Quelques leitmotivs de l’isolement dans les filmographies de Anthony Hopkins et Wim Wenders
Anthony Hopkins, figure majeure du cinéma anglo-saxon n’a été diagnostiqué comme étant atteint de troubles du spectre de l’autisme qu’en 2014 et ne l’a publiquement révélé qu’en 2017[1] à l’âge de 70 ans. Cette information éclaire sous un nouveau jour nombre de rôles qu’il a interprétés. À travers l’analyse de cinq films dans lesquels il a tourné entre les années soixante-dix et les années quatre-vingt-dix, « Magic » et « Les Ombres du cœur » de Richard Attenborough, « Elephant Man » de David Lynch, « Le Silence des Agneaux » de Jonathan Demme et « Les Vestiges du jour » de James Ivory, je propose de mettre en évidence quelques leitmotivs propres à l’isolement des personnes autistes et leur difficulté à en sortir pour agir et interagir avec les autres et dans le monde. Afin de renforcer la pertinence de cet éclairage, je ferai des parallèles avec le cinéma de Wim Wenders, réalisateur allemand de la même génération que Anthony Hopkins qui dépeint des êtres et des univers qui m’ont paru avoir des caractéristiques très proches. Je citerai des films des années soixante-dix et quatre-vingts tels que « L’Ami Américain », « Paris-Texas », « Les Ailes du désir », « Faux mouvement » ainsi que le documentaire « Pina » qu’il a réalisé en 2011.
[1] Au cours d’une interview dans le journal The Desert Sun daté d’avril 2017.
I- Le Cercle
La figure du cercle qui enferme les personnages est récurrente. « Les Vestiges du jour », de James Ivory sorti en 1993 est l’adaptation du roman de l’écrivain britannique d’origine japonaise Kazuo Ishiguro paru en 1989 dont l’intrigue se déroule en Angleterre entre les années trente et cinquante. Le roman brosse le portrait de Stevens, un majordome à la vie parfaitement réglée qui s’est coupé du monde des sentiments afin d’accomplir sans accroc ce qu’il estime être son devoir. Lorsqu’il regarde au début du film la gouvernante Miss Kenton (jouée par Emma Thompson) qu’il s’interdit d’aimer, c’est derrière le hublot de la porte de service, voire par le trou de la serrure.
Le château de Darlington Hall dont il sert les maîtres successifs avec une abnégation totale symbolise en effet sa prison intérieure pour ne pas dire son tombeau. C’est ce que symbolise la toute première image du film montrant le château emmuré, avant même le titre et le générique ainsi que la dernière scène du film, celle d’un pigeon pris au piège sous le dôme du château comme un oiseau en cage. Stevens referme la fenêtre, une fois le pigeon libéré comme un prisonnier regardant derrière les barreaux.
Dans « Les Ombres du cœur » de Richard Attenborough sorti la même année que « Les Vestiges du jour », Anthony Hopkins incarne l’écrivain et universitaire britannique C.S. Lewis, auteur des contes de Narnia. Il est dépeint comme un célibataire endurci qui voit sa vie routinière perturbée par sa rencontre avec la poétesse américaine Joy Gresham (jouée par Debra Winger) dont il tombe amoureux mais qu’il fuit jusqu’à ce qu’il apprenne qu’elle souffre d’un cancer incurable. En témoigne leur nuit de noces où, troublé par sa présence, il lui demande, je cite « quelle est la marche à suivre ». Cette scène où il dépeint le rituel du coucher dans lequel il s’est enfermé depuis l’enfance semble d’ailleurs être le prolongement de celle des « Vestiges du jour » avec le pigeon, évoquée précédemment. Elle commence par Lewis regardant à travers la fenêtre comme à travers des barreaux au premier plan tandis qu’en arrière-plan à la manière d’un split-screen, Joy couche son fils, comme s’ils évoluaient dans une autre dimension que C.S. Lewis. Mais elle se termine autrement puisque Lewis contrairement à Stevens finit par abolir la distance qui le sépare de Joy, d’abord en lui avouant ses sentiments, puis en l’épousant religieusement (ce qui est important pour lui qui est un fervent chrétien) et enfin en l’étreignant sur le lit conjugal.
