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Lynch/Oz

Publié le par Rosalie210

Alexandre O. Philippe (2022)

Lynch/Oz

Contrairement à une idée reçue, une source essentielle de l'inspiration de David LYNCH lui vient de la culture populaire de son enfance et plus précisément du film de Victor FLEMING, "Le Magicien d'Oz" (1938) adapté du roman de Frank Baum. Film qui l'obsède au point d'avoir déclaré qu'il y pensait tous les jours (et pas qu'en se rasant!) C'est tout à fait revendiqué dans "Sailor & Lula" (1990) qui en constitue une relecture rock and roll/ trash mâtinée de "Roméo et Juliette". Mais c'est le cas aussi dans ses autres films, de manière plus allusive. De "Une histoire vraie" (1999) qui déroule sa simplicité, sa linéarité et sa lenteur à l'alambiqué "Lost Highway" (1997), on suit pourtant toujours la même route de briques jaunes avec ou sans chaussures rouges quand on ne s'y appelle pas Dorothy ou quand on ne se retrouve pas devant un épais rideau en forme de frontière. Ce que démontre ce brillant et passionnant documentaire qui va d'ailleurs bien au-delà de la seule filmographie du réalisateur de "Elephant Man" (1980). C'est à une véritable dissection du cinéma hollywoodien que se livrent les six cinéastes et critiques qui interviennent aux cours des six chapitres qui explorent en profondeur le monomythe théorisé par Joseph Campbell. Sans remonter jusqu'à "L'Odyssée", socle commun de toute la culture occidentale, les histoires fédératrices de la culture américaine sont montrées comme se comptant sur les doigts d'une main: "Le Magicien d'Oz" (1938) et "La Vie est belle" (1946), les deux films entretenant de nombreux points communs dont celui de passer régulièrement à la télévision et ainsi de se transmettre de génération en génération. L'utilisation du split-screen met en évidence les liens tant sur la forme que sur le fond que le film de Victor FLEMING entretient avec celui de Frank CAPRA mais aussi avec une multitude d'autres univers de cinéastes allant des frères Joel COEN et Ethan COEN à Steven SPIELBERG, de Francis Ford COPPOLA à Stanley KUBRICK, de Georges LUCAS à John FORD, c'est un monde de conteurs qui se dévoile innervés par les mêmes schémas, les mêmes symboles (rappelant tout ce que le personnel doit au collectif, l'individu au milieu dans lequel il a grandi) et même si la forme de certains de ses films peut dérouter, David LYNCH fait bien partie de ce monde de conteurs, explorant ce qui se cache derrière la surface des choses, la plupart du temps dans leurs facettes cauchemardesques avant de rentrer (ou pas) à la maison. En visionnant ce documentaire stimulant et enrichissant, me sont venues aux oreilles des phrases telles que "Let's go home Debbie" ("La Prisonniere du desert") (1956), "J'aimerais payer la facture et rentrer chez moi" ("Fisher King") (1991) ou "Téléphone, maison" ("E.T. L'extra-terrestre") (1982).

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