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Simple comme Sylvain

Publié le par Rosalie210

Monia Chokri (2023)

Simple comme Sylvain

Des films sur les oppositions de classe sociale, j'en ai vu un certain nombre, dans le registre de la comédie le plus souvent et j'en ai conclu que c'est un terrain glissant voire miné tant il est propice aux clichés. Il comporte quand même son lot de réussites comme "Ainsi va l'amour" (1971) de John CASSAVETES ou dans un registre plus satirique "La Vie est un long fleuve tranquille" (1987) de Etienne CHATILIEZ. Sur "Simple comme Sylvain", je suis beaucoup plus réservée. J'ai apprécié le regard féministe, c'est si rare au cinéma de montrer la sexualité féminine de façon réaliste, c'est à dire avec une bonne connaissance du fonctionnement du corps féminin et des pensées et désirs propres à l'émoustiller (de quoi aider ce pauvre George Brassens à améliorer les statistiques de sa chanson "Quatre-vingt quinze pour cent"). En revanche le "choc des cultures" produit par la rencontre entre deux personnages aux prénoms-programmes, Sophia (sagesse) et Sylvain (forêt) s'il est au début du film très bien mené grâce à un ton alerte, s'essouffle sur la longueur. Surtout, il n'échappe pas à la caricature. Les deux personnages sont dépeints comme de purs produits de leur milieu social, ils sont unidimensionnels. Et ces milieux sont eux-mêmes uniformes. Sophia est une intello, donc forcément elle intellectualise tout et donc forcément son entourage est composé de snobs. Sylvain est un prolo, donc forcément il est inculte, ne marche qu'à l'instinct et a des goûts vulgaires à l'image de son entourage. C'est là qu'une autre réussite aurait fait du bien pour nuancer le tableau, "Le Gout des autres" (1999) d'autant que plus que le mépris de classe y est montré pour être mieux démonté. Dans "Simple comme Sylvain", on a la désagréable impression qu'il en est rien et que l'on rit beaucoup plus aux dépends de Sylvain, ses fautes de langage, son ignorance de la langue anglaise et ses goûts de "plouc" que de Sophia. Goûts de ploucs décrétés d'ailleurs par l'élite bien-pensante (j'ignorais que la République Dominicaine en faisait partie). Plus gênant encore, Sylvain s'avère être un traditionnaliste réac partisan de la peine de mort comme si le fait d'appartenir à la bourgeoisie intellectuelle était une garantie de progressisme. Un petit tour du côté de Pier Paolo PASOLINI et de Stefan Zweig rappelle qu'il n'en a rien été. Alors qu'à l'inverse des gens "simples" ont pu à la même époque agir avec une noblesse dont ces gens-là auraient été incapables.

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