Maintenant, comparons avec la filmographie de Wim Wenders. Celle-ci est considérée par Franck Boulègue dans son article « Totentanz (danse et mouvements) » pour la revue de cinéma Éclipses dont le n° 57 est consacré à Wim Wenders[1] comme « l’archétype du cinéma du mouvement[2] », un « univers où le mouvement est roi[3] ». Pourtant ce mouvement s’inscrit dans une géographie entravée : « c’est quelqu’un qui est né dans un paysage trop petit pour lui » (Wim Wenders à propos de Travis Henderson dans « Paris, Texas »), « on revient toujours au mur » (citation de Marion jouée par Solveig Dommartin dans « Les Ailes du désir »), « Faux mouvement » (traduction du titre en allemand « Falsche Bewegung »). Franck Boulègue abonde dans ce sens : « Dans l’espace fluide et sans frontières des géographies européennes et nord-américaines, il existe ainsi quelques points de crispation dans le cinéma de Wenders, des tourbillons qui happent les voyageurs pour ne les recracher (éventuellement) que métamorphosés[4] ». Et de citer parmi ces lieux qu’il compare à des trous noirs la ville de Berlin et « Les Ailes du désir » où « des êtres dépourvus de corps, substances immatérielles volent dans le ciel berlinois sans jamais pouvoir quitter la ville, prisonniers comme des oiseaux en cage[5] ». Plus généralement lorsqu’il parle des personnages de Wenders, il ajoute « qu’ils parcourent le vaste monde, mais c’est un monde clos sur lui-même qu’ils habitent. Un cosmos utérin dont ils ne s’extraient jamais véritablement. Un monde où ils vivent des odyssées en boucle[6] ». L’une des séquences finales de « Faux mouvement », sorti en 1975 caractérise l’odyssée de Wilhelm, un héros que Wenders a emprunté à Goethe pour mieux déconstruire le roman d’apprentissage. Le Wilhelm de Wenders joué par Rüdiger Vogler voyage mais sans avancer puisque son odyssée de sa province natale jusqu’à Bonn s’achève sur un constat d’échec (« il n’avait rien appris ») ce que souligne la caméra qui dépeint un mouvement circulaire. Lorsque le mouvement se traduit par la danse, c’est la répétition circulaire des mêmes gestes, ceux des quatre saisons qui ouvre « Pina », le documentaire que Wim Wenders a consacré en 2011 à la chorégraphe Pina Bausch connue pour répéter le même mouvement cent fois. Cette circularité de l’odyssée des personnages de Wenders « ne les empêche pas d’essayer de rompre avec le cercle vicieux où ils se trouvent enfermés, de prendre la route afin de comprendre qui ils sont[7] », mais c’est difficile comme le montre l’exemple de Damiel, l’ange interprété par Bruno Ganz dans « Les Ailes du désir ». Devenu humain, il erre dans Berlin à la recherche de Marion, la trapéziste dont il est tombé amoureux et se retrouve prisonnier à l’intérieur de la trace laissée par la piste du cirque où elle se produisait comme s’il ne pouvait s’extraire de l’attraction du tourbillon dont parle Franck Boulègue.
[1] Franck Boulègue, « Totentanz (danse et mouvements) », Éclipses n°57, « Wim Wenders, au fil du temps », dir. Yann Calvet et Jérôme Lauté, décembre 2015, p. 8 à 27.
[2] Franck Boulègue, « Totentanz (danse et mouvements) », art. cit., p.8.
[3] Franck Boulègue, « Totentanz (danse et mouvements) », art. cit., p.8.
[4] Franck Boulègue, « Totentanz (danse et mouvements) », art. cit., p.14.
[5] Franck Boulègue, « Totentanz (danse et mouvements) », art. cit., p.13-14.
[6] Franck Boulègue, « Totentanz (danse et mouvements) », art. cit., p.17.
[7] Franck Boulègue, « Totentanz (danse et mouvements) », art. cit., p.17.
