Le Comte de Monte-Cristo
Claude Autant-Lara (1961)
Une version du roman de Alexandre Dumas dite de "référence" sans doute parce qu'il s'agit d'une réalisation de prestige à gros budget mais qui m'a fait une impression mitigée. Le format de 3h (divisé en deux époques d'1h30 chacune) est manifestement insuffisant pour rendre compte d'un tel roman. Cependant la première partie tient plutôt bien la route, en dépit de la disparition du personnage de Danglars. La reconstitution de Marseille est plus que convaincante puisqu'on a l'impression de se retrouver au beau milieu d'une "pagnolade" avec l'accent, la truculence locale, le soleil méditerranéen et les cigales. Ce n'est peut-être pas tout à fait l'esprit du roman mais cela a son charme. Charme qui se prolonge jusqu'au début de la deuxième partie dans la scène de l'auberge où Caderousse (alias Pierre MONDY) fait un grand numéro de tartufferie bien secondé par son épouse. Mais il n'était pas possible de maintenir cette couleur locale pleine de bonhommie jusqu'au bout, donc dès que le film bascule dans l'histoire de la vengeance proprement dite, il s'arrête net, à court d'inspiration. On sent parfaitement que cet aspect du roman a été réalisé à contrecoeur et n'est pas dans l'ADN de ses créateurs. Le Monte-Cristo de Louis JOURDAN (excellent acteur pourtant avec une grande prestance), rempli de mélancolie ne manifeste à aucun moment l'état d'esprit machiavélique et haineux du personnage d'origine. Il ne prend pas la peine de se cacher, surgissant tel quel dans l'auberge de Caderousse et se fait tout de suite reconnaître de Mercédès à qui il continue de vouer un amour transi en porte à faux avec le roman de Dumas. Conséquence: le scénario ne sait pas quoi faire d'Albert (parce que continuer à prétendre aimer Mercédès tout en voulant tuer son fils, c'est quand même un peu problématique) ni de Benedetto et d'Haydée qui semblent sortir de nulle part et apparaissent comme "plaqués" sur une intrigue qui surinvestit la relation sentimentale entre le comte et Mercédès et une sous-intrigue policière inventée de toutes pièces jusqu'à la scène finale qui va contre le roman. En résumé, ce Monte-Cristo "qualité française" est sympathique mais très éloigné du roman d'origine et affreusement convenu.
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