette sortie de Shining, la pizzéria "Pizza planet" et ses petits extra-terrestres fatalistes attendant d'être choisis par le grappin magique, la course-poursuite finale qui fait penser à Indiana Jones (tout comme le globe terrestre qui roule sur Buzz), le raid militaire des soldats en plastique... Quant à Woody et Buzz, ils instaurent le "buddy movie" au sein du cinéma d'animation grâce à leurs caractères complémentaires (cool pour le souple Woody et inflexible et déterminé pour le rigide Buzz) qui regardent dans la même direction: celle de la frontière à repousser. Comme les studios Pixar: vers l'infini et au-delà!
C'est beau, très beau même. Historiquement et culturellement c'est passionnant de découvrir le talent et le caractère hors du commun d'une femme artiste resté longtemps dans l'ombre de son illustre père avec lequel elle a travaillé en étroite collaboration pendant plus de 25 ans. L'histoire de la contribution des femmes au monde des arts et de la sciences reste encore largement à écrire. Chaque fois que l'une d'entre elle fait l'objet d'un coup de projecteur, on redécouvre les ravages du patriarcat sur l'écriture de l'histoire et sur les droits/crédits d'auteur. Mais lentement les choses évoluent: Camille Claudel réapparaît derrière Rodin, Emilie du Châtelet derrière Voltaire, Berthe Morisot derrière ses homologues impressionnistes masculins... Et O-Ei derrière Tetsuzo. O-Ei qui entretenait un relation d'égal à égal avec son père, l'appelait familièrement par son prénom (so shocking au Japon!), le critiquait, le bousculait, qui dessinait des œuvres à sa place, qui fumait la pipe, buvait de l'alcool, ne faisait pas la cuisine et préférait voir leur atelier devenir un dépotoir plutôt que de faire le ménage. O-Ei qui était très franche et n'avait pas froid aux yeux surnommait l'un des peintres apprentis d'un confrère d'Hokusai "Zen l'Empoté." N'ayant aucune des "qualités" de la bonne épouse, il n'est guère étonnant que son mariage se soit soldé par un échec. O-Ei apparaît à l'image de ses épais sourcils (si peu dans la norme) comme un cheval sauvage absolument indomptable. Cependant le portrait se nuance lorsque l'on voit O-Ei face à la sexualité et à la sororité qui ici fonctionne comme une substitution de maternité. Contrairement à son milieu d'hommes artistes vivant en symbiose avec les geishas, O-Ei est assez prude et a bien du mal à se décoincer, même pour la bonne cause (peindre des scènes érotiques crédibles). D'autre part son amour pour sa petite sœur de 6 ans O-Nao, aveugle et fragile, donne lieu aux passages les plus délicats et émouvants du film. O-Nao qui a l'inverse provoque chez son père une grande culpabilité car il est persuadé que son énergie créatrice a vampirisé sa fille.
Cependant, aussi intéressant et beau esthétiquement parlant soit-il, il manque quelque chose à ce film pour parvenir à totalement me séduire. L'histoire est quand même assez décousue. Décomposée en petites scénettes, elle manque d'enjeux forts. Et le réalisateur manque de sensibilité dans son approche des personnages. Le spectateur est placé trop loin d'eux ce qui rend ce long-métrage assez sec.
Le sujet était casse-gueule et ce ne sont pas les prix et les critiques dithyrambiques qui allaient me rassurer. Ces mêmes critiques avaient bien encensé il y a quelques années des films français absolument détestables sur des sujets relatifs à l'enfance meurtrie (Polisse, La guerre est déclarée...) Cependant un élément m'a convaincu de tenter l'expérience: la présence de Céline Sciamma au scénario. Céline Sciamma a prouvé avec Tomboy qu'elle pouvait traiter avec justesse de thèmes délicats concernant la construction identitaire de l'individu dans l'enfance. C'est aussi ce qui ressort de Ma vie de courgette qui aborde de front mais sans pathos la maltraitance des enfants et leur protection juridique. La sinistre réalité qu'ils ont connu n'est jamais édulcorée même si elle est évoquée avec des mots d'enfant et à hauteur d'enfant. Des mots simples qui vont droit au but et une technique d'animation en stop motion qui tape dans le mille pour représenter leur monde. Les corps des marionnettes animées portent les stigmates de ce lourd passé (cernes, cicatrices...), les milieux d'où sont issus ces enfants sont très défavorisés voire marginaux ce qui fait d'eux doublement des parias. Mais le film n'est pas sinistre pour autant. Il montre que le meilleur peut sortir du pire et que pour reprendre les mots de Boris Cyrulnik, les tuteurs de résilience existent. Solidarité entre enfants, créativité artistique permanente, adultes bienveillants sont autant de perches salvatrices. Sans parler de l'étonnante capacité des enfants à rebondir et à se créer des bulles de survie même au cœur de la pire des situations. Ainsi le héros, Courgette (alias Icare) qui a transformé son père disparu en super-héros dessiné sur un cerf-volant, qui fait des châteaux avec les canettes de bière que sa mère alcoolique laisse traîner partout ou Camille qui sans se démonter trouve un moyen astucieux de se libérer de sa tante-marâtre avec l'aide de Courgette et de Simon, le (faux) petit dur de la bande.