Le milieu du cirque est également celui dans lequel le docteur Frederick Treves (Anthony Hopkins) découvre John Merrick (John Hurt), surnommé « Elephant Man » qui est exhibé comme une bête de foire dans le film de David Lynch sorti en 1980. Une rencontre vertigineuse à l’image des spirales tournoyantes qui semblent hypnotiser Frederick Treves au début du film et qui annoncent ce regard noyé par l’émotion devenu iconique tant il exprime de facettes du personnage. Treves va donc tenter de libérer John Merrick de sa condition de « freak » pour l’amener jusqu’à lui. Mais John ne cesse d’être ramené à sa servitude première par la curiosité avide des spectateurs-voyeurs attisée par des exploiteurs cupides, au point de se retrouver enfermé dans une cage au milieu des babouins.
II- Mutisme et regard fuyant
Le deuxième leitmotiv est celui du regard fuyant et / ou du mutisme. Dans « Les Ombres du cœur » qui a beaucoup de points communs avec « Les Vestiges du jour » à commencer par l’année de réalisation, 1993, C.S. Lewis s’avère incapable durant une bonne partie du film non seulement d’exprimer mais de reconnaître les sentiments qu’il porte à Joy Gresham au point de dire « J’ai toujours trouvé difficile de savoir ce qu’il se passe entre deux personnes ». Seule la maladie de Joy permet à Lewis de se connecter à ses émotions et cela passe par l’établissement d’un contact visuel avec elle alors qu’il évitait jusque-là soigneusement son regard.
On pense également à Travis Henderson dans « Paris, Texas » qui erre dans le désert depuis des années et semble ne pas reconnaître son frère Walt lorsqu’il vient le chercher, refusant de le regarder et de lui parler. Dans cette mise en scène des corps dans l’espace, comme dans celle du coucher de « les Ombres du cœur », les personnages joués par Harry Dean Stanton et Dean Stockwell semblent évoluer dans des dimensions différentes bien qu’ils apparaissent dans le même plan. Il faut en effet beaucoup de temps à Travis pour retrouver la parole et se connecter au regard de son frère, c’est-à-dire selon les mots de Walt « réappartenir au monde des vivants ».
Dans « Les Vestiges du jour », la rétention des émotions de Stevens est telle que ce sont les objets ou les animaux (comme le pigeon déjà cité) qui parlent à sa place. Lorsqu’il laisse Miss Kenton partir pour se marier ailleurs en prétendant n’en être nullement affecté ce qui est sans doute le cas étant donné que Stevens est un personnage totalement coupé de ses émotions, il descend à la cave chercher une bouteille de vin. Mais celle-ci lui échappe presque aussitôt des mains, tombe et se brise. On le voit d’ailleurs refermer brusquement la porte de la cave derrière lui juste au moment où il allait y descendre dès qu’il aperçoit Miss Kenton dans le couloir comme s’il avait un secret à cacher dans cette cave, lui refusant symboliquement l’accès à son intériorité. Dans le roman, il finit vingt ans plus tard par s’avouer à lui-même que son cœur est brisé. Mais il garde le silence lorsqu’il revoie Miss Kenton qui en vient à établir le constat de l’échec de leur relation par cette phrase : « vous n’avez rien à me dire après toutes ces années ? ».
« Elephant Man » repose sur le parcours de John Merrick vers la reconnaissance de son appartenance à l’humanité. Durant la première demi-heure de film, il n’a ni visage, ni corps, ni voix. Il n’est que l’ombre d’un pantin objectivé aussi bien par les spectateurs que par les montreurs dont Frederick Treves fait partie. David Lynch qui n’aime rien tant que le thème du double établit en effet un parallèle entre lui et le bonimenteur de foire Bytes (Freddie Jones), l’ancien maître de John Merrick. Ainsi, lorsque le médecin tente de sortir John de son mutisme, c’est d’abord dans un but de démonstration scientifique analogue à la leçon d’anatomie qu’il a donné un peu plus tôt en l’exhibant devant un aéropage de scientifiques. Une variante du spectacle de foire, celui du « singe savant ».
