Sissi & moi (Sissi & Ich)
Frauke Finsterwalder (2023)
Je ne suis vraiment pas fan des histoires impliquant des têtes couronnées mais la présence de Sandra HULLER dans le rôle de la dame d'honneur de l'impératrice Elisabeth (Susanne WOLFF) m'a donné envie de jeter un coup d'oeil au film. Celui-ci en effet adopte des partis-pris intéressants. Comme le "Marie-Antoinette" (2005) de Sofia COPPOLA il donne une tournure rock and roll à la vie de Sissi à l'aide d'une bande-son anachronique idoine mais aussi en insistant sur les excentricités d'une impératrice à la fois terriblement bridée par ses obligations (intimes comme publiques) et toujours en mouvement. Pour la première fois dans un film, j'ai ressenti le lien entre la pression extérieure extrême exercée sur un corps (symbolisée comme dans "Titanic" (1997) et je le suppose d'après son titre puisque je ne l'ai pas vu, "Corsage" (2022) par les lacets d'un corset que l'on serre jusqu'à l'étouffement dès les premières images) et le traitement de choc infligé à ce corps par l'esprit qui l'habite pour en reprendre le contrôle comme pour s'en évader (drogue, tatouage, troubles du comportement alimentaire, exercices physiques, blessures, fuite sous des climats exotiques à l'opposé du carcan monarchique et conjugal etc.) On se croirait presque chez Rimbaud lorsqu'il évoque "le dérèglement de tous les sens" mais évidemment pas dans le même objectif. Frauke FINSTERWALDER créé un film solaire et organique en faisant la part belle aux fluides corporels qui viennent constamment rappeler les êtres vivants qui se dissimulent sous les costumes du XIX° siècle: sang, vomi, sueur, sperme, urine, diarrhée, larmes, pus. La sensorialité du film est particulièrement axée sur le goût au vu de l'obsession du contrôle alimentaire de Sissi mais également sur les odeurs. En témoigne le passage dans la Casbah d'Alger où ce beau monde se met de la menthe sous le nez pour conjurer les miasmes de leur environnement immédiat. Enfin "Sissi et moi" comme son titre l'indique adopte le point de vue de la dame d'honneur complètement fascinée pour ne pas dire énamourée du personnage à la fois punk et assujetti qu'elle doit accompagner ce qui fait penser à "Les Adieux a la Reine" (2012). Mais le personnage joué par Sandra HULLER est intéressant en lui-même. Vieille fille rabaissée et violentée par sa mère parce qu'elle n'entre pas dans les cases, elle est tiraillée, on le comprend assez vite entre sa pruderie qui en fait une (plus très jeune) vierge effarouchée par la personnalité de Ludwig, le cousin de Sissi et son attirance pour l'impératrice.
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