Mémoires d'un escargot (Memoir of a Snail)
Adam Elliot (2025)
Aussi rare que Thomas CAILLEY, Leos CARAX ou Victor ERICE, l'australien Adam ELLIOT n'a réalisé que deux films en 16 ans: "Mary et Max" (2008) et "Mémoires d'un escargot" (2024) qui est sorti mercredi 15 janvier. Tous deux récompensés du Cristal du long-métrage à Annecy, ce sont des films utilisant la technique de la stop-motion pour animer la pâte à modeler mettant en scène des personnages au physique ingrat, au fonctionnement différent, marginalisés, isolés du monde. D'ailleurs la part d'autobiographie est explicite dans "Mémoires d'un escargot" puisque l'héroïne, Grace veut devenir réalisatrice de films d'animation en stop-motion. Le père et le frère de Grace ont également hérité d'éléments de la vie du réalisateur ou de sa propre famille. L'escargot qui est la passion de Grace au point de devenir son confident est une métaphore de son introversion et de sa peur du monde, comme ses kilos en trop ou l'accumulation d'objets relatifs à sa passion dans sa maison. Le trop-plein est aussi une métaphore de son vide affectif. Grace devient orpheline très jeune et est séparée de son frère jumeau, Gilbert, à peine moins bizarre qu'elle qui est confié à une autre famille d'accueil, encore pire que celle de Grace qui la laisse livrée à elle-même. Seule la correspondance avec son frère (qui rappelle celle entre Mary et Max qui étaient éloignés géographiquement) et la rencontre avec une vieille dame excentrique, Pinky sortent Grace de son abattement. Cette amitié m'a fait penser à "Harold et Maude" (1971) d'autant que Pinky est aussi haute en couleurs que Grace est pâle et triste, un peu dans le style "femme-patate" de la dernière période de vie de Agnes VARDA. Pinky va aider Grace à embrasser la vie (c'est bateau mais bon, évidemment, il s'agit de "sortir de sa coquille") et Grace va aider Pinky à finir ses jours paisiblement. Dès le générique qui m'a fait penser à celui de "Delicatessen" (1990), on sent qu'on entre dans une antre artisanale très intime où l'âpreté est constamment contrebalancée par une tendresse, une poésie et un humour qui m'ont rappelé les meilleurs films de Albert DUPONTEL (genre "9 mois ferme") (2012) et cette impression se poursuit tout au long du film.
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