Mais évidemment, il y a autre chose qui se joue ou plutôt qui se noue derrière les rôles sociaux du médecin et de son patient ou d’un chercheur et de son objet d’étude. Frederick Treves par sa manière douce et courtoise d’essayer d’entrer en contact avec lui renvoie à John Merrick un miroir d’humanité inédit dans sa vie qui l’amène à surmonter sa peur des hommes pour se décider à parler. Il lui dévoile alors l’étendue de son intelligence, de son cœur, de sa sensibilité, de son amour de la beauté, suscitant à nouveau chez Treves mais aussi chez son épouse un bouleversement profond dans lequel on devine des failles affectives intimes qui ne peuvent s’exprimer que devant cet être totalement innocent. Il n’est guère surprenant que lorsque Treves retrouve Merrick, incarnation apparente de l’altérité absolue, il l’étreigne comme un frère. Car si Bytes est sans doute la facette la plus sombre de Frederick Treves, John Merrick représente celle qui est la plus lumineuse et la plus élevée. La révélation de l’âme d’artiste de John Merrick par son accès au langage m’a fait penser au parcours de Hélène Nicolas alias Babouillec, autiste sans paroles qui s’est avérée être une poétesse exceptionnelle le jour où elle a pu communiquer ses pensées à l’aide de lettres cartonnées disposées sur une feuille blanche. En 2018, elle a publié son premier roman, « Rouge de soi », « Premier roman bouleversant dans lequel son personnage, miroir d’elle-même, est aux antipodes de l’enfermement[1] ».
[1] Marine Landrot, « “Rouge de soi” joyau littéraire sorti du silence », Télérama, 18 avril 2018.
« Magic » de Richard Attenborough, sorti en 1978 offre une variante intéressante de ce leitmotiv. Anthony Hopkins interprète un magicien raté d’une timidité maladive, Corky Withers. Le jour où grâce à ses dons de ventriloque, il se produit accompagné d’une marionnette à son image, Fats qui représente tout ce qu’il refoule, il enchaîne les succès, attirant les applaudissements du public comme l’intérêt de la femme qu’il aime en silence depuis le lycée. Mais la marionnette à qui il prête une vie propre finit par le dévorer : « Le film suit avec une fascinante minutie le processus par lequel la marionnette, devenue l’alter ego, la caricature monstrueuse de son maître, exerce sur lui une emprise de plus en plus étouffante. Cette emprise s’exerce surtout – et c’est là l’aspect original de l’histoire – par la parole. La marionnette prend la parole et la confisque à son profit[1] ». Fats est en effet volubile et sans filtre, sa logorrhée trash, paillarde, vulgaire, borderline devenant une drogue dont le mutique Corky ne peut se passer dans l’interaction avec les autres. Son impresario (Burgess Meredith) qui s’est rendu compte de son désordre mental échoue à l’en séparer plus de quelques minutes car le silence pesant qui s’installe mène Corky au bord de la crise de nerfs. Fats est ce double tyrannique qui commente, conseille, aide, ordonne, menant Corky dans une spirale de folie destructrice.
[1] Jacques Lourcelles, Dictionnaire du cinéma, Paris, Robert Laffont, Coll. « Bouquin », 1992, p. 873-874.
Je n’ai pu m’empêcher de faire un parallèle avec « L’Ami américain » de Wim Wenders sorti un an avant « Magic » en 1977 où Jonathan Zimmermann, un petit artisan allemand sans histoires et condamné par la maladie (Bruno Ganz) se fait vampiriser par un doppelgänger américain, Tom Ripley (Dennis Hopper) qui lui propose de devenir tueur à gages amateur, l’entraînant dans une spirale d’aventures à la fois destructrices et enivrantes.
