Suzume (Suzume no tojimari)
Makoto Shinkai (2021)
L'oeuvre de Makoto SHINKAI est hantée par la catastrophe du 11 mars 2011 et ses conséquences. Mais contrairement à "Your name." (2016) où celle-ci restait suggérée, elle est nommée explicitement dans "Suzume". Ce titre fait référence à l'héroïne, une adolescente de 16 ans dont on découvre à l'aide de flashbacks qu'elle est une survivante de la catastrophe. Ce passé est montré dès les premières images où l'on voit une petite fille de quatre ans appeler sa mère dans ce qu'on découvre être des ruines. Suzume a conservé un vestige de cette époque qui est une chaise d'enfant fabriquée par sa mère dont il manque un pied. A l'image de cette chaise, la vie de Suzume, élevée par sa tante surprotectrice qui lui a tout sacrifié est restée bancale. Sa rencontre avec un jeune homme du nom de Sota va tout bouleverser. Comme dans ses précédents films, Makoto SHINKAI a recourt au fantastique pour évoquer les tourments de son pays. Sota est un verrouilleur: il parcourt le pays pour refermer les portes cachées dans les ruines. Ces ruines et ces portes constituent autant de symboles d'anciennes catastrophes: l'une d'elles est dissimulée dans un parc d'attractions abandonné, comme dans "Le Voyage de Chihiro" (2001). Une autre, située au fond d'un tunnel menace de faire revivre à Tokyo le traumatisme du séisme du Kanto. Seules des forces surnaturelles, les "pierres de voûte" peuvent maintenir ces portes fermées. Lorsqu'elles font défaut, la porte s'ouvre, libérant un ver géant en forme de colonne de fumée qui menace de s'abattre au sol, provoquant une nouvelle catastrophe. Suzume sans le savoir libère une pierre de voûte qui prend la forme d'un petit chat qui s'enfuit après avoir jeté un sort à Sota, l'enfermant dans la chaise à trois pieds de Suzume. Celle-ci munie de sa chaise désormais vivante se lance alors dans un périple à travers le Japon pour rattraper le chat qui veut "libérer" d'autres portes. Un récit à deux dimensions se met alors en place. D'un côté, un récit d'apprentissage et d'émancipation en forme de road-movie. De l'autre, une "recherche du temps perdu" où il s'agit de se souvenir du traumatisme enfoui dans le trou noir des pages caviardées d'un journal intime. Se souvenir pour consoler, réparer et repartir de l'avant. Un miroir tendu à un Japon plutôt désireux d'enfouir les mauvais souvenirs que de s'y confronter.
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