Un film d'animation hors des sentiers battus du genre et beaucoup plus profond que nombre de films live sur le sujet.
Au début pourtant, l'homme réchappé du naufrage et échoué sur l'île déserte veut faire comme tous ceux qui en sont passé par là (dans la culture occidentale du moins). Il veut construire un radeau pour quitter l'île. Il s'acharne. Il recommence, encore et encore. Mais une mystérieuse force le ramène toujours sur le rivage après avoir détruit l'embarcation. Cette force, il finit par le découvrir, c'est une immense et mystérieuse tortue rouge. L'homme la voit comme son ennemie et lorsqu'elle vient à sa rencontre, il la frappe, la retourne et la laisse pour morte. C'est alors qu'il réalise qu'elle est venue le sauver, lui qui se mourrait de désespoir. Plein de remords, il essaye de la ranimer. Alors le miracle se produit: la tortue devient femme. L'homme cesse de lutter, il lâche prise et laisse les flots emporter son radeau. Plus jamais il ne tentera d'aller contre les éléments ou de les dominer ou de les transformer. Il se laissera porter, il contemplera, il acceptera. La tortue métamorphosée deviendra sa compagne et la mère de leur enfant. Elle restera avec lui jusqu'à la fin. Puis elle retournera à la mer.
Ce conte philosophique d'une limpidité absolue et d'une beauté à couper le souffle nous parle de la condition humaine et du rapport de l'homme à l'univers. Il est le fruit de trois sensibilités au carrefour de l'orient et de l'occident. Celle du réalisateur néerlandais Michael Dudok de Wit auteur de plusieurs courts métrages sur les cycles de la vie. Celle du studio animiste (à tous les sens du terme) japonais Ghibli dont c'est la première collaboration avec des éléments extérieurs. Et enfin celle de Pascale Ferran coscénariste qui dans Lady Chatterley magnifiait déjà la symbiose homme/nature.
Cette œuvre minimaliste, distanciée et silencieuse ne peut pas plaire à tout le monde mais elle recèle tant de beauté qu'elle doit être découverte
Après l'avoir vu au cinéma en 2016 sans en avoir gardé un souvenir impérissable, je viens de le revoir en DVD. Certes, il s'agit d'un produit dérivé du jeu vidéo éponyme à évidentes visées commerciales mais au moins c'est un film agréable à voir (contrairement à Lego Batman). Les oiseaux sont sympathiques dans l'ensemble (je ferme les yeux sur l'horripilante Matilda doublée par Audrey Lamy), leur graphisme est mignon, il y a des passages humoristiques pas toujours fins mais parfois réussis, quelques références mais pas trop ce qui permet de les apprécier à leur juste valeur (particulièrement celle qui fait allusion à Shining). L'histoire elle reste très convenue et pleine de facilités scénaristiques mais avec ce type de film il ne faut pas trop en demander. Alors on va dire 3 étoiles pour le dosage assez réussi de tous les éléments pré-cités et 1 étoile pour le scénario soit une moyenne de 2 étoiles.
Un dessin animé hystérique et épuisant qui use et abuse d'un gloubiboulga de références à la pop culture. Les personnages Batman ne suffisant pas à remplir le vide intersidéral de cette soupe abrutissante on a fait appel aux autres super-héros et aux méchants d'autres sagas cultes du catalogue Warner du Seigneur des Anneaux à Harry Potter, tout aussi peu et mal exploités. L'histoire est décousue, l'esthétique laide, la morale hyper-convenue. Quant à l'humour il oscille entre le caca-prout-prout et les clins d'œil parodiques à la Schrek (personnellement, je déteste ça). En dehors des geek ou des super fans de Batman qui collectionnent tous les opus de leur héros, s'abstenir y compris si on a des enfants. Voilà de quoi leur refiler la migraine (d'autant qu'ils ne comprendront pas les 3/4 des références).
Analyse de classiques et de films récents par une passionnée du 7eme art. Mes goûts sont éclectiques, allant de la nouvelle vague française au cinéma japonais (animation incluse) en passant par l'expressionnisme allemand et ses héritiers et le cinéma américain des studios d'Hollywood aux indépendants.