Fayge Orzel relève que le silence est intrinsèque au jeu de Anthony Hopkins : « L’une des caractéristiques déterminantes des performances de Hopkins est son utilisation du silence. Il a la capacité de transmettre une gamme d’émotions et de pensées à travers des expressions faciales et un langage corporel subtils. Ce talent est souvent associé aux personnes autistes, qui peuvent avoir des difficultés avec la communication verbale mais excellent dans la communication non verbale[1] ». Même constat en ce qui concerne le regard : « Le diagnostic de spectre autistique de Hopkins a également influencé son approche des interactions sociales. Les personnes autistes ont souvent du mal à gérer les signaux sociaux et à maintenir un contact visuel, ce que l’on peut voir dans les performances de Hopkins. Il apporte une certaine distance et un certain détachement à ses personnages, ajoutant des couches de complexité à leurs personnalités[2]. Dans une interview radiophonique présente dans les suppléments de l’édition collector combinant Blu-ray, DVD et livret du film « Magic » chez Rimini Editions, l’acteur a évoqué son enfance difficile marquée par une timidité maladive jusqu’à sa découverte du théâtre qui lui a permis de s’exprimer et de se sentir mieux dans sa peau[3].
[1] Fayge Orzel, « Comprendre le spectre de l’autisme d’Anthony Hopkins », Connect n Care ABA Therapy, https://www.connectncareaba.com/anthony-hopkins-autism, mis en ligne le 7 juin 2024.
[2] Fayge Orzel, « Comprendre le spectre de l’autisme d’Anthony Hopkins », art. cit.
[3] James Domb, « Test Blu-ray / Magic, réalisé par Richard Attenborough », Homepopcorn.fr, https://homepopcorn.fr/test-blu-ray-magic-realise-par-richard-attenborough/, mis en ligne le 16 février 2021.
III- Les écrans-isoloirs
Enfin le troisième leitmotiv qui émerge dans ces filmographies, ce sont les dispositifs isoloirs faisant écran au contact physique. « Magic » de Richard Attenborough en est la parfaite illustration avec la dépendance de Corky à sa marionnette qu’il utilise comme une interface entre lui et monde jusqu’à la folie schizophrène. Ce rôle préfigure celui de Hannibal Lecter qui l’a rendu mondialement célèbre dans « Le Silence des Agneaux ». Hannibal Lecter est un dangereux psychopathe qui apparaît durant la majeure partie du film enfermé dans une cellule de haute sécurité.
Les échanges avec Clarice, la stagiaire du FBI jouée par Jodie Foster ont lieu de part et d’autre de la vitre de la cellule ce qui rend hautement symbolique l’instant furtif où leurs doigts se touchent. Même après son évasion, il ne lui parle qu’au travers d’un téléphone, entérinant cette forme de communication séparée par des dispositifs-écrans.
Dans « Paris, Texas » de Wim Wenders ce principe est systématique. Travis ne se connecte aux autres que par le biais des écrans : photographies et cinéma avec son frère, talkie-walkie et le magnétophone avec son fils Hunter, cabine de peep-show avec sa femme Jane (jouée par Nastassja Kinski), au travers d’un miroir sans tain et d’un téléphone.
« Les Ailes du désir » qui raconte l’éclosion d’un amour entre deux êtres vivants dans des dimensions séparées repose sur le même principe. Marion ne peut entrer en contact avec Damiel que dans ses rêves, celui-ci étant invisible et immatériel dans le monde réel.
C’est pourquoi Wilhelm dans « Faux mouvement » qui vit encore chez sa mère à trente ans passés commence son périple par un acte symbolique radical que l’on peut qualifier de transgressif : il casse deux carreaux de la fenêtre de sa chambre comme s’il traversait un miroir, juste avant de quitter sa mère et de prendre le train pour Bonn.
Un passage qui fait penser à celui qui transforme Damiel en être humain dans « Les Ailes du désir » : il traverse le mur séparant les deux parties de Berlin. Wilhelm et Damiel se blessent et saignent en commettant cet acte de franchissement. De façon très symbolique pour Damiel, c’est en perdant son armure d’ange.
Car en effet, le dispositif-écran, cela peut-être la carapace du personnage lui-même. Dans « Les Ombres du cœur », Joy Gresham constate dépitée qu’en dépit de tous ses efforts pour l’approcher, Lewis s’est organisé une existence dans laquelle il est intouchable, une vie à l’abri de tout risque émotionnel. Elle évoque le doute, la peur et la douleur mais le fait qu’il la tienne à distance l’empêche également de connaître la joie : son prénom revêt alors un symbolisme évident puisqu’en acceptant la joie de l’aimer (« je ne savais pas que l’on pouvait être si heureux » dira-t-il plus tard), il accepte aussi la douleur de la perdre. Fayge Orzel relie cette difficulté relationnelle à l’autisme : « L’un des défis auxquels Hopkins a été confronté était la difficulté à maintenir des relations stables et à ressentir un sentiment d’appartenance. Il s’agit d’une lutte courante pour les personnes autistes, qui peuvent avoir du mal à se connecter avec les autres sur le plan émotionnel[1] ». Cette description correspond également parfaitement à Travis dans « Paris, Texas » qui met beaucoup de temps à reconnaître son frère, son fils et sa femme et à se sentir relié à eux, non pour reprendre une place de mari et père qu’il s’est avéré incapable de tenir mais pour réparer le lien entre mère et fils, lui-même s’effaçant du paysage. Impossible de ne pas faire le rapprochement avec la rupture entre Anthony Hopkins et sa fille que celui-ci décrivait en ces termes sur Radio Times en 2018 : « Les gens se séparent. Les familles se brisent. Et dans ces cas-là, vous savez, il faut continuer à vivre sa vie. Les gens font des choix. Et je n'en ai rien à faire, dans un sens ou dans l’autre […] Vous n'êtes pas obligé d'aimer votre famille. Les enfants n'aiment pas forcément leur père. Oui, c'est froid. C'est froid, tout comme la vie[2] ».
[1] Fayge Orzel, « Comprendre le spectre de l’autisme d’Anthony Hopkins », art. cit.
[2] Ginny Dougary, « Anthony Hopkins, Le Roi Lear de Shakespeare, les ruptures familiales, la vie… et la mort », Radio Times, https://www.radiotimes.com/tv/drama/anthony-hopkins-king-lear-madness-and-daughter/, mis en ligne le 28 mai 2018.
Pour conclure, on voit donc que l’isolement n’est pas une fatalité : si Stevens choisit de rester dans son cocon tout comme Hannibal Lecter et Travis Henderson, si Wilhelm, Jonathan Zimmermann et Corky Withers tentent d’en sortir et finissent par échouer, d’autres comme Frederick Treves, John Merrick, Damiel ou C.S. Lewis réussissent à briser leur isolement au prix d’un processus de métamorphose. On mesure également combien l’art est vital pour sortir les personnes atteintes de troubles de l’autisme de leur isolement, que ce soit par le biais de l’écriture, du théâtre, de la photographie ou du cinéma. On ne sera donc pas étonné d’apprendre qu’en plus de son activité d’acteur, Anthony Hopkins chante, peint, compose et réalise.
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![La première fois que j'ai vu "Faces" (1968), j'ai été bouleversée par le personnage de Chet (Seymour Cassel), l'escort boy qui sauve de justesse Maria du suicide (comme Fran dans "La Garçonnière", elle a avalé des somnifères) et sa tirade sur l'incommunicabilité ("Nous nous protégeons, personne ne prend le temps de se montrer vulnérable à l'autre [...] nous sortons avec notre armure et notre bouclier, nous sommes tellement mécaniques").](https://image.over-blog.com/TmtULgKOiy2hFpa32r_OhSqLOg8=/filters:no_upscale()/image%2F2429364%2F20210422%2Fob_271620_d3pxfcwwwaar5jd.jpg)
![La première fois que j'ai vu "Faces" (1968), j'ai été bouleversée par le personnage de Chet (Seymour Cassel), l'escort boy qui sauve de justesse Maria du suicide (comme Fran dans "La Garçonnière", elle a avalé des somnifères) et sa tirade sur l'incommunicabilité ("Nous nous protégeons, personne ne prend le temps de se montrer vulnérable à l'autre [...] nous sortons avec notre armure et notre bouclier, nous sommes tellement mécaniques").](https://image.over-blog.com/HRcftveGm7KQwwzFtoHqbbXAaCs=/filters:no_upscale()/image%2F2429364%2F20210422%2Fob_157d31_2926509515-1-5.jpg)
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